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Mise en œuvre du droit de communication au public par la mise à disposition d’une plateforme permettant des échanges pair à pair (P2P)

La mise à disposition et la gestion, sur Internet, d’une plateforme de partage qui, par l’indexation de métadonnées relatives à des œuvres protégées et la fourniture d’un moteur de recherche, permet aux utilisateurs de cette plateforme de localiser ces œuvres et de les partager dans le cadre d’un réseau de pair à pair (peer-to-peer), constitue un acte de communication au public, en raison du rôle incontournable ainsi joué.

Ziggo et XS4ALL sont des fournisseurs d’accès à Internet dont une partie importante des abonnés utilise la plateforme de partage en ligne « The Pirate Bay » (ci-après TPB). Cette dernière offre à ses utilisateurs (« pairs » ou « peers ») la possibilité de partager (téléchargements ascendants comme descendants), par fragments (« torrents »), des œuvres qui se trouvent sur leurs propres ordinateurs. Bien que le recours à la technologie « pair à pair » puisse être fait pour l’échange de données de toute nature, la pratique la plus répandue, désormais, concerne des œuvres protégées par les droits de propriété littéraire et artistique, mises à disposition sans l’accord des ayants droit. Tel

était le cas dans l’espèce soumise à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE, 2e ch., 14 juin 2017, affaire C610/15, Stichting Brein c/Ziggo BV, XS4ALL Internet BV).

La façon de procéder est ainsi décrite par la Cour (points 9 & 10) : « Pour pouvoir partager des fichiers, les utilisateurs doivent d’abord télécharger un logiciel spécifique, appelé « client-BitTorrent », qui n’est pas fourni par la plateforme de partage en ligne TPB. Ce « client-Bit-Torrent » est un logiciel qui permet de créer des fichiers torrents. Les utilisateurs (appelés « seeders ») qui souhaitent mettre un fichier qui se trouve sur leur ordinateur à la disposition d’autres utilisateurs (appelés

« leechers ») doivent créer un fichier torrent au moyen de leur client-BitTorrent. Les fichiers torrents renvoient à un serveur centralisé (appelé « tracker ») qui identifie les utilisateurs disponibles pour partager un fichier torrent particulier ainsi que le fichier média sous-jacent. Ces fichiers torrents sont téléchargés vers l’amont (upload) par les seeders sur une plateforme de partage en ligne, telle que TPB, qui procède ensuite à leur indexation, afin que ceux-ci puissent être retrouvés par les utilisateurs de la plateforme de partage en ligne et que les œuvres auxquelles ces fichiers torrents renvoient puissent être téléchargées vers l’aval (download) sur les ordinateurs de ces derniers en plusieurs fragments, au moyen de leur client-BitTorrent ».

Ces initiatives ne sont pas du goût des ayants droit qui voient dans ces échanges, dénués d’autorisation, des actes de contrefaçon. Pour cette raison, Stichting Brein, qui est une fondation néerlandaise qui défend les intérêts des titulaires du droit d’auteur, demande, à titre principal, qu’il soit ordonné aux fournisseurs d’accès Ziggo et XS4ALL de bloquer les noms de domaine et les adresses IP de la plateforme de partage en ligne TPB, afin d’éviter ces partages par la voie de leurs services.

La demande est accueillie par les premiers juges mais rejetée en appel.

Saisi à son tour, le Hoge Raad der Nederlanden (Cour suprême des Pays-Bas) décide d’interroger la Cour de justice de l’Union européenne sur l’interprétation de la directive de l’Union sur le droit d’auteur afin d’être éclairé sur la situation d’une plateforme de partage de type « The Pirate Bay ».

Cette dernière effectue-t-elle bien un acte de « communication au public », au sens de la directive 2001/29 (article 3, paragraphe 1) ? Ce qui conduirait à considérer que faute d’autorisation des ayants droit, la plateforme enfreint le droit d’auteur. Est-il possible, par ailleurs, de solliciter les FAI ?

Les deux questions préjudicielles posées sont les suivantes :

« 1) L’administrateur d’un site Internet réalise-t-il une communication au public, au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/29, lorsqu’aucune œuvre protégée n’est présente sur ce site, mais qu’il existe un système […] dans lequel des métadonnées relatives à des œuvres protégées qui se trouvent sur les ordinateurs d’utilisateurs sont indexées et classées pour les utilisateurs de sorte que ces derniers peuvent ainsi tracer les œuvres protégées et les mettre en ligne ainsi que les télécharger sur lesdits ordinateurs ?

2) Si la première question appelle une réponse négative :

L’article 8, paragraphe 3, de la directive 2001/29 et l’article 11 de la directive 2004/48 permettent-ils de rendre une injonction à l’encontre d’un intermédiaire au sens desdites dispositions lorsque cet intermédiaire facilite les atteintes commises par des tiers de la manière visée à la première question ? »

La première question consiste donc à savoir si la mise à disposition et la gestion, sur Internet, d’une plateforme de partage qui, par l’indexation de métadonnées relatives à des œuvres protégées et la fourniture d’un moteur de recherche, permet aux utilisateurs de cette plateforme de localiser ces œuvres et de les partager dans le cadre d’un réseau de pair à pair (peer-to-peer) constitue un acte de communication au public.

Pour y répondre, la Cour reprend alors la démarche démonstrative qui était la sienne dans l’affaire du lecteur multimédia examinée deux mois plus tôt (affaire Filmspeler, supra, I). Elle commence par rappeler que cette prérogative, de nature préventive, doit être envisagée en privilégiant une approche « large » afin de garantir un niveau élevé de protection permettant l’obtention par les ayants droit d’une rémunération appropriée (points 20 à 22). Elle précise, comme dans son arrêt du 26 avril 2017, que la notion de « communication au public » implique une appréciation individualisée dans la vérification de la présence de ses deux éléments constitutifs (« communication » et « public »).

Cette recherche doit être menée par le recours à une batterie de critères, envisagés tant individuellement que dans leur interaction les uns avec les autres (points 23 à 25). On est ici dans un « acquis communautaire » qui sert désormais de référent constant.

Le raisonnement étant un parfait décalque de celui conduit dans la précédente décision, il n’est pas surprenant d’y retrouver, pour l’appréciation de l’acte accompli, le recours au critère du « rôle incontournable joué par l’utilisateur et le caractère délibéré de son intervention » (point 26). Et les juges de redonner le même corps à la notion : l’« utilisateur réalise

un acte de communication lorsqu’il intervient, en pleine connaissance des conséquences de son comportement, pour donner à ses clients accès à une œuvre protégée, et ce notamment lorsque, en l’absence de cette intervention, ces clients ne pourraient, ou ne pourraient que difficilement, jouir de l’œuvre diffusée ».

Le raisonnement est pareillement identique à propos de l’autre élément constitutif de la prérogative, la présence d’un « public » : nombre indéterminé mais assez important de destinataires potentiels/communication selon un mode technique spécifique différent du premier ou, à défaut, présence d’un

« public nouveau », c’est-à-dire non déjà pris en compte par les titulaires du droit/possibilité de faire jouer un rôle au « caractère lucratif » de la communication (points 27 à 29).

La « boîte à outil juridique » étant exactement la même, l’intérêt de la décision est d’en voir l’application aux actes querellés.

Quant à l’acte de communication, les juges rappellent (points 31 à 33) qu’« il suffit, notamment, qu’une œuvre soit mise à la disposition d’un public de telle sorte que les personnes qui le composent puissent y avoir accès, de l’endroit et au moment qu’elles choisissent individuellement, sans qu’il soit déterminant qu’elles utilisent ou non cette possibilité ». La solution, déjà connue, avait été également rappelée par l’arrêt du 26 avril dernier. La mise à disposition, le fait de rendre accessible une œuvre relève de la communication au public sans qu’il soit nécessaire que ces initiatives soient suivies d’un acte de transmission effectif.

Et les juges de rappeler la conclusion qu’ils avaient déjà tirée de ces prémisses : « en principe, tout acte par lequel un utilisateur donne, en pleine connaissance de cause, accès à ses clients à des œuvres protégées est susceptible de constituer un « acte de communication », au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/29 » (point 34).

Concrètement ?

Suivant M. l’avocat général (point 45 de ses conclusions), les juges relèvent « qu’il est constant que des œuvres protégées par le droit d’auteur sont, par l’intermédiaire de la plateforme de partage en ligne TPB, mises à la disposition des utilisateurs de cette plateforme, de manière à ce que ceux-ci puissent y avoir accès, de l’endroit et au moment qu’ils choisissent individuellement (point 35, souligné par nous).

La circonstance suivant laquelle les œuvres ainsi mises à la disposition par la plateforme de partage en ligne TPB « ont été mises en ligne sur cette plateforme non pas par les administrateurs de cette dernière, mais par ses utilisateurs » est-elle de nature à changer l’approche retenue ? Non, répond la Cour. Car « il n’en demeure pas moins que ces administrateurs, par la mise à disposition et la gestion d’une plateforme de partage en ligne, telle que celle en cause au principal, interviennent en pleine connaissance des conséquences de leur comportement, pour donner accès aux œuvres protégées, en indexant et en répertoriant sur ladite plateforme les fichiers torrents qui permettent aux utilisateurs de celle-ci de localiser ces œuvres et de les partager dans le cadre d’un réseau de pair à pair (peer-to-peer) » (souligné par nous). La Cour et M. l’Avocat général partagent la même

conviction : sans l’intervention des administrateurs de la plateforme, « lesdites œuvres ne pourraient pas être partagées par les utilisateurs ou, à tout le moins, leur partage sur Internet s’avérerait plus complexe » (point 36). Ce qui démontre un

« rôle incontournable dans la mise à disposition des œuvres en cause » (point 37, souligné par nous).

N’existe-t-il aucune échappatoire notamment par l’affirmation selon laquelle les administrateurs de la plateforme de partage en ligne TPB ne réaliseraient qu’une « simple fourniture d’installations » ? Surgit, ici, le même moyen de défense que dans l’affaire Filmspeler, tranchée le 26 avril, puisque selon le considérant 27 de la directive 2001/29, la personne qui se contente de pareil rôle n’accomplit pas un acte de communication au public.

Le moyen de défense connaît le même insuccès. Dans la mesure où la plateforme TPB, d’une part, « procède à l’indexation des fichiers torrents, de sorte que les œuvres auxquelles ces fichiers torrents renvoient puissent être facilement localisées et téléchargées par les utilisateurs de ladite plateforme de partage », d’autre part, « propose, en sus d’un moteur de recherche, un index classant les œuvres sous différentes catégories, fondées sur la nature des œuvres, leur genre ou leur popularité, au sein desquelles sont réparties les œuvres qui sont mises à disposition, le respect du placement d’une œuvre dans la catégorie adéquate étant vérifié par les administrateurs de cette plateforme » et, enfin, procède à la suppression des fichiers torrents obsolètes ou erronés et filtre de manière active certains contenus (point 38), l’argument doit être écarté.

L’acte accompli est bien un acte de communication et non une simple fourniture d’installation.

Cette communication touche bien un public (points 39 à 46), puisque s’adressant à l’ensemble des utilisateurs de cette plateforme qui peuvent accéder, à tout moment et simultanément, aux œuvres protégées qui sont partagées par l’intermédiaire de ladite plateforme, elle « vise un nombre indéterminé de destinataires potentiels et implique un nombre important de personnes » (point 42 reprenant le point 45 de l’arrêt du 26 avril 2017 et la jurisprudence qui y était citée). Ce public est même « nouveau » puisqu’il « n’a pas été pris en compte par les titulaires du droit d’auteur lorsque ces derniers ont autorisé la communication initiale » (point 44), ce que les administrateurs de la plateforme ne pouvaient ignorer puisque non seulement ils en avaient été dûment informés (point 45) mais qu’en plus cette mise à disposition d’œuvres sans autorisation est leur objectif proclamé. Et la Cour de relever, par ailleurs, qu’il ne saurait être contesté que la mise à disposition et la gestion de la plateforme de partage en ligne était « réalisée dans le but d’en retirer un bénéfice » notamment grâce à des recettes publicitaires considérables.

Il y a donc bien un acte de communication au public de la part de la plateforme, ce qui rend inutile l’examen de la deuxième question préjudicielle.

On le voit, l’affaire Ziggo, présentement commentée, reprend la structure et le contenu du raisonnement proposé par la Cour dans l’affaire Filmspeler (supra, I).

Faut-il s’en étonner alors que les deux décisions ont été rendues à deux mois d’intervalle à propos d’une problématique identique ? Dans les deux affaires, la personne poursuivie facilitait des actes de contrefaçon par la

fourniture de moyens. Ce qui a conduit inéluctablement la Cour à proposer des critères de distinction entre « la simple fourniture d’installations destinées à permettre ou à réaliser une communication » qui échappe au droit d’auteur (considérant 27) et la communication au public qui en participe.

L’essentiel de l’apport des décisions réside donc dans l’analyse de cet acte pour des hypothèses qui se situent dans une configuration bien différente de celle d’une communication primaire classique, voire d’une communication secondaire. Certes, les deux affaires – Filmspeler et Ziggo – ne sont pas identiques, puisque la première concernait une forme de fourniture de liens (via le lecteur multimédia vendu) tandis que la seconde traitait de la fourniture d’autres moyens (plateforme facilitant P2P) d’accéder aux œuvres contrefaisantes. Mais les deux avaient donc en commun cet acte de facilitation de la contrefaçon par une intervention offrant les moyens d’un accès au public.

En traitant chacune des deux affaires de manière totalement identique, la Cour admet – sur le fondement de leur problématique commune – un régime, harmonisé, concernant tant le droit de communication au public (point de vue de l’ayant droit) que la responsabilité pour facilitation de la contrefaçon (situation de la personne qui prend l’initiative de fournir ces moyens).

La construction relative à cette fourniture de moyens est alors (indépendamment des critères habituellement retenus) la suivante :

– Il faut que l’acte querellé touche un « public » compris comme un nombre indéterminé de destinataires potentiels et impliquant un nombre

de personnes assez important. Le but lucratif poursuivi pouvant jouer un rôle.

– Il faut que, par l’acte accompli, la personne dont on prétend qu’elle communique l’œuvre au public, joue un « rôle incontournable ».

C’est dire qu’elle doit être intervenue « en pleine connaissance des conséquences de son comportement ». C’est le cas lorsque consciente de la portée de son acte, elle rend indirectement accessible une œuvre qu’elle sait contrefaisante. Pour autant, l’acte querellé n’a pas à être « indispensable » pour le public. C’était le cas dans l’affaire Filmspeler par le fait de rendre possible, en toute connaissance de cause, les chargements sur ses lecteurs multimédias d’hyperliens pointant des sites. C’est le cas en classant les œuvres sur une plateforme. L’accès par le public aux œuvres contrefaisantes était possible sans l’intervention des personnes poursuivies mais se serait révélé plus complexe. Le facilitateur, par son initiative, accomplit un acte de communication.

Pour autant, il ne se contente pas de fournir des moyens, car son rôle est « incontournable », « décisif » ou « délibéré » (Filmspeler, point 49 ; Ziggo, point 26) et réalisé « en pleine connaissance des conséquences de son comportement », c’est-à-dire en sachant qu’il facilite la contrefaçon (Filmspeler, point 31 ; Ziggo, points 26, 34) puisque l’analyse de la Cour s’appuie sur la connaissance par l’intéressé des contrefaçons.

La vérité oblige à dire que les critères retenus tant pour qualifier l’acte de communication que pour écarter l’exemption pour cas de « simple fourniture

d’installations destinées à permettre ou à réaliser une communication » (considérant 27) sont semblables. Mais il est vrai que dans les deux cas, il s’agit d’affirmer que l’on est bien dans le champ du droit de communication.

Cette construction appelle trois observations.

La première a trait aux ayants droit qui se plaignaient souvent des analyses retenues par les juges de Luxembourg, voyant dans les interprétations retenues (et les conditions surprenantes posées) des rétrécissements du champ des droits reconnus par les Directives relatives au droit d’auteur. D’un certain point de vue, cette nouvelle séquence jurisprudentielle, vouée à harmoniser les solutions dans l’Union, les restitue dans leurs prérogatives.

La deuxième observation concerne le rôle dévolu à la notion de « public nouveau » par la Cour qui en fait une exigence, notamment en cas de communication secondaire. En donnant toute sa place au rôle de l’agent pour la qualification de l’acte, la Cour réemprunte, intellectuellement, le chemin parcouru par les négociateurs réunis par le passé à Genève. On sait que ces derniers, en 1948, lors des travaux de la Conférence de Bruxelles ayant abouti à l’adoption de l’article 11 bis, alinéa 1, de la Convention de Berne, avait envisagé le recours au critère de « public nouveau » pour en définitive l’écarter (par 13 voix contre 5), lors de cette même Conférence, et en retenir un autre apparu comme plus pertinent, celui d’« autre organisme » (adopté d’abord en sous-commission puis à l’unanimité par la Conférence). Ces travaux ont pu être ainsi résumés : « Si les critères de « nouvelle communication publique » et de « nouveau public » se sont révélés inopérants pour cerner des activités distinctes de l’organisme

autorisé par l’auteur à radiodiffuser son œuvre, la conférence n’a en revanche jamais mis en doute le fait que la distribution d’une œuvre radiodiffusée par un tiers constitue toujours un nouvel acte de communication au public. […] La disposition qui constitue maintenant le texte de l’article 11 bis 1) 2° de la Convention de Berne a été adoptée en sous-commission par 12 voix contre 6 (Doc. Berne, p. 290), puis à l’unanimité par la conférence » (Les principes commentés relatifs à la distribution par câble, Le Droit d’auteur, OMPI 1984, n° 63-67, p. 144 et s.).

Quel intérêt, au vu de la solution proposée dans les décisions Filmspeler et Ziggo de conserver, cette condition mal venue et inutile ?

La troisième observation concerne le curieux parallèle qui semble se poursuivre entre le droit de communication au public et le statut de certains prestataires techniques issu de la directive 2000/31 relative au commerce électronique.

Nous avions indiqué (cette revue, janv. 2017, n° 251, p. 335 & s.) que la solution retenue par l’arrêt GS Media (précité, I) s’écartait des canons du droit d’auteur en exigeant, pour caractériser un acte de communication au public un élément de connaissance (celui du caractère illicite du contenu pointé par un hyperlien). Outre le fait que pareille construction s’affranchissait de toutes les solutions posées par les textes internationaux ou européens, c’était aussi transformer la nature objective d’un droit en une espèce de responsabilité subjective.

Le critère de connaissance est ici maintenu. Cela peut être considéré de deux façons.

Soit de manière négative : la Cour persiste à utiliser un critère normalement indifférent.

Soit de façon différente : les juges de Luxembourg y ont ici recours dans des hypothèses plus lointaines que celles originellement visées. Il n’est question ni de communication primaire ni de communication secondaire.

Il s’agit d’appréhender par la notion de communication des actes qui dans d’autres États relèvent d’une responsabilité dérivée (ou de second degré).

Pour certains, cette approche – et cette exigence de connaissance – permet d’assurer une large portée au droit de communication. Il s’agit de permettre l’interdiction des actes de ceux qui facilitent la contrefaçon ou qui en fournissent aux consommateurs les moyens.

Mais au-delà de ce constat, il faut en revenir au parallèle qui peut être fait avec d’autres acteurs, dont les prestataires techniques. La présente affaire (Ziggo) le met encore plus en lumière que la première (Filmspeler).

On sait que la personne qui fournit stockage ou hébergement dans les conditions prévues par l’article 14 de la directive 2000/31 bénéficie, suivant les dispositions de ce texte, d’un statut favorable d’irresponsabilité conditionnée.

Si le prestataire joue un rôle passif, il peut bénéficier du statut d’hébergeur.

Cela l’installe alors dans un régime qui le fait échapper à toute responsabilité, quand bien même il héberge des contrefaçons, tant qu’il n’a pas eu connaissance de l’existence de ces œuvres illicites. Et l’on sait que nombre de juridictions appliquent, à tort ou à raison, ce statut à certaines plateformes communautaires

Cela l’installe alors dans un régime qui le fait échapper à toute responsabilité, quand bien même il héberge des contrefaçons, tant qu’il n’a pas eu connaissance de l’existence de ces œuvres illicites. Et l’on sait que nombre de juridictions appliquent, à tort ou à raison, ce statut à certaines plateformes communautaires