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a- Fermentations séquentielles

Ces fermentations simulent le procédé de vinification naturel ; en d’autres termes la FML démarre quand la FA est achevée. Il s’agit donc d’inoculer le milieu préfermenté par la levure avec une souche d’O. oeni dans le but d’étudier l’effet de cette levure sur la bactérie en termes de croissance et de consommation d’acide malique. Notons qu’en fin de FA, le milieu présente plusieurs

contraintes (concentration d’éthanol élevée, SO2, manque de nutriments, acides gras, protéines,

etc …) qui peuvent être évaluées à l’aide de différents tests et dosages.

b- Cultures mixtes ou co-cultures

Au laboratoire de Génie chimique, les fermentations mixtes ou co-cultures, sont réalisées dans un bioréacteur à membrane qui repose sur le principe suivant: deux micro-organismes différents sont confinés dans deux compartiments séparés par une membrane à fibres creuses mais évoluent dans le même milieu de culture grâce à une circulation alternative de ce milieu d'un compartiment à l'autre. De cette manière, les souches se développent isolées l’une de l’autre, mais toutes les interactions indirectes ayant lieu par l’intermédiaire de métabolites extracellulaires, se produisent comme si les souches étaient quasiment dans le même réservoir. Ainsi un prélèvement distinct de chaque souche devient possible et l’analyse de chaque population participant à l’interaction sera identique à celle d’une culture pure qui est relativement simple.

Cette méthode n’a pas été utilisée jusqu’à ce jour pour des co-cultures levures/bactéries. Cependant, elle peut être envisagée pour simuler une co-inoculation du moût de raisin. En effet, la présence des bactéries dès le début du procédé de vinification peut minimiser l’effet des contraintes et favoriser donc leur croissance et surtout la consommation d’acide malique. Cette nouvelle stratégie, si elle s’avérait efficace, permettrait aussi de simplifier le travail de l’œnologue en réalisant une seule opération d’inoculation du moût de raisin.

b-1 Description du Bioréacteur à membrane (BRM)

Ce bioréacteur (cf figure I-9), a été conçu et développé au laboratoire de Génie Chimique (L.G.C) (Salgado, 1999, Albasi et al. 1998, Albasi et al. 2001). Il est constitué de deux réservoirs dont l’un d’eux renferme une membrane de filtration à fibres creuses. La circulation du milieu au travers de cette membrane est assurée par une surpression (0,4 à 0,7 bar) et contrôlée par des sondes à niveau.

Un gaz comprimé est introduit alternativement dans l’espace tête d’un réservoir alors que le deuxième reste ouvert à l’atmosphère. Il en résulte une différence de pression transmembranaire qui induit un déplacement du milieu d'un compartiment vers l'autre.

L'entrée et la sortie des gaz dans chaque compartiment sont contrôlées par un couple d'électrovannes: une contrôlant l'entrée et qui est normalement fermée et l'autre contrôlant la sortie et qui est normalement ouverte. Un dispositif permet de basculer la mise sous tension entre les deux couples de vannes en fonction du niveau de liquide dans les deux réservoirs. Le niveau maximum est fixé pour chacun des réservoirs par deux sondes de niveau en acier inoxydable: lorsque les deux sondes sont en contact avec le liquide, le système de contrôle fait basculer la mise sous tension des vannes. Les vannes qui étaient ouvertes se ferment et celles qui étaient fermées s'ouvrent. Le réservoir qui était à pression atmosphérique passe en surpression et vice versa.

La stérilité du gaz entrant est assurée par filtration sur des membranes hydrophobes en Téflon, de

seuil de coupure de 0,2 µm.

Le module de filtration à fibres creuses est fourni par la société Polymem SA (Fourquevaux,

France). Les fibres en polysulfone sont en forme de U et maintenues ensemble à la base par une

résine Epoxy. La base du module est confinée dans un réceptacle métallique et la partie filtrante est en immersion dans le milieu de culture. Les caractéristiques du module de filtration sont présentées dans le tableau I-2:

Tableau I-2. Caractéristiques du module de filtration du BRM

Diamètre nominal des pores 0,1 µm

Diamètre interne des fibres 0,25 mm

Diamètre externe des fibres 0,43 mm

Nombre de fibres 1314

Longueur utile des fibres 0,09 m

Surface interne 0,107 m2

Surface externe 0,156 m2

par une tuyauterie métallique. Le volume mort de cet espace intercompartimental est inférieur à 5 mL (soit 0,1 % du volume réactionnel total).

P r is e d 'é c h a n t il lo n A ir s o u s p r e s s io n c o n trô l e d e n iv e a u fi b re s c re u s e s M a n o m è t re E l e c tro v a n n e s F i lt re s t é ri li s a n t R e p è re B a rre a u x a im a n té s o n d e d e n iv e a u p o n t d e c ir c u la t io n

Figure I-9. Bioréacteur à membrane pour l’étude de cultures mixtes de micro-organismes

b-2 Conditions de travail

Afin que ce réacteur puisse être utilisé dans l’étude des cultures mixtes, il doit remplir certaines conditions :

1- L’homogénéité du milieu doit être telle que les micro-organismes qui se trouvent dans chaque compartiment soient soumis au même environnement. Ce qui compte pour l’étude quantitative des interactions, c’est l’influence des écarts de concentrations des différents solutés entre les deux compartiments sur la dynamique de la réaction. Cette influence est conditionnée par les temps de réponse des micro-organismes qui dépendent des temps de relaxation des mécanismes par lesquels ils répondent aux changements dans leur environnement. De cette façon, on doit travailler strictement avec des temps de mélange inférieurs aux temps de relaxation des différents mécanismes. Ainsi, l’écart de concentrations entre les réservoirs serait supprimé avant que le micro- organisme ne modifie son métabolisme et on pourrait ignorer le changement. Pourtant celà peut s’avérer très difficile vu les temps de relaxation de certains mécanismes (cf figure I-10). Il faut alors mélanger assez rapidement pour que les différences soient faibles et qu’elles n’affectent pas le

déroulement de la fermentation. Les bactéries lactiques que nous utilisons (O. oeni) ont des temps de relaxation beaucoup plus grands que ceux affichés sur la figure I-10.

Les travaux de Salgado Manjarrez (1999) montrent que si l’on fixe le volume d’échange entre 100 et 200 mL et le volume dans chaque pot entre 1,5 et 1,7 L, et pour une surface d’échange de 1000

cm2, le temps de mélange sera inférieur à 10 minutes. Ce temps défini comme étant le temps

nécessaire à obtenir une différence de concentration entre les deux réservoirs inférieure à 5 %, est ainsi largement inférieure au temps de réplication cellulaire des micro-organismes dans nos conditions expérimentales.

Figure I-10. Temps caractéristiques des réponses biologiques importantes en ingénierie de bioréacteurs (Bailey et Ollis, 1986)

2- Le volume de liquide dans chaque réservoir doit être le même. Cela est aussi nécessaire pour soumettre les deux souches au même environnement car si le mélange est correct les teneurs de solutés seront très proches dans les deux réservoirs. Pour que les souches soient soumises à un environnement similaire, leurs concentrations respectives devront avoir un même volume de référence.

3-La membrane doit être inerte vis-à-vis des solutés du milieu et des micro-organismes. En plus, la quantité de cellules adsorbées ou piégées dans la membrane devra être négligeable par rapport à la

10-6 10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100 101 102 103 104 105 106 Temps de relaxation (s) Réplication de chromosomes Temps de réplication cellulaire Cellules animales et végétales Levures Bactéries Contrôle transcriptionel Changements dans la concentration d’enzymes Apparition de mutants Réactions chimiques élémentaires Contrôle allostérique

population totale. Celà est indispensable pour que la détermination quantitative de leur concentration soit correcte.

b-3 Validation

Salgado (1999) a utilisé le réacteur pour étudier des cultures mixtes entre S. cerevisiae et Klueveromyces marxianus et entre une souche S. cerevisiae killer et une souche S. cerevisiae sensible (cas d’amensalisme). Les expériences de mélange avec fermentation ont démontré que le système est capable de maintenir à des valeurs faibles les différences de concentration des différents solutés (substrats et produits) entre les deux réservoirs. Concernant la protéine « killer » produite par S. cerevisiae K1, c’est une protéine globulaire de 16 KDa et sa taille est inférieure à la taille minimale des pores de la membrane utilisée (0,1 µm) (Ramon-Portugal, 1995). Ainsi, une rétention importante ne semble pas envisageable. Salgado (1999) a d’ailleurs vérifié son passage à travers la membrane et la conservation de son activité et il a constaté une évolution comparable de l’activité killer dans les deux réservoirs. Celà nous laisse espérer que d’autres types de protéines importantes dans les phénomènes d’interaction pourraient se comporter de la même façon (exemple dans notre cas: protéine synthétisée par S. cerevisiae et inhibant O. oeni).