• Aucun résultat trouvé

Chapitre 1 : Photovoltaïque organique : problématiques et axes d’amélioration

4. Caractérisation à l’échelle nanométrique des couches actives

4.3 Microscopie à Force Atomique

4.3.1 Présentation de l'AFM

La Microscopie à Force Atomique (AFM pour « Atomic Force Microscopy ») a été développée en 1986 par G. Binning, C.F. Quate et C. Gerber123. Depuis son invention, la

technique a été adaptée à différents environnements tels que les milieux liquides ou le vide et a été étendue à différents domaines (biologie, médecine, chimie, etc.). Depuis son invention de nombreux développements ont donné naissance à différents modes, dérivant de l’AFM qui peuvent être utilisés pour mesurer des propriétés variées à l’échelle nanométriques (électriques, mécaniques, …). De plus, peu ou pas de préparation de l’échantillon est nécessaire. Le fonctionnement de l’AFM, et quelques modes dérivés, est développé en annexe.

Les performances macroscopiques d’une cellule photovoltaïque peuvent être considérées comme une somme (complexe) de contributions locales (nanométrique)124, notamment du fait

des séparations de phase entre les matériaux. Ainsi l’AFM et ses modes dérivés permettent d’étudier à l’échelle nanométrique ces variations de propriétés et de les lier à la morphologie des films minces.

L’AFM est utilisée régulièrement pour caractériser la topographie et la rugosité des surfaces. En OPV, les images de phase peuvent donner de bonnes informations sur la distribution du donneur et de l’accepteur dans un mélange et l’interpénétration de leur réseau125,126 et ainsi

permettre la mesure de la taille des domaines.

Pour l’étude des cellules photovoltaïques organiques à hétérojonction volumique, l’AFM en mode conducteur (C-AFM) s’avère un des outils performants pour étudier la structuration des couches actives et leur ségrégation de phase. En effet, le C-AFM permet d’obtenir une cartographie des courants et ainsi déterminer la répartition des domaines conducteurs.

47

4.3.2 Exemples d’étude par C-AFM

Les premières études par C-AFM des hétérojonctions en volume d’un mélange de polymères D-A ((MDMO-PPV)-PCNEPV), ont permis d’observer pour la première fois une variation des conductivités locales dans une hétérojonction, ainsi qu’une ségrégation de phase entre les polymères127.

Ce type d’étude a été largement utilisé par la suite sur d’autre type de couple D-A tel que par exemple le P3HT-PCBM128,129, démontrant ainsi l’intérêt du C-AFM pour l’étude des couches

actives.

Les travaux de M. Osaka et al.130 illustrent les potentialités de cette technique. Ces études par

C-AFM ont permis d’investiguer l’effet de recuits thermiques sur des films de P3HT-RR (cf. Figure 25).

Figure 25 : images (2,5 x 2,5 µm) (a-d) de la topographies et (e-h) des courants pour une tension appliquée de +1 V d’un film de P3HT (a,e) non recuit puis recuit, in-situ sous atmosphère de N2, successivement (b,f)

à 100°C, (c,g) à 140°C et (d,h) à 180°C pendant dix minutes à chaque température.

Les images de topographie (cf. Figures 25-a et 25-d) ne montrent pas de différence significative avant et après les recuits thermiques. Au contraire, les images des courants (cf. Figures 25-e et 25-h) montrent une augmentation du courant collecté associée aux trous dans le P3HT avec les recuits. Ces cartographies des courants révèlent que la capacité de transport verticale des trous dans le P3HT est inhomogène en intensité et en localisation à l’échelle

48 nanométrique: elles révèlent des zones de faibles conductions (de la dizaine à centaines de nanomètres) et de fortes conductions (de l’ordre de 200 nm). Les recuits thermiques améliorent les propriétés de conduction en moyenne sur le film, cependant la taille et la répartition des domaines de conductions restent pratiquement inchangées. On peut constater (cf. Figure 25-h) que la conduction s’améliore plus fortement dans les domaines auparavant les plus conducteurs, ce qui accentue l’inhomogénéité de la conduction à l’échelle nanométrique.

L’intérêt de corréler la morphologie aux propriétés électriques des couches à hétérojonction volumique pour l’OPV a ainsi conduit à une évolution du mode C-AFM dédié à l’étude du photocourant.

4.3.3 pC-AFM

Le photoconductive AFM (pC-AFM) est un dérivé du C-AFM qui consiste au couplage d’un C-AFM avec un système d’illumination permettant d’étudier à l’échelle nanométrique les propriétés de photo-génération dans les couches actives. Cette méthode a notamment permis d’obtenir une cartographie hétérogène à l’échelle nano de photo-génération de courant dans un mélange D-A (MDMO-PPV)-PCBM par exemple131.

En 2008, B. J. Leever et al.132 ont mis en place une variante du CAFM qu’ils nomment AFPM

(Atomic Force Photovoltaic Microscopy), en utilisant un simulateur solaire comme source de lumière.

Des études par C-AFM et pC-AFM sur des films de mélanges P3HT-PCBM ont ainsi permis de faire le lien entre morphologie et propriétés électriques133 et d’observer que les résultats

entre C-AFM et pC-AFM n’étaient pas systématiquement corrélés134. En effet, les sous-

domaines qui participent le plus au courant sans illumination ne sont pas forcément ceux qui contribuent le plus au photocourant.

Pour le P3HT, les zones qui conduisent le plus sans illumination les trous sont des zones de haute cristallinité, alors que les zones qui participent le plus au photocourant sont celles où il y a le plus de photo-génération de charges.

De plus, ces études montrent que le C-AFM et le pC-AFM n’apportent pas seulement des informations sur la surface mais également sur le volume. En effet, la ségrégation verticale du PCBM dans la BHJ, peut modifier de manière très significative les chemins de percolation des charges, et donc le courant récolté par la pointe de l’AFM en deux points dont la topographie

49 est similaire. De plus, les donneurs ou accepteurs isolés dans le volume ne contribuent pas au photocourant, ainsi le pC-AFM sonde seulement les matériaux actifs dans le processus photovoltaïque.

En conclusion, la littérature montre que le C-AFM et pC-AFM sont des méthodes puissantes pour étudier à l’échelle nanométrique les BHJ notamment pour l’OPV, en apportant des informations conjointes sur la morphologie et les propriétés électriques.