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Aspect impact environnemental : vers des procédés de synthèse plus verts

Chapitre 3 : Synthèse de nouvelles petites molécules oblongues fluorées

1. Objectifs et stratégie de synthèse

1.3 Aspect impact environnemental : vers des procédés de synthèse plus verts

1.3.1 Contexte

Le photovoltaïque organique est souvent mis en avant pour ses applications possibles dans des dispositifs nomades. Un grand nombre d’applications ciblées par l’OPV appartiennent au marché « grand public » plutôt qu’à la production d’énergie massive. Si on considère la vitesse à laquelle les appareils électroniques portables sont rendus obsolètes par la production de nouveaux modèles, il semble important de diminuer l’impact environnemental de leur production plutôt que d’optimiser leur temps de vie. Dans ce but, de nombreux paramètres sont souvent oubliés bien qu’ils restent à être considérer tel que la notion de coût.

En 2006, N. S. Lewis et D. G. Nocera6 ont annoncé qu’un système photovoltaïque ne devrait

pas coûter plus cher que 100 $/m² pour pouvoir être compétitif avec les technologies utilisant les énergies fossiles. A l’heure actuelle, un gramme de P3HT régiorégulier coûte environ 500 €7. Si on considère des matériaux plus complexes ayant une faible largeur de bande interdite tels que le PCDTBT8, il faut multiplier ce prix par 7. Pour le PC71BM, les prix atteignent 2000

€/g. Une production à l’échelle industrielle permettrait une réduction des prix des composants chimiques. Cependant aux coûts des matériaux s’ajoutent également les coûts annexes de fabrication9. A titre d’exemple, le coût du silicium utilisé pour un panneau solaire commercial ne représente que 30 % du prix total (installation comprise), les coûts « associés » représentent 40 % du prix du panneau (frais d’installation, connexion au réseau, etc.)10.

135 Il est donc nécessaire de chercher à diminuer les prix de tels matériaux pour rendre l’OPV viable. Une solution est de développer une chimie la plus verte possible pour réduire les coûts annexes de traitement des déchets. Le concept de chimie verte a été introduit par P. T. Anastas11, qui se réfère à une chimie efficace. Une telle chimie doit produire peu de déchets, éviter l’utilisation de groupements protecteurs, utiliser la catalyse plutôt que des procédés stœchiométriques, générer des sous-produits non nocifs pour l’environnement et posséder une faible empreinte carbone. Cette chimie verte a pour but non pas de traiter les déchets, mais vise à ne pas en produire. Il est donc préférable de mettre en place des approches qui peuvent tendre à réduire le coût et l’impact environnemental lors de la synthèse de semi-conducteurs organiques.

Bien que de grands progrès aient été faits dans le domaine de l’encapsulation et du temps de vie des cellules solaires organiques, ces dernières ont une durée de vie limitée, il est donc nécessaire d’utiliser des composants facilement recyclables. Dans cette optique, le remplacement des fullerènes est à considérer, car leur synthèse à l’échelle industrielle9 ainsi

que leurs produits de dégradation ont un impact environnemental important. La production des polymères semi-conducteurs est moins coûteuse que celle des fullerènes, cependant leur coût de fabrication augmente d’un ordre de grandeur chaque fois que le nombre d’étapes est doublé9.

Dans le domaine de l’OPV, de nombreux efforts sont faits pour développer des méthodes de chimie verte afin de produire des dispositifs efficaces, moins chers et à faible impact environnemental12,13. Dans le cadre de cette thèse, les choix de synthèse ont été faits dans cet esprit et avaient pour but de générer des petites molécules acceptrices pour l’OPV pour remplacer les fullerènes. Ces dernières devaient présenter une structure la plus simple possible afin de limiter le nombre d’étapes de synthèses nécessaires à leur obtention.

1.3.2 Choix d’une voie de synthèse plus verte

Dans cette thèse de façon à limiter le nombre d’étape de synthèse, il a été choisi d’utiliser la C-H activation comme outil de synthèse, et plus particulièrement l’hétéroarylation directe afin de remplacer les étapes de couplage de Stille ou de Suzuki nécessitant la préparation de produits intermédiaires polluants ou coûteux. L’hétéroarylation directe présente le grand avantage de diminuer la quantité de déchets toxiques formés lors de la synthèse de semi- conducteurs organiques. Cette méthode de couplage sera développée plus en détails dans la suite.

136 Afin de s’assurer de la pertinence de l’hétéroarylation directe, le schéma 1 compare trois voies de synthèse différentes menant au 5,6-difluoro-4,7-di(thiophèn-2-yl)benzo[2,1,3]thiadiazole (diTDFBT), qui est un des fragment le plus proche de nos molécules cibles décrit dans la littérature. Il existe deux méthodes classiquement décrites dans la littérature par couplage de Stille procédant via le composé diiodé (Voie A) ou le composé dibromé (Voie B), et le couplage par arylation directe (Voie C).

Schéma 1 : étude comparative en terme de rendement de trois voies de synthèse du 5,6-difluoro-4,7- di(thiophèn-2-yl)benzo[2,1,3]thiadiazole ( * : composé instable ; *² : rendement obtenu au laboratoire)

La Voie A14 est l’une des plus utilisées et consiste à diioder le DFBT puis à le faire réagir par

couplage de Stille avec le triméthyl(thiophène-2-yl)stannane. L’iodiation du DFBT pour former le 5,6-difluoro-4,7-diiodobenzo[2,1,3]thiadiazole est très peu décrite en terme de rendement car le composé formé est instable15. Un des rares exemples, la décrit avec un

rendement de 65 %14. La stannylation du thiophène est réalisée en général avec un rendement

de 89 %16. Le couplage de Stille est réalisé avec un rendement de 60 %14. L’obtention du diTDFBT est donc réalisée, selon la Voie A, en trois étapes avec un rendement global de 35 %.

La Voie B17 consiste en un couplage de Stille entre le 4,7-dibromo-5,6- difluorobenzo[2,1,3]thiadiazole (Br2-DFBT) et le 2-tributylstannyl thiophène réalisé avec un

137 Opératoire) et l’intermédiaire stannylé avec un rendement de 100 %18. L’obtention du

diTDFBT est donc réalisée, selon la Voie B, en trois étapes avec un rendement global de 37 %.

Enfin, la Voie C utilise l’arylation directe15 et ne nécessite qu’une seule étape avec un rendement de 31 %.

Les trois voies de synthèse offrent des rendements globaux similaires de l’ordre 30 %. Cependant, l’arylation directe présente l’avantage de ne nécessiter qu’une seule étape, et n’utilise pas de composés toxiques stannylés.

De plus, le faible rendement de l’arylation directe dans ce cas s’explique par la réactivité du 2-bromothiophène qui subit des réactions parasites menant à la formation d’oligomères non souhaités. Il est à noter que le 2-bromothiophène est parmi les bromures d’hétéroaryle les plus sujets à ces réactions secondaires parasites15.

Enfin dans ces travaux de thèse, un effort a été fait dans la recherche de méthode de purification les plus simples possibles. En effet, le matériel, l’énergie et le temps mis en œuvre dans la purification de produits de synthèses à plusieurs étapes peuvent être considérables. A titre d’exemple, une étude de T. P. Osedach et al.19 suggère que les étapes de

traitement du mélange réactionnel et de purification comptent pour la moitié du coût de synthèse du P3HT à l’échelle du laboratoire. Cependant, la recherche d’un processus durable ne doit pas se faire au détriment de la pureté du produit final, du fait de l’effet néfaste des résidus de réaction, tels que le palladium, sur les performances électroniques20-23.