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Chapitre I : Etat de l’art

II. Étude du frittage par MEBE

II. 1. MEBE-HT in situ

L’utilisation d’un MEBE permet, de la même manière qu’un microscope conventionnel, de travailler sous vide poussé mais également sous un vide dégradé pouvant aller jusqu’au mode dit environnemental. Il est alors possible de maintenir une pression élevée (jusqu’à 2400 Pa) de gaz dans la chambre du microscope (air, H2O, O2, …). Ceci est possible grâce à la présence d’un système de vide

différentiel positionné dans la lentille objectif qui permet de maintenir la source d’électrons et la colonne électronique sous vide poussé, tout en permettant de conserver une pression élevée dans la chambre [8, 9].

La détection des électrons secondaires ou rétrodiffusés est réalisée en utilisant des détecteurs spécifiques. Ces derniers sont choisis en fonction du mode de fonctionnement de l’appareil (i.e. vide poussé ou mode environnemental). Dans le cas où les expériences sont réalisées sous vide, deux types de détecteurs peuvent être utilisés pour collecter les différents électrons émis par l’échantillon le détecteur ETD (Everhart-Thornley Detector) pour les électrons secondaires et un détecteur solide, constitué d’un élément semi-conducteur, permettant la collection des électrons rétrodiffusés (Back- Scattered Electron Detector, BSED). En conditions environnementales, le détecteur ETD ne peut pas être utilisé car il fonctionne uniquement sous vide poussé. Il est alors nécessaire d’utiliser un détecteur spécifique pour pouvoir collecter les électrons secondaires provenant de la surface de l’échantillon. L’utilisation du détecteur « Gaseous Secondary Electron Detector » (GSED) permet d’attirer les électrons secondaires émis par l’échantillon, grâce à la mise en place d’un potentiel positif pouvant atteindre 500V. L’application de ce dernier fournit suffisamment d’énergie aux électrons secondaires générés lors de l’interaction entre les électrons primaires et l’échantillon pour qu’ils puissent interagir avec les molécules de gaz présentes dans la chambre du microscope. Cela va entrainer leur ionisation et la formation d’électrons supplémentaires, appelés électrons secondaires environnementaux. Ceux- ci se trouvent alors accélérés à leur tour et interagissent à nouveau avec les molécules gazeuses. Cette cascade de réactions entre les électrons et les molécules de gaz permet alors d’amplifier le signal électronique de départ et donc d’enregistrer des images résolues et peu bruitées malgré la présence de gaz dans la chambre du microscope (Figure 24. a.).

Figure 24 : a. Schéma simplifié de l'amplification du signal électronique émis suite à une réaction en cascade entre les électrons secondaires et les molécules de gaz [9] et b. Détecteur utilisé pour la collecte des électrons secondaires à haute

température (GSED).

Par ailleurs, le développement d’un four pouvant être directement introduit dans la chambre du microscope permet de réaliser des expériences à des températures pouvant atteindre 1350°C directement dans la chambre du MEBE. En mode environnemental, la gamme de pression pouvant être alors utilisée lors des traitements thermiques est comprise entre 10 et 750 Pa. Pour les expériences réalisées en température, seuls les détecteurs ETD et GSED peuvent être utilisés (Figure 24. b.), le premier lors d’expériences sous vide poussé et le second pour les expériences en présence de gaz. La technologie de collecte des électrons rétrodiffusés est basée sur l’utilisation d’un semi- conducteur, ce dernier étant sensible à la lumière émise par le rayonnement thermique et à la chaleur il est alors impossible d’utiliser ce type de détecteur. Cependant une entreprise tchèque, Crytur, est actuellement en train de développer un détecteur BSE rétractable (Karmen) permettant de réaliser des observations en température (Figure 25). Comme les détecteurs BSE dit conventionnels, Karmen est basé sur l’utilisation d’un capteur de scintillation monocristallin accompagné d’un photo- multiplicateur permettant d’améliorer la qualité des images enregistrées. Ce dispositif s’est vu complété par un système Peltier permettant de refroidir le détecteur, installé dans sa partie extérieure, en bleu sur la Figure 25.a. Le détecteur restant sensible à la température de fonctionnement, une sécurité entraine sa rétractation automatique si le système Peltier n’arrive pas à le maintenir à une température inférieure à 60°C. Il est donc nécessaire d’adapter les températures d’expériences et de pression dans la chambre du MEB de façon à rester en dessous de cette valeur critique.

Figure 25 : Photographie du microscope FEI Quanta 200 FEG avec le détecteur Karmen de Crytur : a. vue extérieure et b. vue intérieure avec le détecteur déplié.

L’utilisation d’un four pouvant être directement introduit dans la chambre du microscope permet de réaliser des observations in situ tout en opérant un contrôle précis de la température de l’échantillon [10, 11]. Ce contrôle est assuré par le biais d’un thermocouple placé dans le creuset du four (Figure 26), en contact direct avec l’échantillon. De cette manière, il est possible de déterminer la température réelle de l’échantillon avec une précision d’environ 5°C [12].

Figure 26 : a. Vue schématique du four associé au MEBE : 1 – porte échantillon, 2 – isolant thermique, 3 – thermocouple associé au four, 4 – module de chauffe, 5 – enveloppe métallique et b. Vue schématique du creuset associé au four : 1 – fil du thermocouple associé au porte échantillon Pt-Pt/Rh10, 2 – tête du thermocouple, 3 – élément céramique isolant, 5 – anneau

céramique jouant le rôle d’isolant [10].

Pour réaliser les expériences visant à imager la première étape du frittage de UO2, les

échantillons sont préparés en utilisant le protocole présenté précédemment puis sont directement déposés dans le creuset du four associé au MEBE (Figure 27. a.). Une montée en température rapide (environ 50°C/min) est alors réalisée jusqu’à atteindre la température d’intérêt à laquelle sera réalisée l’expérience, typiquement entre 800°C et 1200°C (Figure 27. b.). Une vitesse de chauffe importante permet de s’affranchir des modifications morphologiques que pourraient subir les échantillons avant d’atteindre le palier isotherme. Toutefois, un palier de quelques minutes est réalisé aux environs de 350-400°C (Figure 27. b.), afin de positionner le bouclier thermique, élément de sécurité permettant de travailler en température. Ce palier est réalisé dans les mêmes conditions (pression, tension d’accélération, taille de spot) que l’expérience de façon à pouvoir réaliser un premier réglage de l’imagerie. Pour les expériences réalisées sous atmosphère contrôlée, la suite de la montée en température est réalisée sous vide de façon à éviter l’oxydation de UO2. Le gaz de travail est alors

réinjecté dans la chambre du microscope une fois la température visée atteinte.

Différentes conditions atmosphériques ont été utilisées pour déterminer l’impact de la pression partielle en oxygène (pO2) sur la première étape du frittage de l’oxyde d’uranium. Quatre

atmosphères différentes ont donc été choisies avec des pressions comprises entre 50 et 150 Pa, afin de faire varier la pression partielle en oxygène dans une large gamme, comme le montre le Tableau 4 ci-dessous.

Tableau 4 : Récapitulatif des conditions de pression et de pression partielle en oxygène des différents essais.

Type de gaz Pression (Pa) pO2 (Pa)

Vide 1.10-3 ~ 0

N2 / 5% H2 / 20 000 ppm H2O 150 ~ 10-10

N2 / 1000 ppm O2 100 ~ 10-2

Air 120 ~ 25

Le mélange gazeux N2 / 5% H2 est tout d’abord acheté sous forme de bouteille auprès d’Air

Liquide. Il est par la suite mis à buller dans un piège rempli d’eau, thermostaté par l’intermédiaire d’un cryostat. La température de l’eau étant régulée, la pression de vapeur saturante en eau est donc contrôlée et permet de piloter la valeur de la pression partielle en oxygène via le couple H2/H2O. Le

montage utilisé est présenté dans la Figure 28 ci-dessous.

Figure 28 : Schéma de fonctionnement pour la préparation du mélange gazeux N2 / 5% H2 / 2000 ppm H2O.

Une fois la température de travail atteinte et le gaz réinjecté, il est possible de débuter l’enregistrement des images et le suivi de la réaction. Un délai de 15 à 30 secondes est alors nécessaire pour arriver à obtenir une image nette. Les images sont par la suite enregistrées de manière continue avec une fréquence de 1 à 60 images par minute en fonction de la vitesse de balayage utilisée et avec un intervalle de quelques secondes à plusieurs minutes entre chaque image. Au cours du traitement thermique, les images MEBE sont enregistrées sur une ou plusieurs zones de façon à pouvoir suivre l’évolution de différents systèmes durant l’expérience.

Il est tout de même important de noter que pour les expériences réalisées au-delà de 1150°C, une diminution significative de la résolution des images enregistrées a été observée [4]. Cette dégradation peut en particulier être expliquée par l’augmentation progressive de l’émission d’électrons thermiques avec la température [10, 13]. Cet effet engendre une diminution du rapport entre le nombre d’électrons d’intérêts collectés et le nombre d’électrons thermiques, ce qui provoque une diminution de la qualité des images enregistrées. Pour les températures les plus élevées, il devient très difficile d’enregistrer des images ayant une résolution suffisamment importante pour pouvoir quantifier les modifications morphologiques ayant lieu au cours du frittage. Dans le cadre de cette étude, où l’on cherche à enregistrer des images à fort grandissement (entre 60 000x et 120 000x), la température limite au-delà de laquelle l’enregistrement d’images résolues n’a pas pu être réalisé se situe ainsi aux environs de 1200°C.