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Chapitre 2 : Hiérarchie des facteurs déterminant les émissions

2.2. Présentation du jeu de données initial

2.2.2 Matériels et méthodes

2.2.2.1Choix des constituants

Le lisier de porc est un effluent d’élevage riche en azote ammoniacal (environ 70% de l’azote

total ; Levasseur, 2002). Il produit de fortes émissions d’ammoniac lors de la phase

thermophile. De même sa forte humidité (entre 92 et 95% de la masse brute) assure des

conditions de croissance microbienne rapide. La paille de blé joue le rôle de structurant, en

assurant au mélange une porosité importante, augmentant ainsi la diffusion gazeuse. De part

son rapport C/N élevé, elle apporte une grande partie du carbone nécessaire à la croissance

microbienne et donc à l’activation du procédé de compostage. La sciure de bois joue le même

rôle au niveau de la porosité et de l’apport de carbone. La mélasse permet d’apporter du

carbone très biodégradable sous forme de sucres pour la croissance microbienne. Les fumiers

de volaille sont généralement secs et compacts, leur humectation préalable au compostage

peut conduire à une hétérogénéité de la distribution d'eau dans l'andain. L'azote y est

partiellement sous forme d'acide urique et par conséquent moins disponible pour les flores

microbiennes ou la volatilisation que lorsqu'il est sous les formes uréique ou ammoniacale.

2.2.2.2Organisation des expérimentations

16 situations de compostage contrastées ont été réalisées dans la halle expérimentale de

l’INRA de Rennes (UMR SAS), en conditions climatiques contrôlées. Elles diffèrent par

l’influence de la biodégradabilité du carbone, de la disponibilité de l’azote, de la porosité et de

l’humidité (Figure 11 ; tas notés A à P) sur les cinétiques des principales émissions gazeuses

(CO

2

, H

2

O et NH

3

). Avec l’objectif de plutôt privilégier l’observation de contrastes, le suivi

simultané de tas identiques, conduit dans des conditions climatiques identiques n’a pas été

réalisé. Pour chaque expérimentation, l’influence d’un facteur sur les émissions gazeuses a été

privilégiée, par le suivi simultané de quatre tas différents. La composition des tas est

disponible dans la table 1 de l’annexe 2 p248. A chaque fois, les facteurs non étudiés étaient

identiques, autant que possible, ainsi que le volume des andains (excepté pour les tas H, L et

M d’une hauteur moindre : pour minimiser la perte par écoulement de jus dans le cas de H et

M très humides, pour maximiser le renouvellement d’air pour L très sec) :

- en 2002, l’influence de la disponibilité de l’azote a été étudiée en compostant différents

mélanges de fumier et lisier de porc, d’urée, de paille de blé et d’eau (tas notés A, B, C

et D) ;

- en 2003, l’influence de la biodégradabilité du carbone a été étudiée en compostant

différents mélanges de lisier de porc, de paille de blé, de sciure de bois, de mélasse de

betteraves et d’eau (tas notés E, F, G et H) ;

- en 2004, l’influence de la porosité libre à l’air a été étudiée en compostant du fumier de

dinde plus ou moins tassé et humidifié (tas notés I, J, K et L) ;

- en 2004 également, l’influence de l’humidité a été étudiée en compostant différents

mélanges de lisier de porc, de paille de blé, de sciure, de mélasse, d’urée et d’eau (tas

notés M, N, O et P).

Figure 11. Situations de compostage (disponibilité du carbone et de l'azote, aération, porosité) du jeu de données initial (d'après Paillat et al., 2005a)

15 tas sont retenus pour le présent travail. Le tas P a été exclu de ce jeu de données initial car

nous suspectons que la mélasse apportée en quantité importante a produit des acides

organiques qui ont perturbé les mesures d'émissions gazeuses (interférences entre gaz ; Paillat

et al., 2005a ; Hassouna et al., 2013).

2.2.2.3Dispositif expérimental et mesure des émissions gazeuses

Les essais de compostage ont été réalisés à l’intérieur de quatre cellules expérimentales

situées dans un local à température constante (Figure 12). La forme de chaque cellule est un

trapèze surmonté d’une fine cheminée. Chaque cellule possède un volume de 8 m

3

pour une

surface au sol de 3 m

2

. La température à l’intérieur des cellules est contrôlée à 25°C tout au

long des manipulations par des apports électriques complémentaires si la production de

chaleur du compost est insuffisante. La ventilation statique au sein des cellules est modulée

par l’ouverture de volets et de trous calibrés selon la production de chaleur et de gaz émis par

le tas.

sortie d ’air psychrom ètre capteur de gaz entrée d ’air andain

Figure 12. Représentation schématique d’une cellule de mesure

La disposition des tas à l’intérieur des cellules est faite pour que celui-ci soit représentatif

d’une situation réelle, soit un demi andain. La forme initiale du tas est définie par des tasseaux

fixés sur les parois internes aux cellules. Les dimensions des quatre tas sont identiques

(Figure 13). Les températures sèches et humides de l’air sont suivies à l’aide de

thermocouples (type K) et de psychromètres disposés à l’extérieur et à l’intérieur des cellules

de façon à mesurer respectivement la température et l’humidité de l’air entrant et sortant.

La température à l’intérieur des tas est suivie par l’intermédiaire de 8 thermocouples disposés

au sein du tas en quatre positions : respectivement à 80 cm de profondeur au fond du tas, à 50

cm de profondeur au cœur du tas, à 10 cm de profondeur en haut du tas et à 15 cm de

profondeur sur le devant du tas (Figure 13). Ces zones de mesures correspondent

respectivement au bas, au cœur, au haut et à l’entrée d’air du tas. Les thermocouples sont

insérés dans des filets remplis du mélange, sur lesquels un suivi massique est effectué.

0.10 m 0.4 m 1.45 m 1m 1.40 m Position des thermocouples

Figure 13. Représentation schématique d’un tas et positionnement des thermocouples

La vitesse d’air en sortie de cellule est mesurée à l’aide d’un anémomètre fil chaud (8450 de

TSI Incorporated, Shoreview, MN 55126 USA) disposé à la sortie de cheminée. L’entrée et la

sortie de l’air dans la cellule sont régulées selon le fonctionnement du tas de façon à maintenir

toujours sa valeur entre 0,3 et 0,8 m s

-1

. Une mesure manuelle avec un anémomètre à hélice

(LCA 6000, de Airflow Developments LTD, Cressex Business Park, High Wycombe,

Buckinghameshire, HP12 3QP, UK) est effectuée à chaque ouverture au niveau des

cheminées, deux fois par jour en début de compostage, puis une fois par jour après que la

température soit montée dans les andains, afin de contrôler les vitesses d’air enregistrées

automatiquement.

L’air à l’intérieur et à l’extérieur des cellules est automatiquement pompé et analysé toutes les

2 minutes pendant 20 minutes par zone de prélèvement. L’air est prélevé sur 6 zones (les 4

cellules et 2 prises extérieures) ; la durée d’un cycle de mesure est donc de 2 h. Les mesures

réalisées en continu sont enregistrées toutes les minutes par l’intermédiaire d’une centrale

d’acquisition (SA120, AOIP SAS, Ris-Orangis F-91130). Celle-ci pilote également un

automatisme de changement de voies de prélèvements. Pour une période de 20 minutes, la

concentration moyenne pour chaque gaz est calculée.

Les teneurs en dioxyde de carbone (CO

2

), en vapeur d’eau (H

2

O

vap

), ammoniac (NH

3

),

protoxyde d’azote (N

2

O) et méthane (CH

4

) ont été déterminées, selon les expérimentations,

par un analyseur de gaz 1312 ou 3426 (Brüel et Kjaer, Innova, Skordsborgvej 307, Naerum

DK-2850), reliés à un ordinateur par une interface RS232.

2.2.2.4Calcul des émissions gazeuses

Les émissions gazeuses sont calculées à chaque pas de temps par l’équation suivante

(exemple du CO

2

) :

[eq. 3] E_C-CO

2

= (n

t

. A

t

. S. 3600) . ρ

Tsi,Thi

. [(C

i

– C

e

) . M

C

/(ρ

norm

. M

CO2

) .

1/C

0

]

où E_C-CO

2

est l’émission de dioxyde de carbone pour une cellule (en g C-CO

2

h

-1

kg

-1

C

initial), n

t

est le nombre de trous ouverts au niveau de la cheminée, A

t

est la surface d’un trou

(en m

2

), S est la vitesse d’air moyenne à travers les trous (en m.s

-1

), ρ

Tsi,Thi

est la densité d’air

sec en sortie (kg d’air sec m

-3

d’air humide) calculé à partir des températures de l’air sec et de

l’air humide, C

i

et C

e

sont les concentrations mesurées à l’intérieur et à l’extérieur de la

cellule (en gCO

2

m

-3

dans des conditions normales de température et de pression d’air), M

C

et

M

CO2

sont les masses molaires du carbone et du dioxyde de carbone (respectivement en gC

mol

-1

et gCO

2

mol

-1

), ρ

norm

est la densité de l’air dans les conditions normales de pression et

de température (en kg d’air sec m

-3

d’air normal), C

0

est la masse initiale de carbone dans le

tas (en kg C). Pour les autres gaz (H

2

O, NH

3

, N

2

O, CH

4

) les concentrations, les masses

molaires et les masses initiales sont adaptées dans l’équation [eq. 3].