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Chapitre 4 : Les accélérateurs Cockcroft-Walton à travers le monde

4.1 Une méthodologie d’enquête alternative

Dès le début de notre travail, nous nous sommes intéressés à l’existence d’autres accélérateurs de type, en France, puis dans le monde. Mais très vite, nous avons été confrontés à un certain nombre de difficultés à la fois d’ordre méthodologique et sémantique, mais aussi en terme d’accessibilité aux informations. Comment effectuer cette « recherche » ? Comme nous l’aborderons plus précisément dans la seconde partie, les accélérateurs de particules, comme la grande majorité des objets scientifiques contemporains, ne font pas partie du « patrimoine » identifié et répertorié en tant que tel. Les recherches classiques sur les bases de données du patrimoine se sont révélées infructueuses. Les laboratoires de recherche ne font pas état, sur leur site Internet, de tous leurs équipements. Les chances de trouver un instrument « vieux » qui n’est plus utilisé sont encore plus faibles. En raison de son gros gabarit, il était possible de rencontrer des objets exposés en extérieur, mais dans ces cas-là ; c’est un peu comme une sculpture de rond-point que l’on ne mentionne nulle part. Les musées n’adoptant pas tous la même politique de communication, certains ne dévoilent pas le contenu des expositions, et donc les objets faisant partie des collections. Nous avons donc développé une méthodologie de recherche dite « du flou » en ce sens qu’elle se doit de ne pas cibler de

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manière précise l’objet de la recherche63. Nous avons en quelque sorte intégré une « mesure d’incertitude », plus ou moins grande autour de notre « valeur » de recherche : l’accélérateur de particules Cockcroft-Walton.

4.1.1 La recherche par l’image

Au moment où nous commençons cette prospection documentaire, nous avons déjà effectué la majorité de l’enquête socio-historique sur l’accélérateur de particules CW. La connaissance de l’objet oriente déjà certainement notre méthodologie. Par exemple, nous connaissons les autres noms de cet appareil (Greinacher, Cascade, Multiplicateur, etc.), les évènements marquants de l’histoire à laquelle il est associé (l’année 1932, la seconde guerre mondiale, le laboratoire Cavendish, etc.), mais aussi la qualité de son esthétique. En commençant cette recherche, nous nous doutons donc qu’il a pu être photographié ou dessiné, sans pour autant posséder un référencement en plein texte. Donc chaque fois que nous effectuons une recherche, nous explorons les résultats « textes » et les résultats « images ». Même si la pertinence des résultats proposés par le moteur de recherche semble très approximative, nous avons relevé l’importance d’observer l’ensemble des images proposées. Certaines trouvailles ont été faites alors que nous semblions bien loin du sujet recherché.

4.1.2 La recherche par le nom exact

La première recherche que nous avons faite (texte et image) est celle qui intègre le nom correct de l’objet : « accélérateur particules Cockcroft-Walton ». Nous avons d’ores et déjà pu agrémenter notre liste avec les occurrences françaises : encyclopédies en ligne, dictionnaires, puis quelques cours de physique essentiellement.64 La recherche par image, nous relie aux images servant d’illustration aux articles en français et donne accès aux objets les plus connus : l’accélérateur de Cockcroft et Walton exposé au Science museum (Figure 37). Nous accédons aussi aux pages personnelles, parfois très bien documentées, même s’il est difficile de savoir qui en est à l’origine et quelles sont les sources utilisées. Nous avons également retrouvé quelques publications scientifiques, articles de recherches, permettant ainsi de remonter au nom d’un laboratoire et éventuellement à son inventaire. Nous avons

63 Comme pour la majorité des recherches documentaires aujourd’hui, Internet est le support principal d’exploration. Dans cette partie, quand nous utilisons le terme « chercher » ou « rechercher », il signifie la majorité du temps l’acte de faire une recherche sur un moteur de recherche.

64 Cette recherche a été faite au début de notre travail de thèse, entre 2012 et 2013. À cette époque le musée des Confluences n’a pas encore ouvert au public, l’élève restaurateur n’a pas travaillé à l’IPNL et aucune communication n’a été faite sur notre recherche. Effectuer une telle recherche aujourd’hui change considérablement les résultats.

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ainsi exploré plusieurs terrains d’utilisations de ces appareils : laboratoire de physique, de médecine ou une structure militaire. Très vite, nous nous sommes aperçus que l’objet n’était pas toujours nommé et orthographié de la même manière.

4.1.3 La recherche par le nom mal orthographié

Cet objet a aussi la particularité d’avoir un nom un peu compliqué à écrire. Et nous nous sommes aperçus que bien souvent, le nom du physicien anglais John Cockcroft était mal orthographié. En faisant une recherche volontairement erronée (en oubliant un ou plusieurs « c » sur les trois), les résultats sont différents et complètent la précédente recherche. Cette erreur est beaucoup plus récurrente que ce que nous pensions au début de notre travail.

4.1.4 La recherche par vocabulaire élargi

Comme l’étude ci-dessus le montre, il y a une différence entre ce qu’on nomme un accélérateur de particules de type Cockcroft-Walton et un générateur de hautes tensions de type Cockcroft-Walton. Mais cette distinction n’est pas toujours très claire. Par exemple, un accélérateur peut porter la légende « générateur » si la photographie ne montre que la partie génératrice de haute tension. Le système de haute tension porte aussi le nom de multiplieur, de multiplicateur, redresseur, de cascade ; et est quelques fois associé au nom de son inventeur : Greinacher (1880 - 1974)65.

4.1.5 La recherche dans d’autres langues

En raison de l’origine de l’objet et la nécessité de remonter à certaines sources originales, nous avons dû faire des recherches en utilisant la langue anglaise (particle accelerator). Dans un premier temps sur un moteur de recherche français, puis sur un moteur de recherche américain. En multipliant également cette recherche avec les erreurs orthographiques, nous avons de nouveau obtenu une pléthore de nouveaux appareils à exploiter. Nous avons également fait des recherches en langue espagnole (acelerador de partículas) et italienne (acceleratore di particelle). C’est à ce moment que nous avons senti la nécessité de distinguer les appareils ayant existé, les appareils encore existants, ceux faisant l’objet d’une valorisation muséographique ou ceux qui sont seulement remontés. En effet,

65 Nous rappelons ici que Greinacher est l’inventeur du système de multiplication de la tension des années avant le travail de Cockcroft et Walton. J. Cockcroft et E. Walton sont à l’origine d’un accélérateur de particules utilisant un générateur en cascade. Ce n’est que par extension que nous parlons d’un générateur de tension de type Cockcroft-Walton.

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nous avons pu identifier certains objets à travers des sources historiques, et d’autres, plus contemporaines. Ils peuvent être différents, comme ils peuvent être le même objet avec en quelque sorte deux histoires : une ancienne, une contemporaine. Parmi ceux dont il reste des traces physiques, certains sont encore en fonctionnement, un petit nombre a trouvé une place dans des musées et d’autres sont arrêtés, mais conservés sur leur lieu d’utilisation sous différentes formes : démontés, montés en accès restreint ou montés sur un espace public. Suivant les cas, les accès aux informations sont bien différents. Avec des légendes de photos nous avons été amenés à faire recherches en polonais (Akcelerator kaskadowy Cockcrofta-Waltona), en Hongrois (kaszkádgyorsító), en allemand, en russe, etc. Mais le travail de traduction devient trop important pour entrer dans les détails de chacun des instruments. Dans ces cas-là, nous relevons les sources, les informations chiffrées, et les intégrons dans un dossier documentaire qui nous permettra plus tard de revenir sur les traductions.

4.1.6 La recherche par bonds successifs

La recherche d’informations avec l’outil informatique permet d’adopter une méthodologie à la fois organisée et totalement aléatoire. Nous avons dû, lors de ce travail, nous plier aux contraintes précisément liées à notre objet :

- C’est un objet peu connu du grand public et qui était utilisé dans des laboratoires de recherche ; nous avons donc cherché des traces sur les sites des laboratoires de physique atomique, en exploitant l’historique de la structure, le matériel utilisé, et la recherche d’occurrences dans les articles de recherche.

- C’est un objet grand et dont l’esthétique ne laisse personne indifférent, qu’on l’apprécie ou non. Nous avons donc la chance de pouvoir supposer que cet appareil est souvent (et de plus en plus) photographié, lors des voyages touristiques, lors des journées portes ouvertes de laboratoires, ou par des étudiants sur leur propre campus. Ainsi, grâce à des réseaux de partage (blogue, applications de partage de photos, réseaux sociaux, etc.) nous avons pu retrouver quelques appareils.

- Il a servi pour la recherche ; nous avons donc pu le retrouver parfois grâce aux occurrences de son nom dans des articles de recherche, ou dans des cours (actuels) mis en ligne par les universités.

- Il a un lien avec les instruments développés pendant la Seconde Guerre mondiale, au sein du projet Manhattan. Des sources historiques et des archives utilisées par certains

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historiens ou par des rétrospectives biographiques, ont donc été aussi des ressources permettant de remonter aux noms des laboratoires.

Et de fil en aiguille, de photographie en article et en commentaires, nous avons pu retrouver un bon nombre d’accélérateurs Cockcroft-Walton à travers le monde.

4.1.7 La recherche actualisée

Quand nous en avons eu l’occasion, nous avons reproduit un certain nombre de ces recherches, mais en variant quelques paramètres. Par exemple, en changeant d’ordinateur (ce dernier n’ayant donc pas enregistré de préférences) ou avec quelques mois ou années d’écart pour voir l’évolution des résultats. Nous nous sommes également aperçus que des ressources que nous avions trouvées il y a deux ou trois ans sont aujourd’hui inaccessibles.