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Il existe différentes méthodes d’identification des médicaments anticholinergiques particulièrement pour ceux dont l’activité anticholinergique n’est pas l’action pharmacologique principale. Cependant, il n’y a à ce jour aucun consensus sur la meilleure méthode permettant de mettre en évidence ces médicaments. Dans la pratique clinique, certains médicaments dont la prescription est considérée comme inappropriée chez les personnes âgées, les médicaments anticholinergiques y compris, peuvent être identifiés à l’aide des guides de prescription des médecins. En effet, la polymédication étant un phénomène récurrent chez les personnes âgées, certains guides de prescriptions ont été élaborés sur la base de l’avis d’experts (gériatres, pharmaciens, pharmacologues etc.) et se présentent sous forme de listes de médicaments potentiellement inappropriés et à éviter chez les personnes âgées. Certaines de ces listes permettent ainsi d’identifier les médicaments anticholinergiques : the Beers Criteria of

potentially inppropriate drugs in elderly publiés aux États-Unis en 1997 et régulièrement mis à jour ou encore la liste de Laroche en France (voir Annexe). Cependant il est indispensable de quantifier le niveau d’activité anticholinergique de chaque médicament afin d’en étudier notamment les effets néfastes dans les populations vulnérables pour mieux identifier les médicaments les plus à risque. Certaines méthodes ont ainsi été développées dans la littérature sous forme d’échelles dans le but de quantifier la charge anticholinergique des médicaments anticholinergiques. Ces échelles sont surtout utilisées dans les protocoles de recherche mais peu par les cliniciens. Ces échelles confèrent à chaque médicament anticholinergique un score qui correspond à sa charge anticholinergique. Plusieurs échelles ont été développées dans la littérature ; dans le cadre de ce travail de thèse, nous allons présenter les 4 échelles les plus utilisées selon une revue récente de la littérature (pour revue, voir Salahudeen et al., 2015).

III-4-1) L’échelle des médicaments anticholinergiques (Anticholinergic Drug Scale [ADS], Carnahan et al., 2002). (Annexe)

Cette échelle, développée par Carnahan et son équipe en 2002 et remise à jour en 2006 est basée sur la méthode de dosage radioimmunologique de Tune et Cole (1980). Ce dosage permet de mesurer l’activité anticholinergique des médicaments dans le sérum (AAS). L’AAS permet de mesurer l’activité anticholinergique des médicaments et de leurs métabolites actifs dans un prélèvement de sérum chez un sujet, en mesurant leur affinité pour le récepteur muscarinique de l’acétylcholine, in vitro.

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La valeur de l’AAS est exprimée en équivalent atropine (moles équivalent atropine / quantité de volume) qui est utilisée ici comme une valeur de référence puisqu’étant l’antagoniste principal du récepteur muscarinique. Plus l’AAS est élevée, plus la charge anticholinergique est élevée. Un score est ensuite attribué à chaque médicament en fonction de la valeur de l’AAS :

 score de 0, pas de propriété anticholinergique connue  score de 1, potentiel anticholinergique faible démontré  score de 2, potentiel anticholinergique modéré démontré  score de 3, potentiel anticholinergique élevé démontré

III-4-2) L’échelle du risque cognitif lié aux anticholinergiques, (Anticholinergic Cognitive Burden [ACB], Boustani et al., 2008). (Annexe)

Cette échelle résulte d’une revue de la littérature concernant toutes les études entre 1966 et 2007 qui ont évalué les effets néfastes des médicaments anticholinergiques sur la cognition (Boustani et al., 2008). Ensuite, sur la base de l’avis d’un panel d’experts (gériatres, pharmaciens, chercheurs), les médicaments ont été classés selon leur charge anticholinergique en combinant : l’activité in vitro démontré par l’AAS, les effets néfastes sur la cognition selon la revue de la littérature et leur capacité à traverser ou non la barrière hématoencéphalique (BHE). On distingue ainsi :

 score de 0, ces médicaments sont considérés comme n’ayant aucun effet anticholinergique délétère sur la cognition

 score de 1, ces médicaments sont considérés comme ayant un possible effet anticholinergique délétère sur la cognition. Ce sont des médicaments ayant un effet anticholinergique démontré in vitro par leur affinité pour le récepteur muscarinique ou par le calcul du niveau AAS, mais sans preuves d’effet délétère sur la cognition dans la littérature

 scores de 2 et 3, ces médicaments sont considérés comme ayant un effet anticholinergique délétère modéré (score 2) ou sévère (score 3) sur la cognition. Ce sont des médicaments ; i) dont l’activité anticholinergique in vitro a été démontré par l’AAS, ii) dont les effets délétères sur la cognition ont été identifiés dans la littérature et iii) qui traversent la BHE.

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III-4-3) L’échelle du risque anticholinergique (Anticholinergic Risk Scale [ARS]) (Rudolph et al., 2008) (Annexe)

L’échelle ARS est similaire à l’échelle ACB. Dans un premier temps, les 500 médicaments les plus prescrits dans un centre de santé aux États-Unis (Veterans Affairs Boston

Healthcare System) ont été identifiés par un gériatre et 2 pharmaciens en recherchant une potentielle activité anticholinergique. Ensuite l’activité anticholinergique a été confirmée par : 1) une revue de la littérature (MEDLINE) et 2) une recherche dans la base de données « micromedex » (base de données en ligne sur les caractéristiques de tous les médicaments autorisés par la Food and Drugs Administration, FDA, l’European Medecine Agency, EMA) pour une comparaison aux effets placebo 3) le calcul de la constante de dissociation (pKi) des médicaments en fonction de leur affinité, in vitro, pour les récepteurs muscariniques en utilisant

KiBank Database (Roth et al, 2000). Un score anticholinergique est attribué ensuite à chaque médicament préalablement identifié :

 score de 0, aucune propriété anticholinergique connue  score de 1, potentiel anticholinergique faible, risque faible  score de 2, potentiel anticholinergique moyen, risque modéré,  score de 3, potentiel anticholinergique élevé, risque majeur

III-4-4) L’index de la charge médicamenteuse (Drug Burden Index [DBI]) (Hilmer et al., 2007)

Cette échelle permet d’identifier, en plus des médicaments anticholinergiques, ceux ayant des propriétés sédatives. C’est une échelle qui est basé sur une liste de médicaments identifiés dans deux bases de données de prescriptions pour professionnels de santé (Nissen, 2004 ; Duplay 2004) comme étant des médicaments anticholinergiques ou ayant des propriétés sédatives. Un score DBI est ensuite calculée pour chaque médicament en fonction de l’équation suivante :𝐷𝐵𝐼 = Σ𝜕+𝐷𝐷 (D est la dose journalière consommée et 𝜕 est la dose journalière recommandée). La dose journalière recommandée peut être celle de la FDA ou celle utilisée dans la population d’étude selon les pratiques de chaque pays. La valeur de la DBI pour un médicament est comprise entre 0 et 1 ; plus la valeur est élevée, plus la charge anticholinergique et/ou sédative du médicament, en fonction de sa dose, est forte. Dans certains protocoles de recherche, la contingence anticholinergique est utilisée dans le calcul du score de DBI quand seuls les effets des médicaments anticholinergiques sont évalués.

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Contrairement aux trois autres échelles, la DBI ne prend pas en compte le calcul de l’affinité des molécules pour le récepteur muscarinique.

III-5) Consommation des médicaments à propriétés anticholinergiques