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4. Les structures tridimensionnelles de graphène

4.2. Méthodes d’élaboration

L’exfoliation et le traitement thermique d’oxyde de graphite conduisent à l’obtention d’un

solide composé de feuillets de FLG froissés [81], [82]. D’autres techniques permettent l’élaboration

de ce type de structures à partir d’oxyde de graphite : le traitement thermique (600°C à 800°C) d’une

suspension d’oxyde de graphène sous forme d’aérosol [170], [171], [172], [173] ou son

refroidissement à l’aide d’azote liquide [174]. Deux exemples de micrographies MEB et MET de

feuillets de graphène froissés sont présentées figure I-21.

Figure I-21 : (a) Micrographie MEB [82], (b) Micrographie MET [173] de feuillets de graphène froissés obtenus par traitement d’oxyde de graphite.

Ces structures présentent l’intérêt d’éviter l’agrégation des feuillets sous l’effet des

interactions de Van der Waals, qui est souvent un problème dans le cas de feuillets « plans » obtenus

par exemple par exfoliation en phase liquide. Cette résistance à l’agrégation est effective que ce soit

à l’état solide ou en dispersion [171], [172], [173]. La stabilisation de ces structures s’effectue grâce

aux liaisons pendantes, aux groupes oxygénés et aux défauts sp

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générés par ces groupes qui

permettent la courbure des plans de graphène [82], [175]. Les feuillets de graphène froissés possèdent

une structure mésoporeuse et/ou macroporeuse, créée par la corrugation des plans [170], [171], [176],

qui développent des surfaces spécifiques calculées selon le modèle BET allant de 200 m

2

.g

-1

[170] à

1000 m

2

.g

-1

[81]. Les applications possibles des feuillets froissés concernent l’énergie [126], [127],

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4.2.2. Activation chimique de graphène

La création d’une structure poreuse dans un échantillon de graphène peut se faire par

activation chimique, exactement sur le même principe que l’activation des charbons : de l’oxyde de

graphite est imprégné avec de l’hydroxyde de potassium KOH puis chauffé sous atmosphère inerte,

ce qui a pour double effet la réduction et l’activation du matériau [178]. L’activation physique avec

CO

2

peut être également réalisée [179], ou bien de l’oxyde de graphène réduit subit une oxydation

catalysée par des particules métalliques. Ces traitements génèrent une grande quantité de mésopores

et de micropores dans les plans de graphène, tout en développant un réseau tridimensionnel. Malgré

la création de pores permettant d’atteindre des surfaces spécifiques très élevées (3100 m

2

.g

-1

selon le

modèle BET), le graphène activé conserve une conductivité électrique de l’ordre de plusieurs S.cm

-1

[178].

4.2.3. Auto-assemblage en phase liquide

De nombreuses techniques de synthèse par auto-assemblage en phase liquide sont

répertoriées dans la littérature et conduisent à l’obtention d’un caractère tridimensionnel plus marqué

que celui des feuillets de graphène froissés et des échantillons de graphène activé. Elles ont toutes

pour matériau de départ une suspension aqueuse d’oxyde de graphène (voir partie 2.), simple à

obtenir en grandes quantités. Beaucoup de méthodes passent par la synthèse d’un gel, par analogie

avec la synthèse de carbones mésoporeux ou macroporeux. Les gels peuvent être préparés par simple

agitation d’un mélange d’une suspension aqueuse d’oxyde de graphène avec un agent gélifiant

comme l’alcool polyvinylique : le gel est stabilisé par l’interaction entre les fonctions alcool et les

fonctions oxygénées de l’oxyde de graphène, et il est ensuite lyophilisé. L’oxyde de graphène étant

biocompatible, la structure macroporeuse obtenue est intéressante pour des applications telles que la

délivrance de médicaments [180]. Dans la plupart des cas, toutefois, l’oxyde de graphène est réduit

pour améliorer les propriétés du matériau obtenu. La réduction peut se faire thermiquement, en

milieu hydrothermal par exemple [181], avec l’aide éventuelle de sels métalliques restant dans le

matériau sous forme de nanoparticules [182], ou bien chimiquement en utilisant des réducteurs

comme l’ascorbate de sodium [183] ou l’acide ascorbique [184]. Lors de la réduction, les feuillets

d’oxyde de graphène perdent localement leur caractère hydrophile et s’assemblent ainsi pour former

un réseau tridimensionnel. Une étape de lyophilisation termine le procédé. La figure I-22 montre une

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dispersion aqueuse d’oxyde de graphène avant et après réduction chimique et permet de bien

visualiser l’auto-assemblage macroscopique des feuillets de graphène.

Figure I-22 : Dispersion d’oxyde de graphène, avant et après réduction chimique par l’ascorbate de sodium [183].

L’auto-assemblage de l’oxyde de graphène peut aussi s’effectuer par centrifugation sous

vide, suivie d’une réduction thermique [185]. Les matériaux ainsi obtenus possèdent une structure

macroporeuse [180], [181], [182], [183], [185] parfois également mésoporeuse [184], dont les parois

des pores sont constituées d’un faible empilement de plans de graphène. Sur la figure I-23 sont

présentés un exemple de photographie d’un matériau après lyophilisation, ainsi qu’une micrographie

MEB montrant la structure poreuse obtenue.

Figure I-23 : (a) Photographie d’un assemblage de graphène obtenu après lyophilisation de l’hydrogel, (b) micrographie MEB de l’assemblage [181].

La pyrolyse sous azote d’une résine organique obtenue par polymérisation dans une

suspension aqueuse d’oxyde de graphène s’inspire également des techniques classiques d’obtention

de carbones poreux : la polymérisation de la résine simultanée à la réduction de l’oxyde de graphène

conduit au même type de structures [186], [187]. Dans le même ordre d’idée, d’autres auteurs

reportent le chauffage en milieu hydrothermal d’une suspension aqueuse d’oxyde de graphène

mélangée avec un composé issu de la biomasse : dans ce cas, la mousse de graphène est obtenue par

l’association de la réduction de l’oxyde de graphène avec le phénomène de carbonisation [188]. De

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d’augmenter la surface spécifique du matériau. L’assemblage de l’oxyde de graphène sur des

templates comme des billes de silice est une autre technique de synthèse classique revisitée [189].

L’utilisation d’une dispersion aqueuse d’oxyde de graphène ainsi que l’étape de réduction

subséquente conduisent à des matériaux de bonne qualité cristalline, sans nécessiter l’utilisation d’un

traitement post-synthèse destiné à graphitiser le matériau. Ceux-ci possèdent de bonnes propriétés de

transport, qui peuvent atteindre des conductivités approchant 1 S.cm

-1

[184], [186]. Ces valeurs

restent très inférieures à celles relevées pour le graphite et le graphène, en raison des défauts liés à

l’assemblage et à la courbure des feuillets, mais sont suffisantes pour les applications visées pour ce

type de structures. Le développement de macropores et de mésopores permet d’obtenir des volumes

poreux conséquents, ainsi que des surfaces spécifiques assez élevées, allant d’environ 500 m

2

.g

-1

[184], [186] à 1200 m

2

.g

-1

[187] (dans le modèle BET). Un traitement d’activation subséquent permet

d’obtenir de plus grandes surfaces [188]. Les propriétés mécaniques de ces structures sont également

très intéressantes : elles possèdent une excellente résistance mécanique [181], [183], couplée à une

densité faible et peuvent supporter jusqu’à plus de dix mille fois leur poids sans se déformer [184].

Les applications concernées sont principalement l’énergie, en particulier grâce aux bonnes

capacitances et conductivités des matériaux [181], [183], [184], [190], mais également la catalyse et la

détection d’espèces chimiques [190].

4.2.4. Dépôt chimique en phase vapeur

Le dépôt chimique en phase vapeur de précurseurs carbonés sur des templates

tridimensionnels conduit à l’obtention de réseaux de graphène de très bonne qualité cristalline [191],

[192]. Ils possèdent une structure macroporeuse, réplique du template utilisé, et peuvent servir en

électrochimie et comme capteur d’espèces chimiques [192], ainsi que pour la fabrication de

matériaux composites : des composites polymères avec une conductivité d’environ 10 S.cm

-1

et une

grande flexibilité ont été synthétisés et sont particulièrement intéressants dans le domaine de

l’électronique souple [191].