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LA MÉTAPHORE POÉTIQUE

L’ENJEU DE LA LOGIQUE DANS

MAIS DANS SA QUÊTE ÉDUCATIVE, L’HOMME RESTE CONNECTÉ AUSSI AUX MÉTHODES DE PERSUASION PAR L’EXEMPLE, SI UTILES EN POLITIQUE, ET AUX IMAGES DE LA POÉSIE

III. LA MÉTAPHORE POÉTIQUE

Une conception littéraliste de la métaphore est l’idée qu’il s’agit d’un raisonnement potentiel, non expli-cite, tout n’est pas dit, il y a place pour la suggestion.

On sauve le sens littéral, sans dédoubler ni le sens, ni la référence, sans déréaliser notre monde et en faisant la pleine reconnaissance de la valeur cognitive de la métaphore : celle-ci ne menace pas le sens mais en propose un usage distinct du commun. Al Fârâbî ainsi qu’Averroès ont fait de la métaphore un syllogisme potentiel et imaginatif. Un syllogisme est un raisonne-ment qui permet un acquis de connaissance, la part cognitive est donc sauvée. Il est imaginatif, au sens YG&

langage. Il est potentiel car aussi bien celui qui fait la métaphore que celui qui la reçoit sont dans la suggestion et non dans l’explicite : une métaphore est une conclusion de syllogisme dont on a fait l’ellipse des deux prémisses.

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les prémisses par son imagination et, par cet acte, il crée de la métaphore en la comprenant.

La métaphore est alors une métamorphose : si elle sauve le sens littéral, elle en fait un usage nouveau qui s’apparente à une métamorphose. L’exemple suivant donné par Avicenne est éloquent : « le miel est de la bile vomie ». Littéralement c’est bien le travail des abeilles que de « vomir » le miel : la métaphore ne crée pas un autre sens, mais se fonde sur le sens pour en proposer un autre usage. Il y a métaphore car le mot « vomir » est associé communément dans la langue à une activité que cherche à fuir l’homme. Fuir, poursuivre : nous sommes là dans des actes associés au produit de l’imagination. Nous n’avons pas touché au sens littéral, mais nous en avons fait un usage qui apparente la métaphore à une métamorphose : le miel n’est pas vu comme une douceur que l’on chercherait mais comme un rendu qui laisse l’auditeur perplexe, qui trouble donc

en donnant lieu à une perception autre de la réalité : le miel sera donc rejeté alors que communément il est recherché.

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#' La métaphore est là pleinement une modalité du G ou l’assertion. En valorisant le rôle de l’imagination, on indique que la métaphore n’est pas explicable par paraphrase ; elle ne l’est ni par celui qui la produit, ni par celui qui la reçoit, tous deux créateurs de métaphore, l’un en la proposant, l’autre en la comprenant.

La logique est en général associée aux actes de

!* ! et la démonstration. Loin de nier ces pratiques fonda-mentales de la logique, les philosophes arabes comme Al Fârâbî et Averroès, ont voulu insister sur le caractère également logique de pratiques comme la poétique et la rhétorique. L’objectif est de montrer que les images de la poétique et les arguments persuasifs de la rhétorique relèvent bien d’une rationalité logique et a des règles précises qu’il convient de décrire.

Dans un contexte culturel - l’Islam classique du IXe au XIIe siècle - où la théologie aussi bien que la poésie se sont développées d’une manière remarquable, il appartenait au philosophe de montrer que la créativité poétique aussi bien que l’argumentation théologique répondent à des règles logiques et à une rationalité communément partagée. Ces règles mettent l’accent sur les multiples accès à la vérité. Si aucune vérité n’en contredit une autre logiquement, encore convient-il de reconnaître que les vérités auxquelles l’homme donne G

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Autres époques, Autres lieux

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L’allégorie de la Caverne de Platon représente l’idée que l’homme tend à comprendre le monde comme il le perçoit et non tel qu’il est véritablement. C’est une problématique de toute première importance puisqu’elle débouche sur la nécessité de l’interprétation des perceptions par la pensée, le raisonnement, pour tendre vers une véritable compré-hension des choses.

Einstein n’était pas philosophe, mais il a apporté une petite révolution dans le domaine de la pensée. On considère ordinairement qu’est vrai ce qui est vu, ce qui est perceptible.

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humaine qui se distinguerait des autres espèces par le fait qu’elle ne se contente pas de percevoir mais essaie de comprendre par l’opération de la pensée.

D’après ses biographes, Einstein fut perçu par ses professeurs comme un élève plutôt moyen ' " ! G posées. Solitaire, il aurait acquis un certain nombre de connaissances en autodidacte.

Une anecdote intéressante est souvent citée : vers l’âge de 4 ou 5 ans il fut profondément marqué par la vue d’une boussole que lui montra son père : le mouvement déterminé de l’aiguille sans cause apparente lui « laissa une impression profonde et durable », le sentiment qu’ « il devait donc y avoir derrière les choses quelque chose de profondément caché »1. W?€#'$&

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était différente de la manière de penser courante ; différente donc jugée peu performante.

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les raisons des choses et leur fonctionnement. Il cherche des solutions logiques, raisonnées

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« C’est en réalité tout notre système de conjectures qui doit être prouvé ou réfuté par l’expérience. Aucune de ces suppositions ne peut être isolée pour être examinée séparé-ment. […]. Les concepts physiques sont des créations libres de l’esprit humain et ne sont pas, comme on pourrait le croire, uniquement déterminés par le monde extérieur.

Dans l’effort que nous faisons pour comprendre le monde, nous ressemblons quelque

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image de la réalité deviendra de plus en plus simple et expliquera des domaines de plus &!3 ! limite idéale de la connaissance que l’esprit humain peut atteindre. Il pourra appeler cette limite idéale la vérité objective. ».

! ‹šAlbert Einstein, Léopold Infeld2. Einstein nous apprend à penser autrement. L’esprit logique, c’est-à-dire cohérent avec le fonctionnement des choses telles que nous pouvons les percevoir, entre-t-il en

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Ainsi, la naissance des théories physiques de la Relativité a augmenté notre conscience

&&G de réalité plus vaste que celui auquel celle-ci s’applique.

1 Michel Paty, \ % , Paris, Les Belles Lettres, 1997.

2 Léopold Infeld (1898-1968), collaborateur d’Einstein à Princeton en 1936-1937. Il écrit en 1938 de L’évolution des idées en physique avec Einstein. Publication conjointe de trois articles sur le problème du mouvement

Rubrique rédigée par Jacques Nicolaus

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Clés de lecture

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la logique d’Aristote, in Penser avec Aristote, Paris, +:!5#d+;<<7+97}X97<

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;; 0+Commentaire moyen sur la Rhétorique d’Aristote+*+++2+

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+La doctrine rhétorique d’ibn Ridwan et la didascalia in Rhetoricam Aristotelis ex Glosa Al Fârâbî, in Arabic Sciences and philosophy+=+%;<=='+

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;9 +Commentaire moyen sur les catégories, +L’organon d’Aristote dans le monde arabe, 2+\+;<}7+?W

La civilisation arabo-musulmane au miroir de l’universel : perspectives philosophiques ISBN 978-92-3-204180-7 © UNESCO Rubrique rédigée par Khaled Roumo

L’ART

DANS LA CIVILISATION