• Aucun résultat trouvé

A.1) La mémoire mesurée à 72 heures est associative et spécifique de l ʼ odeur apprise

III.B.3) Analyses statistiques

IV. A.1) La mémoire mesurée à 72 heures est associative et spécifique de l ʼ odeur apprise

# Pour vérifier que le conditionnement permet aux animaux dʼapprendre et de mémoriser à long terme lʼassociation SC-SI, les performances dʼapprentissage et de mémorisation des groupes dʼanimaux ont été suivies individuellement. Afin de sʼassurer que les données obtenues ne dépendent pas du SC utilisé, les premières expériences sont réalisées avec 2 stimuli conditionnels différents, utilisés en parallèle pour des groupes indépendants dʼanimaux : le 1-nonanol et le 1-hexanol. La figure 21 rassemble les performances de conditionnement et de rappel de lʼensemble des individus soumis à un conditionnement ou un pseudoconditionnement avec ces 2 SC (A : 1-nonanol ; B : 1- hexanol), lors de nos différentes expériences. La comparaison des deux jeux de données montre clairement que le comportement des animaux est similaire pour ces deux odeurs (test du χ 2, χ2 < 9.3 pour toutes les comparaisons, NS). Dans la suite du texte, les résultats statistiques sont donc fournis de manière globale, pour les deux types de SC.

# Les animaux conditionnés sont entraînés à apprendre lʼassociation entre une odeur (1-nonanol ou 1-hexanol) et une récompense sucrée, au cours de cinq essais consécutifs espacés de dix minutes. Le panneau de gauche de la figure 21 montre les performances comportementales des abeilles (pourcentage de réponses conditionnées) au cours des cinq essais de lʼapprentissage. Quelle que soit lʼodeur apprise, les réponses des animaux conditionnés augmentent significativement au cours des essais (test Q de Cochran, pour les 2 odeurs Q > 16.60, 4 ddl, P < 0.001) pour atteindre près de 80 % dès le troisième essai. Le groupe conditionné apprend donc lʼassociation de manière efficace. Au contraire,

les abeilles pseudoconditionnées, qui ne reçoivent aucune présentation contingente de lʼodeur et de la solution sucrée, montrent une légère diminution des réponses (depuis environ 15 % jusquʼà près de 5 %) qui ne se révèle pas significative (pour les 2 odeurs : Q < 5.2, 4 ddl, NS). Par conséquent, malgré des expériences sensorielles au contenu identique, les groupes conditionné et pseudoconditionné possèdent des performances dʼapprentissage très différentes (test U de Mann-Whitney, U > 14.5, P < 0.001). Plus que le contenu sensoriel, lʼassociation temporelle entre les stimuli olfactif et sucré est donc déterminante dans cet apprentissage.

Figure 21 : Les abeilles conditionnées développent à 72 h une mémoire associative et spécifique de l’odeur apprise. Les performances comportementales correspondent au pourcentage d’extensions

conditionnées du proboscis (% ± intervalle de confiance à 95 %) lors du conditionnement ou pseudoconditionnement au 1-nonanol (A) et au 1-hexanol (B). Quelle que soit l’odeur, pendant l’acquisition (à gauche), seuls les animaux conditionnés montrent une augmentation de leurs réponses conditionnées au fur et à mesure des essais (test Q de Cochran, pour les deux odeurs Q > 16.60, 4 ddl, P < 0.001). Soixante- douze heures après le conditionnement (au centre), la plupart des abeilles conditionnées répondent encore à l’odeur apprise, alors que très peu répondent à une nouvelle odeur (test de Mc Nemar : χ2 > 15.1, P < 0.001).

Au contraire, la plupart des abeilles pseudoconditionnées ne répondent à aucune odeur. Ceci se reflète dans les profils de réponses spécifiques des deux groupes : les conditionnées présentent clairement et significativement plus de réponses spécifiques que les pseudoconditionnées (test du χ2 pour les 2 odeurs, χ2 >

# Pour tester la rétention de ces informations à long terme, les animaux sont soumis à un test de rappel 72 h après la phase dʼapprentissage, soit dans la fenêtre temporelle de mise en évidence de la MLTt, typiquement 3 ou 4 jours après le conditionnement (Schwarzel et Muller, 2006). Le panneau central de la figure 21 illustre les performances comportementales observées au cours du test de rappel, obtenues lors de la présentation de lʼodeur apprise6 et dʼune nouvelle odeur (non expérimentée au préalable, cf. Matériels et Méthodes). Les abeilles conditionnées répondent significativement plus à lʼodeur apprise (~ 70-75 %) quʼà lʼodeur nouvelle (~ 12-20 %) (test de Mc Nemar : χ2 > 15.1, P < 0.001). Un tel conditionnement produit donc une mémoire spécifique de lʼodeur apprise. Ces réponses contrastent avec celles des abeilles pseudoconditionnées. En effet, ces dernières montrent des pourcentages de réponse à lʼodeur expérimentée très faibles (~ 10 %), et non significativement différents des réponses à lʼodeur nouvelle (~ 2-10 %) (Test de Mc Nemar pour les 2 odeurs apprises, χ2 < 15.1, NS). Ces réponses ne peuvent donc pas être attribuées à une mémoire olfactive spécifique.

# Les pourcentages de réponses spécifiques, correspondant aux animaux répondant uniquement au SC, sont comparés entre groupes sur le panneau droit de la figure RA1. Le taux de réponse spécifique du groupe conditionné y apparaît clairement plus important (~ 50-60 % contre ~ 0-5 % pour le groupe pseudoconditionné) (test du χ2 pour les 2 odeurs, χ2 > 19.14, P < 0.001). À lʼéchelle individuelle, 207 des 369 individus (56 %) conditionnés au 1-nonanol et 40 des 78 individus (51 %) conditionnés au 1-hexanol montrent — 72 h après lʼapprentissage — une réponse seulement pour lʼodeur apprise.

# Une propriété générale du processus dʼapprentissage associatif est que la réponse conditionnée acquise est affectée dʼextinction par la présentation répétée du SC sans renforcement (Pavlov, 1927). Les réponses conditionnées acquises au cours du conditionnement du REP de lʼabeille se sont dʼailleurs révélées sensibles au phénomène dʼextinction (Bitterman et al., 1983; Sandoz et al., 1995; Sandoz et Pham-Delegue, 2004; Eisenhardt et Menzel, 2007). Cependant, il nʼétait pas établi si la MLT tardive (testée à 72 h) était sensible à lʼextinction. Pour tester cette possibilité, nous avons soumis des animaux conditionnés au 1-nonanol ou au 1-hexanol à un protocole dʼextinction 72 h après le conditionnement, en présentant à 3 reprises le SC (intervalle entre présentations :

6Conscients qu’il s’agisse d’un abus de langage, nous faisons le choix d’utiliser les termes d’« odeur apprise » et de SC pour désigner l’odeur utilisée pendant le conditionnement et le pseudoconditionnement, par souci de simplicité.

min). La figure 22 représente le pourcentage de réponses des insectes aux 3 présentations successives. Quel que soit le SC (fig. 22A : 1-nonanol ; fig. 22B : 1- hexanol) on détecte un effet des présentations répétées sur le pourcentage de réponses (test Q de Cochran, Q > 10.2, 2 ddl, P < 0.01). Pour les deux odeurs de conditionnement, on observe effectivement une diminution de lʼordre de 15-20 %. Au contraire, les réponses des abeilles pseudoconditionnées restent très faibles et nʼévoluent pas significativement au cours des présentations (test Q de Cochran pour les 2 odeurs, Q > 4.9, 2 ddl, NS). En conclusion, les réponses des abeilles à long terme sont affectées par lʼextinction, renforçant de nouveau le caractère associatif de la mémoire établie.

Figure 22 : Extinction des réponses des abeilles conditionnées. Soixante-douze heures après la

séance de conditionnement/pseudoconditionnement au 1-nonanol (A) ou au 1-hexanol (B), le pourcentage de réponses est mesuré lors de 3 présentations successives du SC. Pour les 2 odeurs, bien que les réponses du groupe conditionné restent élevées, une diminution progressive et significative est détectable au fur et à mesure des 3 présentations (test Q de Cochran, Q > 10.2, 2 ddl, P < 0.01). Les réponses conditionnées sont donc affectées par l’extinction (*** : P < 0.001 ; ** : P < 0.01.)

#

# En conclusion, le conditionnement en cinq essais espacés de dix minutes permet de générer, dans nos conditions, une MLT associative spécifique de lʼodeur apprise, et détectable 72h après le conditionnement. À lʼopposé, les présentations non appariées du même nombre de présentations olfactives et sucrées — au cours du pseudoconditionnement — ne mènent à aucune rétention stable dʼune éventuelle association entre odeur et sucre.

IV.A.2) Les abeilles pseudoconditionnées ne développent pas de