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Mécanismes d'ouverture d'un seul G4 par la famille des SSB-OB fold aux télomères

Introduction Générale

1.7 Mécanismes d'ouverture d'un seul G4 par la famille des SSB-OB fold aux télomères

Comme nous l'avons vu précédemment (section 1.6), des répétitions du motif télomérique TTAGGG se structurent en G4s. Ces structures G4s sont souvent considérées comme des structures problématiques pour la réplication des télomères. En eet ce point de vue repose sur l'observation qu'un défaut de certaines protéines de la famille des hélicases, aptes à dérouler in vi-tro ces structures, entraine une perturbation de la réplication des télomères. Ces études in vivo nous informent de l'importance des hélicases, notamment WRN (Werner syndrome helicase) (Crabbe, 2004), BLM (Bloom syndrome protein)(Zimmermann et al., 2014; Sfeir et al., 2009) ou encore RTEL1 (Re-gulator of telomere elongation helicase 1)(Sfeir et al., 2009; Vannier et al., 2012), dans la réplication du brin G télomérique (Maestroni et al., 2017) (Figure 1.35). Il existe une autre famille de protéines susceptibles de prendre en charge cette activité de dérouler les G4s aux télomères : la famille des SSB-OB fold. Les protéines appartenant à cette famille ont souvent un rôle crucial au sein de la cellule rendant dicile des études in vivo présentant un défaut de ces protéines (Flynn and Zou, 2010). En revanche, des études in vitro ont permis de montrer qu'un certain nombre de protéines de liaison à l'ADN simple brin aux télomères, appartenant à la famille des SSB-OB fold, possèdent la capacité de dérouler les structures G4s. Chez l'homme il existe au moins trois complexes appartenant à cette famille possédant cette faculté à dérouler les structures G4s : POT1-TPP1, RPA et CST.

Figure 1.35  Prise en charge par les hélicases des structures G-quadruplexe et de la T-loop pour éviter le blocage de la fourche de réplication aux télomères.

1.7.1 Le complexe POT1-TPP1

Des recherches in vitro réalisées en 2005 montrent que l'oligonucléotide GGG(TTAGGG)3, replié en G4, est un mauvais substrat pour l'activité d'élongation de la télomérase, comparé à des substrats qui ne se structurent pas en G4. Cependant l'addition de POT1 restaure l'activité d'élongation de la télomérase. Ces résultats suggèrent que POT1 déroule le G4 facilitant ainsi l'activité d'élongation de la télomérase (Zaug et al., 2005). Des expé-riences en molécule unique entreprises par Hwang et al. en 2012 ont permis d'observer l'ouverture d'un G4 par la protéine POT1 avec une directionnalité de 3' vers 5' (Hwang et al., 2012). Sur la base de la polarité de liaison des domaines OB1 et OB2 de POT1 (section 1.5.2), les auteurs ont proposé un mécanisme d'ouverture du G4 dans lequel la liaison de POT1 se fait dans un premier temps via le domaine OB2, du côté 3', suivi par le domaine OB1, du côté 5'(Figure 1.36). De plus, , l'observation de complexes Protéine :ADN de

st÷chiométrie 2 :1 leur a permis de suggérer que deux protéines POT1 sont nécessaires à l'ouverture d'un G4. Une étude publiée en mai 2020 par Chaires et al. montre que les courbes de liaison de la protéine POT1 sur des séquences télomériques de 24 nt, composées de deux sites de xation de POT1 et struc-turées en G4, présentent une allure sigmoïdale suggérant une coopérativité de POT1 dans l'ouverture du G4 (Chaires et al., 2020). A l'inverse, il semble qu'un seul complexe POT1-TPP1 soit susant pour dérouler un G4 (Hwang et al., 2012; Ray et al., 2014). An d'expliquer cette diérence, le modèle de Hwang et al. propose que le complexe POT1-TPP1 glisse le long de l'ADN télomérique (Figure 1.36). Cette idée que le complexe POT1-TPP1 glisse sur l'ADN télomérique est renforcée par le rôle du complexe dans la processivité de la télomérase. Cependant même s'il existe des modèles de protéines liant l'ADN en glissant le long de ce dernier, comme c'est le cas de Cdc13 chez S. cerevisiae, il me semble dicile que le complexe POT1-TPP1 ait un tel comportement au vu de la spécicité de séquence de POT1. Il faudrait que le complexe POT1-TPP1 "saute" de site en site sur l'ADN télomérique, et non glisse comme proposé, ce qui ne semble pas cohérent.

Une étude réalisée en 2014 par Ray et al. montre à l'aide d'expérience en molécule unique que les structures G4 sont mieux déroulées par le complexe POT1-TPP1 que par POT1 seule (Ray et al., 2014). Mullins et al. ont étudié la liaison de POT1-TPP1 à des séquences de 24 nt comportant deux sites de liaison et se structurant ou non en G4 (Mullins et al., 2016). Ils ont ob-servé que la liaison du premier hétérodimère POT1-TPP1 à la séquence qui se structure en G4 dépend fortement de la stabilité du G4, l'anité en K+

étant cinq fois inférieure à l'anité en Na+. En revanche, l'anité de liaison du deuxième hétérodimère POT1-TPP1 ne dépend pas de la structure secon-daire et de sa stabilité, vraisemblablement en raison du dépliage résultant de la liaison du premier complexe POT1-TPP1.

Figure 1.36  Modèle d'ouverture d'un G-quadruplexe par POT1 et POT1-TPP1 . Proposé par Hwang et al. (Hwang et al., 2012).

1.7.2 La protéine RPA

De nombreuses données chez la levure ont suggéré que la protéine RPA pouvait intervenir aux télomères en maintenant le brin G sous une forme non structurée compatible pour la réplication des télomères et l'accès à la télomérase (Schramke et al., 2003; Cohen et al., 2004; Luciano et al., 2012; Audry et al., 2015). En eet, de nombreuses études in vitro ont montré que la protéine RPA se lie aux séquences structurées en G4 simple en déroulant la structure. Cela a été montré pour le G4 formé par la séquence télomérique humaine (Salas et al., 2006; Safa et al., 2014) et pour d'autres séquences du génome humain (Fan et al., 2009; Ray et al., 2013). Qureshi et al. observent que RPA ouvre les structures G-quadruplex avec diérents degrés d'ecacité (Qureshi et al., 2012). Des études ont montré que RPA lie et ouvre préféren-tiellement les G4 les moins stables établissant ainsi une relation inverse entre anité et stabilité des G4 (Ray et al., 2013; Safa et al., 2014).

Des recherches in vitro ont permis de mettre en évidence que les interac-tions des domaines OBD (RPA2) et OBE (RPA3) de RPA sont essentielles pour dérouler un G4 (Prakash et al., 2011). Enn des études in vitro, me-nées au sein de l'équipe SANTÉ ont montré que la protéine RPA déroule les G4 de façon directionnelle, de 5' vers 3' (Safa et al., 2016) : une fois établi un premier contact de quelques nt avec l'ADN via la sous-unité RPA1, elle s'étend sur l'ADN vers 3' (Figure 1.37). Cette directionnalité de RPA dans le déroulement des G4 télomériques pourrait assurer une xation rapide de RPA au brin G retardé lors de la progression de la fourche de réplication.

De récentes études ont montré que la capacité de RPA à dérouler les struc-tures G4 se retrouve chez diérentes espèces. Parmi ces études nous pouvons citer l'étude de Carlos A.H Fernandes et al., à laquelle j'ai eu l'opportunité de participer, portant sur la RPA du parasite protozoaire Leishmania ama-zonensis (Fernandes et al., 2020) (en Annexes Articles) ou encore l'étude de B. Aklilu et al. sur la RPA de la plante Arabidopsis thaliana (Aklilu et al., 2020).

Figure 1.37  Modèle d'ouverture d'un G-quadruplexe par la pro-téine humaine RPA (Safa et al., 2016).

1.7.3 Le complexe CST

Récemment, il a été observé que la présence de ligands de G4 exacerbe les problèmes de réplication du brin G observés en défaut de CST (Zhang et al., 2019). Ces résultats confortent les résultats obtenus in vitro par l'équipe de Carolyn M. Price en 2017 qui montre, outre la préférence de CST pour la jonction d'ADN double brin/simple brin, la capacité de ce complexe à dérouler le G4 formé par le motif télomérique humain (Bhattacharjee et al.,

2017). Cette étude montre que le complexe CST ne possède pas de préférence pour une extrémité 3' ou 5' de l'ADN simple brin. En eet l'ecacité de liaison de CST est similaire, qu'il y ait ou non présence d'ADN simple brin en 3' ou 5' du G4. Il est important de noter que le mécanisme qui régit l'ouverture des structures G4s par le complexe CST est aujourd'hui encore inconnu.