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c Mécanisme de formation des nanoparticules d’YVO 4 dopé Eu

Partie I : Étude du mécanisme de formation des nanoparticules d’YVO 4 :Eu

III.4. c Mécanisme de formation des nanoparticules d’YVO 4 dopé Eu

A ce stade, il est possible de proposer un mécanisme de formation des nanoparticules d’YVO4

dopé europium basé sur l’étude cinétique précédente. Dans des temps très courts (t < 400 ms), un précipité d’hydroxyde d’yttrium, d’europium et de vanadate se forme par olation. Celui-ci présente probablement des liaisons (Y,Eu)-(OH)-V permettant une luminescence de l’europium sous excitation UV. Ce précipité est vu comme une sorte d’amorphe polymérique 3D présentant deux tailles caractéristiques de l’ordre de 15 et 1.5 nm (Figure 68-1). A ces échelles, la densité du précipité est comparable à celle des nanoparticules finales.

Ensuite, des grains primaires cristallins font leur apparition. Leur taille caractéristique initiale élevée, extraite des pics de diffraction, prouve que ces grains grossissent très rapidement dans un premier temps puis n’évolue quasiment plus ensuite. Ils apparaissent avec une taille de l’ordre de 5 nm de diamètre. La détection concomitante du signal SAXS des grains primaires et WAXS des cristallites impose que ces grains, une fois formés, sont entourés de solvant et pas d’amorphe. Sinon, ils seraient pas visibles au SAXS. Par conséquent, nous pouvons penser à deux scénarios : soit les grains primaires se forment à partir de précurseurs libres en solution dû à l’équilibre de précipitation, soit ils résultent de la cristallisation des objets amorphes de 1.5 nm détectés dans le précipité initial (Figure 68-2). La nuance dans ce dernier point est que, localement, cet objet amorphe se densifie légèrement et adopte une forme relativement sphérique. Par conséquent, il est entouré de solvant et le contraste est suffisant pour qu’il soit détecté en SAXS. Ce qui ne serait pas le cas si une fraction interne d’un volume amorphe cristallisait.

Finalement, ces grains primaires s’agrègent en nanoparticules plus massives. Celles-ci grossissent au cours du temps à la fois par ajout de grains libres en solution et par fusion de petits agrégats de grains (Figure 68-3). Cette étape se déroule en parallèle de la production des grains primaires. Il y a donc de l’amorphe structuré, des grains libres et des nanoparticules agrégées en solution. Les clichés MET des échantillons finaux, présentant une probabilité importante d’avoir des grains au sein d’une même particule en axe de zone, tendent à dire que cette agrégation n’est pas purement aléatoire. Elle est partiellement orientée. De plus, la taille finale de ces nanoparticules semble être contrôlée par un processus non identifié d’interaction entre les grains. Une des pistes est qu’il existe un potentiel attractif entre les grains qui se transforme en potentiel répulsif au-delà de 10 grains. De cette façon, l’agrégation limitée en particules d’environ 1000 grains peut être justifiée.

En parallèle, les grains primaires continuent de mûrir et de devenir de plus en plus anisotropes. Par conséquent, les nanoparticules obtiennent une forme sphéroïdale (Figure 68-4). Cette poussée, dans une direction préférentielle, peut être la raison de l’alignement des grains.

Conclusions

Dans cette première partie, nous avons étudié la formation de nanoparticules d’YVO4:Eu par

suivi cinétique d’apparition de fluorescence et de signal de diffusion des rayons X. L’objectif était de résoudre leur mécanisme de formation en se basant sur ces différentes mesures au cours du temps. Pour cela, la structure des objets finaux issus de cette synthèse a été caractérisée finement par ces mêmes techniques. Les nanoparticules ont une structure à deux niveaux. Elles sont vues comme étant des agrégats de 40 nm formés de grains primaires 5 nm. Chacune de ces deux unités a une forme légèrement anisotrope et peut être résolue par des mesures de diffusion des rayons X.

En revanche, le temps d’acquisition nécessaire à ces mesures est trop important pour effectuer un suivi cinétique de formation de ces particules en laboratoire. Il a donc été réalisé un ralentissement de cinétique par ajout de base dans la solution de précurseurs en orthovanadate. Les objets obtenus en réalisant ces synthèses ralenties ont été caractérisés et comparés aux particules standards. Les structures sont comparables : les particules peuvent toutes être vues comme des agrégats de grains primaires. Bien que le ralentissement de cinétique tend à faire croître en taille les grains ainsi que les nanoparticules, le mécanisme de formation de ces objets ne nous a pas semblé sensiblement changé en ajoutant de la base. C’est pourquoi nous avons effectué un premier suivi par diffraction des rayons X et imagerie électronique par prélèvement d’une synthèse ralentie au cours du temps. Les résultats obtenus nous ont permis de proposer une hypothèse concernant la formation des grains primaires. Ils apparaissent et atteignent très rapidement une taille 5 nm et ne grossissent pratiquement pas ensuite. En revanche, le suivi de formation par diffusion des rayons X de cette cinétique ralentie n’a pas été concluant. Le rapport signal sur bruit au laboratoire était encore trop faible.

Nous avons donc décidé de nous déplacer sur synchrotron afin de suivre la structuration de ces particules au cours de leur formation. L’avantage principal de ce grand instrument est que son flux de photons est très important. Il a donc été possible d’effectuer ce suivi sur la synthèse standard. Après une quantité importante de traitement de données, nous avons confirmé que les grains primaires n’évoluaient pratiquement pas en taille une fois qu’ils étaient détectés et que les nanoparticules grossissaient au cours du temps. Le mécanisme de formation de ces nanoparticules proposé est une agrégation limitée. De plus, l’analyse du précipité initial aux temps courts a permis d’identifier une structure polymérique présentant deux tailles caractéristiques et de proposer des hypothèses sur sa formule chimique. Un passage de cet amorphe structuré en cristallites d’YVO4:Eu par déshydratation est envisagé. Toutefois,

l’existence d’un lien direct entre la structure de l’amorphe et la taille des grains n’a pas pu être clairement montrée. C’est probablement dans cette direction qu’il faut chercher pour pouvoir modifier la synthèse pour obtenir des particules très poreuses ou très bien cristallisées.

Perspectives

Plusieurs pistes d’études ont été envisagées pour la suite de ce travail. Les deux principales sont présentées rapidement ci-dessous.

1-L’idée d’avoir un lien direct entre la structure de l’amorphe initial et les grains primaires finaux est intéressante. Elle pourrait par exemple expliquer les différences structurales constatées avec la marque du précurseur en orthovanadate. Ce qui a été remarqué pour le moment à ce sujet est que la taille finale des nanoparticules est identique mais les cristaux internes sont plus ou moins gros. La mesure de diffusion d’une synthèse réalisée avec un précurseur Aldrich, menant aux grains les plus gros, est tracée en Figure 69.

Figure 69 : Diagramme de diffusion de nanoparticules YVO4:Eu fabriquées à partir de précurseurs Aldrich.

Sur cette mesure, aucun grain primaire n’est visible et les domaines de cohérence extraits du WAXS sont proches de la taille de la nanoparticule. Expérimentalement, l’aspect visuel du précipité initial est différent. Il semble beaucoup plus floconneux que pour les synthèses utilisant le précurseur Acros, discutées dans le corps de la partie I. Les résultats actuels ne sont pas suffisants pour expliquer les raisons de ces différences structurales. Il serait intéressant de creuser dans cette direction liant le précipité initial et les grains finaux afin de pouvoir guider la synthèse vers une structure plus ou moins bien cristallisée.

2-D’un autre côté, le suivi cinétique par la technique de diffusion présentée dans la première partie de ce manuscrit peut être appliqué à d’autres particules à structures comparables comme par exemple des particules de ZrO264 ou TiO2 afin de pouvoir décrire leur mécanisme de

formation. Le diagramme de diffusion de particules de dioxyde de titane présentant une structure hiérarchique a été mesuré. Il est présenté ainsi qu’un cliché MET de ces particules en Figure 70.

Figure 70 : Diagramme de diffusion de rayons X et cliché MET des nanoparticules de TiO2.

Ces particules de TiO2 présentent une structure hiérarchique comparable aux nanoparticules

d’YVO4:Eu étudiées. Elles seront utilisées en tant que matériau modèle dans la partie suivante