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Étymologiquement, le mot comique désigne à partir de 1531 sous la forme adjectivale « ce qui possède un rapport au théâtre et à la comédie » (cf. l‟ouvrage « comiques » de Raoul de Presles). Cette définition est un emprunt au terme latin de Comicus. En 1689, le sens de ce mot s‟affine et signifie un peu plus exactement « ce qui attire le rire, et ce qui est plaisant » d‟après une définition citée dans l‟esthétique de Richter.

Charles Baudelaire qui parcourt les fêtes foraines observe les facettes de la comédie et de la tragédie à l‟intérieur même de ce qui convient d‟appeler la réalité :

« Le comique est, au point de vue artistique, une imitation ; le grotesque, une création. Le comique est une imitation mêlée d‟une certaine faculté créatrice, c'est-à-dire d‟une idéalité artistique »1.

Le comique serait l‟imitation de la réalité. Quant au grotesque, celui-ci fait effectivement appel à l‟imagination lorsqu‟il réunit toutes les déclinaisons de la vie pour juxtaposer les règnes végétaux et animaux ainsi que minéraux en un ensemble mixte. Ce que le surréalisme fait par ailleurs aussi, mais dans une moindre mesure.

Le sujet comique qui se veut discret par principe ne l‟est absolument pas. Il se fait remarquer malgré son fait parce qu‟il exprime autour de lui un profond déséquilibre. Ce déséquilibre lui appartenant et étant son objet à lui, est inséparable et inaltérable au fil du temps. Bien qu‟il ne se sente pas non plus moralement supérieur aux autres, l‟être comique ne peut également s‟empêcher d‟être dédaigneux et de se moquer de la solennité. Ce qu‟il n‟arrive pas à dissimuler est pallié par le narcissisme dont il fait preuve pour exister et trouver une quelconque raison à poursuivre sa vie. Autrement dit, l‟homme comique est sans honneur, c‟est-à-dire qu‟il demeure infiniment sage face aux luttes violentes induites par la société. Il répond à l‟absurde de la vie par l‟ironie, en échappant ainsi à certaines valeurs humaines qui lui sont inaccessibles. Il reste maître à son bord en décidant de ne pas accoster sur d‟autres côtes que les siennes.

Il est tout aussi vrai qu‟à lire attentivement les poètes surréalistes, ceux-ci peuvent réunir et nourrir les contradictions les plus embarrassantes, contraire à leur volonté de se

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débarrasser des oppositions antithétiques traditionnelles. Là où le comique surgit à travers leurs écritures, une forme de conscience du monde réel peut apparaître. En conséquence, ni rire, ni pleurs ne sont issus de l‟expérience comique, mais davantage des états psychologiques nés de la tristesse et de la mélancolie :

« Pour la critique française de l‟époque, si Dada était la négation de tout, les surréalistes, eux, n‟étaient pas négation totale, mais ils apportaient en échange un état maladif de la conscience. De plus, les surréalistes se réclamaient de Freud, étaient considérés, non pas comme ses admirateurs, mais bien comme des gens à soigner. »1

L‟objet comique se joue des apparences. Nous préférerons donc le définir comme l‟expression de l‟intériorité même de l‟homme et délivrant une part de sa vérité. Le comique offre au spectateur, selon Sigmund Freud, un plaisir préliminaire à l‟humour et au rire qui en découle. Ce plaisir tire pleinement partie du jeu de fiction(s) que l‟être comique élabore au sein de son imaginaire. Craindre et imaginer entre autres sa chute, sans y être confronté, suscite un réel plaisir chez cet être. À entendre Freud, ce plaisir serait nécessairement toujours présent avant le bon jeu de mot:

« Le comique produit ici tout à fait l‟effet d‟un plaisir préliminaire qui nous séduit, et ainsi nous pouvons comprendre que bien des mots d‟esprits soient à même de renoncer totalement au plaisir préliminaire produit par les moyens habituels du mot d‟esprit et ne se servent que du comique comme plaisir préliminaire2. »

Le genre comique est un genre latent qui anticipe le débordement de la raison.

La revue mensuelle « La révolution surréaliste » retranscrit un échange entre André Breton et la photographe française Suzanne Muzard (1900-1992) à la rubrique « dialogue en 1928 », où est définie de manière aphoristique l‟absence de l‟être :

« « B » : Qu'est-ce que l'absence ? « S » : Une eau calme, limpide, un miroir mouvant. »3

1 A. Masson : Le Vagabond du surréalisme, op.cit., p. 67. 2 S. Freud : op.cit., p. 279.

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L‟effet comique peut être considéré, suivant cet extrait du « dialogue en 1928 », comme une absence tendant vers une présence, tandis que le genre tragique semble être une présence qui tend vers une absence. La forme comique approche la vie de manière décalée, elle s‟installe dans le non-vivant pour créer des corps mixtes (cf. les tableaux de Magritte). L‟objet/sujet comique approche toute sa vie d‟une présence existentielle qu‟il brûle de connaître. Dans le genre tragique, c‟est la vie, qui, par peur d‟être reprise trop tôt, se heurte à la mort. La fiction s‟installe au cœur du dialogue entre les idées et leurs possibilités sous-latentes mais jamais entrevues. Le genre comique s‟imprègne d‟une anxiété constante à propos de la vie :

« L‟abolition momentanée du monde réel confère au sentiment comique son caractère spécifique : la conscience de la réalité est en effet inséparable d‟un sentiment de crainte et d‟angoisse, qui, pour être diffus et enfoui dans l‟ombre du subconscient, n‟en imprime pas moins à l‟âme humaine une obscure et vague inquiétude ; c‟est de cet élément de crainte de la vie que le comique délivre1. »

Le rire délivre l‟homme comique de la crainte qu‟il éprouve sur le déroulement de sa vie. Certes, le corps exprime l‟angoisse de la conscience, mais uniquement grâce au miroir de l‟âme réfléchissant ses troubles à l‟extérieur (cf. l‟échange précédemment cité entre André Breton et Suzanne Muzard). Le personnage ou la chose comique est donc réfractaire à la vie. L‟essence de l‟irréalité constitue une vie construite et faite à partir du « rien ». Le sujet comique se dirige vers l‟existence malgré l‟angoisse de la vie. Le comique délivre de l‟angoisse : il devance le réel.

La crainte et l‟angoisse, véritables aiguilles de l‟identité comique, influencent le comportement de l‟homme. Celui-ci projette à l‟intérieur de son esprit des images fausses à partir des raisonnements erronés de sa part. Ces erreurs apparaissent comme étonnamment voulues et fabriquées de toutes pièces parce que calmant l‟anxiété. En faisant cela, l‟homme comique peut croire plus facilement en la fausseté même de sa perception des choses et des gens. La conséquence de cette bizarrerie est la prédominance d‟une réalité imaginaire en rupture avec le monde. Claude Saulnier définit le sens comique tel le « luxe du réflexe psychique » :

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« Le comique qui s‟amuse de la fiction, la considérant comme telle, est le luxe de la fiction : c‟est une fiction de fiction. Le jeu esthétique y est poussé à l‟extrême, puisque, plus que l‟art encore, qui cependant offre le cas unique d‟une émotion de luxe, fiction de la réalité, détournée de toute fin pratique, immédiate, le comique, fiction de la fiction, est encore plus inutile : c‟est « le luxe du réflexe psychique »1. »

La fiction de la fiction définie par Claude Saulnier consiste pour le sujet dit « comique » à croire en l‟image fausse de la fausseté même. La psychanalyse du genre comique nous apprend que l‟homme se trompe doublement, telle une répétition fatale d‟appréciation. L‟homme comique ne sait pas apprécier le monde tel qu‟il existe.

La source du comique est, selon le penseur français Claude Saulnier (XXe siècle)2, l‟irréel. À l‟instar de l‟effet obtenu par le comique, l‟irréel consiste en une amplification d‟une crainte fictive chez le sujet. La crainte du sujet ne devient finalement comique que lorsqu‟elle se dégonfle tel un ballon de baudruche. Si elle vient à se confirmer, alors le tragique l‟emporte. L‟angoisse est l‟ingrédient nourrissant la réaction comique de l‟homme à propos du monde qui l‟entoure. Saulnier déclare ainsi :

« La source du comique est l‟irréel. Cela se comprend facilement, si l‟on reconnaît, d‟une part, que « toutes les émotions sont en rapport avec la crainte ou le désir d‟assurance » et que, d‟autre part, l‟attente du rieur est inspirée « par la crainte et non par l‟espérance ». L‟étrange est une invitation à la peur : la peur est manquée, si l‟étrange s‟avère irréel. Mais le familier aussi est une source de comique, parce que son manque d‟autonomie peut le faire paraître sous les aspects d‟un moins de vouloir : il devient irréel aussi, par rapport au rieur3. »

fig.30. Diffusion non autorisée. René Magritte, Le monde poétique II. Huile sur toile, 1926, 98,2 x 74 cm.

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C. Saulnier : Le Sens du comique, Paris, Librairie philosophique J. Vrin, 1940, p. 76-77.

2 Comme au sujet de Marc Chapiro, très peu d‟informations sont diffusées autour de cet auteur, notamment

en ce qui concerne sa biographie.

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Tout comme la vision comique qui s‟illustre ci-dessus, c'est-à-dire qui englobe et comprend un tout fictif produit de l‟imagination, la vision surréaliste se situe au-dedans de l‟univers. La vision comique est cosmique, au sens où elle ne s‟éteint jamais et comprend les inclusions des choses les unes à l‟intérieure des autres. Dans une lettre adressée au Pape, le groupe surréaliste écrit :

« C'est avec l'œil du dedans que je te regarde, ô Pape, au sommet du dedans. C'est du dedans que je te ressemble, moi, poussée, idée, lèvre, lévitation, rêve, cri, renonciation à l'idée, suspendu entre toutes les formes, et n'espérant plus que le vent1. »

« Le réflexe psychique » permet donc à la figure comique de compenser son manque de présence dans le monde, grâce à une activité purement intellectuelle. L‟être comique assimile discrètement et sans partage des idées que lui communique la société. L‟être comique incarne un monde autonome soutenu par de la fiction. Le théoricien prussien St Schütze (XIXe siècle) écrit parallèlement à l‟idée d‟irréalité inhérente au phénomène comique :

« Le comique est une aperception ou une conception, qui éveille par moments la sourde conscience que la nature se joue sereinement de l‟homme, quand il croit agir en toute liberté ; de sorte que son indépendance restreinte est tournée en dérision par rapport à une liberté supérieure2. »

Le sujet comique reste inhibé au stade premier de sa vie, c'est-à-dire au stade narcissique. Il n‟aspire ni à la vie ordinaire ni à la mort, mais se complait dans son jeu erroné où le « hasard objectif » règne en maître et anime ses idées et ses rêves. À l‟irréalité comique coïncide l‟imprégnation du Moi dont elle dépend étroitement et une tendance appuyée à la mélancolie dont l‟être se drape. Elle enlace de la sorte une réalité étendue, avançant sous le couvert du sérieux et de la répétition pour mieux marteler l‟ennui de l‟existence, prometteur d‟une régénération.

La pensée comique cherche un recoin où se reposer, où arrêter son flot :

1 La Révolution surréaliste, N°3, op.cit., p. 17. 2

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« Ce qui en moi fut indéniable, je n‟ai jamais eu la tentation d‟en faire part à qui que ce soit. Au contraire l‟instable, l‟inquiet exigent une proclamation. La pensée en mouvement ne désire rien de plus que se figer dans une forme, car, de l‟arrêt marqué, naît l‟illusion de ce définitif dont la recherche est notre perpétuel tourment1. »

L‟incomplétude ou la désolation parsème le registre comique. La réalité comique n‟arrive pas à s‟ériger convenablement, captive de la fixité des signifiés ordinaires. L‟autre singularité de la pensée comique est qu‟elle demeure une pensée narcissique, ne délivrant aucun sentiment de partage, mais au contraire de distance :

« La pure et simple acceptation d‟« un cavalier monté sur son cheval » (le cavalier courrait léger monté sur son cheval), et les suppositions que cela implique (idées inhérentes de vélocité, de position horizontale du cheval et verticale du cavalier, etc.), apparaît à notre esprit comme quelque chose de tout à fait irréel et confus, au moment où nous jugeons ledit ensemble par nos seuls instincts2. »

Au lieu de former des agrégats de sens, la combinaison comique des signifiés ne se réalise pas, au contraire, elle s‟écroule. Cet écroulement est directement lié au fait qu‟il n‟y a pas de dynamique préexistante au sein même de l‟irréalité. Ce qui fonde une réalité se trouve présent dans le réel. Il faut donc de la grandeur pour constituer une entité réalistique qui puisse devenir autonome.

L‟homme comique reste superficiel, et peut-être aussi par bien-être personnel dans le commencement permanent d‟une vie. Chez cet être, aucune entrée en relation n‟est envisagée avec le monde. La vie sommeille en lui, mais ne s‟y réveille jamais. Au contraire, il est davantage absent de la réalité qui l‟entoure :

« Je ne peux pas me reposer, ma vie est une insomnie, je ne travaille, je ne dors pas, je fais de l‟insomnie, tantôt mon âme couchée sur mon corps debout, mais jamais il n‟y a sommeil pour moi, ma colonne vertébrale a sa veilleuse, impossible de l‟éteindre. Ne serait- ce pas la prudence qui me tient éveillée, car cherchant, cherchant, et cherchant, c‟est dans tout indifféremment que j‟ai chance de trouver ce que je cherche puisque ce que je cherche je ne le sais3. »

1 R. Crevel : Mon Corps et moi, op.cit., p. 52. 2 S. Dali : op.cit., p. 89.

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De même, le besoin de consumer la vie ne se fait nullement ressentir. Le salut et l‟idéal comique sont l‟oubli, l‟inaccomplissement et le vide. La figure du rêveur solitaire est un bon exemple de genre comique. Celui-ci, lorsqu‟il est en proie à ces propres angoisses provenant d‟une réalité qu‟il ne peut ignorer, oublie un peu plus qui il est et laisse l‟univers diriger son être. En cela, la réalité peut être source de comique lorsque celle-ci anime le caractère vivant d‟un être qui ne l‟est point. Cet effet d‟illusion émanant de la réalité suscite le sourire :

« L‟homme isolé lui-même parcourt aujourd‟hui trop d‟évolutions intérieures et extérieures pour qu‟il ose s‟établir, rien que pour sa propre existence, d‟une façon durable et une fois pour toutes1

. »

Le genre comique voit naître des êtres sensibles dépourvus d‟attaches avec le monde, et qui néanmoins en font partie. La vie menée par l‟individu comique se résume donc à une solitude assumée, malgré la traversée incessante et angoissante qu‟il connaît à travers l‟altérité. De ce constat répétitif, nous pouvons ajouter que seule l‟intellection leur est d‟un grand secours pour voyager au sein même de la réalité. Artaud écrit effectivement dans « L’activité du bureau de recherches surréalistes » en 1925 :

« Entre le monde et nous la rupture est bien établie. Nous ne parlons pas pour nous faire comprendre, mais seulement à l‟intérieur de nous-mêmes, avec des socs d‟angoisse, avec le tranchant d‟une obstination acharnée, nous retournons, nous dénivelons la pensée2. »

La figure du personnage comique se bâtit à partir d‟un relâchement :

« Le vide et le rien ne cesseront de lui imposer leur loi. Il aura à apprendre que prendre le pouvoir signifie aussi le perdre, et que sa fin n‟est pas tragique, car la tragédie a déjà pris fin3

. ».

À l‟aune du surréalisme, le comique résulte d‟une non-saturation du corps. C‟est ce profond déséquilibre qui fait tanguer le personnage dans sa représentation poétique :

1 F. Nietzsche : Humain, trop humain, Paris, Librairie Générale, 1995, p. 53. 2 A. Le Brun : op.cit, p. 104-105.

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« Il est alors en lutte non plus avec un ensemble égal à celui qu‟il représente, mais avec le néant. En tant qu‟il est un monstre Ŕ assumant légèrement ce péché. L‟homme n‟est plus comme la bête le jouet du néant, mais le néant est lui-même son jouet Ŕ il s‟y abîme, mais en éclaire l‟obscurité de son « rire », auquel il n‟atteint qu‟ « enivré » du vide même qui le tue1

. »

L‟inexistence du sujet est la résultante la plus marquante du genre comique. Cette inexistence est difficile à appréhender car elle doit être comprise non comme une fatalité, mais au contraire, comme la chance d‟une vie laissée sans accomplissement. Métaphoriquement l‟on pourrait dire qu‟il s‟agit là d‟une vie vierge, se tenant au seuil de l‟existence et écoutant tout ce qui se passe de l‟autre côté. Seul le détournement nourrit l‟être comique. C‟est l‟un des aspects qui peut notamment résoudre le pourquoi de l‟attitude sérieuse et de l‟autosuffisance comique.

L‟absence d‟être possède une valeur comique lorsqu‟elle se concrétise aussi par la lassitude que provoque la répétition des signes qui façonnent le monde. L‟originalité, voilà ce qui ravive les êtres comiques. Les êtres comiques veulent échapper à la banalité qui les a déjà engloutis :

« Échapper, dans la mesure du possible, à ce type humain dont nous relevons tous, voilà tout ce qui me semble mériter quelque peine. Pour moi, se dérober, si peu que ce soit, à la règle psychologique équivaut à inventer de nouvelles façons de sentir2. »

L‟ironie du sort voudrait ainsi que le sujet comique ne puisse jamais se connaître, portant en lui la réponse à son identité qui ne cesse de lui échapper constamment. Il envoie aux autres la clé de sa propre solution mais ces derniers ne la lui rendent pas :

« Révolution de cette contradiction apparente par l‟idée du sacré en tant que communication, projeter au dehors, donner en partage ce que l‟on a de plus intime ; ce « soi » le plus secret, le projeter « hors de soi »3. »

1 G. Bataille : op.cit., p. 109.

2 A. Breton : Les Pas perdus, op.cit., p. 15. 3

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Le regard que les autres lui portent lui fait très gravement défaut, car il diffuse un sentiment frôlant la négation. Ce que l‟homme comique ne parvient à ressentir dans sa relation avec l‟univers, l‟homme tragique lui, le ressent pleinement. Le personnage au caractère comique, pour autant qu‟il ait un caractère, démasque les énigmes cachées par la nature dans son impossible parcours mené vers Soi :

« Je prends conscience, je crois, quand je ne suis plus sur les traces des autres, sur des traces, ou quand je ne suis plus moi-même à ma propre suite. Je reviens aux sources, à la source. Je me ressaisis. Tout est illusion, nous dit-on. Je dirais plutôt que tout est illusions.

fig.31. Diffusion non autorisée. René Magritte, Perspective 2. Huile sur toile, 1950, 81 x 60 cm.

René Magritte qui peint Perspective 2 (1950), renvoie directement à l‟œuvre du Balcon de Manet. L‟œuvre originale fut critiquée en son temps pour sa composition trop moderne, où les barreaux du balcon prirent une place tout aussi importante que les personnages eux-mêmes. L‟œuvre fut composée d‟une façon semblable au cadrage que proposait déjà la photographie. Magritte fait tomber un voile thanatique sur chaque protagoniste. La vie semble subsister toujours immanquablement au travers de chaque cercueil, par effet de superposition entre l‟œuvre originale et la parodie :

« La simple présence théâtralisée du corps ne suffit pas. Encore faut- il que celui-ci accomplisse physiquement certaines actions pour que la magie de la mise en scène puisse avoir lieu1. »

Seule démarche possible car on ne peut créer un avant et un après Manet. Les