1.2 Théorie des champs continus de désinclinaisons et de dislocations
1.2.5 Lois d’élasticité, équilibre mécanique et champs élastiques dus
α=−rot(1
2 (α×V
α+ (α×V
α)
t)) + (θ×V
θ)
t−tr(θ×V
θ)I. (1.100)
L’équation ci-dessus est de la forme :
˙
α=−rotε˙
p+S
θ. (1.101)
L’équation1.101 est l’équation de transport des densités de dislocations dans la
théorie des champs de dislocations et de désinclinaisons [Fressengeas,2011a].
L’équa-tion1.101 montre l’apparition d’un terme source de nucléation ou d’annihilation de
densités de dislocationsS
θdû à la mobilité des désinclinaisons. Ainsi, le mouvement
des désinclinaisons engendre une nucléation ou une annihilation de dislocations.
Nous allons montrer plus loin dans ce chapitre l’importance de ce terme pour la
modélisation des mécanismes de migration des joints de grains [Taupin,2014]. On
pense aussi que ce terme permet de modéliser la nucléation de dislocation depuis
les joints de grains ainsi que l’absorption. Ce terme peut également participer à
la relaxation des champs de contraintes internes au voisinage des désinclinaisons
[Romanov,1992, Kleman,2008].
1.2.5 Lois d’élasticité, équilibre mécanique et champs
élas-tiques dus aux désinclinaisons
Comme nous considérons non seulement les déformations élastiques mais aussi
les courbures élastiques, nous prenons maintenant une densité d’énergie élastique
sous la forme :
ψ =ψ(
e,κ
e). (1.102)
Le volume est donc vu comme continu et capable de transmettre des contraintes
et des moments de contraintes même à l’échelle inter-atomique. En différentiant la
densité d’énergie, on peut identifier les tenseurs de contraintes et de moments de
contraintes avec les dérivées partielles de l’énergie :
˙
ψ = ∂ψ
∂
e: ˙
e+
∂ψ
A cause de la symétrie du tenseur des déformations élastiques, seule la partie
symétrique du tenseur des contraintes contribue à l’énergie. C’est le tenseur des
contraintes de Cauchy. Le tenseur des moments de contraintes est déviatorique car
la trace du tenseur des courbures est nulle. Ainsi, les lois constitutives peuvent
s’écrire [Upadhyay,2013] :
T
sym= C:
e+D:κ
e(1.104)
M
dev= A:κ
e+B:
e. (1.105)
A, B, Cet D sont des tenseurs d’élasticité. Alors que les modules C
ijkletA
ijklont la dimension d’une contrainte et d’une contrainte multipliée par une longueur
au carré, les modules B
ijkland D
ijklont la dimension d’une contrainte multipliée
par une longueur. Ainsi, les relations 1.104 et 1.105 impliquent des longueurs
in-ternes caractéristiques et ont un caractère non local. En effet, le tenseur D induit
des contraintes dues à une inhomogénéité de rotation sur une faible longueur alors
que le tenseur B induit des moments de contraintes dues à une inhomogénéité de
déformation également sur une faible longueur. Dans le cadre de l’élasticité isotrope
homogène et linéaire, une forme pour ces tenseurs d’élasticité a été récemment
pro-posée [Upadhyay,2013]. Un résultat important est que les tenseursB etDsont nuls
si on fait l’hypothèse de centrosymétrie. Ceci suggère que ces tenseurs sont non nuls
au niveau des défauts cristallins, là où la centrosymétrie cristalline est rompue. Nous
reviendrons sur ce point et sur les lois d’élasticité lors du chapitre 3. En l’absence
de forces de volumes et d’effets d’inerties, les équations d’équilibre mécanique sont :
div T = 0 (1.106)
div M
dev+ 2T~ = 0. (1.107)
Ce sont des équations d’équilibre typiquement utilisées dans les milieux de
Cos-serat. Le tenseur des contraintes T contient une partie symétrique T
symqui est le
tenseur de Cauchy et une partie antisymétrique T
skew. Cette dernière s’écrit
éga-lement sous forme de vecteur T~ = −1/2T : X et permet d’équilibrer les moments
de contraintes. La partie antisymétrique T
skewdu tenseur des contraintes
n’inter-vient pas dans l’énergie et n’est pas constitutivement spécifiée. La résolution des
équations d’équilibre 1.106 et 1.107 fait intervenir les tenseurs de déformation et
de courbure totales. Ces deux tenseurs sont compatibles et dérivent du
déplace-ment matériel. Le vecteur déplacedéplace-ment matériel fournit donc trois degrés de liberté
indépendants pour résoudre six équations. Il manque donc trois degrés de liberté
[Shu,1999]. En se basant sur les travaux de Mindlin et Tiersten [Mindlin,1962], les
trois degrés de liberté nécessaires sont les composantes du vecteur contraintesT~.
Au-trement dit, les composantes antisymétriques du tenseur des contraintes sont non
nulles lorsque la divergence du tenseur des moments de contraintes est non nulle
et servent donc à compenser ce déséquilibre [Hadjesfandiari,2011]. En prenant le
rotationnel de l’équation 1.107 et en éliminant T
skewdans l’équation 1.106, cette
dernière peut être réécrite comme une seule équation d’ordre supérieur :
div T=div T
sym+div T
skew=div T
sym+1
2curl div M
dev
=0, (1.108)
En termes de déformations et de courbures élastiques, on a :
div(C:e+D:κe) + 1
2curl div(A :κe+B:e) = 0. (1.109)
En utilisant finalement la décomposition de Stokes Helmholtz pour les
déforma-tions et les courbures, on obtient l’équation :
div(C: (
ke+
⊥e) +D: (κ
ke+κ
⊥e)) +1
2curl div(A: (κ
k
e
+κ
⊥e) +B : (
ke+
⊥e)) =0,
(1.110)
où l’inconnue est le vecteur déplacement qui intervient dans les déformations et
courbures élastiques compatibles. Les courbures et les déformations élastiques
in-compatibles proviennent d’une distribution de densités de dislocationsαet de
dés-inclinaisonsθ non nulle. Enfin, dans un contexte dynamique, l’équation d’équilibre
1.109 peut aussi être écrite en remplaçant
epar (−
p) et κ
epar (κ−κ
p).
Ini-tialement, les déformations et les courbures plastiques sont purement incompatibles
et sont égales à l’opposé des parties élastiques. Les déformations et les courbures
plastiques évoluent ensuite avec le mouvement des densités de défauts. La figure1.8
montre le champ de contrainte et de moment de contrainte d’un dipôle de
désin-clinaison coin [Taupin,2013]. On retrouve bien un champ de contrainte proche de
celui d’une dislocation coin. En revanche, les moments de contraintes sont différents
car les courbures élastiques ne sont pas les mêmes et sont notamment incompatibles
alors qu’elles sont compatibles pour une dislocation.
Figure 1.8 – Champs élastiques induits par un dipôle de désinclinaisons coins
[Taupin,2013]. La densité de dislocation est nulle. Le dipôle est constitué de densités
de désinclinaisons coinsθ
33négative (bleu) et positive (rouge). Les contours en noir
et blanc sur la figure de gauche montrent le champ de contrainte de tractionT
11(P a).
Les contours en noir et blanc sur la figure de droite montrent le champ de moment
contrainte de flexionM
31(P a.m).
Dans le document
Modélisation de l’interaction des coeurs de dislocations et des joints de grains
(Page 64-67)