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Limites des stratégies d’adaptation de la ville à l’échelle urbaine « micro »

CHAPITRE 1 Enjeux contemporains du climat, réchauffement climatique et vagues de

1.5 Limites des stratégies d’adaptation de la ville à l’échelle urbaine « micro »

Les stratégies et les dispositifs présentés dans ce chapitre nous ont permis de poser un cadre général du sujet, de présenter l’origine du problème et les solutions avancées.

Bien que les situations simples et les études isolant un phénomène climatique ou une stratégie de rafraîchissement particulière donnent des résultats plus précis (Kuismanen, 2008), les interactions entre les phénomènes climatiques ne permettent pas une considération isolée des phénomènes ni une différenciation des dispositifs nette et définitive. Certains dispositifs de rafraîchissement appar-tiennent aux deux familles des dispositifs à la fois. Par exemple, un bassin d’eau est une source de fraîcheur qui diminue la température de l’air et augmente l’humidité, et en même temps réduit le stockage de chaleur dans le sol par la modification des propriétés radiatives du revêtement. De même, un arbre apporte de la fraîcheur et réduit le stockage de chaleur dans le sol par l’ombre

pro-jetée. Aussi, l’introduction d’un élément spatial censé adapter la ville aux conditions estivales chaudes, par exemple le revêtement réfléchissant, peut perturber les échanges thermiques locaux conduisant à des conditions inconfortables. Ainsi, l’introduction des dispositifs de rafraîchissement dans le milieu urbain doit être réfléchie spécifiquement au regard du contexte et au regard des inte-ractions entre un grand nombre de facteurs climatiques.

En raison de la variété des objectifs de départ, les études considérant la pertinence des différents dispositifs et des stratégies d’adaptation de la ville prennent en compte différents paramètres et points de mesure des phénomènes climatiques, rendant difficile le travail d’analyse comparative des résultats (Oke, 2006). La plupart des études aborde les dispositifs et les stratégies d’adaptation de façon à évaluer leur efficacité à diminuer les effets globaux d’ICU dans la ville en réalisant des calculs basés sur les capteurs, la télédétection, ou encore les méthodes de simulation numérique. L’échelle « micro » est abordée de façon à étudier l’efficacité énergétique des dispositifs et stratégies, avec pour objectif leur multiplication pour influer sur le climat des espaces urbains plus vastes. Bien qu’une importance particulière commence à être attribuée aux stratégies d’adaptation à petite échelle et à leur impact sur le confort piétonnier, la perception du climat et le ressenti thermique du piéton sont rarement abordés.

Il se pose donc, dans un premier temps, la question de la définition d’une échelle encore plus petite que celle considérée dans les travaux de la climatologie urbaine, qui peut être nommée échelle « pi-co » puisqu’elle pi-concerne l’espace avoisinant le piéton et son ressenti subjectif face aux ambiances climatiques « confortables » assurées par la mise en place des dispositifs de rafraîchissement.

Dans les travaux de climatologie urbaine, l’efficacité des dispositifs est étudiée principalement à l’échelle urbaine « micro », « locale » et « méso » englobant les interactions entre le contexte clima-tique et les bâtiments (Figure 7). La plus petite échelle abordée dans les travaux de recherche est l’échelle « micro », définie différemment selon les auteurs et les études, sans limites strictes et inter-nationalement convenues (Thomas et Goudie, 2000). L’échelle « micro » est généralement considé-rée comme l’échelle d’une rue, d’une place ou d’un quartier, dont la hauteur s’étend de 1 cm à 10 mètres, la longueur entre 1 cm et 1 kilomètre, et la dimension temporelle qui varie entre 1 et 10 secondes (Yoshino, 1975 ; Oke, 1987). Ainsi, on peut citer les dispositifs considérés unanimement à l’échelle « micro » bien qu’ils se différencient considérablement par leur zone d’influence et par les effets sur le ressenti thermique du piéton, comme par exemple, les parcs urbains et les systèmes végétaux de type alignement des arbres, les ombrières et les parasols autoportants, ou encore, les fontaines et les brumisateurs.

Figure 7 Echelles spatio-temporelles concernées dans les études sur les phénomènes climatiques dans le milieu urbain. Le schéma illustre quelques exemples des phénomènes climatiques dynamiques : 1 – tourbillons méca-niques induits par les obstacles, 2 – vortex à travers les canyons ; 3 – recirculation turbulente de vent générée par un bâtiment ; 4 – plume de la pollution par des cheminées industrielles ; 5 – circulation de la brise dans un parc urbain ; 6 – système des brises entre milieu urbain et rural ; 7 – grandeur de la « plume » de l’îlot de cha-leur urbain. Source : Oke, 2006.

La distribution des dispositifs au sein de la ville peut être considérée à la lumière des notions de « land sharing » (urbanisation où les terres construites et l’espace naturel sont entremêlés) et « land sparing » (urbanisation compacte séparée des espaces verts préservés, larges et continus). Ces deux formes divergentes de développement urbain sont issues des débats sur la distribution spatiale des terres agricoles et la préservation de la biodiversité.

D’une manière analogique, les îlots de fraîcheur peuvent être introduits sous la forme « d’oasis » vastes et bien délimitées au sein de la ville, ou sous forme de « tremplins » ponctuels, en réseaux, et entremêlés avec de fortes densités urbaines.

D’après Stott et al (2015), la séparation des cadres naturels est cruciale pour la préservation des éco-systèmes, tandis qu’un certain partage des terres est nécessaire pour permettre un contact fréquent des habitants avec la nature. L’interconnexion entre les deux favorise le potentiel de biodiversité dans les espaces urbanisés, et par là même les cadres naturels étroits et ponctuels entremêlés dans le bâti (ou urbanisation extensive) influent sur la biodiversité à l’intérieur et au-delà des frontières d’une ville (Lin, Fuller, 2013 ; Baró et al, 2017).

Ainsi, un intérêt important pour l’application des mesures d’adaptation de la ville à une échelle ré-duite peut être illustré par le plan de développement de la ville de Barcelone20 favorisant le modèle de « land-sharing », ou encore par les travaux focalisés sur la valorisation et la mise en réseaux des lieux singuliers à petite échelle, comme une stratégie développée par l’Atelier Parisien d'Urbanisme (APUR, 2017).

Le potentiel des interventions architecturales et urbaines éphémères (à court terme) à une échelle réduite est également exploré en vue d’une amélioration de la qualité de vie dans la ville. L’accent est mis sur l’appropriation de l’espace, la cohésion sociale, les modèles « open-source » des actions et des projets architecturaux (Brenner, 2015). Il est considéré que les interventions « acupunctu-rales » sont caractérisées par une faible prise de risque, et qu’elles sont susceptibles de provoquer le débat sur les problèmes généraux et locaux de la ville contemporaine.

20 Barcelona City Council. 2013. « Barcelona Green Infrastructure and Biodiversity Plan 2020 ». [Plan del verd i de la biodiversidad de Barcelona 2020]. Medi Ambient i Serveis Urbans - Hàbitat Urbà. Document disponible sur le lien : https://w110.bcn.cat/MediAmbient/Continguts/Documents/Documentacio/BCN2020_ GreenInfraestructureBiodiversityPlan.pdf (consulté en juin, 2017).

CHAPITRE 2 Le climat urbain à l’échelle « pico » à travers la notion d’invite