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Limites et perspectives d’ordre microbiologiques relatives à l’étude de la pharmacodynamie des

Partie 3 : Discussion générale

1.4 Limites et perspectives d’ordre microbiologiques relatives à l’étude de la pharmacodynamie des

Il est démontré de longue date que les concentrations en anti-infectieux, pour être actifs doivent se rapporter aux valeurs de concentrations minimales inhibitrices des germes ciblés. Différents ratios PK/PD ont été décrits d’abord sur des modèles in vitro, puis chez l’animal pour ensuite être confirmés chez l’homme (229,264,270). Parmi eux se trouvent le ratio Cmax/CMI pour les antibiotiques concentration-dépendants, le temps passé au-dessus de la CMI pour les infectieux temps-dépendant et le ratio AUC/CMI pour les

anti-infectieux à action mixtes, temps et concentration-dépendantes. La connaissance de la CMI a donc une grande importance. Il a été précédemment suggéré que les infections les plus graves se doivent d’être traitées le plus rapidement possible mais un problème de poids émerge quand il s’agit de déterminer la CMI du germe incriminé. Premièrement, il n’est pas dit que le germe soit isolé lors du premier prélèvement microbiologique, avant l’administration des anti-infectieux. Ensuite, l’administration de traitement anti-infectieux avant prélèvement bactériologique peut « décapiter » l’inoculum et rendre difficile l’identification du germe pathogène en cause par inhibition de sa croissance. De plus, lorsqu’il s’agit de déterminer la sensibilité du germe vis-à-vis de l’agent anti-infectieux, surviennent de nouvelles problématiques : la fiabilité et le temps pour obtenir cette mesure. En effet, entre la réception du prélèvement par le laboratoire de microbiologie et la mise en évidence d’un germe par culture, il peut se passer plus de 24h (271). Ensuite, la détermination de la CMI peut être effectuée en 16-20 heures d’après la méthode conventionnelle (272). Pour l’heure, trois méthodes sont effectuées en routine pour déterminer la CMI : la microdilution en milieu liquide, sur gélose par la mesure des diamètres d’inhibition de disques d’antibiotiques ou par bandelette (E-test). Quoique les E-test semblent plus performants, certaines études montrent un certain manque de précision par rapport aux CMI mesurées par d’autres techniques (273-275). Outre la variabilité inter-technique, un autre problème est celui de la relative imprécision analytique de la mesure de la CMI. Pour la plupart des bactéries et des antibiotiques, quelle que soit la technique, la CMI rendue est entachée d’une imprécision de une à deux dilutions. Ceci fut l’objet d’un débat intéressant menant à la conclusion qu’une unique détermination de CMI individuelle ne peut facilement orienter la décision du clinicien (276-278). Ainsi, l’utilisation des CMI dites ECOFF (epidemiological cut-off) représentant les valeurs seuil distinguant une souche bactérienne sensible d’une souche phénotypiquement résistante semble actuellement la meilleure alternative, c’est à dire qu’il faut se placer dans ce scénario du pire en termes de CMI pour adapter la posologie des antibiotiques.

Afin de réduire le temps de rendu et peut être augmenter la précision de la détermination de la CMI, d’autres techniques sont en développement : le MALDI-TOFF (matrix-assisted laser desorption/ionization time-of-flight), qui après avoir révolutionné l’identification bactérienne par la production d’un spectre (de masse) bactérien, pourrait permettre de déterminer la sensibilité d’une souche par différentes approches, soit par identification de motifs spectraux différents entre souches sensibles ou résistants, soit par

étude de la lyse enzymatique des bêta-lactamines par les bactéries après un court temps d’incubation, ou soit par l’évaluation de la croissance bactérienne avant/après contact avec un antibiotique (incorporation d'acides-aminés radio-marqués ou mesure globale de la biomasse bactérienne produite) (279). D’autres méthodes sont en développement utilisant entre autres la biologie moléculaire (PCR) (280).Dans le cadre des hémocultures, l’EUCAST a récemment proposé une méthode capable de rendre des résultats en moins de 8h directement sur les flacons d’hémocultures (281).

Comme précédemment discuté, la définition des cibles PK/PD des aminosides reste encore incertaine. Semblant se situer entre un effet concentration dépendant utilisant le rapport Cmax/CMI et un effet exposition dépendante régit par le ratio AUC/CMI (231). Des investigations cliniques semblent encore nécessaires malgré le fait que cette classe d’antibiotiques soit connue de longue date. Mais de façon générale, il est à noter que ces ratios ne sont pas en mesure d’apprécier les autres caractéristiques des antibactériens comme de potentiels effets synergiques (aminosides/bêta-lactamines), rémanents (effets post-antibiotiques) ou l’effet inoculum qui ont été mis en évidence in vitro ou chez des modèles animaux. Ces modèles possédant leurs propres limites, il serait d’intérêt de pouvoir étudier ces caractéristiques anti-infectieuses par l’utilisation d’une nouvelle catégorie de modèles d’infection in vitro pour ensuite les traduire et les valider en situation clinique. Ces modèles s’appellent les modèles de culture bactérienne en fibres creuses (Hollow fiber infection models : HFIM) et se composent d’un circuit de fluides reliés par des récipients et actionné par des pompes. Au centre de ce circuit se greffe une cartouche à fibres creuses semi-perméables, asse semblable à un filtre de dialyse où il est ensemencé une souche bactérienne.

Le circuit pouvant alors s’apparenter à un organisme, il est possible, de contrôler les débits et volumes pour induire des modifications pharmacocinétiques simulant des profils humains et observer une potentielle décroissance bactérienne. Malgré qu’elle puisse être plus couteuse et plus encombrante qu’une étude PK/PD classique in vitro (environ 500€ la cartouche), cette technique reste assez aisée à mettre en œuvre ce qui a permis la publication de nombreux exemples (282). certaines se sont particulièrement focalisé au contexte réanimatoire en simulant la présence de clairance rénale augmentée (283,284). Mais une des limites majeures de ces modèles est l’absence de système immunitaire. Dans le cadre de la réanimation, cette limite est double car influe à la fois sur la réponse anti-infectieuse et induit des modifications

physiopathologiques de prise en compte complexe. Autre limite, il est également complexe d’étudier la fixation protéique ou la diffusion tissulaire dans ces modèles.

Une fois que les modèles PK/PD sont disponibles et valides, il serait néanmoins possible de les coupler à des modèles physiopathologiques de réponse immunitaire. Quoique théoriques et encore difficilement applicables à une situation individuelle, ils permettraient néanmoins une démarche exploratoire pour mieux comprendre les interactions entre eux sur le plan de la décroissance bactérienne. Mais ils relèveraient également d’un intérêt pour comprendre les modifications physiopathologiques induites par le développement du sepsis.

Ce pan de la recherche en pharmacologie est appelé la pharmacologie des systèmes (quantitative systems pharmacology QSP). Un exemple développé par notre équipe pour la tuberculose est un modèle mathématique combinant un modèle physio-pathologique de la tuberculose couplé avec un modèle thérapeutique (PK et PK/PD) au niveau pulmonaire pour la rifampicine et l’isoniazide par le biais d’un système à multiples équations différentielles (285,286). Leurs résultats, obtenus par simulations de diverses hypothèses biologiques ou thérapeutiques, ont pu mettre en évidence que l’éradication de la tuberculose était sous la dépendance de la dose journalière en anti-tuberculeux et propose qu’elle soit augmentée mais que certains individus n’étaient pas en mesure d’obtenir un effet anti-bactérien suggérant ainsi d’autres pistes autres que la résistance bactérienne ou variabilité pharmacocinétique. A ma connaissance, de tels modèles n’ont pas encore jamais été développés pour le sepsis mais des modèles physiopathologiques ont récemment été publiés (287,288), il ne reste plus qu’à les coupler aux modèles thérapeutiques.

1.5 Limites et perspectives d’ordre statistiques relatives à l’étude des