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3.1. Généralités

On peut considérer qu’une articulation élastique est mise en jeu à partir du moment où il existe un étranglement localisé au niveau d’un solide élastique. Dès lors, la rigidité de la pièce se retrouve localement diminuée et si celle-ci est placée sous contrainte mécanique, c’est au niveau de l’étranglement que se produit l’es- sentiel du mouvement. La forme et la combinaison de ces étranglements définissent la rigidité suivant les différents axes et par conséquent les degrés de liberté pour les mouvements des pièces reliées par ces articulations. La figure 4.3-a) illustre un mouvement de rotation privilégié, l’articulation étant alors équivalente à une liai- son pivot. La figure 4.3-b) donne l’exemple d’une combinaison permettant d’obtenir une liaison équivalente de type cardan. En robotique ou lorsque le positionnement précis est recherché, le dispositif de type glissière schématisé sur la figure 4.3-c) est très souvent utilisé (conservation du parallélisme).

Les articulations flexibles peuvent également être appelées « joints flexibles », car elles permettent de relier deux solides pour permettre leur mouvement relatif. Ces solides sont des éléments rigides, en comparaison à la plus grande déformabilité de leur liaison.

Les structures déformables à base d’articulations élastiques sont utilisées dans de très nombreux domaines, tant pour des mouvements macro ou microscopiques, en raison de la précision des déplacements, que pour la fiabilité, la facilité de fa- brication et le niveau d’intégration important qu’elles procurent. L’idée de mettre en mouvement relatif des éléments rigides par l’intermédiaire d’un ensemble de pivots flexibles semble très répandue dans l’automobile et l’aérospatiale pour des capteurs ou des accéléromètres [Hon06], le médical, pour des mécanismes de chirurgie peu invasifs [Kot05], les télécommunications ou l’optique, pour le positionnement précis d’antennes ou de miroirs [Bel00] ou pour tout ce qui a trait aux systèmes micro-électro-mécaniques (MEMS) de positionnement pour lesquels il existe une très grande quantité de brevets, ou bien encore la robotique [Hen00, Bac03].

Le concept de mécanisme flexible est quant à lui, vieux de plusieurs millénaires si l’on considère les structures flexibles où de l’énergie est accumulée dans un maté- riau déformable pour la propulsion de projectiles, comme les arcs ou les catapultes (les premières catapultes à ressort ayant été imaginées par Léonard de Vinci dans les années 1490). L’articulation flexible, en elle-même, est présente sur tous les livres présentant une couverture rigide.

Par contre les articulations flexibles telles qu’on les utilise aujourd’hui n’ont été étudiées de manière systématique qu’au milieu du vingtième siècle. Ainsi voit-on apparaître des méthodes de conception et de modélisation des articulations flexibles dans les années 60 avec Weinstein [Wei65] mais surtout Paros et Weisbord [Par65] qui proposent l’expression analytique d’un pivot flexible à étranglement circulaire. Quelques applications sont étudiées dans les années qui suivent, comme les travaux de Scire et Teague en 1978 [Sci78] qui combinent un actionneur piézoélectrique et un système d’amplification uniaxiale de type levier.

C’est surtout à partir de la fin des années 90 que la littérature se densifie. De nombreux modèles de différentes architectures d’articulations flexibles sont propo- sés dans différents pays, grâce à l’enthousiasme pour les MEMS, mais surtout à l’amélioration des calculs par éléments finis permettant les comparaisons avec les modèles analytiques [Het99, Smi92, Hen00, Xu96]. On peut noter deux courants différents dans l’approche de ces mécanismes avec Howell [How01], d’une part, qui propose l’idée d’un modèle pseudo-rigide permettant de simplifier les modèles pour faciliter le dimensionnement des structures, basé sur l’utilisation de coefficients cor- recteurs calculés numériquement. D’autre part, Lobontiu [Lob02], qui s’inspire des travaux de Paros et Weisbord, a une approche purement analytique des articu- lations flexibles et propose des méthodes de calcul des matrices de souplesse de pivots flexibles de sections circulaires, elliptiques, paraboliques ou hyperboliques.

3.2. Principaux avantages des pivots flexibles

Les différents auteurs cités précédemment s’accordent tous sur les avantages de l’utilisation des articulations flexibles, dans la mesure où elles sont utilisées dans un domaine élastique :

− ces mécanismes flexibles ont un fonctionnement similaire à celui d’un ressort, impliquant une réversibilité. L’application d’une force engendre un déplace- ment prévisible et précis et inversement, un déplacement donné engendre une force connue ;

− les forces mises en jeu au sein du matériau sont uniquement des forces élec- trostatiques au niveau des atomes, la résolution disponible est alors poten- tiellement très importante. De plus, la déformation se fait sans frottement, sans nécessité de lubrification, de manière continue, sans à-coups ;

− pendant la déformation, il n’y a aucun hystérésis ;

− la fabrication de pivots flexibles se fait par usinage dans la masse d’une pièce maîtresse de telle sorte que le mécanisme complet tient en un seul bloc, il est dit monolithique. Il n’y a donc pas d’assemblage, de vis ou de boulons, ce qui rend le mécanisme exempt de tout micro-déplacement parasite.

Cependant, des inconvénients existent, limitant leur utilisation dans les diffé- rents domaines. En effet, les angles des pivots flexibles sont limités par la contrainte maximale correspondant à la limite élastique du matériau. La rotation n’est pas parfaite car l’articulation est soumise à de multiples contraintes : cisaillement, flexion et compression. Le centre de rotation n’est donc pas fixe pendant la dé- formation. De plus, la sensibilité des matériaux aux variations de température engendre une modification des propriétés de l’articulation, notamment sa raideur. Enfin la modélisation analytique des articulations flexibles, et donc leur dimen- sionnement, ne constitue pas un problème mécanique simple.

3.3. Les profils de pivots flexibles

On trouvera dans la littérature deux formes extrêmes adoptées pour la concep- tion des pivots flexibles. La plus basique correspond au profil rectangulaire (Fig. 4.4-a). Cependant, l’étranglement circulaire (Fig. 4.4-c) est le profil le plus uti- lisé dans les mécanismes d’amplification des déplacements. D’autres formes ont été étudiées, comme par exemple les profils rectangulaires munis de congés 4.4-b), elliptiques 4.4-d) ou hybrides 4.4-e) [Che05].

L’utilisation de profils particuliers prend son sens lorsque l’on considère la préci- sion des déplacements ou les contraintes que subissent les articulations flexibles. En effet, il a été démontré [Xu96] que les profils circulaires permettent de bénéficier de la précision optimale car la déformation du joint se fait quasi parfaitement autour de son centre. En revanche, les contraintes sont concentrées au niveau de ce centre,

Fig. 4.4: Exemples de différents profils de pivots flexibles

Fig. 4.5: Axes de rotation privilégiés

où l’épaisseur du joint est minimale. Cela tend à réduire les efforts applicables au niveau de l’articulation. De plus, les profils circulaires possèdent une plus grande rigidité que les autres, ce qui limite également l’amplitude de la déformation.

Lorsque les contraintes s’éloignent du centre de l’articulation, la précision di- minue, mais la souplesse augmente. Le profil rectangulaire est le plus flexible, malheureusement la concentration des contraintes se fait au niveau des angles, ce qui le fragilise considérablement. L’utilisation de congés permet alors de mieux répartir les contraintes dans le matériau.

Tous les autres profils, notamment le profil elliptique, procèdent d’un compro- mis entre la recherche d’une grande précision et la tenue de contraintes résultantes élevées, sous l’effet des efforts appliqués sur l’articulation.

Selon l’objectif de la structure et de l’application, le choix du profil ne sera donc pas le même. Ainsi, pour une structure d’amplification du déplacement comme la nôtre, qui est intégrée dans un actionneur à déplacement macrosco- pique, la précision n’est pas un critère primordial, contrairement à l’amplitude du déplacement disponible en sortie de la structure. Le profil rectangulaire à congés est donc tout à fait adapté dans notre cas.

La majorité des profils est réalisée de manière à disposer d’un mouvement dans un plan. On parle alors d’articulations à un seul axe de rotation. L’articulation a

la forme d’un parallélépipède dont la hauteur est suivant l’axe de rotation (Fig. 4.5). Si l’on souhaite bénéficier d’un axe de rotation supplémentaire, il suffit alors de réduire la hauteur du joint. Enfin, il existe des profils d’étranglement à section circulaire qui ne privilégient aucun axe de rotation particulier.

4. Modèle analytique général d’une articulation