3. Les céramiques multicouches
3.2. Rappels sur la piézoélectricité
3.2.1. Hypothèses
La céramique multicouche que nous nous proposons de modéliser dans cette section a une longueur L. Elle est composée de n éléments de surface A et d’épais- seur e (Fig. 2.9). L’empilement est réalisé dans l’axe de polarisation des céramiques (e3). ∆L représente l’allongement total de la céramique. Nous supposons que les électrodes et les joints ont des épaisseurs négligeables comparées à celle des céra- miques. Une tension d’amplitude uc est appliquée à ses bornes et elle subit une force fc sur chacune de ses extrémités. Le matériau piézoélectrique est considéré comme un diélectrique parfait et les électrodes sont métalliques, constituées par un dépôt de matériau conducteur sur la céramique.
Fig. 2.9: Dimensions d’une céramique multicouche prises en compte pour la modélisation
3.2.2. Électrostatique
Nous rappelons ici quelques propriétés utiles de la théorie sur les milieux conducteurs et diélectriques [Lan90, Ber96].
Dans un milieu conducteur, à l’équilibre électrostatique, les charges électriques sont réparties uniquement sur les surfaces, le champ électrique étant nul dans le volume. Le champ électrique −→E vérifie alors la relation :
−→
rot−→E =−→0 (2.1)
Cette relation permet d’écrire que le champ électrique dérive d’un potentiel V : −
→
La relation 2.1 nous assure que sur les surfaces chargées, les composantes tan- gentielles du champ électrique sont nulles, et la relation 2.2 permet de considérer ces surfaces comme des équipotentielles.
Une autre équation locale permet de relier la divergence du champ électrique à la densité volumique de charge ρ, où ε0 est la permittivité du vide :
div−→E = ρ ε0
(2.3) Ainsi, sur une surface de conducteur, on obtient la relation liant la densité surfacique de charge à la composante normale du champ électrique :
ρ = ε0En= −ε0∂V
∂n (2.4)
Fig. 2.10: Représentation du vecteur polarisation, du champ électrique dans un milieu diélectrique polarisé entre deux électrodes planes normales à l’axe de polarisation
Considérons, maintenant, un pavé piézoélectrique entouré de deux armatures soumises à une différence de potentiel (notre pastille piézoélectrique prise entre deux électrodes planes), comme l’illustre la figure 2.10, il existe sur l’une d’elles une densité surfacique de charge σ. On note qc la charge emmagasinée sur cette électrode.
Dans un matériau piézoélectrique polarisé, existe une polarisation d’orientation. Si l’on isole de ce matériau un cylindre élémentaire contenant une chaîne de dipôles élémentaires, on peut définir un vecteur polarisation −→P, dont la norme correspond à la valeur absolue de la charge vue de la base du cylindre, la direction est l’axe du cylindre et le sens celui des dipôles élémentaires. En notant σp la charge de polarisation et −→n la normale sortante du cylindre élémentaire, on a la relation :
− →
P = σp−→n (2.5)
Cette polarisation uniforme est nécessairement à flux conservatif, ce qui s’écrit :
Le champ électrique −→E à l’équilibre électrostatique est la résultante du champ électrique dans le vide−E0, dû à l’application d’une différence de potentiel entre les→ deux armatures, et du champ électrique dépolarisant −Ep→ créé par les charges de polarisation. Ainsi, à l’intérieur du milieu diélectrique coexistent des porteurs de charge dite de polarisation (indice p) et des porteurs de charge dite libre (indice l).
La charge totale surfacique portée par une électrode est appelée charge vraie et s’écrit : σv = σp + σl. Le champ électrostatique −→E résulte de la répartition des charges libres, ce qui donne la relation suivante :
div−→E = ρl ε0 = ρv−div − → P ε0 (2.7) En réécrivant cette dernière relation en faisant apparaître les charges vraies on obtient :
divε0−→E +−→P= ρv (2.8) Cette écriture permet d’introduire le vecteur induction électrique ou déplace- ment électrique−→D tel que :
div−→D = ρv (2.9)
Cette dernière équation nous permet d’écrire la relation de passage entre les milieux diélectriques et conducteurs à la surface des électrodes :
Dn2− Dn1 = σn1→2 (2.10)
En prenant les orientations de la figure 2.10, les équations 2.2 et 2.10 permettent de donner les relations simplifiées suivantes du champ dans le milieu diélectrique et de l’induction électrique au niveau de l’électrode dont le potentiel V est positif :
E3 = Vc
e (2.11)
D3 = Qc
A (2.12)
3.2.3. Piézoélectricité
Les équations constitutives de la piézoélectricité s’écrivent de différentes ma- nières, selon le couple de variables indépendantes choisi. Convenant de les exprimer en fonction du tenseur de contrainte TTT et du champ électrique EEE, elles s’écrivent
sous la forme [Nog05] : Si = sE ijTj + dmiEm Dn= dmjTj + εT nmEm où {i, j} ∈ {1...6}2 et {n, m} ∈ {1...3}2 (2.13)
La première équation représente l’équation caractéristique de l’effet piézoélec- trique inverse et la deuxième, celle qui traduit l’effet piézoélectrique direct.
La charge mécanique que subissent les céramiques est supposée uniaxiale et uniforme dans le plan, dans la direction de la polarisation. Par conséquent, les composantes du tenseur des contraintes suivant les directions e1 et e2 sont négligées en première approximation. La composante T3 restante ne dépend alors que de la position sur l’axe e3.
Du point de vue électrique, une céramique de faible épaisseur peut être considé- rée en première approche comme un condensateur plan en supposant que les équi- potentielles sont parallèles aux électrodes. Le potentiel électrique est donc considéré comme dépendant uniquement de la position sur l’axe e3. Par conséquent seule la composante E3 est non nulle.
Ces considérations permettent de simplifier les équations piézoélectriques ini- tiales pour aboutir aux équations constitutives du mode longitudinal pur :
(
S3 = sE33T3+ d33E3
D3 = d33T3+ εT33E3 (2.14)
Afin d’exprimer les équations du mouvement, il est souvent plus intéressant d’écrire les relations de la piézoélectricité en fonction des variables mixtes de contrainte SSS et du champ EEE lorsqu’on cherche à calculer les énergies internes et le travail extérieur. Cela donne :
T3 = 1 sE 33 S3 −d33 sE 33 E3 D3 = d33 sE 33 S3+ 1 − k2 εT33E3 avec k2 = d233 sE 33εT33 (2.15)
Pour simplifier l’écriture, on adopte la notation normalisée suivante :
T3 = cE33S3− e33E3 D3 = e33S3+ εS33E3 (2.16) avec c33= 1 sE ; e33 = d33 sE ; ε S 33= 1 − k2 εT33
Cette écriture fait intervenir le coefficient de couplage k électromécanique qui représente le quotient d’énergie effectivement convertie par l’énergie stockée.