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B. La situation socio-économique

4. Les religions à Madagascar

La Constitution malgache permet la liberté de culte et d’expression et interdit toute discrimination au travail qui serait basée sur la religion. La loi protège la liberté de culte des individus contre tout abus du gouvernement ou d’acteurs privés. Par ailleurs, la loi impose aux groupes religieux de se déclarer auprès du gouvernement afin d’obtenir un statut légal qui leur permettra de recevoir des legs et des donations. Pour remplir les conditions requises de certification, un groupe religieux doit être composé de minimum cent individus avec un conseil administratif élu, comprenant pas plus de neuf

divers/2018/06/23/insecurite-a-madagascar-les-actes-de-banditisme-ont-fait-4000-morts-en-cinq-ans/

(consulté le 16/03/19)

98OMS, Rapport annuel Madagascar 2017, 2018, p 13, in

https://apps.who.int/iris/bitstream/handle/10665/272374/MadagascarRap2017.pdf (consulté le 6/04/19)

99 Dolorès Pourette, Chiarella Mattern, Christine Bellas Cabane et Bodo Ravololomanga, Femmes, enfants et santé à Madagascar, approches anthropologiques comparées, Paris : L’Harmattan, 2018, p 23

100 UNICEF, Défis et opportunités des enfants à Madagascar, octobre 2018, p 3

membres. En 2014, le gouvernement malgache avait enregistré soixante nouveaux groupes religieux, pour un total d’environ deux cent-vingt groupes déclarés officiellement101. Madagascar est connue pour sa diversité religieuse et son syncrétisme. En effet, les « supports religieux traditionnels et chrétiens peuvent, selon ceux qui les vivent, soit s’interpénétrer, soit marcher côte à côte. Ils peuvent parfois tendre vers une confusion syncrétique – ou plutôt un syncrétisme confusionnel – unissant ancêtres et religion du Christ dans un sursaut culturel de nouveau messianisme »102.

Plus de 50% des Malgaches pratiquent la religion traditionnelle qui s’articule autour du culte des ancêtres et d’un créateur appelé Zanahary ou Andriamanitra103. Les ancêtres sont les intercesseurs entre les vivants et Dieu, c’est pourquoi il ne faut surtout pas les contrarier et respecter les fady (les tabous/interdits religieux). Cependant, ce terme prête à confusion car il recouvre en fait une multiplicité de réalités. Des rites aussi différents que « des offrandes sur un site dit vazimba, une séance de possession tromba chez les Sakalava ou un enterrement dans l’Androy, dont la finalité est la

« mise au calme d’un défunt », ne paraissent pas participer d’un même système religieux »104. Le Famadihana ou retournement des morts est par exemple une pratique qui vise à honorer les morts en les déterrant afin de les recouvrir d’un nouveau linceul en soie et qui donne lieu à de grandes cérémonies festives parfois très coûteuses. Le culte des ancêtres se retrouve au niveau des côtes, tandis que 90% des habitants des Hautes Terres se déclarent chrétiens105.

Le protestantisme est arrivé sur l’île au début du XIXe siècle avec les missionnaires de la London Missionary Society et bien que les premiers chrétiens fussent persécutés sous le règne de la reine Ravanalona Ière qui voulait stopper l’influence européenne sur l’île, le protestantisme trouva son soutien auprès de la reine Ravanalona II et devint

101 U.S Department of State, Bureau of Democracy, Human Rights and Labour, International Religious Freedom Report for 2014, Executive Summary, in

https://www.state.gov/j/drl/rls/irf/2014religiousfreedom/index.htm?year=2014&dlid=238232#wrapper (consulté le 17/03/19)

102 Lantosoa Andrianjafitrimo, La femme malgache en Imerina au début du XXIe siècle, Paris : Éditions Karthala, 2003, p 7

103https://www.worldatlas.com/articles/religious-beliefs-in-madagascar.html consulté le 16/03/19

104 Vazimba : selon les traditions historiques, les autochtones de Madagascar ; Successivement, Malgaches de l’Ouest et l’Extrême Sud in Adolphe Rahamefy, Sectes et crises religieuses à Madagascar, Paris : Éditions Karthala, 2007, p 11

105 Id., p 75

la religion de la royauté et de l’aristocratie106. Les trois grandes branches sont les Luthériens, les Anglicans et l’Église de Jésus-Christ à Madagascar (cette dernière est plus connue sous l’appellation FJKM107) et font toutes trois parties du Conseil des Églises malgaches.

Le catholicisme a quant à lui été apporté par les Français et a gagné en popularité pendant la colonisation, notamment au niveau des côtes et auprès des opposants à la monarchie merina. L’Église catholique fait aussi partie du Conseil des Églises malgaches et possède donc un certain degré d’influence dans le pays (les établissements scolaires catholiques sont par exemple réputés pour leur rigueur et leur excellence et sont fréquentés par de nombreux élèves non catholiques).

D’autres congrégations existent comme l’Église de Jésus-Christ des Saints des derniers jours, les Témoins de Jéhovah ou encore l’Église adventiste du septième jour, auxquelles se mêlent de nombreuses sectes. Ces dernières, d’obédience chrétiennes, ont fait leur apparition dès la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle. En fait,

« elles ont servi d’échappatoire à des anciens devins guérisseurs, dans un premier temps, avant de devenir des cercles de prières et de profession de foi »108.

L’Islam sunnite est la plus grande minorité religieuse et a pour origine les migrations des commerçants arabes sur l’île ainsi que les connexions avec les Comores, l’Inde et le Pakistan. Quelques malgaches pratiquent l’islam chiite mais cette branche est très minoritaire109.

Cependant, on peut également parler d’un syncrétisme puisque les différentes croyances se mélangent, et il est très courant pour les Malgaches de combiner leur religion avec leurs croyances religieuses traditionnelles (comme le retournement des morts et le respect des ancêtres, pratiqués par de nombreux chrétiens).

Les églises jouent un rôle très important au sein de la société civile et s’impliquent beaucoup dans la vie de tous les jours à travers des œuvres de bienfaisance, des associations, ou encore les mouvements des scouts. De même, dès la fin du XIXe siècle, les deux branches principales, catholiques et protestantes, cristallisaient en leur sein des opinions et des courants d’idées bien précis, comme le fait que les protestants

106 Benjamin Elisha Sawe, “Religious belief in Madagascar”, World Atlas, in

https://www.worldatlas.com/articles/religious-beliefs-in-madagascar.html (consulté le 16/03/19)

107 FJKM : Fiangonan’i Jesoa Kristy eto Madagasikara

108 Adolphe Rahamefy, Sectes et crises religieuses à Madagascar, Paris : Éditions Karthala, 2007, p 135

109 Benjamin Elisha Sawe, “Religious belief in Madagascar”, World Atlas, in

https://www.worldatlas.com/articles/religious-beliefs-in-madagascar.html (consulté le 16/03/19)

soient majoritaires au sein de la monarchie merina et les catholiques furent leurs principaux opposants. On peut aussi ajouter un autre clivage, où les Hauts Plateaux regroupent principalement des protestants, contrairement aux côtiers, majoritairement catholiques (quand ils ne suivent pas exclusivement le culte des ancêtres). De plus, dans la zone des Hauts Plateaux, les catholiques sont souvent des descendants d’anciens esclaves. En politique, la présence des églises s’est fait ressentir dès les prémices de l’indépendance ou encore en 1975, lorsque les catholiques furent « les premiers à contester les outrances du stalinisme ratsirakien [et] s’associèrent aux protestants pour structurer le mouvement, qui mis bas à la dictature en 1993 ».

L’ancien président Marc Ravalomanana, membre des FJKM, se présentait comme un messie, et le nouveau président Andry Rajoelina contraste par son appartenance à une vieille famille catholique. Si Madagascar est un pays où les différentes croyances coexistent dans un climat de paix, on constate malgré tout des différences culturelles liées à ces dernières, ainsi qu’une perception du rôle social de l’individu qui diffère et qui peut expliquer la place de chacun au sein de la société.

Il est intéressant de noter que les chiffres se confrontent avec parfois des écarts relativement importants :

World Atlas, religious beliefs in Madagascar (2017)110

Gouvernement américain (2014)111

Religion traditionnelle

50% 52%

Protestantisme 25% 41%

Catholicisme

Islam 7% 7%

Autres 2%

Tableau représentant le pourcentage de la population qui adhère à telle branche religieuse selon différentes sources.

110 Benjamin Elisha Sawe, “Religious belief in Madagascar”, World Atlas, in

https://www.worldatlas.com/articles/religious-beliefs-in-madagascar.html (consulté le 16/03/19)

111 U.S Department of State, Bureau of Democracy, Human Rights and Labour, International Religious Freedom Report for 2014, Executive Summary, in

https://www.state.gov/j/drl/rls/irf/2014religiousfreedom/index.htm?year=2014&dlid=238232#wrapper (consulté le 17/03/19)

Ces différences s’expliquent par l’intérêt porté par chaque groupe de se montrer comme étant les plus nombreux. En effet, chaque entité souhaite avoir un poids conséquent, tant politique que social, dans la vie quotidienne et en l’absence de recensement (le dernier date de 1993), chacun est libre d’avancer des affirmations, qui ne sont finalement que des approximations.