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Pour rappel, les Nations Unies définissent la violence à l’égard des femmes comme

« tous les actes de violences dirigés contre le sexe féminin, et causant ou pouvant causer aux femmes un préjudice ou des souffrances physiques, sexuelles ou psychologiques, y compris la menace de tels actes, la contrainte ou la privation arbitraire de liberté »130. Les violences commises à l’égard des femmes malgaches sont monnaie courante dans une société où les hommes ont clairement la main mise sur elles. Quelques statistiques permettent de constater une situation catastrophique, d’autant plus que l’on sait que beaucoup de femmes et de jeunes filles ne viennent pas rapporter ce qui leur est arrivé :

- 15% des filles de 10 à 14 ans sont victimes de violence physique131. - 31% des femmes malgaches sont victimes de violence132.

127 UNESCO, La violence et ses causes, 1980, p 32 in

https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000043086_fre (consulté le 30/03/19)

128 Id., p 40-41

129 Id., p 37

130 OHCHR, UNFPA, « Connaissez vos droits », Campagne d’éducation, de sensibilisation, et de vulgarisation des Droits de l’Homme sur le thème Tous les Droits de l’Homme pour tous les Malgaches, Série 2 « Droits de la femme malgache », Édition décembre 2018

131 UNICEF, Défis et opportunités des enfants à Madagascar, octobre 2018, p 3

132 A.H, « Madagascar est-il un pays des droits de la femme ? », in Madonline, 10 mars 2015, in https://www.madonline.com/madagascar-est-il-un-pays-des-droits-de-la-femme/ (consulté le 10 mars 2019)

Une enquête du UNFPA133 précise que :

- 19% des femmes ont été victimes de violence psychologique - 12,1% des femmes ont été victimes de violence physique - 7,2% des femmes ont été victimes de violence sexuelle - 5,3% des femmes ont été victimes de violence économique

Si aucune catégorie de femme n’est épargnée par la violence, les jeunes femmes sont plus touchées que leurs aînées. Le facteur culturel peut expliquer ces violences à l’égard des femmes, dans une société patriarcale où leur place est parfois plus que dégradante. En effet, les familles et les communautés restent très sensibles au poids des différentes coutumes et croyances qui vont à l’encontre du droit international. En outre, il ne faut pas négliger le facteur financier qui favorise certaines pratiques comme les mariages forcés lorsque la famille manque d’argent notamment. Par ailleurs, il est parfois difficile d’obtenir des informations ou simplement de recenser le nombre de femmes victimes de violence car comme le dit l’adage malgache :

« Nytokantranotsyahahaka », ce qui signifie « le linge sale se lave en famille ». Ainsi, peu sont les femmes qui vont parler publiquement ou simplement aller dénoncer les souffrances dont elles sont victimes, surtout au niveau des violences conjugales, et cela même à un médecin. Ce dernier reste « un étranger au ménage » et raconter ses problèmes est presque tabou et va à l’encontre des consignes sociales134. En effet, si dans l’article 52 de la loi malgache 2007-022 relative au mariage et aux régimes matrimoniaux135, la femme peut retourner vivre dans sa famille (ou dans un centre d’accueil) en cas de motifs graves (le droit de « misintaka »), elles sont peu nombreuses à le faire. En effet, d’une part, certaines vivent éloignées de leur famille et n’ont pas les moyens de la rejoindre, quant à d’autres, elles ne veulent pas être une charge supplémentaire pour leur famille ou ressentent tout simplement de la honte et n’osent/ne veulent pas montrer aux autres que leur ménage ne va pas bien. À cela s’ajoute le fait que cette situation où les femmes « se retirent » est temporaire et ne peut excéder deux mois sans l’autorisation de leur mari. Ainsi, elles doivent donc

133 INSTAT, Enquête nationale sur le suivi des objectifs du millénaire pour le développement à Madagascar, 2012-2013, 2013, p 44, in https://madagascar.unfpa.org/sites/default/files/pub-pdf/OMD_Resume.pdf (consulté le 6/04/19)

134 Dolorès Pourette, Chiarella Mattern, Christine Bellas Cabane et Bodo Ravololomanga, Femmes, enfants et santé à Madagascar, approches anthropologiques comparées, Paris : L’Harmattan, 2018, p 239 135 Loi n°2007-022 du 20 août 2007, in Le droit des affaires en Afrique francophone, in

http://www.droit-afrique.com/upload/doc/madagascar/Madagascar-Loi-2007-22-mariage-et-regimes-matrimoniaux.pdf (consulté le 6/04/19)

finalement retourner dans leur foyer, sans que parfois rien ne change bien que le mari se doit de procéder aux démarches du « Fampodiana » ou invitation à réintégrer le domicile conjugal. Le UNFPA a mené une enquête dans laquelle avait été demandée à des femmes de 15 à 49 ans et à des hommes de 15 à 59 ans si le mari a le droit de battre sa femme pour certaines raisons et c’est près d’une femme sur deux qui a répondu positivement. Voici les raisons fournies et le pourcentage de femmes et d’hommes interrogés qui y adhèrent :

- Si une femme néglige ses enfants (38,4% des femmes et 38,9% des hommes)

- De sortir sans demander la permission au conjoint (23% des femmes et 23,3% des hommes)

- De brûler la nourriture (13,5% des femmes et 12,9% des hommes)

- De refuser d’avoir des rapports sexuels avec son conjoint (10,6% des femmes et 12,2% des hommes)

- D’« argumenter » avec son conjoint (8,1% des femmes et 10,1 des hommes)136

136 INSTAT, Enquête nationale sur le suivi des objectifs du millénaire pour le développement à Madagascar, 2012-2013, 2013, p 43, in https://madagascar.unfpa.org/sites/default/files/pub-pdf/OMD_Resume.pdf (consulté le 6/04/19)

Les données statistiques figurant dans le rapport annuel 2017 Océan Indien du UNFPA137 précisent que près d’une femme sur deux trouve normale la violence à leur égard. Par ailleurs, seulement 0,5% des victimes portent plainte, ce qui est encore bien trop peu, sans compter le fait que dans ces plaintes, la majorité des accusés s’en sortiront sans dommage contrairement à la victime, qui non seulement verra sa vie marquée à jamais, mais peut même être à nouveau victime de pression et de chantage psychologique.