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II. Le Virus de l’Hépatite B

II.2. Classification et Structure d’HBV

II.2.5. Les protéines virales

x Les protéines d’enveloppe L, M et S

Les trois protéines virales présentes dans les enveloppes des virions (HBsAg) possèdent le même domaine C-terminal hydrophobe capable de s’intégrer aux membranes lipidiques. Elles diffèrent par leur extrémité N-terminale (Figure 17A). Les protéines d’enveloppe sont en partie exposées à la surface des virions et jouent ainsi un rôle déterminant dans la fixation du virus aux molécules d’attachement et au récepteur cellulaires et donc dans le pouvoir pathogène d’HBV.

La protéine S (S-HBs) est très hydrophobe avec ses quatre domaines transmembranaires (I à IV). Lors de l’assemblage des virions, le domaine N terminal de S-HBs est localisé dans la lumière du RE alors que la partie C terminale se trouve vers le cytoplasme (342). S-HBs présente une boucle antigénique exposée à l’extérieur des virions, cible des anticorps neutralisants anti-HBs. Cette protéine est essentielle aux étapes d’assemblage, de sécrétion et d’infectivité des particules virales (343).

La protéine M (M-HBs) adopte la même structure que la protéine S, avec un domaine N terminal plus long exposé à l’extérieur de la particule virale. Les fonctions de cette protéine ne sont pas élucidées : elle n’est pas essentielle à l’entrée du virus dans les hépatocytes ni aux étapes du cycle viral, mais, elle est très conservée chez tous les orthohepadnavirus ce qui suggère un rôle important (344).

La protéine L (L-HBs) est indispensable aux étapes de reconnaissance des hépatocytes par le virus, à son internalisation et à la formation des nouvelles particules

78 Figure 17. Les protéines virales.

(A) L’ORF S code pour les protéines L-, M- et S-HBs qui différent par la présence de régions additionnelles en 5’, pré-S1 et pré-S2. (B) L’ORF PreCore/Core code pour la protéine Core dont le domaine C terminal comporte un signal d’export nucléaire (NES) et un signal de localisation nucléaire (NLS). Ce même ORF code aussi pour le précurseur PreCore qui est ensuite clivé en HBeAg. (C) L’ORF P code pour la polymérase virale composée des domaines TP, Spacer, RT/Pol et RNaseH.

79 infectieuses. Le domaine N-terminal possède un site de myristylation nécessaire à l’ancrage de la protéine dans l’enveloppe virale. Cette modification n’est pas essentielle à la formation de nouvelles particules virales, mais à leur pouvoir infectieux (345). Au cours de l’assemblage des virions, L-HBs peut prendre deux formes transmembranaires : i-préS est la forme interne dans laquelle l’extrémité N terminale est exposée vers le cytosol ; e-préS la forme externe dans laquelle l’extrémité N terminale est exposée vers la lumière du RE. La topologie i-préS permet à la protéine L-HBs d’interagir avec les nucléocapsides. Le basculement entre les deux formes a lieu dans le RE ou dans le pré-Golgi. Lors du bourgeonnement des virions, les régions preS1 et preS2 se trouvent à la surface des particules : c’est la topologie e-préS qui permet l’interaction du domaine PreS1 avec le récepteur membranaire hépatocytaire NTCP d’HBV (Sodium taurocholate cotransporting polypeptide) (346,347). L’inhibiteur de l’entrée virale Myrcludex B® est un peptide analogue de la région PreS1 de la protéine L-HBs qui inhibe l’entrée des particules d’HBV par compétition avec le récepteur NTCP (348).

x La protéine Core

La protéine de capside Core (21 kD) est composée de 183 à 185 acides aminés selon le génotype d’HBV, et constitue l’unité structurale de la capside. Il existe quatre variants d’HBc quasi-équivalents qui peuvent s’organiser selon deux symétries : T=4, symétrie la plus fréquente, avec 120 dimères et T=3, avec 90 dimères (349). Elle présente deux domaines : un domaine N-terminal et un domaine C-terminal qui sont séparés par un court domaine charnière (Figure 17B). Le domaine N-terminal (NTD) est impliqué dans la formation des dimères de Core et leur auto-assemblage en capside (350). Le NTD est aussi impliqué dans l’enveloppement des nucléocapsides (351). Le petit domaine charnière se trouve du côté interne de la capside et pourrait intervenir dans l’étape d’encapsidation (352). Le domaine C-terminal (CTD) n’est pas essentiel à l’assemblage des capsides, mais comporte différentes régions régulatrices indispensables au cycle réplicatif. Le CTD et riche en arginines et en sérines qui peuvent être phosphorylées. Le niveau de phosphorylation de Core conditionne sa localisation cellulaire, l’encapsidation de l’ARNpg et sa reverse transcription, ainsi que la maturation de la capside (353). On trouve dans ce domaine une séquence de localisation nucléaire (NLS), impliquée dans l’adressage des capsides au noyau (354),

80 et une séquence d’export nucléaire (NES) qui peut interagir avec le facteur d’export TAP, impliqué dans l’export nucléo-cytoplasmique des ARNm et des protéines via les pores nucléaires (NPC) (355).

La protéine Core possède non seulement des fonctions structurales essentielles pour la formation des capsides, mais aussi des fonctions régulatrices de l’encapsidation de l’ARNpg, de sa reverse transcription et du transport des capsides. Grâce à sa séquence NLS, Core est aussi présente dans le noyau où elle aurait un rôle régulateur additionnel. En effet, Core se lie à l’ADNccc très précocement après sa formation et module l’espacement des nucléosomes. De plus, sa présence est corrélée à une transcription active de l’ADNccc (356). Enfin, plusieurs études suggèrent un rôle de Core dans la régulation du métabolisme des ARN qui sera explicité dans la sous-partie II.4.

x La protéine HBeAg

L’ARNm PreCore conduit à la synthèse du précurseur préCore de 25 kD qui contient les mêmes domaines CTD et NTD que la protéine Core, avec une extension de 29 acides aminés en N terminal (Figure 16B) (354). Ce précurseur subit un double clivage dans le réticulum endoplasmique : le premier clivage en N-terminal permet l’obtention du précurseur P22 (préCore de 22kD), le second au niveau C-terminal permet d’obtenir la protéine HBeAg de 17 kD (Figure 17B) (357). Ainsi, HBe partage de fortes homologies de séquence mais pas de structure avec HBc. En particulier, la présence d’un résidu cystéine additionnel (provenant de l’extrémité N-terminale d’HBe) crée un pont disulfure qui est absent dans HBc et qui conduit à un repliement spécifique d’HBe qui lui permet de former des dimères mais pas de s’assembler en capside (358,359).

L’HBeAg est une protéine non structurale qui est retrouvée en grande quantité dans le sérum des patients infectés par HBV. Elle est secrétée sous forme dimérique mais n’est pas impliquée dans le pouvoir infectieux ni la réplication du virus. L’HBeAg aurait plutôt un rôle immunomodulateur en exerçant un rôle tolérogène sur les lymphocytes T (360). De plus, l’HBeAg peut franchir la barrière hémato-placentaire et exerce ainsi son effet tolérogène in utero, ce qui expliquerait en partie le fréquent passage à la chronicité observé lors de la transmission de l’infection entre mère et

81 enfant (361). De façon intéressante, le précurseur P22 d’HBe peut s’assembler en pseudo-capsides, qui peuvent être enveloppées et secrétées mais qui sont dépourvues d’acides nucléiques. Ces particules pourraient intervenir dans le phénomène d’immunotolérance induit par HBV et donc participer à la persistance de l’infection. Les niveaux de sécrétion en HBeAg sont un marqueur de la réplication active du virus, et la sero-conversion vis-à-vis de cet antigène signe la fin de la réplication et l’évolution vers le stade de porteur inactif d’HBV (cf §II.1.3) (362).

Les hépatites chroniques HBeAg-négatives sont des de formes chroniques d'infection par un virus de l'hépatite B mutant, incapable de produire l’HBeAg souvent à cause de l’apparition de mutations au niveau du promoteur préCore ou dans la séquence d’HBe (363,364). Les patients infectés par ces mutants possèdent des anticorps anti-HBe mais l’infection chronique perdure (365). Parmi les patients possédant le phénotype HBsAg (+) /HBeAg (−), les porteurs de la mutation sont très nombreux dans le bassin Méditerranéen et en Asie (366).

x La Polymérase Virale

La polymérase virale (230 aa, 90kD) est la seule protéine virale qui possède une activité enzymatique. Son activité est la cible majeure des traitements anti-HBV actuels (cf §II.1.4). La polymérase virale est composée de 3 domaines : TP pour Terminal Protein, RT pour Reverse Transcriptase, et un domaine RNaseH. Il y a aussi un domaine charnière entre les domaines TP et RT (Figure 17C) (367).

Le domaine TP se lie au signal d’encapsidation ε à l’extrémité 5’ de l’ARNpg, ce qui amorce la synthèse du brin d’ADN (-). Le domaine RT possède deux activités enzymatiques. L’activité reverse transcriptase permet la synthèse du brin d’ADN (-) à partir de l’ARNpg, et l’activité d’ADN polymérase ADN-dépendante permet la synthèse du brin d’ADNrc (+) à partir du brin (-) (Figure 18, étapes 6 et 7). Le domaine RT n’a pas d’activité 3’-5’ exonucléase ce qui autorise des erreurs et induit une variabilité génomique (368,369). Ces deux premiers domaines sont séparés par le domaine charnière (ou spacer) qui assure la flexibilité de la protéine pour un bon fonctionnement de ses activités catalytiques. Ce domaine ne portant pas d’activité primordiale, il peut tolérer de nombreuses mutations, ce qui explique la variabilité de longueur de la polymérase (367). Le domaine « RNase H » possède une activité

82 ribonucléasique qui permet la dégradation de l’ARNpg après la synthèse du brin (-). Cette dégradation est incomplète et laisse une petite amorce ARN nécessaire à l’initiation de la synthèse du brin d’ADN (+) (370).

x La protéine HBx

HBx est la plus petite des protéines d’HBV (154 aa, 17kD). C’est une protéine multifonctionnelle produite à un niveau très bas, durant l’infection aiguë et chronique, mais essentielle à la réplication complète du virus chez les orthohepadnavirus (371– 373). Elle transactive les promoteurs de l’ADNccc mais pas de l’ADN viral intégré (341,374). Bien qu’HBx ne semble pas pouvoir se fixer directement à l’ADN, elle interagit avec des facteurs de transcription et régule l’expression de gènes cellulaires impliqués dans l’apoptose ou la réparation de l’ADN (375). HBx est aussi un régulateur épigénétique qui se lie aux enzymes de modification des histones. Malgré son faible pouvoir oncogène, il semble qu’en intervenant dans de multiples voies HBx puisse participer au développement de l’HCC associé à HBV (376,377). Enfin, il a été montré qu’HBx induit la dégradation du complexe SMC5/6 qui est un facteur de restriction majeur de l’ADNccc (378).

Ces sept protéines virales sont toutes produites à partir d’ARN non épissés. Cependant, comme on le verra par la suite, des formes épissées des ARNm d’HBV sont produites et bien qu’elles ne soient pas nécessaires à la réplication virale, elles conduisent à la synthèse de trois protéines virales additionnelles : HBSP, P-S et HBDSP (cf §II.4.1).