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Les protéines comme agents thérapeutiques et/ou diagnostiques

I.2 De l’utilisation des protéines comme ligands

I.2.2 Les protéines comme agents thérapeutiques et/ou diagnostiques

Un des intérêts de la conception de ligands, concerne le processus de conception de médicaments. L’accroissement du nombre de protéines utilisées, en tant qu’agents thérapeutiques et/ou diagnostiques, met en évidence l’intérêt de ce type de ligands.

I.2.2-A Protéines à usage thérapeutique

Depuis une dizaine d’années, le nombre de protéines à usage thérapeutique ne cesse d’augmenter [73] et les prévisions, estimées par plusieurs travaux, pour les années à venir sont optimistes [73, 74]. Initialement, leur utilisation se limitait à compenser une fonction déficiente ou insuffisante : injection d’insuline en cas de diabète ou hormone de croissance en cas de nanisme par exemple. Désormais, le recours à l’ingénierie des protéines permet d’élargir les possibilités d’utilisation de celles-ci [75, 76, 77].

Les méthodes d’optimisation [75] peuvent être utilisées pour améliorer les critères d’affinité et spécificité, ou d’autres propriétés liées à l’utilisation de molécules thérapeutiques, dont la stabilité in-vivo et la toxicité ou l’immunogénicité [78, 79]. Les protéines, même d’origine humaine, sont capables d’induire des réactions du système immunitaire de l’organisme. Différentes stratégies d’optimisation ont été mises au point de façon à réduire cet inconvénient [78, 80, 81] : modifier la séquence primaire de façon à supprimer les épitopes antigéniques [81] et/ou améliorer la solubilité évitant ainsi la formation d’agrégats immunogènes [80], masquer les sites d’interactions avec les anticorps par ajout de PEG à la surface des protéines [80].

Les protéines ont une durée de vie in-vivo limitée, du fait de la dégradation par les protéases et le protéasome. Dans ce dernier cas par exemple, la nature du résidu en position N terminale est déterminante pour la durée de vie de la protéine [82, 83]. La figure I-15, partie A, montre l’évolution de la quantité d’une protéine de référence (la β-galactosidase) restante après dix minutes selon la nature du résidu en position N terminale, dans une lignée cellulaire eucaryote. Pour 12, parmi les 20 acides aminés naturels, la dégradation des protéines est supérieure à 40%. Le temps de demi-vie de cette protéine de référence a été estimé dans deux lignées, bactérienne (E. Coli) et eucaryote (S. Cerevisiae), et est présenté dans le tableau I-15, partie B. D’autre part, l’action des protéases est, quant à elle, ralentie lorsque la structure des protéines est repliée. Il en résulte une stabilité variable d’une protéine à l’autre. Le cas des anticorps, dont la durée de vie dépasse un jour, rend concevable l’utilisation de protéines pour des applications in-vivo.

Figure I-16 : Liste de plusieurs protéines mises sur le marché (USA), en tant qu’agents thérapeutiques ou diagnostiques (lignes entourées) [75].

I.2.2-B Exemples de protéines thérapeutiques

Les anticorps sont des protéines produites par le système immunitaire dont le but est de fixer les molécules étrangères à l’organisme. De part leur faculté à reconnaître des antigènes divers, les anticorps ont été les premières protéines utilisées comme médicament. Leur utilisation s’est

largement développée lors de la mise au point d’anticorps monoclonaux [84], capables de reconnaître une cible précise. Les anticorps présentent de nombreux avantages : ce sont des protéines circulantes, donc très solubles. Leur structure rigide rend la détermination de leur structure 3D aisée. Enfin, les régions impliquées dans la reconnaissance (fragments variables Fv) de structures diverses, sont peu sensibles aux mutations, facilitant les approches d’ingénierie et d’optimisation. Leurs applications sont multiples :

• à des fins diagnostiques, ils peuvent être associés à des marqueurs fluorescents ou radioactifs (test ELISA, test de grossesse, marquage de tumeurs...) ;

• à des fins thérapeutiques, leur capacité à déclencher certains mécanismes immunitaires (cytotoxicité, apoptose...) peut être mise à profit vis-à-vis de cellules cancéreuses. Leur capacité de liaison peut être utilisée afin de bloquer diverses protéines circulantes ou récepteurs membranaires, impliqués dans une pathologie.

La liste de plusieurs anticorps monoclonaux mis sur le marché est présentée dans le tableau I-16. Dans ce dernier, sont indiqués : le nom de la protéine utilisée, le nom du médicament, les modifications effectuées pour améliorer ses propriétés biologiques ou modifier son utilisation, et son indication. Les protéines peuvent donc être utilisées dans une grande variété de pathologies, et ne se limitent plus à compenser une fonction déficiente.

Par la suite, d’autres classes de protéines ont été mises à profit notamment différentes cytokines : les interférons, les facteurs de croissance hématopoïétiques, les facteurs de croissance, les interleukines, les CSF (« Colony Stimulating Factor »). Plusieurs d’entres elles sont utilisés en tant que médicaments et sont reportés dans le tableau I-16. Ces protéines ou glycoprotéines solubles (représentées figure I-17) de faible poids moléculaires (compris entre 8 et 30kDa, la plupart contenant moins de 150 résidus), sont caractérisées d’un point de vue structural par des repliements bien définis. Pour ces raisons, les cytokines peuvent donc facilement s’inscrire dans une approche de conception basée sur la structure. L’utilisation des cytokines, à des fins thérapeutiques, est essentiellement liée à leurs fonctions dans l’organisme. Elles sont, en effet, impliquées dans les voies de communication cellulaire, en particulier entre cellules du système immunitaire. De ce fait, leur utilisation présente un intérêt particulier pour le développement de médicaments dans diverses pathologies : maladies auto-immunes, cancers, transplantations, hépatites...[85]

Figure I-17 : Classification des cytokines en fonction de leur repliement. I.2.2-C Conclusion

Ces différents exemples démontrent la possibilité d’utiliser des protéines en vue d’applications thérapeutiques et/ou diagnostiques. Toutefois, les médicaments actuellement sur le marché (anticorps et cytokines majoritairement) sont utilisés en raison de leur fonction ou de leurs propriétés particulières intrinsèques. De nombreux cas existent, de composés organiques entièrement artificiels, dont le mode d’action est original et n’imite pas celui de composés naturels ou déjà connus. Aucun exemple similaire n’existe dans le cas de protéines. Le développement d’approches de conception de ligands protéiques, permettrait de faciliter l’obtention de nouvelles protéines, utilisées à des fins thérapeutiques et/ou diagnostiques.