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Caractéristiques des interfaces protéine-protéine

Chapitre II Analyse des interactions protéine-protéine

II.1 Description générale des interfaces

II.1.2 Caractéristiques des interfaces protéine-protéine

Le but de l’analyse de complexes protéiques est d’identifier différents critères, caractérisant l’interface, liés à formation de ces mêmes complexes. Toute modification observée, entre les états libre et lié de deux protéines, peut être directement reliée à la formation d’un complexe et non à diverses modifications conformationnelles, à la seule condition que leurs structures respectives ne soient pas modifiées. Ces protéines doivent être alors assimilées à des corps rigides. La comparaison de structures 3D de protéines, entre l’état libre et lié, a été réalisée via le calcul du RMSD sur les atomes Cα ou les chaînes latérales : de faibles variations entre ces deux états ont ainsi été observées [135]. Une partie de ces résultats est présentée dans la figure II-2.

Figure II-2 : Valeurs de RMSD calculées entre les structures, à l’état libre ou lié,

de complexes

cristallographiques enzyme- inhibiteur, antigène-anticorps ou autres, indiqués par leur code PDB et la structure considérée (exemple : 1CGI_E). Les chiffres (au- dessus de chacune des barres) indiquent pour chaque structure le nombre d’atome Cα ou de chaînes latérales dépassant la valeur du seuil. Plus de 75% des structures ont des valeurs de RMSD inférieures à la valeur seuil [135].

Dans plus de 75% des cas étudiés, aucune différence significative n’a été observée. Dans moins de 25% des cas, les modifications, souvent de faible amplitude, correspondent essentiellement à de simples mouvements de chaînes latérales [135]. De plus, ces observations ont été réalisées sur des protéines de taille comprise entre 36 et 489 résidus et impliquées dans divers types de complexe : elles sont, de ce fait, très générales. En revanche, des modifications importantes de conformation ont été observées lorsque la taille de l’interface dépassait 2000 Ų [52]. Au-delà de cette taille, il n’est alors plus possible d’assimiler, de manière systématique, les protéines à des structures rigides.

II.1.2-A Taille de l’interface

La taille de l’interface est mesurée par la variation de surface accessible au solvant entre les états libre et lié des deux partenaires [136,137], schématisé figure II-3.

Figure II-3 : Calcul de la taille de l’interface lors de la formation d’un complexe. Les protéines en interaction (en bleu et jaune) sont représentées en mode « cartoon ».

Les travaux, réalisés jusqu’à présent, ont permis de définir une taille relativement homogène des interfaces, dans 70% des complexes considérés, estimée à 1600±400Ų (figure II-4, A) [52, 131]. Cette dernière s’applique à divers hétéro-dimères, et ceci malgré des variations de taille importantes, de 2000 à 40000Da (figure II-4, B). Par ailleurs, l’analyse de la structure des interfaces montre que, lorsque la surface calculée est supérieure à cette valeur moyenne, l’interface met en jeu plusieurs régions d’interaction distinctes ou « patch » [138] comme indiqué sur la figure II-5. La partie A montre une représentation visuelle de ces « patch ». La partie B

représente la variation de la taille de l’interface en fonction de leur nombre. Il apparaît que cette valeur, dite standard, inférieure à 2000Ų, ne soit valable que pour une seule et unique région d’interaction.

Figure II-4 : La partie A montre la répartition des valeurs de la taille de l’interface de divers complexes, en fonction de leur nature [52]. La partie B, représente la variation taille de la surface (pour chacune de ses faces) en fonction de la taille des protéines impliquées [139].

Figure II-5 : La partie A est une représentation visuelle des régions d’interactions, en rouge, bleu et jaune à la surface des protéines. Complexes : trypsine/PTI ; thrombine/ornithodorine ; facteur tissulaire soluble/facteur VIIA. La partie B montre la répartition des complexes, selon leur nombre de « patch » en fonction de l’ASA mesurée. [138].

II.1.2-B Compacité de l’interface

L’analyse de complexes montre que deux protéines en interaction contribuent de façon quasi équivalente à la taille de l’interface. Chaque partenaire participe, en moyenne, à hauteur de

50±3% de la surface totale [52]. L’aspect essentiel réside surtout dans l’importante complémentarité de forme des surfaces en contact [140]. Cette complémentarité se traduit par une forte compacité de l’interface, qui peut être estimée par différentes méthodes : méthode du polyèdre de Voronoï [141], mesure du « gap index » [139, 142], ou méthode statistique basée sur la détermination d’un coefficient de corrélation de forme Sc [140]. Ces trois méthodes sont décrites plus amplement par les figures II-6, II-6bis et II-6ter. Les résultats obtenus par la méthode de Voronoï montrent une compacité peu inférieure (≈4%) à celle des résidus présents au cœur des protéines, elle même peu inférieur (≈5%) à la compacité d’acides aminés sous forme cristalline [52]. Les interfaces sont donc des structures très compactes. Le « gap index », qui montre une faible dépendance en fonction du type de complexe considéré [139], sera de ce fait utilisé pour caractériser divers complexes cristallographiques dans les chapitres IV et V.

Figure II-6 : Mesure de la compacité des interfaces par la méthode du polyèdre de Voronoï [141].

Figure II-6bis : Le calcul du « gap index » est défini par le ratio Surface (à l’interface)/Volume (à l’interface). Le complexe montre l’interaction entre le BPTI (jaune et vert) et la trypsine bovine (bleu et rouge) [143]. Les résidus de l’interface (jaune et bleu) sont représentés en mode « sphere » (gauche) et « surface » (droite) ; les résidus de surface (vert et rouge) en mode « cartoon » (gauche) et « surface » (droite).

Figure II-6ter : Estimation de la compacité par analyse statistique [140]. II.1.2-C Structure de l’interface

Chaque face de l’interface possède une forme globalement ovoïde [52, 139]. Les atomes qui la composent peuvent être distingués en fonction de la variation de surface accessible, entre état libre et lié, et en fonction de la distance minimum par rapport aux atomes de la protéine partenaire. Trois classes d’atomes distincts sont alors identifiées, et sont schématisées sur les figures II-7 et II-7bis : ceux dont l’ASA est non-nulle et qui établissent (zone B) ou n’établissent pas (zone C) de contact de Van der Waals, et ceux dont l’ASA est nulle et qui établissent des contacts de Van der Waals (zone A) :

Les résidus de classe A forment le cœur de l’interface tandis que les résidus de classe B et C forment une couronne, entourant le cœur. En moyenne, pour des interfaces de taille standard, la moitié des atomes sont des atomes en contact (A et B), et un tiers seulement sont enfouis (A), totalement isolés des molécules de solvant [52]. Il est proposé que les résidus appartenant à la couronne (classe B notamment) protègent le cœur vis-à-vis du solvant, favorisant ainsi la réalisation d’interactions Figure II-7 : Représentation de l’interface entre la trypsine bovine

et le BPTI. Le BPTI (en rouge) est représenté en mode « dot » et « cartoon ». La trypsine bovine (en vert) est représentée en mode « sphere ».

ponctuelles énergétiquement favorables [144].

Figure II-7bis : Représentation schématique de l’interface. Les résidus de classe A forment le cœur de l’interface. Ceux de classe B et C forment la couronne [52].