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5.2 G´en´eralisation `a N qubits

5.2.2 Les N qubits

Les espaces polaires symplectiques

A partir de N > 2, les N qubits ne sont plus caract´eris´es par un quadrangle g´en´eralis´e d’ordre N mais sont reli´es [SP07a, Tha07, Hav07] `a une structure plus g´en´erique du fait que l’on a perdu la dualit´e : les espaces polaires symplectiques (cf. section B.2.5), not´es

W2N−1(q). Ces derniers constituent en effet, ainsi qu’on va le voir, la g´eom´etrie sous-jacente au graphe de Pauli pour les N qubits.

Cette id´ee d’avoir tent´e et r´eussi `a relier les N qubits `a de tels objets provient du fait que W (2) est le plus petit repr´esentant (en terme de rang) de la famille constitu´ee par ces derniers.

Pour rappel, un espace polaire symplectique est un espace vectoriel de dimension

d sur le corps de Galois Fq, not´e V (d, q), muni en plus d’une forme bilin´eaire altern´ee non

d´eg´en´er´ee.

ordre). Un sous espace de V (d, q) est dit totalement isotrope si la forme associ´ee est la fonction nulle. L’espace Wd−1(q) peut alors ˆetre vu comme l’espace des sous espaces totalement isotropes de P G(2N − 1, q), tout en tenant compte de la forme symplectique [PS08]. Les plus grands sous espaces totalement isotropes en sont les g´en´erateurs.

Pour q = 2, cet espace polaire contient :

| W2N−1(2) |=| P G(2N − 1, 2) |= 22N − 1 = 4N − 1 points. (5.1)

(2 + 1)(22+ 1)...(2N + 1) g´en´erateurs G. (5.2) Un drapeau (spread) S de W2N−1(2) est un ensemble de g´en´erateurs constituant une partition des points de W2N−1(2), les cardinaux d’un drapeau et d’un g´en´erateur de

W2N−1(2) sont respectivement :

| S |= 2N + 1 et | G |= 2N − 1 (5.3)

Par ailleurs, deux points distincts de W2N−1(q) sont dits perpendiculaires si ils sont reli´es par une ligne ; pour q = 2, il y en a :

22N−1 (5.4)

A la lumi`ere de tout ceci, on peut faire correspondre :

– le nombre de points de W2N−1(2), au nombre d’op´erateurs de Pauli g´en´eralis´es (´equa- tion 5.1),

– le concept de deux op´erateurs qui commutent, avec celui de deux points perpendi- culaires,

– suite `a l’identification entre les deux concepts, l’ensemble des points d’un g´en´era- teur G, avec un ensemble maximalement commutant. L’ensemble S reconstitue la partition ´evoqu´ee tout au d´ebut de ce chapitre : pour une dimension de l’espace de Hilbert consid´er´e, puissance d’un nombre premier d, on aura d + 1 MUBs et d + 1 ensembles maximalement commutant de cardinal d − 1 (´equation 5.2),

– le nombre total de g´en´erateurs de W2N−1(2), au nombre des ensembles maximale- ment commutant (disjoints ou non).

De plus, l’´equation 5.4 indique qu’il y a 22N−1 op´erateurs qui ne commutent pas avec un op´erateur donn´e. Certes, le fait est que cela reste une conjecture que de dire que la g´eom´etrie cach´ee du graphe de Pauli pour les N qubits – qui sera not´e par la suite P [2, N] – est W2N−1(2). Cependant, il y a beaucoup de co¨ıncidences : notamment, la propri´et´e issue de l’´equation 5.4 a ´et´e v´erifi´ee ind´ependamment par Koen Thas [Tha07]. De fa¸con pratique, cela a ´et´e calcul´e pour les cas des 2, 3, et 4 qubits (voir le tableau 5.7 en fin de

section) ; et en soi, vu de quoi il retourne, il n’y a pas, du moins a priori, tellement de raisons pour que l’hypoth`ese se r´ev`ele fausse.

C’est pourquoi on va consid´erer que W2N−1(2) est la bonne g´eom´etrie cach´ee de P [2, N]. Cette derni`ere cependant est une g´eom´etrie « multi-ligne » (au sens o`u un point peut appartenir `a deux lignes par exemple) ; mais on va voir que, du fait que le graphe de Pauli pour les N qubits soit fortement r´egulier, des relations entre W2N−1(2) et les g´eom´etries partielles, d´efinies plus loin, permettent de retrouver toutes les propri´et´es de P [2, N]. L’int´erˆet en est que les g´eom´etries partielles sont des espaces presque lin´eaires (cf. section B.2.4) qui vont « lisser » la structure g´eom´etrique sous-jacente de P [2, N].

Les g´eom´etries partielles :

On sait [Cle02] que la matrice d’adjacence, not´ee A, d’un graphe fortement r´egulier v´erifie les ´equations suivantes :

AJ = DJ et A2+ (µ − λ)A + (µ − D)I = µJ (5.5)

o`u J est la matrice ne contenant que des 1, I, la matrice identit´e, D, son degr´e tel que deux sommets adjacents sont tous les deux adjacents avec le mˆeme nombre λ de sommets, et tel que deux sommets non adjacents sont tous les deux adjacents avec le mˆeme nombre

µ de sommets. On notera le graphe fortement r´egulier correspondant de la fa¸con suivante : gf r(v, D, λ, µ)

La matrice A a ainsi comme valeur propre D avec une multiplicit´e 1 (D n’apparaˆıt qu’une fois dans son spectre) ; ses autres valeurs propres sont r (>0) et l (<0), reli´ees de la mani`ere suivante :

r + l = λ− µ et rl = µ − D (5.6)

Les graphes fortement r´eguliers ont de multiples propri´et´es [Cle02] ; en particulier, les deux valeurs propres r et l sont (except´e pour les graphes connus sous le nom de graphes de conf´erence [Cle02]) des entiers dont les multiplicit´es respectives, f et g, v´erifient les relations suivantes :

f = −D(l + 1)(D − l)

(D + rl)(r − l) et g =

D(r + 1)(D− r)

(D + rl)(r − l) (5.7)

Le graphe de Pauli pour les N qubits, ´etant fortement r´egulier, v´erifie les propri´et´es ´evoqu´ees ci-dessus qui vont permettre de relier les espaces polaires symplectiques avec les g´eom´etries partielles.

Une g´eom´etrie partielle, not´ee gp(s, t, α) [Bat97], est un objet plus g´en´erique qu’un quadrangle g´en´eralis´e fini. C’est un espace presque lin´eaire {P, L} tel que, pour tout point

– Le nombre de points de L reli´es `a P par une ligne est α – Chaque ligne a s + 1 points

– Chaque point est sur t + 1 lignes

Le graphe de gp(s, t, α) est constitu´e de (s + 1)st+α

α sommets et de (t + 1) st+α

α lignes ; il est fortement r´egulier, du type :

gf r 2 (s + 1)st + α α , s(t + 1), s− 1 + t(α − 1), α(t + 1) 3 (5.8)

Par ailleurs, si le spectre d’un graphe fortement r´egulier est de la mˆeme forme que celui d’une g´eom´etrie partielle, un tel graphe est dit pseudo-g´eom´etrique. Les graphes associ´es aux espaces polaires symplectiques W2N−1(q) sont pseudo-g´eom´etriques [Cle02], et sont de la forme : pseudo− g 2 qq N−1− 1 q− 1 , q N−1,qN−1− 1 q− 1 3 (5.9)

Par suite, le graphe de Pauli pour N qubits est du type d´ecrit par l’´equation 5.9.

Exemples :

Afin de fixer un peu mieux les id´ees, voici un exemple d´etaill´e pour N = 3. La section 5.2.1 donne le graphe de Pauli des 3 qubits et quelques unes de ses caract´eristiques. Du spectre de ce dernier, {−527, 335, 30}, puis grˆace `a l’´equation 5.6 (calcul de λ et µ), il

d´ecoule que P [3, 2] est, avec les notations du paragraphe pr´ec´edent, le graphe :

gf r(63, 30, 13, 15)

On va en d´eduire la g´eom´etrie partielle associ´ee :

gf r(v, D, λ, µ) = gf r 2 (s + 1)st + α α , s(t + 1), s− 1 + t(α − 1), α(t + 1) 3 =⇒ gp(s, t, α)?

L’expression ci-dessus est issue de l’´equation 5.8 et des notations concernant les graphes fortement r´egulier, du paragraphe pr´ec´edent. On ne recherche finalement que 3 param`etres, nomm´ement s, t et α, et on dispose de 4 relations comme exprim´e ci-dessus. Eh bien qu’`a cela ne tienne ! On utilise les 3 ´equations les plus simples ; la plus compliqu´ee, `a savoir celle qui contient une fraction, on s’en contentera comme v´erification. Par identification, on a :

Ainsi, dans le cas des 3 qubits, obtient-on la g´eom´etrie partielle gp(6, 4, 3).

A titre d’exemples, le tableau 5.7 regroupe les caract´eristiques des graphes de Pauli des N qubits, pour les cas N = 2, N = 3 et N = 4.

N v e D r l λ µ s t α

2 15 15 6 1 −3 1 3 2 2 1

3 63 45 30 3 −5 13 15 6 4 3

4 255 153 126 7 −9 6 63 14 8 7

Tab. 5.7 – Invariants des graphes de Pauli P [2, N ] pour N ∈ {2, 3, 4}

Les invariants des graphes de Pauli mentionn´es dans le tableau 5.7 ont ´et´e calcul´es « `a la main », mais a posteriori ils d´ecoulent directement des propri´et´es des espaces polaires symplectiques d’ordre 2 et de rang N.

On a, en r`egle g´en´erale :

– le nombre de sommets du graphe : v = 4N − 1, – le degr´e du graphe : D = v − 1 − 22N−1, – s = 22N−1−1 2−1 , – t = 2N−1, – α = 2N−1−1 2−1 , – µ = α(t + 1) = rl + D, – λ = s − 1 + t(α − 1) = µ + r + l,

– le fait que le nombre d’arˆetes du graphe e puisse se d´eduire de α, s et t ; c’est ´egale- ment un autre moyen de retrouver v (cf. la constitution du graphe de gp(s, t, α)).

Quel pourrait ˆetre l’int´erˆet v´eritable des g´eom´etries partielles ? Eh bien, il s’agit d’une autre partition du graphe de Pauli, « moins complexe » au sens g´eom´etrique puisque c’est un espace presque lin´eaire, et qu’elle poss`ede moins de lignes que l’espace symplectique associ´e. Par exemple, dans le cas des 3 qubits, l’espace polaire symplectique associ´e au graphe de Pauli poss`ede 135 lignes, tandis que la g´eom´etrie partielle, elle, « seulement » 45 (45 × 3 = 135). Peut-ˆetre – cela reste une question ouverte – que les 45 ensembles d’op´erateurs de Pauli g´en´eralis´es disjoints, « r´ev´el´es » et organis´es en partition par ces 45 lignes, ont un sens physique particulier du fait de leur particularit´e, comme ce fut le cas pour la g´eom´etrie des 2 qubits, qui « r´ev´ela » les ensembles maximalement commutant.