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de décrochage

À partir de l’ensemble des connaissances accumulées grâce aux travaux sur le décrochage scolaire, plusieurs auteurs ont développé des modèles ayant pour objectif de saisir les dynamiques des processus de déscolarisation à partir des prédicteurs les plus puissants du décrochage scolaire dans une optique plus ouverte et plus globale que ne le faisait des théories classiques que nous avons déjà cités précédemment (Tinto, 1975 ; Vallerand & Sénécal, 1992 ; Rumberger & larson, 1998).

Nous présentons donc dans cette partie deux modèles en particulier dans la mesure où, à la différence d’autres travaux, ceux-ci sont parmi les plus récents, qu’ils ont le mérite de prendre en considération une multitude de facteurs de risque et qu’ils sont véritablement spécifiques à la question des processus induisant une augmentation du risque de décrochage au cours des classes du secondaire.

1. Le modèle causal multidimensionnel du décrochage scolaire (Fortin, Marcotte, Diallo, Royer, & Potvin, 2012)

En s'appuyant sur les travaux pluridisciplinaires sur les facteurs de risque du décrochage scolaire, Fortin et al. (2012) ont construit un modèle multidimensionnel permettant de penser le processus de décrochage scolaire en s'appuyant sur l'articulation des facteurs de risque scolaires, familiaux et personnels dans un échantillon longitudinal de 808 jeunes québécois entre l'âge de 12 ans et l'âge de 19 ans, comme le montre la figure 9. Ce modèle permet de rendre compte de l'apport spécifique de cinq facteurs de risque, en particulier au processus de décrochage prédicteurs pour expliquer l'évolution vers l'abandon des études au cours du secondaire :

Deux facteurs de risque familiaux :

! La relation parents / adolescents ! La dépression / difficultés familiales Trois facteurs de risque scolaire :

! Le climat de classe

! Les interactions des jeunes à l'école ! Le rendement scolaire

Ce modèle permet de mettre en évidence le rôle joué par les facteurs latents en rapport avec leur contribution au processus de décrochage scolaire, et met à une place centrale les facteurs scolaires comme étant des dimensions incontournables de l'arrêt prématuré des études.

De plus, ce modèle nous permet de voir la relation bi-directionnelle entre les interactions négatives à l'école et le rendement scolaire. Cela montre de quelle manière les unes influencent les autres pour créer un contexte qui rend compte de la pression scolaire régulièrement relevée par les décrocheurs eux-mêmes dans les difficultés relationnelles que ceux-ci semblent entretenir avec les personnels scolaires. Ce lien aurait l'avantage d'être un argument de choix pour plaider en faveur d'une intervention préventive ciblée directement à destination des élèves dans le cadre de la classe.

De plus, ce modèle démontre comme cela a été le cas d'études antérieures, qu'en dépit de leur poids important dans la décision d'abandonner l'école, les facteurs personnels ne semblent pas aussi centraux à partir du moment où l'on inclue dans les différents modèles des facteurs institutionnels, organisationnels et contextuels présentant un effet à un niveau macro-social et méso-sociale (Janosz et al. 1997).

Enfin, l'intérêt de ce modèle réside, comme le souligne Lessard et al. (2013), dans le choix de la population qui permet de tirer des conclusions sur le processus de décrochage scolaire qui ne soient pas conditionnées à un échantillon issu de milieux défavorisés ou dans des établissements scolaires qui présentent statistiquement des taux de décrochage très en lien avec des facteurs de risque qui se limitent à la seule dimension délinquante ou liés à des problèmes de comportement, comme c’est trop souvent le cas aussi bien dans les études nord-américaines qu’en Europe.

! Figure 9 - Modèle multidimensionnel du décrochage scolaire (Fortin, Marcotte, Diallo, Royer, & Potvin, 2012)

2. Le modèle prédictif plurifactoriel du risque de décrochage scolaire (Galand, Hospel, Bachérius, Channouri, Dublet, Goyens,…Van Pottelbergh 2011)

Le modèle développé par Galand et al. (2011) montre que le décrochage scolaire est, comme le mettent en avant d'autres auteurs, un phénomène complexe qui se construit sur l'accumulation de facteurs de risque. Cependant, le travail des auteurs nous permet de pondérer, à l'instar des travaux de Janosz et al. (2000), le poids des différents facteurs dans le processus de décrochage.

Les chercheurs ont introduit progressivement dans leurs analyses les différents facteurs dans un ordre prédéfini en introduisant en premier lieu les facteurs les plus distaux (ceux sur lesquels les professionnels pourraient avoir le moins de possibilité d'intervenir

directement), puis les facteurs les plus proximaux (ceux sur lesquels les intervenants pourraient avoir le plus de possibilité d'intervenir), dans l’ordre suivant :

Les facteurs sociaux

Les facteurs relatifs à la trajectoire scolaire Les facteurs relatifs à la santé

Les facteurs relatifs à l'expérience scolaire

Les résultats obtenus par Galand et al. sont résumés dans la figure suivante.

! Figure 10 - Schéma des facteurs de risque associés au risque de décrochage scolaire d'après Galand et al. (2011)

En conclusion, les auteurs constatent que les facteurs sociaux joueraient un rôle dans le processus de décrochage scolaire à travers leur influence sur les facteurs relatifs à la santé et sur la trajectoire scolaire des élèves. D'un autre côté, une partie des facteurs liés à la santé et à la trajectoire scolaire joueraient quant à eux un rôle dans le processus de décrochage scolaire à travers leur influence sur les facteurs relatifs à l'expérience scolaire.

Autrement dit, les facteurs liés à la trajectoire scolaire et aux questions de santé médiatiseraient la relation entre facteurs sociaux et risque de décrochage scolaire, de même que l'expérience scolaire médiatiserait le poids des facteurs sociaux. En cela, et comme l'ont montré Janosz et al. (2000), ce sont les facteurs scolaires et en particulier ceux relatifs à la vie de l'élève à l'école qui auraient le plus de poids sur l'augmentation du risque de décrochage.