• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 4 – Résultats

4.6. Les modèles d’intervention utilisés dans les trois centres

Les descriptions faites par les participantes indiquent qu’il existe des similarités entre les modèles d’intervention utilisés et considérés comme adéquats en contexte de concomitance de violence conjugale-troubles modérés de santé mentale dans les trois centres impliqués dans notre étude, à savoir Violence Info, la maison d’hébergement Marie-Rollet et le Centre intégré universitaire de santé et services sociaux de Québec.

4.6.1. Les modèles d’intervention utilisés au Centre intégré universitaire de santé

et services sociaux de Québec

Les participantes du Centre intégré universitaire de santé et services sociaux de Québec (CLSC-Haute-ville et CLSC-Basse-ville) ont affirmé qu’elles n’utilisaient pas un modèle précis, mais que, selon les cas, elles combinaient plusieurs approches et modèles. Elles expliquent pourquoi dans ce qui suit :

49

« Nous n’avons pas un modèle d’intervention principal que nous utilisons dans nos interventions. C’est nous-mêmes qui décidons des modèles d’intervention à utiliser. J’utilise souvent l’approche systémique, l’approche centrée sur les forces, l’approche humaniste et l’approche cognitivo-comportementale (pour expliquer aux femmes victimes de violence conjugale que ce qu’elles vivent a un impact sur leurs émotions, leurs sentiments et cela les amène à avoir des perceptions sur elles-mêmes). Je parle aussi de distorsion cognitive, car ça les amène à manifester des comportements. Je les réfère aussi au groupe

d’empowerment ».

Certaines participantes ont mentionné qu’elles ne font plus d’intervention individuelle et de sensibilisation à cause des spécificités de leur programme et des lois qui régissent les services, mais qu’elles réfèrent les femmes violentées à des organismes spécialisés. Voici des extraits d’entrevues sur ce sujet :

« Notre façon de faire, c’est vraiment une amorce de sensibilisation, puis d’aide individuelle. C’est sûr qu’on n’a pas eu nécessairement une formation spécifique sur la violence conjugale dans les dernières années à cause de la loi de la protection de la jeunesse, mais les intervenantes sont quand même sensibilisées, car c’est une problématique qui est difficile. On travaille avec deux parents. On réfère aussi les papas à des organismes comme Gapi et Autonhommie. On travaille plus à sensibiliser et à référer. Une fois que nous sommes centrés sur le spécifique des enfants, la problématique de la violence va être travaillée avec d’autres organismes. On travaille aussi à faire réaliser aux parents qu’il y a une dynamique de violence. Une fois que les parents sont conscients, ils vont aller travailler la violence dans les ressources plus spécialisées. Je dirais peut-être que le modèle d’intervention est systémique dans une certaine mesure, mais là je dirais qu’il y a des intervenants qui utilisent différents modèles ».

« Je dirais que oui et non, nous avons un modèle d’intervention à suivre et qu’on travaille le plus possible avec tous les membres de la famille, donc avec l’approche systémique. Mais lorsqu’il y a situation de violence conjugale, je n’irai pas mettre la femme en danger ou les enfants non plus. En ce moment- là, on ne va pas faire du systémique, mais de l’individuel ».

Nous avons remarqué que même si les participantes du CLSC-Haute-ville et CLSC- Basse-ville n’ont pas un modèle d’intervention précis, elles utilisent quand même plusieurs modèles d’intervention tels que : l’approche systémique, l’approche cognitive-

50

comportementale, l’approche centrée sur les forces, l’approche humaniste et l’intervention familiale.

4.6.2. Les modèles d’intervention de base à Marie-Rollet et Violence Info

Nous avons posé la question suivante aux intervenantes de ces organismes : « Quel est le modèle d’intervention principal que vous utilisez auprès des femmes victimes de violence conjugale et ayant des troubles mentaux modérés? » Voici leurs réponses:

« C’est sûr que l’approche féministe est la principale. Elle est quand même inspirée de l’approche humaniste existentielle. Nous utilisons l’approche féministe pour tout le monde. À la base c’est l’approche féministe – humaniste. On utilise aussi beaucoup l’emporwement, donc de leur redonner le pouvoir sur leur vie, parce qu’elles l’ont perdu. De fois, elles se sentent carrément impuissantes. Ce n’est pas mal les deux approches principales qu’on utilise. Féministe –humaniste, les principales, puis empowerment ».

« On travaille parfois avec l’écosystémique parce que, même si on est dans le féministe, on sait bien que si la femme réagit un peu, tout le système va réagir. On travaille aussi avec la thérapie brève, on regarde les objectifs qui permettent à la femme de se mettre en action. Parfois, on a même du béhavioral, la femme qui, je pense à une femme, a tellement reçu les commentaires de son conjoint qu’elle a développé le toc au niveau du ménage. On travaille d’autres modèles, mais l’approche féministe et l’empowerment restent la base de notre travail ».

« Nous utilisons l’approche féministe avec toutes les femmes, y compris celles qui ont les problèmes mentaux, car on croit que toutes femmes ont des capacités et des limites. Donc, on les accepte dans leurs limites à elles. On regarde la capacité de la femme et de quelle façon on peut l’outiller. L’anxiété, les femmes qui sont très anxieuses, on leurs mentionne leur réussite, par exemple, juste le fait de venir aux rendez-vous ou le fait de nous avoir contacté pour la première fois est une réussite. On travaille avec les femmes, peu importe leurs capacités et limites, on axe sur les capacités, des fois où elles ont dépassé leurs capacités qui est la reprise du pouvoir. C’est la technique du petit pas, la technique de l’échelle, qu’est-ce qui serait réaliste pour vous ici et maintenant ».

Les intervenantes en violence conjugale utilisent plus le modèle d’intervention féministe, car elles croient que les femmes sont les expertes de leur vie. C’est donc aux femmes de

51

pouvoir prendre les décisions concernant leur vie, dans le meilleur de leurs connaissances. Elles rapportent que, puisque ce sont les femmes elles-mêmes qui connaissent le mieux leur conjoints celles-ci sont les mieux placées pour connaitre ce qui est le mieux pour elles. Elles mentionnent l’importance du rôle d’égalitaire dans leurs interventions afin de ne pas contribuer à la dynamique de la violence, en disant aux femmes ce qu’elles doivent faire. Sur ce, elles rajoutent qu’il arrive parfois qu’elles soient en désaccord avec les femmes, mais que cela se passe toujours dans le respect. Elles rapportent aussi qu’elles ont un rôle d’éducatrice, parce qu’elles croient qu’informer les femmes sur la violence, c’est aussi leur redonner le pouvoir. Elles désirent que, petit à petit, les femmes reprennent le pouvoir sur elles-mêmes et sur leur vie et qu’elles soient capables de répondre à leurs propres besoins. Dans le même ordre d’idées, elles expliquent aussi aux femmes que prendre soin d’elles-mêmes leur permet non seulement de reprendre le pouvoir sur leur vie, mais également de comprendre que si elles ne s’occupent pas d’elles-mêmes, elles ne seront pas en mesure de s’occuper de leurs enfants. Finalement, elles font aussi comprendre aux femmes que leurs actions constituent des exemples qu’elles donnent à leurs enfants et, qu’ainsi, elles ont des impacts sur leur socialisation.

Dans ces deux centres, les intervenantes utilisent plusieurs approches, mais elles privilégient l’approche féministe et l’empowerment. Selon elles, le processus de la reprise de pouvoir ne peut mieux se faire qu’avec de l’intervention féministe, car elle permet aux femmes de comprendre la dynamique de la violence conjugale.