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Situées dans le vieux centre de Cayenne, les maisons traditionnelles créoles sont des habitations construites pour la population créole bourgeoise du XIXème siècle. Connues aujourd’hui pour leur architecture reconnaissable, ces maisons de maîtres appartenaient à des propriétaires aisés. Elles prennent place dans la trame orthogonale du plan d’extension du chevalier Turgot de 1764. Cette trame divise la vieille ville en îlots carrés, d’environ cent trente mètres de côté. Ces derniers se divisent en six ou douze parcelles qui sont elles-mêmes subdivisées dans le sens est-ouest afin de créer une voirie intermédiaire.

Au sein de ces parcelles les maisons s’alignent à la rue, dégageant ainsi un large espace à l’arrière de la parcelle pour la cour. D’une profondeur de trente mètres, la superficie de la parcelle permet la création de beaux et grands îlots de verdure dans la trame urbaine.

Le long de la rue, les maisons sont construites à soixante centimètres l'une de l'autre, ménageant un accès direct à la cour. Cette discontinuité dans le bâti permet la ventilation de la cour et la création de percées visuelles vers cet espace végétal intérieur.

Simple parallélépipède, la maison de maître présente un léger rétrécissement au fur et à mesure que l'on monte dans les étages. La diversité de façade est accentuée par la différence de hauteur entre le rez-de-chausséee, environ 3m, et les étages, moins hauts. Le auvent quant à lui, présent à tout les étages, crée une coupure dans la façade et participe au rythme de la rue. Enfin, le toit joue lui aussi un rôle dans l'aspect de la maison traditionnelle. Sa pente est double, d'abord très prononcée, pour évacuer l'eau de pluie, elle s'adoucit pour venir couvrir les murs et ainsi protéger l'habitat.

"La qualité esthétique de cet habitat est en fait surtout due à tous les accessoires rajoutés sur le volume de base qui là encore lui donne une grande finesse de lecture, grâce en particulier au travail subtil de décoration" 1

Les matériaux nécessaires à la constructions des maisons traditionnelle tirent généralement parti du milieu environnant. A Cayenne les maisons traditionnelles ne font pas exception et font usage de matériaux locaux - la terre, le sable et le bois.

Tout d’abord, la nature et la composition du sol détermine l’assise de l’habitation. A Cayenne la zone de construction du centre ville se trouvant sur une aire marécageuse, argileuse, les fondations des maisons sont posées sur un empierrement important. Cette étape est cruciale pour asseoir correctement le bâtiment. Afin de prévoir les inondations, fréquentes sous ce climat équatoriale, les maisons sont surélevées de quelques marches par le biais d’un soubassement de briques.

Le bois, élément constitutif principal de la maison, se positionne, au dessus de ces quelques marches, pour former la structure de la maison. Soutenant un voir deux étages, la structure en bois est remplie par un torchis et supporte un toit en tôle qui, avec ses ondulations permet une meilleure évacuation des eaux. Le plancher et le plafond de la maison sont généralement construits à partir de planches de cèdre.

1 RICHTER Monique, “Pour une réhabilitation de l’habitat créole à Cayenne”, Editions L’Harmattan, Paris, 2010, p27

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Les maisons de Cayenne sont parfois de simple RDC, parfois avec un étage mais ne dépasse jamais le R+2 afin de permettre aux alizés de circuler. La circulation de l’air est primordial dans la maison créole, à cause du climat chaud et humide de la Guyane. Les maisons sont conçues pour rester fraîches et aérées tout au long de la journée. Grâce aux façades ouvertes, elles sont traversantes et l’air circule constamment entre la cour et la rue.

Les Cayennais cherchent l’intimité au sein de leur maison et la vie intime et familiale est essentiellement tournée vers la cour, protégée des regards. Le devant de la maison et les balcons côtés rues, sont quant à eux des lieux privilégiés pour les échanges avec le reste du quartier. Ce sont des espaces de représentations, où les familles créoles s'installent pour voir mais aussi pour être vu. Le soir, les guyanais sortent des tabourets et discutent au pas des portes même lorsque la nuit est tombée. La relation au voisinage est très importante dans la vie de quartier et les voisins sont perçus comme des membres de la famille. Les portes du rez-de-chausséee sont en permanence ouvertes sur la rue, cette dernière étant utilisée comme un prolonguement de la maison.

Principes climatiques directeurs de la conception de la maison créole ©Production personnelle

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Coupe transversale de la maison de maître cayennaise ©Production personnelle

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A Cayenne, l’entrée de la maison se fait sur le côté du bâtiment. A droite ou à gauche de la maison, une première porte, en bois, permet d’accéder au corridor, qui mène à l’intérieur de la parcelle. L’entrée dans la maison se fait alors par la galerie ou bien par l’intermédiaire d’une porte d’entrée située sur le côté.

Une rigole permet la récupération des eaux de pluie.

A l’arrivée de l’eau courante, elle ne parvenait dans les maisons que le matin de 8h à 10h, un bassin est alors installé pour faire des réserves d’eau pour le reste de la journée.

La cour est largement végétalisée. On y trouve des arbres fruitiers divers. Par exemple dans toute les cours se trouve un Citronnier. Son jus était utilisé pour désinfecter les plaies ouvertes, pour assaisonner le poisson, comme médicament contre les mots de gorge ou encore comme boisson.

Un poulailler se trouve également dans la cour.

Un beau puit central est alimenté en eau par les nappes phréatiques, constamment remplies par les pluies fréquentes. L’eau est puisée à la main, à l’aide d’un seau. “C’était

la corvée du matin”, “il y avait le coup de main, tu laissais tomber le seau dans le puit, un geste, pring, le seau se remplissait, on le portait, on allait le déverser dans les bails - on appelle ça des bails, les tonneaux.”1 Il

est fait de margelles ou de blocs de granite . Les dépendances (7 et 8) se distinguent de la maison, séparées d'environ 4 m. Elles

1 Paul Kali, résident de Cayenne. Le plan ci-contre est celui de la maison de son enfance, appartenant à ses parents

sont construites en briques et un torchis recouvre la face intérieure de leurs murs. Pour se laver la famille possédait 2 ou 3 fûts. Ces fûts qui servaient à faire fermenter le vin, étaient importés par cargos en Guyane. Partagés en deux et placés dans la salle de bain, ils étaient remplis matins et soirs. Petite particularité Cayennaise, la toilette du matin et la toilette du soir se faisaient dans deux pièces distinctes. Le matin, une petite toilette suffisait et se faisait par conséquent dans une pièce au sein de la maison appelée cabinet de toilette. Le soir, après une dure journée passée dans l’humidité et la chaleur, le passage à la douche était obligatoire et la toilette se faisait alors dans la salle de bain. La cuisine, séparée du corps de bâti principal, permet de garder odeurs, fumées, bêtes et saletés à distance de la maison. Elle est équipée de foyers incorporés dans un plateau, qui fonctionnent au charbon. Aussi appelés réchauds, ils contiennent le feu servant à la cuisson du repas.

Au fond de la cour on retrouve les tinettes, des toilettes, qu’il fallait vider régulièrement. L’élément central de la maison créole est sa galerie. A Cayenne, présente à tous les niveaux de la maison, elle est tournée vers la cour et accueille la plupart des activités de la famille. La galerie est l’espace le plus aéré de la maison car il est ouvert mais couvert. C’est un endroit semi extérieur où l’on prend les repas, on fait les devoirs, la couture, et même où l’on reçoit ses amis. Dans les années 1940 les guyanais vivaient principalement à l’extérieur mais lorsqu’ils étaient chez eux, vous les trouviez à coup sûr dans la galerie de leur maison.

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