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La disponibilité des matériaux a largement influencé la mise en œuvre des constructions de Guyane. Comme on peut s’en douter, le bois est l’un des matériaux dominant, élément d’ailleurs commun à tout le territoire et plus encore, à toutes les populations.

Les Amérindiens sont les premiers à avoir su exploiter les richesses environnementales de la Guyane. Installés au sein de la forêt amazonienne, les peuples indigènes ont tiré parti de ce matériau de construction, idéal et présent en abondance, pour façonner leur habitat. Les premières constructions coloniales s’inspirant des habitats amérindiens, le bois s'imposa comme principal composant de la construction pendant des années.

Jusqu’à la fin du XVIIème siècle, les constructions sont simples et le milieu naturel fournit l’ensemble des éléments nécessaires à l’édification des maisons - branchage, tressage de palmes et bois ronds pour l’ossature.

Aux XVIIIème et XIXème siècles, les techniques de constructions évoluent sous l’influence des colons, désireux de s’installer plus confortablement. S’émancipant de cette architecture de bois, ils font appel à des charpentiers de marine et à des militaires européens qui importent de nouveaux procédés.1

Par la suite, les colons introduisent la brique avec enduit de sable et de chaux. “Les colonisateurs rêvant de constructions “en dur”2, installent, notamment à Saint-Laurent, des briqueteries dès le début du XIXème siècle. La brique creuse, de par ses grande inertie thermique, est adaptée à la chaleur de Guyane, elle offre une bonne résistance à la chaleur mais aussi à l’humidité. Rendues désuètes par l’invasion du parpaing dans la construction, il ne subsiste aujourd’hui de ces briqueteries, que des ruines.

La plupart des maisons traditionnelles créoles sont un mélange de toutes ces techniques, elles sont conçues de bois et de briques. La brique assure l’assise et la stabilité tandis que les cloisons ajourées en bois assurent la ventilation naturelle.

Le bois est également utilisé pour les menuiseries et les planchers. A Cayenne par exemple, jusqu’à la fin du XIXème siècle on exploite des bois locaux, le wacapou, le cèdre ou le grignon.

“Les matériaux nécessaires à la construction sont issus du milieu environnant : la forêt fournit le bois, la terre argileuse permet de fabriquer la brique, les fondations sont réalisées à partir des roches granitiques ou briques.”3

1 Source : Guide d’utilisation des bois de Guyane dans la construction, Michel Vernay, Daniel Fouquet, 1997

2 TOULIER Bernard, PABOIS Marc, “Architecture coloniale et patrimoine : l’expérience française”,actes de la table ronde organisée par l’Institut national du patrimoine, Paris, Institut national du patrimoine, 17-19 septembre 2003 / [sous la direction scientifique de Marc Pabois et Bernard Toulier], p16

3 Direction Régionale de l’Environnement de la Guyane, “Atlas des paysages de Guyane”, VUE D’ICI & ARUAG, 2007, p28

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2. architecture créole guyanaise traditionnelle

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Au fil des années, l’amélioration des communications entre la métropole et la colonie permet l’introduction de nouveaux matériaux. Ces derniers sont mis en œuvre grâce à des techniques constructives apportées par des nouveaux arrivants venus de la métropole.

A la fin du XIXème siècle certaines constructions ont remplacé le bois par le fer, ininflammable. Quant aux toits, on utilise à Cayenne, jusqu’en 1870, des couvertures en bardeaux de wacapou. Ensuite, les ardoises métalliques et la tôle ondulée, fournies par la métropole, remplacent le bois.

.CLIMAT.

La maison traditionnelle créole est soumise à un climat caractéristique, où chaleur et humidité, omniprésentes, imposent une réflexion particulière. Guidée par le besoin de fraîcheur mais aussi celui d’intimité, elle est conçue pour offrir à l’habitant un cocon agréable et fonctionnel au sein des villes.

Les études d’Amos Rapoport introduisent le facteur climat comme l’élément prédominant toute architecture se trouvant dans des régions chaudes et humides. Avant la culture, avant les besoins et les envies, avant les moyens financiers, c’est le climat qui se place en première position et qui donne le la.

De ce fait, la préoccupation qui dominent la conception de la maison créole est la mise en place d’une aération naturelle. Indispensable avant l’arrivée de la climatisation, la ventilation naturelle est assurée en premier lieu par une implantation spécifique. Le bâtiment est orienté selon les alizés, les façades principales sont ainsi face aux vents dominants. Par l’intermédiaire de larges ouvertures fermées seulement par des persiennes, mais aussi de cloisons ajourées qui ne montent pas jusqu’au plafond, le vent circule librement à travers la maison. Ces séparations intérieures sont faites d’un treillage de gaulette, un bois fibreux habillé de terre glaise, un mélange qui maintient la fraîcheur à l’intérieur de la maison. La maison créole est poreuse, les impostes au dessus des portes sont ajourées à la manière des caillebotis, de telle sorte que même fermée, la maison continue de respirer. Cette recherche d’air frais est également à l’origine d’un espace particulier, typique des maisons créoles, la galerie. Espace majeur des habitats que l’on rencontre dans les régions chaudes, la galerie est un objet climatique, social et symbolique.

Tout d’abord la galerie joue un rôle tampon, en affaiblissant les impacts du climat sur la maison. Double peau venant isoler la maison, couverte mais ouverte, elle intercepte les rayons du soleil, trop bas pour le toit débordant. Espace ouvert aux vents mais protégé du soleil, elle assure un climat tempéré et confortable.

Son action climatique est double car elle permet de laisser les fenêtres ouvertes lorsque les pluies tropicales s'abattent sur la Guyane. Sans galerie, la ventilation des espaces intérieurs en temps de pluie est plus difficile et puisque les pluies sont fréquentes, son rôle est primordial.

La galerie, d’après les écrits d’Amos Rapoport1 est le principal élément climatique qui modifie la forme architectural de l’habitation créole. C’est un objet qui vient s’ajouter au bloc principal, une

1 RAPOPORT AMOS, “Pour une anthropologie de la maison”, Editions Dunod, 1973

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sorte d’excroissance, qui peut être placée à différent endroits de la maison. A Cayenne par exemple, elle se trouve sur la façade intérieure, en contact direct avec la cour alors qu’à Saint-Laurent-du- Maroni, la galerie court sur trois des côtés de la maison.

Comme je le développerai plus loin, elle est, de part le confort climatique qu’elle apporte, la pièce la plus utilisée par la famille créole. La galerie accueille les repas, le temps des devoirs, le linge qui sèche, les conversations amicales, les soirées calmes et joyeuses et les rires des enfants. A l’inverse, les pièces intérieures sont très peu utilisées, ou dans de rares cas comme à Cayenne, pour recevoir. La galerie est aussi un prolonguement du dedans au dehors ou à l’inverse du dehors au dedans. La culture créole est de très près liée à la nature et le quotidien se déroule principalement à l’extérieur, ce qui fait de la galerie un espace vraiment approprié à la famille créole.

La maison créole protège donc du soleil, de la chaleur, mais aussi de la pluie. Les nombreuses intempéries - quotidiennes durant certaines saisons - imposent la surélévation des constructions. Elles sont donc isolées du sol de quelques marches, par un soubassement en briques, afin de les protéger de l’humidité.

Enfin, les toits, sont un énième dispositif participant au maintien de la chaleur et de la pluie à l’extérieur de la maison. En tôles ondulées la plupart du temps, l'ondulation et la pente importante favorise le bon écoulement de l’eau, et leurs larges débords contrent les gouttes pluie et les rayons du soleil.