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Les médicaments en cours de développement

III. Les dispositifs d’accès précoce en France

5. L’ATU

5.1 Historique

5.1.2 Les médicaments en cours de développement

A partir de 1982, ces traitements expérimentaux sont accessibles aux patients inclus au sein d’un essai clinique et, à titre exceptionnel, à des patients appartenant à un service autre que celui en charge de l’investigation uniquement si un accord est conclu entre un médecin demandeur, l’expert en charge de l’essai clinique et le fabricant.[62]

Dans les années 80, l’épidémie de SIDA (Syndrome d'immunodéficience acquise) a mis en évidence la nécessité de mettre rapidement à disposition des patients de nouveaux traitements dans le but de limiter leurs pertes de chance face à la maladie. Rappelons qu’il faut environ une dizaine d’années pour qu’un médicament soit disponible auprès des patients et que dans le contexte de certaines pathologies, dont le SIDA, ce délai peut s’avérer une grande perte de chance. Aussi, une pression sur les pouvoirs publics a été exercée par des associations de malades atteints du VIH sensibilisés à l'information médicale par le biais de médias grand public ou spécialisés, afin que les traitements, même lorsqu'ils sont encore en investigation, puissent être mis à la disposition des patients. [63]

Le décret d’application de la loi n° 88-1138 du 20 décembre 1988 relative à la protection des personnes qui se prêtent à des recherches biomédicales, également connu sous le nom de loi Huriet Serusclat, prévoit dans la situation mentionnée à l’article R. 5126 du CSP et à titre dérogatoire que des patients non inclus dans des essais cliniques puissent tout de même bénéficier du traitement :

« En cas de nécessité impérieuse pour la santé publique, le promoteur peut être autorisé à fournir à titre onéreux à des établissements de soins un médicament dans des conditions fixées par les ministres chargés de la Santé et de la Sécurité sociale.

56 Cette autorisation ne peut être accordée qu'après avis de la commission mentionnée à l'article R. 5140 du CSP, et lorsque toutes les conditions suivantes sont réunies :

1. Le médicament concerné est destiné à traiter une maladie grave ; 2. Il ne peut être remplacé par un autre traitement ;

3. Il existe des preuves d'efficacité et de sécurité suffisantes pour permettre son utilisation dans des conditions approuvées par le ministre chargé de la santé ;

4. Une demande d'autorisation de mise sur le marché français a été déposée ou une lettre d'engagement de dépôt d'une telle demande a été adressée au ministre chargé de la santé ; 5. Le promoteur s'engage à poursuivre les essais nécessaires pour la constitution du dossier d'autorisation de mise sur le marché.

L'autorisation mentionnée au deuxième alinéa du présent article est accordée pour une durée maximale d'un an. »[64] [65]

En 1992, la loi n°1279 du 8 décembre 1992 (transposition en droit français de la directive 89/341/CEE du Conseil du 3 mai 1989 [66]) réunit au sein d’un même texte la possibilité d’utiliser certains médicaments sans AMM, qu’ils soient importés ou en cours de développement. En effet, l’article L.601-2 du CSP tel que créé par la loi du 8 décembre permet l’utilisation à titre exceptionnel de médicaments sans AMM lorsque ceux-ci :

- « sont destinés à traiter des pathologies graves, alors qu'il n'existe pas d'alternative thérapeutique, dès lors que leur efficacité est fortement présumée au vu des résultats d'essais thérapeutiques auxquels il a été procédé en vue du dépôt d'une demande d'autorisation de mise sur le marché ; ». On retrouve ici la notion de produit en cours de développement.

- « sont destinés à des patients atteints de maladies rares et dès lors qu'il n'existe aucun médicament déjà autorisé au sens de l'article L. 601 et susceptible de se substituer à eux;

- sont importés en vue de leur prescription à des malades nommément désignés, sous la responsabilité de leur médecin traitant, dès lors qu'ils sont autorisés à l'étranger. » Il est fait mention ici de médicament importé depuis l’étranger, où il possède une AMM.[67] Cette autorisation est délivrée pour une durée limitée, par le ministre chargé de la santé avec l’accord préalable par le titulaire des droits d’exploitation du produit dans le cadre d’un médicament en cours de développement ou à la demande d’un médecin traitant dans le cadre d’un médicament importé pour un patient donné.

En 1993, le Professeur Luc Montagnier transmet au Premier Ministre M. Edouard Balladur son rapport sur le SIDA. Dans ce rapport, il propose notamment d’utiliser les dispositions de la loi du 8 décembre 1992 pour permettre une mise à disposition précoce des médicaments expérimentaux aux patients selon un protocole thérapeutique et non un protocole d’essai. Ces propositions seront reprises dans le décret d’application n°94-658 du 8 juillet 1994 de la loi du 8 décembre 1992 où la notion d’ATU apparait pour la première fois. Ce décret définit les modalités de demande notamment la composition du dossier de demande, les conditions d’octroi et l’instance en charge de l’évaluation de la demande, la durée de l’ATU, les obligations du titulaire de l’ATU, notamment en termes de pharmacovigilance, les conditions de renouvellement, de suspension, de retrait et de caducité de l’ATU.[68]

57 Par la suite, la loi du 8 décembre est modifiée par la loi n°96-452 du 28 mai 1996 portant diverses mesures d'ordre sanitaire, social et statutaire [69] et par son décret d’application[70]. On retrouve plusieurs différences notoires à savoir :

- la disparition de la distinction entre maladie rare et grave (le dossier de demande d’ATU est identique quel que soit la pathologie),

- la disparition de la mention de médicament importé, il est dorénavant possible de demander une ATU pour un médicament fabriqué en France,

- L’introduction du protocole d'utilisation thérapeutique et de recueil d'informations, établi entre l’Agence du médicament et le titulaire des droits d'exploitation.

Cette nouvelle loi met en évidence les deux types d’ATU que nous connaissons aujourd’hui : - L’ATU de cohorte, destinée à un groupe de patients et

- L’ATU nominative à destination d’un patient donné.