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Les mécanismes de financement de la décentralisation

Dans le document LA CONDUITE PAR L ETAT DE LA DECENTRALISATION (Page 142-145)

B - Une carence des dispositifs d’évaluation partagés

RÉPONSE DU PREMIER MINISTRE

3. Les mécanismes de financement de la décentralisation

3.1. La Cour relève dans son rapport l’absence de transparence dans les mécanismes financiers qui président à la décentralisation et s’interroge sur le recours à des impôts nationaux fractionnés pour financer les transferts, créations et extensions de compétences.

Il conviendrait plutôt de parler de complexité.

La compensation des transferts, créations ou extensions de compétence doit être conforme à l’objectif d’autonomie financière. Ce principe est inscrit au sein de l’article 72-2 de la Constitution qui dispose que « les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l’ensemble de leur ressources. La loi organique fixe les conditions dans lesquelles cette règle est mise en œuvre ».

La loi organique du 29 juillet 2004 définit les ressources propres comme étant celles constituées notamment des impositions de toutes natures dont la loi autorise à fixer l’assiette, le taux ou le tarif, ou dont elle détermine, par collectivité, le taux ou une part locale d’assiette.

Le principe de la compensation financière s’opérant, à titre principal, par l’attribution d’impositions de toute nature est repris à l’article 119 de la loi du 13 août 2004. Le choix de ce mode de compensation répond à une demande des élus.

La compensation sous forme du produit d’un impôt partagé, même si elle ne donne pas aux collectivités la possibilité d’en fixer le taux et l’assiette, respecte le principe de l’autonomie financière. La nature même de ce produit est différente de celle d’une dotation puisque il n’y a pas dans le premier cas de face-à-face entre l’Etat et l’échelon local. Ainsi, à l’inverse des dotations budgétaires, l’Etat ne peut ajuster les modalités d’indexation dans un objectif de réduction des déficits publics. Une fois défini le taux par le législateur, l’impôt partagé évolue selon des critères économiques indépendants.

De plus, ce mode de compensation par le partage du produit d’un impôt est entouré d’une garantie face à une évolution négative des recettes par rapport au montant de la compensation en raison de la conjoncture économique ou des effets de variations de tarifs décidées au niveau national sur la ressource transférée

Les transferts de compétences résultant de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales sont donc dans leur quasi-totalité financés par des transferts de fiscalité qui sont libres d’emploi.

Pour les régions, il s’agit d’un transfert de TIPP (la TIPP représente en 2009 96 % du montant de la compensation financière) et pour les départements un transfert de TSCA et depuis 2008 de TIPP (la part de fiscalité dans la compensation financière est de 99 % en 2009).

3.2. La Cour fait par ailleurs observer que « cette fiscalité fractionnée ne répond que de manière artificielle à l’exigence d’attribution de ressources propres pour compenser les charges transférées ».

A cet égard, depuis 2006, l’assiette de la TIPP a été régionalisée : le Gouvernement a en effet obtenu auprès Conseil de l'Union européenne une dérogation visant à ouvrir la possibilité pour les régions de moduler le tarif de TIPP. Le financement des transferts s’effectue depuis lors par l’attribution à chaque région d’une fraction de TIPP qui lui est propre, assise sur les volumes de carburants consommés sur son seul territoire.

Par ailleurs, le projet de réforme de la taxe professionnelle devrait renforcer le lien entre la TSCA et les départements dans la mesure où la quasi intégralité de cette recette serait attribuée à ce niveau de collectivité.

Cependant, il s’est avéré difficile de trouver des impôts dont l'assiette est localisée et bien répartie sur le territoire national et dont les taux ou les tarifs sont modulables.

L'une des rares assiettes localisables qui pourrait être transférée de l'Etat aux collectivités territoriales avec une liberté de fixation du taux de l'impôt est l'assiette « revenu ». Un tel transfert nécessiterait toutefois un encadrement important et une coordination accrue entre les collectivités territoriales et l'Etat.

Au final, le recours à des impôts partagés entre l'Etat et les collectivités pour financer des transferts de compétences apparaît comme étant la seule solution qui permet de préserver l'autonomie financière des collectivités territoriales.

Néanmoins, la compensation des transferts de compétences aux communes, aux EPCI et aux régions d’outre-mer s’effectue uniquement sous forme de crédits budgétaires. Pour les ROM, cela s’explique par l’absence de régionalisation de l’assiette de TIPP sur leur territoire.

Le maintien des dotations de compensation sous forme de crédits budgétaires ou de prélèvement sur recettes s’avère nécessaire en raison, dans certains cas, de la nature de la compétence transférée. En premier lieu, il peut s’agir de concours qui sont répartis en fonction de critères (recours à des critères statistiques dans la répartition du concours particulier de la DGD relatif aux documents d’urbanisme ou utilisation de critères démographiques et de superficie de bibliothèques de lecture publique pour la répartition du concours de la DGD relatif aux bibliothèques municipales et départementales de prêt).

En second lieu, les dotations de compensation ne sont pas toutes libres d’emploi, elles sont dans certains cas affectées. Les dispositions relatives à la DGD relative à la formation professionnelle, à la dotation régionale d’équipement scolaire (DRES) et à la dotation départementale d’équipement des collèges (DDEC) prévoient leur affectation à la réalisation de certaines dépenses.

S’agissant de la DDEC et de la DRES, malgré leur forfaitisation tardive (réforme consensuelle en 2008 seulement), il avait été décidé en accord avec les représentants des élus et dans le respect des dispositions constitutionnelles56 de maintenir leur affectation originelle pour le financement de dépenses d’investissement énumérées par les articles L.

3334-16 et L. 4332-3 du CGCT. Cette affectation ne permettait pas, comme le propose la cour, leur transformation en compensation de nature fiscale.

56) Le principe de la libre disposition des ressources posée par l’article 72-2 de la Constitution n’interdit pas l’Etat d’allouer aux collectivités territoriales des subventions dans un but déterminé (Décision n° 2003-474 du Conseil Constitutionnel du 17 juillet 2003).

Chaque réforme effectuée sur les concours financiers répond aux objectifs de lisibilité et de prévisibilité (exemples : celle effectuée sur le concours particulier relatif aux ports maritimes, comme celle de la DRES et de la DDEC, réalisées à un an d’intervalle).

3.3. La Cour des comptes souligne également l’absence de stabilisation dans le financement de la décentralisation et dans le partage des fiscalités fractionnées entre l’Etat et les collectivités territoriales en raison d’ajustements.

Les augmentations de transfert de fiscalité soulevées par la Cour des comptes ne résultent pas seulement d’ajustements, mais s’expliquent surtout par le cadencement sur plusieurs exercices des transferts de services et des personnels exerçant les missions des compétences transférées par la loi du 13 août 2004. En effet, l’article 147 de la loi n°2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 aménage un mécanisme de report des effets du droit d’option au 1er janvier de l’année n+1 ou au 1er janvier de l’année n+2 par rapport à l’année où il est exercé, selon qu’il est exercé avant ou après le 31 août de l’année n. Ce dispositif a été institué pour préserver les intérêts des collectivités territoriales afin qu’elles ne supportent pas l’afflux massif de personnels sans pouvoir disposer des ressources nécessaires.

Parallèlement, le Gouvernement réalise un gros travail de présentation claire et précise des composantes du montant de la fiscalité transférée à chaque région et à chaque département par la transmission annuelle de circulaires aux préfets de région et de département présentant les mesures inscrites dans chaque loi de finances. Si des difficultés ont pu apparaître en 2005-2006, depuis lors, elles ont été surmontées.

Enfin, l’Etat respecte les obligations constitutionnelles qui lui sont imposées de compenser tout accroissement de charge résultant des créations et extensions de compétences par la loi ou des modifications par voie réglementaire des conditions d’exercice des compétences transférées.

La compensation des nouvelles charges peut donc entraîner l’augmentation du montant des impôts transférés qui sera clairement identifiée dans son montant et dans son objet.

Dans le document LA CONDUITE PAR L ETAT DE LA DECENTRALISATION (Page 142-145)