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D. Rôles des PG

3. Les GAG dans des phénomènes pathologiques

La diversité structurale unique des HS/Hp et CS est également utilisée par plusieurs pathogènes afin de s’adsorber au niveau des tissus de l’organisme pour l’infecter et s’expandre.

a) GAG et infections

De nombreux virus, bactéries et parasites ont été décrit dans la littérature comme interagissant avec les chaines de GAG présents dans les matrices de l’organisme et au niveau des surfaces cellulaires. La plupart des pathogènes n’utilisent les GAG que comme premier point d’ancrage dans l’organisme avant une interaction (en cis ou en trans) avec un récepteur membranaire qui va permettre son internalisation, et d’infecter la cellule. C’est le cas du virus de l’herpès HSV-1 (reconnaissant les glucosamines 3-O-sulfatées) via sa glycoprotéine D (gD), de l’hépatite C via la glycoprotéine 2 de l’enveloppe (E2), de l’hépatite B, du papillomavirus humain, de l'adénovirus, du virus de la dengue (Chen et al. 2008)… Le virus de l’immunodéficience humaine-1 (VIH-1) peut également interagir avec les HS via la glycoprotéine de 120kDa (gp120) de son enveloppe (Mondor et al. 1998). Des bactéries peuvent aussi se servir des GAG pour leur fixation au sein de l'organisme, comme

Mycobacterium tuberculosis (Pethe et al. 2001), Listeria monocytogenes (Alvarez-Dominguez

et al. 1997)… D’autres bactéries comme Streptococcus pneumoniae et Pseudomonas

aeruginosa expriment des métalloprotéases pour induire le phénomène de shedding de PG.

Les bactéries vont ainsi interagir avec ces fragments et se « camoufler » du système de surveillance immunitaire (Chen et al. 2007) (Park et al. 2001). Les parasites interagissent également avec les chaines de GAG, Toxoplasma gondii avec les HS et CS (Carruthers et al. 2000) alors que Plasmodium falciparum est plus affin pour les chaines de CS-A (Fried et al. 2006).

b) GAG et cancer

La cancérogenèse est un phénomène complexe qui se caractérise principalement par la prolifération anarchique de cellules cancéreuses capable de vasculariser le tissu tumoral formé, d'envahir l'organisme en passant par la voie sanguine (on parle de métastases), mais également de se (dé)différencier. Ces événements (en dehors des métastases) sont normalement contrôlés dans un organisme sain et font intervenir les GAG. En effet, comme nous avons pu le voir, les GAG et notamment les HS forment un réservoir de facteurs de croissance. En destabilisant les HS, principalement par la sécrétion d'héparanase par les cellules cancéreuses (Vlodavsky et al. 2002), les facteurs de croissance contenus dans la MEC vont être libérés et vont stimuler la prolifération des cellules dont la cellule cancéreuse. De

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plus, l'expression de certains HSPG et des enzymes impliquées dans la biosynthèse ou modification des chaines d'HS est différente dans la plupart des cancers par comparaison aux cellules saines (Mythreye & Blobe 2009) (Lai et al. 2008). Cela aboutit à un nouveau profil saccharidique par rapport au tissu d'origine. Les interactions avec le milieu environnant vont donc être différentes, améliorant l'affinité pour certains facteurs nécessaires au développement tumoral. Cet environnement va également être perturbé car les cellules tumorales acidifient le pH du tissu (Gerweck & Seetharaman 1996), et cette acidité va également perturber les intéractions protéines-sucres et protéines-protéines du fait des différentes protonations possibles des acides aminés.

A partir d'une certaine taille, toutes les cellules tumorales en amas n'ont plus accès aux ressources nutritives de l'environnement et vont devoir vasculariser la tumeur à partir des vaisseaux préexistant pour capter les nutriments du sang : cette néovascularisation est appelée angiogenèse. Ce processus nécessite l’interaction de facteurs de croissance avec la cellule, et notamment les VEGF (Vascular Endothelial Growth Factors) qui sont également retenus dans les HS des matrices où ils vont jouer un rôle fondamental (Harris et al. 2013). Là encore, la sécrétion d’héparanase par les cellules cancéreuses va permettre de libérer ces facteurs angiogéniques qui vont stimuler les récepteurs cellulaires. L’héparanase joue également un rôle dans la surexpression de VEGF par la cellule, stimulant davantage la vascularisation du tissu tumoral (Zetser et al. 2006).

Un des derniers phénomènes dans la maladie est le détachement des cellules et leur colonisation de l’organisme à travers le courant circulatoire : c’est le phénomène de métastase. Pour cela, les cellules doivent remodeler leur surface cellulaire ou sécréter des enzymes de dégradation pour diminuer ou abolir les interactions entre cellules ou avec la matrice. Les HA, CSPG et HSPG constituant les MEC et les surfaces cellulaires jouent des rôles essentiels dans l’adhésion des cellules et leur cohésion au sein du tissu. Le changement de profil en GAG (principalement des HS) peut affaiblir ces interactions intercellulaires et cellules- matrice facilitant ainsi la migration des cellules cancéreuses. Le shedding ou le clivage des GAG des PG cellulaires abolit de manière efficace ces liaisons et permet l’invasion des cellules cancéreuses dans les tissus voisins. L’intravasation et l’extravasation de celles-ci peuvent être reliées aux HS car les cellules cancéreuses sont capables de chimiotaxie, et les HS de former des gradients de chimiokines comme nous l’avons vu pour les phénomènes immunitaires (van Zijl et al. 2011). L’efficacité de cette chimiotaxie est accrue par la surexpression des récepteurs aux chimiokines (Müller et al. 2001).

Enfin, les cellules cancéreuses sont généralement des cellules qui sont revenues à un stade de cellule non-différenciée. Ces cellules expriment à leur surface différentes protéines, dont les HSPG, et dans des proportions différentes par rapport à la cellule différenciée dont elle est issue (Knelson et al. 2014a).

Tous les HSPG n’interviennent pas de la même manière dans les différents stades de cancers et dans les différents cancers, deux HSPG pouvant même avoir des effets antagonistes sur le développement tumoral. Ces effets viendraient de la structure de la chaine d’HS et de sa

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capacité à interagir avec des facteurs différents. Les rôles majeurs des HSPG sont schématisés figure 35.

c) Les maladies génétiques

Les maladies génétiques liées à un dysfonctionnement de la biosynthèse, modification ou catabolisme des GAG sont extrêmement nombreuses et variées. Comme nous avons pu le voir jusqu’à présent, des mutations génétiques peuvent aboutir à la non-polymérisation de la chaine de GAG ou à des défauts de structures pouvant être létales ou entrainer des malformations variées. Les défauts d’enzymes de dégradation des GAG sont également des pathologies héréditaires rares appelées mucopolysaccharidoses (MPS) et engagent le pronostic vital de la personne atteinte. Pour revue voir Sarrazin et al 2011 et figure 30.