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FIGURE56 – Schéma d’évolution d’une paroi récemment déglacée dans le sud-est de l’Islande.

ciaires se répercute sur l’évolution des versants voisins. Ainsi, la destruction des terrasses fluvio-glaciaires et des morai- nes latérales entraîne une mise à l’affleu- rement rapide des parois. Alors que cette couverture détritique faisait office de cou- che protectrice, sa disparition raccourcit la durée de vie des polis. Les traces de raclage glaciaire subissent un démantèle- ment rapide sous l’effet des agents atmosphériques et des dynamiques de versant. Les vitesses de démantèlement observées sont de l’ordre de plusieurs centimètres sur une période de 70 ans environ ; elles sont loin devant les estima- tions réalisées sur des surfaces subhori- zontales en Laponie suédoise par M.-F. André (1995, 1996, 2002) avec des valeurs

comprises entre 1 et 5 mm.1000 ans-1

dans des roches cristallines et carbona- tées. Les écoulements proglaciaires, caractérisés par de forts débits à la sortie du glacier, empêchent également toute accumulation de se former au pied des parois lorsqu’ils sont connectés aux ver- sants. Le matériel apporté en bas de

pente est directement évacué et déposé plus loin sur le sandur. Cette situation a deux conséquences : d’une part, la forma- tion de tabliers d’éboulis et de cônes en bas de paroi ne peut débuter qu’à partir du moment où les écoulements se décon- nectent des versants ; d’autre part, les écoulements entretiennent le raidisse- ment basal du versant formé par le pas- sage du glacier. Ceci a pour effet d’activer les dynamiques de décohésion qui favori- sent le démantèlement rapide des assises rocheuses.

Le style du retrait glaciaire a donc un impact direct sur l’évolution récente des versants déglacés. Lorsque le glacier stagne ou progresse, les écoulements proglaciaires se répandent sur le sandur et sont susceptibles d’empêcher toutes formes d’accumulation au pied des ver- sants. Lorsque le retrait frontal est au contraire rapide, l’impact des écoule- ments sur les versants est moins contraignant, puisque les chenaux s’inci- sent et que la bande d’activité fluviale a tendance à rétrécir.

cées situées en contre-bas. Lorsque les hauts versants sont soumis à des dynami- ques linéaires intenses (écoulements tor- rentiels, coulées de débris, avalanches), le matériel transporté est déposé au pied de la paroi et peut recouvrir les bourrelets de till et les éboulis. L’apport du versant supra-glaciaire prend alors le pas sur la production issue de la paroi récemment déglacée. Le profil des versants peut donc influencer la vigueur des processus de mobilisation des débris.

Le contrôle lithologique est un élément de différenciation dans l’évolution des ver- sants. La nature des assises rocheuses induit un démantèlement suivant des modalités différentes. Les basaltes se débitent en éléments de tailles variées, du fragment centimétrique au bloc métrique. La taille des matériaux dépend de la mas- sivité du matériel. Dans les basaltes pris- més, les gros blocs se détachent à la faveur des diaclases. Le basalte massif fournit quant à lui du matériel plus petit. Par ailleurs, les basaltes islandais ne sont pas toujours sensibles à la gélifraction tant qu’ils n’ont pas été altérés par des éléments biologiques (Étienne, 2001). En revanche, les hyaloclastites sont très sen- sibles au gel car elles sont poreuses et permettent l’infiltration de l’eau au sein de la roche (Étienne, 2001). Le matériel se désagrège ainsi rapidement en menus fragments sous l’effet de la gélifraction. Le caractère homogène et massif des dykes rend difficile l’action du froid et explique leur bonne conservation, mais leur encaissant très divisé se délite rapi- dement. Le mode et la vitesse de déman- tèlement des polis varient donc considé- rablement selon leur nature lithologique.

Le rôle des dynamiques paraglaciaires ne doit pas être négligé. Elles se manifestent

de deux manières, par le biais de la décompression post-glaciaire et par celui des écoulements proglaciaires. À l’échelle des versants, nous n’avons pas relevé de grandes formes spectaculaires de décom- pression de type exfoliation. Mais l’ouver- ture des réseaux de fissuration observés sur les polis basaltiques et hyaloclasti- ques peut être en partie attribuée à la décompression, voire à l’activité sismique de la région. Le départ du glacier a entraîné des compensations qui se sol- dent par une décohésion des parois. Cette fissuration secondaire favorise l’infiltra- tion de l’eau dans la roche et facilite la gélifraction. Les manifestations spécifi- ques de la décompression ne sont donc visibles que dans de rares secteurs, là où la faiblesse des pentes exclue l’influence des autres dynamiques de versant. Ail- leurs, ses effets sont masqués par des transferts sédimentaires exacerbés.

La présence d’écoulements proglaciaires se place directement dans les influences paraglaciaires puisqu’elle dépend du style du retrait glaciaire. Les écoule- ments adoptent le plus souvent un style fluvial de tressage lié à la variabilité des débits liquides et au charriage de sédi- ments glaciaires de bas de versant. Les observations annuelles de P. Marren (2002) sur le front du Skaftafellsjökull ont révélé que lorsque le glacier est en progression, la densité de tressage aug- mente. Mais dès que le retrait du front s’amorce, les écoulements se concentrent en un chenal unique, parallèle à la marge du glacier. Cette configuration s’est répétée plusieurs fois, depuis la fin du Petit Âge Glaciaire, en témoignent les nombreux alignements de blocs roulés encastrés les uns derrière les autres, notamment en amont des moraines de 1945. La perturbation des marges progla-

LA PERTUBATION DU PETIT ÂGE GLACIAIRE A 1 2 3 B 4 5 C 6 7 191

192 LA PERTUBATION DU PETIT ÂGE GLACIAIRE A 1 2 3 B 4 5 C 6 7

CONCLUSION CHAPITRE 7 PARTIE C

L

a région de Skaftafell présente, dans un périmètre restreint, un grand nom- bre de versants récemment déglacés aux caractéristiques lithologiques et topographiques variées. L’analyse des faciès de ces versants a permis de déga- ger les principaux facteurs d’évolution actuelle. Les conditions climatiques sont telles qu’elles entraînent une météorisation intense et continue des polis gla- ciaires tout au long de l’année, que ce soit sur un support basaltique ou hyalo- clastique. Elles favorisent également une mobilisation rapide du matériel dés- agrégé par le biais des écoulements torrentiels, des coulées de débris et des avalanches. Son action est en cela renforcée lorsque la vigueur des pentes entraîne un fort appel au vide. Dans ce contexte de transferts sédimentaires exacerbés, les processus de décompression post-glaciaire participent au démantèlement rapide des polis glaciaires en fragilisant les assises rocheuses. Par ailleurs, la présence d’écoulements proglaciaires peut perturber les moda- lités de ces transferts sédimentaires. Les versants récemment déglacés du sud-est de l’Islande sont donc soumis à une combinaison de facteurs, dont le facteur paraglaciaire, qui résulte en un ajustement rapide des parois après le départ du glacier.

Les rythmes d’évolution des versants