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PARTIE I ÉTAT DE L’ART

3.1 Les expressions vidéoludiques

3.1.1 L’attitude ludique dans les jeux vidéo

Les jeux vidéo sont des jeux qui ont la particularité d’être informatisés. Une première définition nous est fournie par le Dictionnaire Encarta : le jeu vidéo est un « jeu électronique interactif qui contient des images, se joue sur ordinateur ou sur console et dont l’action se déroule sur un écran ».

Il y a plusieurs types de jeux vidéo, mais la difficulté pour les classer résulte du fait qu’ils procèdent souvent d’une hybridation : les titres se multiplient et ils appartiennent à plusieurs catégories à la fois, d’où les tentatives pour combiner des familles pour essayer de réaliser un classement. En 1998, les frères Le Diberder proposent trois groupes en se basant sur les magazines spécifiques aux jeux vidéo (Le Diberder, 1998) : les jeux d’action, de réflexion et de simulation. Mais Sébastien Genvo constate en comparant quatre magazines (Genvo, 2003), qu’aucun d’entre eux ne définit un jeu de la même façon : seize genres ont été attribués à six jeux vidéo populaires de 2001. La classification par thèmes ignore les différences et les similitudes fondamentales qui doivent être trouvées dans les intentions du joueur. L’interactivité est une composante essentielle pour examiner des jeux vidéo. Le degré de motivation combiné avec les diverses formes d’interactivité dans le jeu, peuvent être les deux éléments fondamentaux pour établir des genres de jeux vidéo (Wolf, 2002). Tomas Malaby définit le jeu comme un ensemble d’éventualités inventées qui produisent des résultats interprétables (Malaby, 2007) : « A game is a semi-bounded and socially legitimate domain of contrived contingency that generates interpretable outcomes ». Ainsi, les jeux sont des modes d’expériences reflétant des expériences humaines. Un jeu ne peut donc pas être considéré uniquement sur des critères intrinsèques, car le jeu lui-même peut changer selon ce que le joueur en fait.

Dans un jeu vidéo, le joueur va évoluer dans un monde préalablement pensé par les « game designers », appelés « architectes de la narration » (Jenkins, 2002), car ils ne racontent pas simplement des histoires, mais « conçoivent des mondes et sculptent des espaces51

Pour que la relation interactive entre le joueur et le jeu soit possible, le « game designer » détermine quels choix le joueur aura dans cet univers et quelles seront les conséquences de ses choix, quelles informations le jeu lui délivrera et de quelle manière ; en d’autres termes, il définira les « mécanismes ludiques » qui vont inciter le joueur à poursuivre sa quête. Ce premier travail, qui détermine les concepts de base du projet, est appelé « game design* ».

». Les termes utilisés par Jean-Paul Lafrance lorsqu’il parle du langage interactif vont dans ce sens (Lafrance, 1994) : « le concepteur du jeu n’est pas un conteur d’histoires ou un donneur de leçons, c’est un architecte d’univers, et l’utilisateur, un héros démiurgique qui contrôle le monde qui se donne à faire ».

L’univers dans lequel évolue le joueur est perçu par ce dernier comme un dispositif qui va donner sens à ses actions. Ce dispositif constitue le cadre intelligible mettant à disposition des

51 « Game designers less as storytellers and more as narrative architects. […] Game designers don’t simply tell

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outils cognitifs et pratiques permettant au joueur de s’exprimer, de créer. C’est le « game design » qui « fait évoluer l’utilisateur vers un statut de joueur, c’est-à-dire celui de quelqu’un qui a intégré les règles de fonctionnement du jeu et qui peut actualiser celui-ci » (Nélide- Mouniapin, 2006).

« Lorsqu’une personne joue, elle adopte une posture d’immersion fictionnelle particulière, que nous proposons de nommer ‘attitude ludique’. Mais pour que cette attitude ludique puisse être adoptée, […] la structure du dispositif […] doit contenir une certaine jouabilité » (Genvo, 2006b).

La volonté d’immerger le joueur dans un univers virtuel se fait, en première instance, par le biais du dispositif technologique ; cette première forme d’immersion est sensorielle. La deuxième forme d’immersion est mentale, et prend forme grâce à la structure même du jeu. Sébastien Genvo utilise l’acception de Jacques Henriot (Henriot, 1989 ; cité par Genvo, 2006a) pour définir la structure de jeu comme un « système de règles que le joueur s’impose de respecter pour mener à bien son action ». Or, c’est la qualité d’un jeu qui va permettre au joueur de « mener à bien son action », en fonction de sa prise en main, du niveau de difficulté, du degré de liberté, de la cohérence des actions, des modes d’interactions, d’une manière générale de tout ce qui touche à « l’essence même du jeu qui cumule jouabilité et plaisir de jeu52

Plusieurs théoriciens du jeu ont fait la distinction entre les termes « game » et « play ». Selon Mark Prensky (Prensky, 2001), le jeu « game » renvoie à une structure organisée et le jeu « play » renvoie au divertissement (« fun ») comme source de plaisir. Ainsi, le joueur est libre de découvrir et d’explorer un monde, mais des règles viennent recadrer sa liberté. Le concept de « gameplay » nous amène à croire qu’un équilibre est nécessaire entre liberté d’action (« play ») et règles du jeu (« game ») (Genvo, 2006a) : « un joueur ayant une totale liberté d’action, qui n’a aucune règle à éprouver, se sentira perdu, ne sachant quels sont les buts à atteindre ni les moyens qui lui sont donnés pour y parvenir. À l’inverse, une trop grande profusion de règles frustrera le joueur. Il sera débordé par le grand nombre de paramètres à prendre en compte pour jouer, la structure ne laissant que peu de place à l’expression de son propre jeu ».

», c’est-à-dire au « gameplay ».

3.1.2 Le « ludo » en jeu

3.1.2.1 Les jeux vidéo comme œuvres de créativité

Dans la confusion qui règne autour de l’éternel débat qui porte sur les jeux vidéo pour savoir si ces derniers peuvent constituer un art, notre approche n’aura pas la prétention de vouloir apporter une réponse à la question. Il faudrait alors commencer par définir l’art, ou comme l’a par exemple fait Eddy « Graoum le mauve » Leja, déterminer ce qui n’est pas de l’art (Leja, 2003). À partir de certains points de vue que nous mettrons en correspondance, nous tenterons simplement de savoir pourquoi des éditeurs, des game-designers et d’autres

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enthousiastes défendent les jeux vidéo comme étant un art, au même titre que le cinéma, la peinture, l’architecture, etc.

Si des game-designers ont été promus Chevaliers des Arts et des Lettres par le ministère de la Culture, nous pouvons admettre que les jeux vidéo ont une certaine reconnaissance artistique et dépassent la dimension du pur divertissement.

Selon Ray Muzyka, PDG du studio Bioware53, le défi côté artistique est de « faire vivre au joueur une expérience qui livre une forte charge émotionnelle54 ». Selon Marcel Duchamp, « la spécificité de l’émotion artistique vient de ce qu’elle est provoquée par un objet mis à distance, posé comme objet esthétique ». Les jeux vidéo peuvent-ils d’abord procurer des

émotions comme objets esthétiques à contempler ? Into the Pixel55 [13] est une bonne

occasion de montrer les fondements d’un jeu vidéo dans ce concept d’art. Depuis 2004, l’exposition rassemble chaque année à Los Angeles, des œuvres préparatoires (« Artworks ») à la réalisation des jeux vidéo (Figure 73). Les seize œuvres exposées, provenant du monde entier et sélectionnées par un jury d’experts en jeux vidéo, permettent aux artistes du milieu d’être reconnus.

Figure 73. Extrait des collections 2007 et 2009 provenant de l’exposition Into the Pixel [13] sur l’art et les jeux vidéo.

53 http://www.bioware.com/

54 Interview sur le site Play3-Live : http://www.play3-live.com/news-ps3-vision-du-jeu-video-par-ray-muzyka-

ceo-de-bioware-13730.html

55 Co-organisateurs de l’exposition : Entertainment Software Association (ESA), Academy of Interactive Arts

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Bryan Ochalla (Ochalla, 2007) a interviewé sur le site Gamasutra [6], des artistes travaillant dans le milieu des jeux vidéo. Ces professionnels ont le sentiment d’être oubliés

par le public. L’artiste Mike McCarthy (Lionhead Studios56

Avant même d’avoir le jeu en main, les bandes annonces vont influencer notre façon de voir le jeu vidéo. Ces vidéos publicitaires que nous appelons « trailer* », annoncent la sortie prochaine d’un jeu vidéo en empruntant des codes cinématographiques : les prises de vues et les effets spéciaux qui accompagnent le graphisme du jeu vidéo nous font croire que c’est un film qui va sortir au cinéma. Le même procédé est utilisé pour la scène cinématique* qui intervient cette fois-ci pendant le jeu vidéo pour ponctuer la narration. La progression du joueur est temporairement arrêtée, ce dernier est passif devant la séquence et devient spectateur.

) pense que les gens ont l’impression que l’ordinateur supplante le côté artistique et créatif : « The average reaction I get when I talk to people about being a games artist is, ‘Oh, do you actually have to draw, then?’ ».

Ce qui plaît d’abord, pour une personne qui achète un jeu vidéo par exemple, c’est l’aspect graphique : la première satisfaction est visuelle. Les styles graphiques ne manquent pas. La tendance est à l’hyperréalisme qui est possible grâce aux nouveaux moteurs de jeux vidéo très performants. Ceux-ci intègrent un éclairage basé sur la radiosité* (illumination globale) pour simuler de manière réaliste la dispersion de la lumière dans une scène 3D. Les détails sont plus nombreux, les phénomènes physiques et les éléments de la nature sont également simulés. La bande annonce présentant le moteur de jeu Cry Engine utilisé pour le jeu vidéo

Crysis [52] (Figure 74), précise bien que ce que nous voyons, nous pouvons le vivre en temps réel : « What you see is what you play57 ».

Figure 74. Captures d’écran du jeu vidéo Crysis [52] utilisant le moteur de jeu Cry Engine. Sur le site inCrysis [12].

56 http://www.lionhead.com/

57 Bande annonce pour Crysis 2 utilisant le moteur de jeu Cry Engine 3. Sur le site Jeuxvideo.com [15]:

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Les jeux vidéo peuvent-ils alors procurer des émotions comme objets à vivre ? Sur la base des résultats de douze années d’expérimentations, Nicole Lazzaro (Lazzaro, 2004) explique qu’elle a pu identifier plus de trente émotions liées au « gameplay » plutôt qu’à l’histoire du jeu. Les gens jouent plus pour l’expérience que le jeu crée que pour le jeu lui-même : une précipitation d’adrénaline, une aventure viscérale, un défi mental. Bernard Perron (Perron, 2005) nomme « G emotions » les émotions liées au « gameplay », qu’il différencie des « F emotions » (« fiction emotions ») et des « A emotions » (« artefact emotions »).

Comme nous l’avons vu dans le sous-chapitre intitulé « L’attitude ludique dans les jeux vidéo » (en page 74), le travail qui consiste à définir le « gameplay » est confié à un ou plusieurs « game designers ». Ces derniers vont créer le « game design document » (« GDD ») qui va présenter tous les éléments techniques et artistiques qui vont faire le jeu vidéo. Ainsi, quand nous jouons à tel jeu vidéo, nous sommes en prise avec les éléments que le concepteur veut nous faire rencontrer. Selon l’artiste conceptuel Joseph Kosuth, qui écarte la conception de l’esthétique dans l’art : « une œuvre d’art est une présentation de l’intention de l’artiste ». Cette affirmation rejoint celle de Joseph Olin, chef de l’Academy of Interactive Arts and Sciences en 2003 : « pour qu’il y ait art, il doit y avoir un tête-à-tête entre le concepteur et le joueur58

Dans son essai, Eddy « Graoum le mauve » Leja (Leja, 2003) définit les concepteurs et les joueurs comme des artistes et laisse sous-entendre que l’« expression artistique » dont il parle n’est pas un acte individuel : « après avoir vu que les développeurs de certains jeux étaient éligibles au statut d’artiste, il nous reste à nous demander s’ils sont les seules personnes directement concernées par le jeu vidéo qui puissent créer et s’exprimer ? […] J’appellerai expression ludo-artistique cette forme d’expression propre au jeu vidéo, qui est l’apanage non pas du développeur mais du joueur ».

».

Le joueur-artiste va en quelque sorte achever « l’œuvre ouverte » (Eco, 1979) laissée par le concepteur-artiste. Les formes visuelles utilisées dans le jeu vidéo Everyday Shooter [55], découlent directement des interventions effectuées par le joueur. Sur le principe des réactions en chaîne, une simple action est capable d’engendrer toute une série de variations graphiques, donnant au joueur l’impression de composer des œuvres plastiques à l’écran (Figure 75).

Figure 75. Variations graphiques provoquées par le joueur dans Everyday Shooter

[55]. Sur le site Tom’s Games [38].

58 Joseph Olin on the art of games. Interview pour le site Gamespot par Tor Thorsen, le 10 août 2007 :

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De plus en plus de jeux vidéo sont livrés avec les éditeurs de niveaux, c’est-à-dire le logiciel qui permet la création des différents environnements, y compris les possibilités de progression dans le jeu. Lorsqu’un niveau est terminé dans le jeu, le joueur passe au suivant (les différents niveaux d’un jeu sont appelés « cartes » ou « maps* »). L’éditeur de niveaux en libre service encourage les utilisateurs à imaginer leur propre monde dans lequel ils peuvent inventer toutes sortes d’actions. À partir du jeu Counter Strike [49], Tazus a ainsi pu créer une nouvelle carte qui est une reconstitution de la Petite France, un quartier de Strasbourg (Figure

76). Cette carte met en scène des terroristes (Group Agricol’s Army) et des contre-

terroristes59. La création des niveaux dans la conception (« Level design* ») est généralement confiée au « level designer » en reprenant les intentions générales de jeu préétablies par le « game designer ».

Figure 76. « Map » de la Petite France à Strasbourg faite par Tazus à partir du jeu

vidéo Counter Strike [49].

La difficulté à estimer qui sont réellement les auteurs d’un jeu vidéo est soulignée par Sébastien Genvo (Genvo, 2003) : « le véritable auteur du jeu est-il alors le concepteur du programme, les graphistes, ou l’utilisateur qui crée l’architecture dans laquelle va se dérouler la partie ? ».

La dimension artistique que l’on accorde aux jeux vidéo, provient du fait que ces derniers sont supports de créations et d’émotions. Les jeux vidéo ont la capacité de produire des émotions, d’abord, comme objets esthétiques à voir, offrant des moments de pure

59 Synopsis écrit par l’auteur : « une semaine avant une conférence européenne pour l’acceptation des OGM dans

l’agriculture européenne commune. Un mouvement agricoterroriste dirigé par Jové Bosé veut contrer les accords en faisant régner un climat de terreur sur Strasbourg. Le but est de faire exploser l’exposition de Xela, symbole de l’abrutissement de la société française par les médias. GAA (Group Agricol’s Army) : faites exploser l’exposition, contre-terroristes : défendez l’exposition ». Disponible sur le site de Tazus : http://www.tazusmaps.com/index.php?page=de_strasbourg

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contemplation visuelle, ensuite, comme objets interactifs à vivre : en créant notre propre histoire, en participant aux graphismes, en détournant les jeux vidéo.

3.1.2.2 Les jeux vidéo comme œuvres culturelles

« Si vous avez besoin de vraies images, tous les monuments historiques français sont à votre disposition pour donner le goût de notre patrimoine, de notre pays60

Les jeux vidéo ludo-culturels mêlent à la fois aventure et faits historiques. Dans ce genre de jeu, les connaissances historiques du joueur acquises durant l’exploration sont nécessaires à la résolution des énigmes ; l’idée étant d’apprendre en jouant.

».

En 1997, le culturel, le multimédia et le monde du jeu vidéo, collaborent pour produire le premier jeu vidéo ludo-culturel : Versailles 1685 : Complot à la Cour du Roi Soleil61 [69]. Ce jeu vidéo d’aventure historique raconte la vie au Château de Versailles au siècle de Louis XIV. Une attention particulière est portée aux personnages et au décor. Toutes les pièces du château sont fidèlement reconstituées en 3D à partir de photographies actuelles, de plans et de peintures d’époque (Figure 77). L’intrigue* se superpose à la retranscription réaliste des lieux, des personnages et des dates, l’objectif étant de découvrir qui est à l’origine du complot contre le château.

Pour accélérer les mouvements des personnages, un système de déplacement rapide permet au joueur de se déplacer écran-par-écran en pointant et en cliquant un lieu (le point & click*). À chaque lieu, il peut avoir une vision de l’environnement sur 360°.

Figure 77. Versailles 1685 : Complot à la Cour du Roi Soleil [69]. 1997. Sur le site Jeuxvideo.com [15].

60 Discours prononcé en mars 2007 par l’ancien ministre de la Culture Renaud Donnedieu de Vabres, lors de la

remise des insignes de Chevalier dans l’Ordre des Arts et des Lettres au créateur et producteur de jeux vidéo Peter Molyneux. Vidéo disponible en ligne sur le site Gamekyo : http://www.gamekyo.com/newsen19573_peter- molyneux-devient-chevalier.html

61 La Réunion des musées nationaux, Canal+ Multimédia, Cryo Interactive. Versailles va donner suite à une

série de jeux vidéo produits par Cryo Interactive : Égypte 1156 avant JC, Égypte II, Chine : Intrigue dans la Cité interdite, Pompéi, etc.

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The Secrets of Da Vinci : le Manuscrit Interdit [66], est un jeu vidéo d’aventure historique, qui nous plonge dans l’art de la Renaissance. L’intrigue se déroule en 1522, dans le Manoir

du Cloux (devenu Clos Lucé62

Figure 78

en 1660), lieu où Léonard de Vinci fut consacré par François 1er « premier peintre, ingénieur et architecte du roi de France » et dernière demeure de l’artiste

italien ( ).

Figure 78. Photo actuelle du Clos Lucé et capture d’écran du jeu vidéo The Secrets of Da Vinci : le Manuscrit Interdit [66], 2006. Sur le site Jeuxvideo.com [15].

Le joueur incarne Valdo, ancien apprenti de Francesco Melzi (disciple préféré du grand maître), qui doit retrouver le manuscrit caché. Les énigmes sont basées sur des œuvres majeures du génie de la Renaissance (Figure 79) : la machine volante, la Joconde, la Bataille

d’Anghiari, Saint Jean-Baptiste, etc.

Figure 79. Intérieurs du Manoir du Cloux dans le jeu vidéo The Secrets of Da Vinci : le Manuscrit Interdit [66], 2006. Sur le site Jeuxvideo.com [15].

62Le Château du Clos Lucé, Parc Leonardo da Vinci, Amboise. Monument classé, il est depuis 1802 la propriété de la famille Saint Bris. www.vinci-closluce.com.

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Le respect historique a été un souci permanent dans le travail de reconstitution des lieux et des personnages (Figure 80), qui a été fait en partenariat avec les propriétaires actuels du Clos Lucé et Pascal Brioist63.

Figure 80. Création du personnage François 1er à partir d’un tableau peint par

l’artiste français Jean Clouet en 1527, exposé aujourd’hui au Musée du Louvre à Paris. Sur le site du jeu vidéo The Secrets of Da Vinci : le Manuscrit Interdit [66].

Néanmoins, Marianne Tostivint de l’équipe TOTM Studio, en charge du « game design », précise que certaines énigmes et certaines parties du bâtiment ont été adaptées pour les besoins du jeu vidéo, comme par exemple la grange qui sert de chambre à Saturnin, ou l’atelier de Léonard de Vinci qui n’existe plus aujourd’hui : « le lieu a été réinventé à partir de différentes descriptions et illustrations d’ateliers de peintre de l’époque […]. Mais c’est aussi l’esprit de l’artiste, qui cherchait toujours à simplifier le travail de l’homme, à lui substituer la force mécanique, qui nous a inspiré pour créer des machines telles que la scie et la perceuse qui se trouvent dans l’atelier64 ». Finalement, même si de minimes éléments ont pu être inventés, c’est l’univers de Léonard de Vinci qui a pu être restitué.

Cette tendance à réajuster certains faits historiques pour les adapter au jeu vidéo est employée par les concepteurs pour enrichir les événements, les circonstances, les incidents, qui en les combinant, vont former une intrigue passionnante.

C’est ce que nous pouvons encore remarquer dans l’un des plus récents jeux vidéo d’aventure à vocation culturelle : Assassin’s Creed 2 [46]. Le jeu a lieu dans la Renaissance Italienne du XVe siècle, entre Florence et Venise, et raconte l’histoire du florentin Ezio Auditore qui veut venger son père trahi et assassiné. Le comparatif en image, rapprochant des photographies actuelles des deux villes italiennes et des captures d’écrans du jeu vidéo, nous