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Les cheminements locaux d’un mot d’ordre national

A NGERS L OIRE M ETROPOLE

2. L A MIXITE SOCIALE DANS LES POLITIQUES DE L ’ HABITAT

2.1. Les cheminements locaux d’un mot d’ordre national

L‟examen de la manière dont l‟enjeu de mixité sociale a émergé, a été formulé et pris en compte dans les politiques développées dans l‟agglomération angevine donne à voir des évolutions sensibles au cours des vingt-cinq dernières années. Ces évolutions peuvent se résumer, schématiquement, de la manière suivante : une lente montée en puissance de l‟échelon d‟agglomération et de l‟institution intercommunale dans la prise en compte et le traitement de ce problème public, accompagnée d‟une transformation de l‟approche, de la maîtrise des flux dans les quartiers les plus spécialisés vers le rééquilibrage spatial du stock de logements sociaux à l‟échelle intercommunale.

Ces évolutions sensibles s‟accompagnent d‟invariants qui le sont tout autant. Tout d‟abord, qu‟elle soit formulée en termes de ségrégation sociale ou de mixité sociale, la question a systématiquement été abordée, dans l‟agglomération angevine, à partir du logement social (et le plus souvent à partir de la situation des grands ensembles d‟habitat sociale). Ensuite, les diagnostics et les débats locaux

témoignent d‟une tension persistante entre les enjeux de mixité sociale et du droit au logement, qui font l‟objet de politiques faiblement articulées. Enfin, il est frappant de voir combien les évolutions des politiques de mixité sociale (formulation du problème, objectifs et réalisations) conduites dans l‟agglomération sont, dans la durée, indexées sur les évolutions des politiques nationales en la matière. Ce dernier point est d‟autant plus notable que l‟agglomération angevine présente des traits particuliers au regard de l‟enjeu de mixité sociale. Au titre de ces spécificités figure l‟importance du logement social dans l‟agglomération (26% du parc de résidences principales), que les acteurs locaux expliquent par une tradition locale ancienne, mêlant l‟héritage du catholicisme social et celui de la figure d‟E. Claudius Petit41, ainsi que par la faiblesse des ressources des ménages qui place Angers dans le peloton de tête des agglomérations du Grand Ouest pour l‟accueil des populations modestes. Une seconde caractéristique mérite d‟être soulignée : la faiblesse de la présence des minorités visibles dans l‟agglomération42. En 2005, les communes d‟Angers Loire Métropole comptaient près de 10 000 résidents étrangers soit 3,7% de la population de l‟agglomération, et deux fois moins que la moyenne nationale (8,1%). A l‟échelle de la ville d‟Angers, la proportion de population étrangère s‟élève à 5,5% de la population totale de la ville. Même si les immigrés et leurs descendants sont concentrés dans les grands ensembles d‟habitat social de la ville centre (La Roseraie43, Monplaisir, Belle-Beille) et de Trélazé (Les Plaines), cette concentration demeure limitée par rapport à celle observée dans les ZUS françaises ou d‟autres villes de la région.

« Heureusement, on a pas de ghettos. On n’est pas dans la situation de l’Ile-de-France, de PACA ou du Nord. Quand je discute avec des collègues de ces régions, je vois bien qu’on n’est pas dans le même monde (…) La mixité ici, c’est vraiment une question sociale, pas raciale. Ce qui ne veut pas dire que le problème soit plus simple. On a des familles très pauvres qui cumulent les problèmes. Des familles avec trois générations de chômeurs qui habitent sous le même toit, souvent regroupées dans les mêmes immeubles » (ALM - VP)

a. Mise sur agenda et premières réponses à l‟échelle communale

Jusqu‟à la fin des années 1980, la ségrégation sociale n‟a pas semblé constituer un problème pour les acteurs locaux. La spécialisation sociale des espaces résidentiels est totalement absente des diagnostics et études réalisées par la DDE ou l‟AURA, qui abordent la question de l‟habitat sous l‟angle de la production voire de l‟appareil de production44. Dans cette approche, les enjeux sociaux et spatiaux liés à l‟habitat sont abordés du seul point de vue de l‟adaptation de l‟offre à la demande : il s‟agit

41 Le ministre de la Reconstruction et de l‟Urbanisme de la IVe République, qui occupe une place éminente dans le Panthéon du mouvement HLM, est en effet né à Angers. Mais son parcours personnel et sa carrière politique se sont déroulés loin du Maine-et-Loire, entre Paris et Firminy. S‟il a effectivement laissé sa marque sur le territoire, c‟est en retenant en 1953 la ville d‟Angers pour la construction expérimentale d‟un des premiers grands ensembles français (Belle-Beille). 42 Geste (2007) Diagnostic territorial dans les domaines de l’intégration et de la lutte contre les discriminations, Rapport pour le FASILD.

43 Ce quartier angevin –non classé en ZUS- accueille à lui seul plus du quart des ménages étrangers hors UE présents dans le parc social de la ville.

44 Dans une note de novembre 1981 relative à un projet de plan local de l‟habitat d‟Angers, l‟AURA indique ainsi que « Le

maintien de l’activité est l’objectif n°1 du plan local de l’habitat car le bâtiment a un rôle très important dans l’économie locale. Les autres objectifs sont dépendants de celui-ci ».

d‟« offrir à chacun un logement adapté à ses besoins », ce qui passe d‟abord par une programmation quantitative de la production et, secondairement, par la prise en compte des « besoins particuliers de

populations spécifiques » (handicapés, handicapés, « familles à insertion difficile », marginaux, gens du

voyage…) dans cette production.

C‟est à l‟occasion des premières opérations de la politique de la ville que l‟enjeu de mixité va émerger sur l‟agenda local. En 1984, la ville de Trélazé s‟engage dans une opération Habitat et vie sociale (HVS) pour le quartier des Plaines, alors marqué par un fort niveau de vacance (qui atteindra un pic de 20% du parc en 1987). Elle est suivie en 1989 par la ville d‟Angers, avec une opération de développement social des quartiers (DSQ) dans le quartier Belle-Beille. Ces deux opérations, qui associent chacune la commune, l‟Etat et un bailleur social (Le Toit Angevin à Trélazé et l‟office municipal d‟Angers pour Belle- Beille), servent de cadre à la réalisation de diagnostics sur l‟occupation du parc social, qui mettent au jour la vacance croissante et la paupérisation des quartiers, sous l‟effet des mobilités résidentielles. Ils révèlent aussi des concentrations particulièrement marquée des ménages étrangers, des familles nombreuses et des chômeurs dans certains ilots, voire dans certains immeubles.

Ces diagnostics qui insistent conjointement sur la vacance et la paupérisation accélérée de certains segments du parc ne vont pas conduire aux mêmes réponses dans les deux villes. A Trélazé, sous l‟impulsion du bailleur social et de la mairie communiste, la résorption de la vacance est prioritaire. Des démolitions et des fusions d‟appartements sont menées (réduisant le parc de 685 à 589 logements), pour ajuster l‟offre à la demande. Ces interventions sont prolongées par des interventions sur les façades (isolation thermique et « embellissement » par des peintures colorées typiques de la période) et à partir de 1991, par des réaménagements des espaces extérieurs. Mais jusqu‟à l‟élection de Marc Goua à la mairie en 1995, qui a fait du désenclavement du quartier des Plaines et de l‟attraction de population moins défavorisées la priorité de ses mandats successifs45, les enjeux du quartier n‟ont pas été formulées en termes de mixité. Il en va différemment à Belle-Beille où, confrontés au même diagnostic (paupérisation et vacance), les acteurs du DSQ se sont lancés dans une opération de reconversion d‟immeubles de logements sociaux en logements étudiants. De cette opération expérimentale, qui visait à tirer parti de la présence du campus d‟Angers à proximité immédiate du quartier, il était attendu qu‟elle résolve conjointement les problèmes de vacance (en réduisant le parc de logements sociaux) et de spécialisation sociale (en attirant une nouvelle population d‟étudiants dans le quartier). Ce projet phare du DSQ, fortement soutenu et promu par la CNDSQ, n‟a pas produit les effets escomptés, comme l‟indique le comité local DSQ dans un bilan établi en 1993 : « La réaffectation de

logements sociaux en direction des étudiants provoque une double réaction. La modification d'usage n'est pas toujours bien acceptée car elle n'a pas donné lieu à un véritable dialogue entre municipalité et quartier. De plus l'argumentation avancée d'une redynamisation du quartier par l'apport d'une population jeune est contrebalancée par l'état transitoire du statut étudiant et les nombreux mois de fermeture de l'université. De plus, les étudiants s'ils logent et étudient à Belle-Beille, font leurs achats et vivent leurs loisirs plutôt au centre ville ». L‟échec de cette opération de mixité exogène (par l‟attraction

de populations extérieures au quartier) a durablement marqué les acteurs angevins46. On peut d‟ailleurs penser que la moindre insistance mise sur l‟objectif de rétablissement de la mixité sociale par l‟attraction

45 Priorité qui sera mise en œuvre dans le cadre d‟une ORU (démolition de 5 immeubles, soit 185 logements entre 1999 et 2004), puis d‟une convention ANRU.

46 Plusieurs documents établis par l‟agence d‟urbanisme dans les années 1990 et au début des années 2000 en témoignent, qui développent des analyses critiques de la notion de mixité et remobilise cet exemple pour les illustrer.

de nouveaux habitants dans les projets de rénovation urbaine en cours à Angers, par rapport à celui de Trélazé, trouve son origine dans cet échec fondateur.

Renonçant à l‟objectif de redynamisation du quartier par l‟attraction d‟une population nouvelle, le comité local DSQ (qui réunit, autour du maire et du préfet, l‟ensemble des acteurs du quartier) adopte en 1993 un objectif plus réaliste : freiner la dynamique de paupérisation de Belle Beille en « évitant autant que

possible les concentrations de familles cumulant des difficultés trop importantes qui se traduisent ensuite par des difficultés de voisinage, absence d’entretien, dégradation des parties communes ».

Même si l‟expression n‟apparaît pas, c‟est ici qu‟est formulé pour la première fois l‟enjeu de mixité sociale : la concentration spatiale de populations en difficulté sociale est à l‟origine de conflits et de dégradations ; elle doit être évitée –« autant que possible »-, ce qui passe par un changement des pratiques d‟attribution du bailleur social.

Ainsi formulé à partir du quartier de Belle-Beille, c‟est sous cet angle des attributions HLM que l‟enjeu de mixité sociale apparaît sur l‟agenda angevin au début des années 1990. Dans le prolongement des tentatives de mise en place d‟un fichier commun de la demande locative sociale à l‟échelle de la commune d‟Angers dès la fin des années 1980, qui visait à mettre en place un système de gestion concertée des attributions de logements sociaux, la DDE a engagé en 1991 la négociation d‟un Protocole d‟occupation du patrimoine social (POPS) avec la ville, les bailleurs sociaux et les réservataires HLM (1% logement). Signé en juillet 1993, ce protocole fixe à chaque organisme des objectifs d'accueil de ménages prioritaires47, à hauteur de 40% de leur volume d‟attributions annuel. Cet objectif, qui vise à rendre effectif le droit au logement, s‟accompagne d‟un souci affiché de répartition équilibrée de ces ménages difficiles entre les quartiers angevins. Mais le souci de mixité, s‟il est affirmé dans le POPS (« Les organismes rechercheront par des politiques d’attribution adaptée (échanges,

gestion de proximité…) à éviter la concentration de populations en difficulté ») est de second rang, et ne

se décline ni dans des objectifs précis, ni dans la mise en place d‟instruments de suivi territorialisés. Le bilan 1993-1996 du POPS établi par l‟AURA témoigne de la tension entre droit au logement et mixité sociale, et de la priorité accordée à Angers au premier de ces deux objectifs : les quotas d‟accueil des ménages prioritaires définis dans le protocole ont été respectés par les organismes HLM ; en revanche (et de ce fait), la concentration des populations en difficulté dans les grands quartiers HLM de la ville s‟est renforcée : « On peut considérer que le premier objectif du POPS, à savoir l’accueil de ménages

prioritaires, est globalement atteint (et même dépassé, ce qui pose le problème de la pertinence des critères retenus). Par contre, le rééquilibrage du peuplement dans la perspective d’une plus grande mixité sociale, s’avère être un objectif beaucoup plus difficile à atteindre, et doit s’inscrire dans le long terme, d’autant plus que la capacité d’action se situe à la marge puisqu’elle ne porte que sur les entrants. »

Au-delà de la possibilité de réduire la ségrégation en jouant sur le levier des attributions HLM dans la commune, c‟est la pertinence de l‟objectif de mixité qui est discutée par les rédacteurs de ce bilan. Résumant les critiques formulées à cette période par les sociologues français, ils insistent sur le flou de la notion et ses effets pervers (stigmatisation), pour conclure par une mise en garde contre le « double

écueil d’un usage purement incantatoire et de dérives potentiellement dangereuses » de la mixité

47 Définis par leur niveau de ressources et/ou par d‟autres caractéristiques qui renforcent leurs difficultés d'accès au logement: jeunes de moins de 25 ans, familles monoparentales, ménages nécessitant un accompagnement social.

sociale. Cette mise en garde se prolonge par une formulation ambiguë des enjeux, mêlant appel à la lutte contre la ségrégation et valorisation des effets potentiellement positifs de l‟entre soi : il faut «

corriger les effets de ségrégation sociale et spatiale liée à la conjonction des caractéristiques du parc (localisation, densité, qualité et taille des logements, montant des loyers, images des groupes…) et des caractéristiques des ménages (âge, composition familiale, ressources, mode de vie, références culturelles, valeurs…) sans pour autant nier les possibles effets positifs en terme de dynamique locale d’une relative homogénéité sociale (sentiment d’appartenance, solidarité familiale et de voisinage, contrôle social collectif de l’usage des espaces publics et semi-privés, modes de vie compatibles). »

La position de la DDE est plus claire : la mixité sociale demeure un objectif prioritaire des politiques du logement, vers lequel on ne peut avancer par une politique d‟attribution dans le parc de la seule commune d‟Angers ; elle doit être recherchée par un rééquilibrage spatial du parc social à l‟échelle de l‟agglomération et, dans le même temps, par une extension du POPS à l‟échelle intercommunale de façon à déconcentrer la pauvreté dans l‟agglomération.

b. La mixité (des)saisie par l‟intercommunalité

L‟intégration de nouvelles communes dans le District et la mise en chantier, par ce dernier, d‟un premier Programme Local de l‟Habitat, permettra à la DDE d‟obtenir satisfaction, au moins formellement : le PLH districal approuvé en juin 1997, s‟appuie sur un diagnostic insistant sur la forte concentration du parc HLM dans les communes d‟Angers et Trélazé, et sa quasi absence dans d‟autres communes importantes (Bouchemaine, Avrillé) ; de ce diagnostic découle un objectif de rééquilibrage de l‟offre locative sociale dans la programmation de la construction neuve. Parallèlement à cet objectif affiché de rééquilibrage du stock, le PLH acte l‟extension du POPS à l‟échelle du district48, pour « mettre en œuvre

une politique habitat veillant aux équilibre sociaux et à la satisfaction de la demande, en particulier très sociale ».

Six ans après la signature de ce premier PLH, le bilan est mitigé : si les bailleurs ont respecté leurs engagements en matière d‟accueil dans leur parc de ménages prioritaires, qui ont bénéficié de la moitié des logements attribués au cours de la période, il en va autrement de nombreuses communes de l‟agglomération, qui n‟ont pas développé de politiques actives de construction de logements sociaux sur leur territoire, quand elles n‟ont pas activement freiné de telles constructions.

« Je pourrais vous faire la carte noire du logement social. La localisation du parc est assez parlante : il y a des collectivités qui n’ont jamais voulu de logement social. Quand elles acceptent une opération, c’est hyper-contrôlé de A à Z. On a en face de nous des élus qui regardent les plans jusque dans les plus petits détails, qui surveillent les attributions, qui nous interpellent dès qu’il y a un petit problème sur une résidence. C’est comme si nous n’étions que les gestionnaires de leur patrimoine ! (…) Nous avons d’excellentes relations avec la communauté d’agglomération mais ce toujours les maires qui décident, comme par le passé : on ne peut pas faire une opération locative sociale sans avoir le terrain à un bon prix et le permis de construire. C’est le maire qui choisit de faire une opération ou pas. C’est lui aussi qui choisit l’opérateur. » (ESH)

Au tournant des années 2000, on assiste à une évolution de l‟approche de l‟enjeu de la mixité sociale, en particulier du côté de l‟Etat local qui se mobilise autour de l‟objectif de rééquilibrage spatial du logement social, relayant en cela les priorités gouvernementale. La mixité sociale figure en effet parmi les objectifs prioritaires des politiques territoriales du gouvernement Jospin, qui a multiplié les lois et les programmes visant à organiser un tel rééquilibrage à toutes les échelles, du quartier à l‟agglomération (programme national de renouvellement urbain et de solidarité ; loi d‟orientation relative à la lutte contre les exclusions du 29 juillet 1998 ; loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains du 13 décembre 2000).

Mais cet enjeu régulièrement rappelé par le Préfet du Maine-et-Loire et la DDE n‟est pas exclusif, comme l‟illustre la charte intercommunale du logement signée en 2003. En juin 2000, le Préfet a procédé à l‟installation de la Conférence intercommunale du logement du bassin d‟habitat d‟Angers, dispositif prévu dans la loi d‟orientation relative à la lutte contre les exclusions du 29 juillet 1998 pour remplacer les anciens POPS. La Charte intercommunale du logement finalement signée en 2003 pointe cet enjeu de rééquilibrage spatial de la production HLM, en direction duquel le premier PLH intercommunal n‟a pas permis d‟avancer : « Angers dispose de 77% de ces logements. Hors le secteur

des Ponts de Cé, le parc locatif social sur Angers représente 79.6% du parc de l'agglomération en 2001 contre 79.5% selon la même enquête au 1er janvier 1998, traduisant les difficultés de mise en œuvre du rééquilibrage de l'offre locative sociale entre les communes de l'agglomération »

Si l‟enjeu est pointé, les négociations organisées sous l‟égide de l‟Etat n‟ont pas permis d‟obtenir un accord des communes quant aux mesures à adopter. La charte intercommunale se contente de rappeler « la nécessité d'intensifier les actions et éventuellement d'en voir émerger de nouvelles dans le

cadre d'une nouvelle réflexion sur la politique de l'habitat », sans décliner l‟objectif de mixité sociale

dans des règles contraignantes pour les communes ni objectifs précis pour les bailleurs. Il en va autrement des objectifs en matière de lutte contre l‟exclusion (droit au logement), qui sont renforcées et font l‟objet de déclinaisons opérationnelles. La charte intercommunale prévoit en effet un objectif d‟accueil des ménages prioritaire dans le parc social renforcé par rapport au POPS (55% des flux d‟attribution contre 40% dans le POPS), au risque –du fait de la faiblesse de la production de logements sociaux dans les communes périphériques de l‟agglomération– de renforcer la concentration des ménages défavorisés dans certains quartiers déjà spécialisés, d‟autant plus que les objectifs d‟attribution définis par la conférence intercommunale le sont par bailleur, sans déclinaison territoriale49. Si l‟on suit l‟analyse d‟un dirigeant d‟organisme HLM, le volontarisme alors manifesté par l‟Etat local en matière de droit au logement a contribué à la forte réduction de la production de logements sociaux dans l‟agglomération au cours des années 2000 (en donc à la réalisation de l‟objectif de mixité sociale par le rééquilibrage spatial du parc HLM), en renforçant les préventions des maires vis-à-vis de ce type d‟habitat : « La conférence intercommunale ne nous a fait pas fait progresser. Augmenter les objectifs

du POPS, c’était une connerie parce qu’en fixant un objectif de 55%, on a fait peur à certains. Il a fallu ramer ensuite pour les convaincre que construire des HLM dans leur commune, ca ne voulait pas dire accueillir des cas-soce, que c’était aussi pour leurs employés de mairie ou leurs enfants. »

49 La charte précise que « les orientations prises ne fixent aucun quota particulier -il n'existe aucun quota garant de

l'harmonie d'un quartier, d’un secteur- mais visent à réguler la spécialisation de certains quartiers. Il s'agit de faire de la C.I.L.