• Aucun résultat trouvé

Partie I De la théorie au terrain

Chapitre 2. Présentation du terrain

2.4 Les acteurs et les actrices de mon terrain

Les acteurs et lieux institutionnels de politiques publiques

Monique V.

Elle est la directrice du service Gens du voyage depuis 6 ans. Dans l’entretien que j’ai réalisé avec elle en mars 2015 elle m’a expliqué qu’elle prenait s’était beaucoup investie dans ce service. C’est elle qui m’a recrutée en CIFRE. Elle a été ma supérieur pendant tout le temps de mon contrat.

La collectivité de Grandpant

Il s’agit de la collectivité territoriale française dans laquelle j’ai commencé ma CIFRE en juillet 2014. Elle a en charge de nombreux services tels que : l’égalité, la solidarité la santé, la culture, les loisirs, le sports, l’emploi, l’économie, l’environnement, l’enfance, l’éducation, le logement, l’urbanisme, la tranquillité publique etc. ainsi que le service Gens du voyage.

Les acteurs institutionnels scolaire

Mme Tielmon

Elle commence son poste d’IEN (Inspecteur de l’Éducation Nationale) missionnée sur les EFIV en 2014. Elle sera en poste tout le long de ma thèse. Ne connaissant pas ce public, elle fait ouvrir un poste de coordonnateur EFIV pour la seconder. Elle est la supérieure hiérarchique de Daniel. J’ai fait de nombreuses demandes à Mme Tielmon pour obtenir l’autorisation de faire mon ethnographie dans des classes, cela n’a jamais abouti.

Daniel

Il est coordonnateur EFIV pour l’Éducation nationale. Il coordonne les Enseignants Relais83, centralise les effectifs des élèves EFIV et assure des missions de formations sur ce public. Il travaille avec les Gens du voyage depuis de nombreuses années. Il a été lui-même enseignant relais pendant plusieurs années avant de prendre ce poste de coordonnateur. J’ai rencontré Daniel la première fois lorsque j’étais AED dans la classe du collège des Chemins. Je l’ai rencontré à nouveau dans le cadre de mon terrain, lors d’un entretien en janvier 2017 puis j’ai enregistré une formation qu’il a donnée en avril 2017. Plus tard, ces deux interactions sont devenues un corpus que j’analyserai dans la Partie 3.

Mélanie

Elle a été enseignante auprès d’EFIV et fait un mémoire sur le sujet. Elle m’a contacté au début de l’année 2016, intéressée par mon poste de Chef de projet scolarisation Gens du voyage. Nous avons échangé au téléphone et je l’ai reçu dans mon bureau de la collectivité de Grandpant pour un entretien.

Les acteurs associatifs

L’Aide Locale aux Itinérants

L’Ali est une association qui existe officiellement depuis les années soixante-dix, elle a comme missions de fournir une adresse de domiciliation pour les Gens du voyage et de lutter contre l'illettrisme. La lutte contre l’illettrisme se partage entre l'accompagnement scolaire (l'aide à l'apprentissage de la lecture, l'aide aux devoirs et l’aide aux cours par correspondance « CNED ») et l'atelier de « mobilisation par l'acquisition des savoirs de base » qui accueille un public d'adultes ne possédant pas ou peu de pré requis à la lecture. L’association propose également une aide à la micro-entreprise pour les Gens du voyage (aide pour remplir les

83 Il y a cinq enseignants relais sur l’académie de mon terrain. Il se partagent différents secteurs. Ils prennent en charge les élèves EFIV sur quelques heures par semaines et font le lien famille-école.

papiers etc.). J’ai travaillé cinq ans à l’ALI avant ma thèse et j’ai été régulièrement en contact avec Emma, salariée de l’ALI, tout au long de mon ethnographie.

Le Lien

Il s’agit d’un service social et de domiciliation pour les Gens du voyage. Le Lien propose un transport spécifique pour emmener les enfants de certains terrains à l’école.

Le Réseau

En marché public avec la collectivité de Grandpant, leurs missions de médiation peut concerner le fait d’aller voir des familles étant en situation d’impayés, des familles arrivant sur un terrain géré par la collectivité « sur site »84 et rencontrant ou amenant des situations difficiles. L’association Le Réseau peut également intervenir quand il y a un défaut de scolarisation des enfants et proposer des « actions de sensibilisation » auprès des familles.

Léon

Il travaille pour une association d’insertion et a pour mission l’aide à l’insertion de Gens du voyage. Il est lui-même Voyageur et doctorant en sciences sociales. Je le connais depuis 2011, nous sommes amis.

Les intervenants de la classe CNED-EFIV

Anne

Anne est enseignante de lettres classiques dans le collège du Bordage. Elle a intégré l’équipe encadrante de la classe « à la rentrée 2015 et participait aux séances de la classe CNED-EFIV à raison de quatre heures par semaine en co-animation avec Clémence, l’Assistante d’éducation. Cette dernière a six heures allouées à la classe et assiste l’enseignant de la classe Relais sur le reste de ses heures. Je la rencontre en décembre 2015. Ce début de mon terrain dans la classe coïncide avec son arrivée dans le dispositif.

La prof de lettres classiques commence à parler avec moi et me questionne sur la thèse. J’explique en essayant de na pas trop en dire. (…) Elle ne comprend pas trop le dispositif tout en s’y engageant « à bras le corps ». Elle voudrait construire des séances mais ne sait pas trop comment les construire étant donné les niveaux très hétérogènes des enfants. On parle plus de la difficulté des cours CNED (une élève85 inscrite en 3ème a des maths que même les collègues de Anne ne font pas car correspond à un niveau seconde) »

Extrait du carnet de terrain, 11 décembre 2015

Anne est très investie dans la classe, elle s’entend très bien avec Clémence.

84 C’est à dire sur un terrain géré par la métropole.

Clémence

Elle est Assistante d’éducation (AED) au collège du Boccage. Pour rappel un AED est une personne (en général un jeune ou un étudiant préparant des concours) qui a un rôle de soutien à l’équipe pédagogique dans les établissements du 1er et 2nd degré. Elle partage son emploi du temps entre la coordination de la classe CNED-EFIV et la classe Relais (qui accueillent les élèves en marginalisation scolaire, au collège ou éventuellement au lycée, afin de les réorienter vers un nouveau cursus) où elle seconde l’enseignant. Elle s’entend très bien avec Anne, avec qui elle travaille en binôme et est très investie dans la classe CNED-EFIV.

Henri

Il est bénévole de l’ALI et vient une fois par semaine dans la classe CNED-EFIV pour le soutien scolaire. Il discute souvent avec les élèves de sujets autres que les cours.

Philippe

Également bénévole de l’ALI, il vient une fois par semaine dans la classe CNED-EFIV pour le soutien scolaire. Comme Henri, il discute souvent avec les élèves de sujets autres que les cours. Il travaille souvent avec Sonny.

Un dernier personnage, Julie, assistante d’éducation qui travaillait avec moi lorsque j’étais coordinatrice à l’ALI, apparaît rapidement dans la présentation de l’historique de la classe CNED-EFIV, mais n’est pas impliquée dans les interactions analysées.

Les élèves de la classe CNED-EFIV

Sonny

Sonny a quatorze ans durant l’année scolaire 2015-2016. Il a suivi une scolarité régulière jusqu’au CM2 à l’école de Lupin. Lupin est à la fois une école primaire de secteur pour les habitants de Telieu et l’école qui accueille le plus de Voyageurs sur le sud de l’agglomération86. Sonny n’a pas été à l’école entre ses 11 (âge auquel il a quitté le Cm2) et ses 13 ans. Puis il a rejoint la classe CNED-EFIV en 2015, parce qu’il en avait entendu parler par d’autres jeunes Voyageurs. Il ne reçoit pas les cours du CNED et fait partie des « élèves fantômes » dont j’ai parlé plus haut. Il bénéficie donc de cours préparés (sous forme de fichiers) par l’équipe du dispositif. Il a un niveau CM2 et a des difficultés en lecture/écriture

86 L’école de Lupin et des Bruyères sont deux écoles très connues pour accueillir historiquement un grand nombre d’Enfants du voyage ou d’enfants de familles du voyage. Cela signifie qu’elles sont géographiquement situées à proximité de terrains/aires d’accueil où résident de Voyageurs et/ou que les familles (même éloignées) y inscrivent leurs enfants car ils savent que l’école accueille beaucoup de Voyageurs. J’ai observé que de nombreuses familles étaient prêtes à y amener leurs enfants même si l’école était loin de leur lieu de résidence.

et en mathématiques. Ses difficultés peuvent dater du temps où il était scolarisé et/ou avoir été amplifiées par la rupture scolaire de plus de deux ans.

Il vient très régulièrement le mercredi matin et a participé aux activités pédagogiques organisées pendant l’année : préparation du certificat de formation générale (CFG), rencontre avec la conseillère d’orientation, participation à un projet théâtre sous forme d’ateliers avec d’autres classes du collège, écriture d’une chanson dans le cadre d’un projet artistique de pratique musicale et enregistrement des chansons avec deux classes de 4ème du collège, visite de la maison des compagnons de Nantes et passage de l’ASSR (attestation scolaire de sécurité routière) 1 et 2. Il est donc très actif sur la vie de la classe. Il est également souvent présent aux pots d’accueil et aux gouters de fin d’année. Il a été inscrit au CFG sur l’année 2017-2018 mais ne s’est pas présenté à l’examen. Sonny ne voyage pas et habite dans une maison à partir de l’année 2016-2017. Il s’intéresse à la maçonnerie qu’il a expérimentée à plusieurs reprises en allant aider des personnes de sa famille travaillant sur des chantiers. Sa mère travaille et sa grand-mère est investie dans son éducation. Pour exemple, elle est présente aux pots d’accueil (elle était au pot d’accueil d’octobre 2015 et est en relation avec Clémence et Anne).

Sonny est très ouvert à la discussion. Il dit souvent qu’il n’aime pas l’école (en dehors de la classe CNED-EFIV), que ce n’est pas pour lui. Selon les élèves présents à la séance, il est plus ou moins concentré, plus ou moins turbulent. De manière générale, il est à l’aise dans la classe et interagit avec tous les adultes sans difficulté. J’ai eu de nombreuses discussions avec lui, que ce soit sur le fait que je sois tout le temps avec un enregistreur, que je sois en thèse, ou sur divers sujets : sur ma famille (m’ayant vue enceinte, il m’a souvent demandé des nouvelles de mon bébé), les métiers en général, le fait qu’il ne se sente pas bien à l’école ou encore son frère, la manière de parler de sa grand-mère, etc.)

Kim

En 2015-2016, Kim a quinze ans. Elle reçoit le CNED et a le niveau troisièmeordinaire qui est le niveau le plus élevé de ce groupe. Elle a la particularité d’avoir obtenu son brevet des collèges en candidate libre à la fin de l’année scolaire 2015-2016, ce qui est une « grande première pour le dispositif du Bordage, où aucun élève ne s’était jusqu’à présent présenté au DNB » (extrait du bilan 2015-2016 écrit par Clémence et Anne) et ce qui est également peu courant dans la majorité des dispositifs EFIV.

Lors du pot d’accueil du 5 octobre 2016 Kim n’est pas présente (elle arrivera au cours du mois d’octobre) mais Anne, qui l’a accompagné scolairement l’année passée, en parle tout de suite après l’allocution du principal.

Pot_5-10-16 extrait 1

5an oUI alors on a on a on pourrait on peut boire un coup à la

santé de kim qui sera pas là ce matin (.) mais on a vu

sa maman euh jeudi dernier

6pr [elle a eu quoi

7An elle a eu son brevet des collèges::: ((elle sourit))

8TLM Ah ah super/

9pr xxx ah très bien/ (.) très bien

10an EUHH::::: ric rac (.) mais (.) mais elle l’a eu (***)

11TLM (***) c’est bien

12an et à sa grande surprise (.) euh::: à NOtre grande surprise

(.) et/ euh grand bonheur (.) puisqu’on était euh po du tout sur (.) euh déjà qu’elle aille jusqu’au bout de la démarche c’était déjà énorme (.) et elle s’est prés (.) sa mère elle nous a raconté un peu justement comment elle elle xxx aux épreuves

13TLM XXX

14An [oui oui puis elle avait oublié SA calculatrice alors ça a

été:: elle a été très très stressée mais elle a (.) elle a vraiment tout (.) tout:: donné euh: pour::: pour aller au bout

En 12an, Anne parle de « sa » et « notre grande surprise » car lorsqu’il a été décidé, en accord avec la mère de Kim, de l’inscrire au diplôme et de passer le Dnb (Le Diplôme National du Brevet) blanc avec les autres élèves de 3éme du collège, les notes qu’elle y a obtenu ne lui auraient pas permis de l’avoir. Anne précise néanmoins dans le bilan 2015-2016, que cette « expérience fut très riche pour la jeune, qui a pu s’habituer aux conditions des épreuves, et prendre la mesure du niveau de ses compétences ». Kim, qui avait envie d’avoir le diplôme et qui est « volontaire » selon Anne (« elle a été très très stressée mais elle a (.) elle a vraiment tout (.) tout:: donné euh: pour::: pour aller au bout »), s’est pourtant présentée en juin et « les résultats obtenus ont surpris tout le monde : elle a obtenu son DNB avec 10, 14 de moyenne aux épreuves » (extrait du bilan 2015-2016). Son niveau scolaire ne lui permettant pas de passer en seconde générale, la famille, sur les conseils de l’équipe EFIV du collège, a donc décidé de demander un redoublement au CNED en classe de troisième. Il faut préciser que Kim n’a pas encore seize ans à ce moment-là. Dans l’interaction du pot d’accueil, Anne a précisé que le père ne souhaitait pas que Kim poursuive ses études en CAP ou lycée professionnel (elle précise également qu’il n’était pas au courant que sa fille passait

le brevet), alors que la mère soutenait ce projet. Kim ne fera donc pas la demande d’aller dans les formations qu’elle envisageait En 2016-2017 après avoir obtenu son brevet, elle retourne donc dans la classe CNED-EFIV pour refaire un niveau troisième. Sur l’année 2017-2018 elle a fait une demande pour suivre une seconde générale au CNED, ce qui a été accepté au vu de ses bons résultats sur son année de redoublement, mais elle n’a pu être accueillie la classe CNED-EFIV car elle ne pouvait plus s’inscrire au CNED sur un niveau collège.

Kim est une élève très souriante elle est très à l’aise dans la classe. Elle est une bonne élève : comme le décrit Anne, Kim est très préoccupée, stressée par le fait de rendre ses devoirs CNED en temps et en heure (« l’année dernière elle était TOtalement focalisée sur le CNED […] elle sera peut-être moins stressée par l’idée de renvoyer puisque :: y’aura plus d’enjeu »). Comme Sonny, elle fréquente le dispositif depuis deux ans et fait partie des plus âgés. Elle a beaucoup d’humour. Il est très facile d’avoir des discussions avec elle tant sur les apprentissages que sur d’autres sujets. J’ai beaucoup échangé avec elle. À la différence des autres élèves qui ne travaillent pas systématiquement avec le même adulte, Kim était toujours aidée par Anne.

La famille de Kim fait les marchés. Sur les années 2015 à 2017 Kim a été présente d’octobre à mai, elle est venue tous les mercredis et jeudis au collège.

Ornella

Il s’agit d’une adolescente de 14 ans qui vient régulièrement en classe. Elle est très intéressée par les matières scientifiques et les langues. Nous échangeons souvent sur ses connaissances en sciences.

Tyron

Ce jeune garçon de 15 ans ne vient pas régulièrement et montre souvent qu’il ne veut pas être là. Il est ami avec Sonny. Ils peuvent très excités et insolents quand ils sont tous les deux.

Outre le fait d’utiliser les prénoms que je leur ai donnés dans le cadre de ce travail, j’emploierai souvent le terme d’élèves ou de jeunes pour parler des élèves Voyageurs. Ce terme de jeune désignera pour moi un âge entre 12 et 16 ans, âge des élèves de la classe87.

87 Dans le sens que Michelle Auzanneau, Patricia Lambert et Nadja Maillard-De La Corte Gomez donnent à ce terme : « le terme jeunesse réfère à une période de transition entre l’enfance et l’âge adulte qui, dans les sociétés occidentales, est le produit de l’allongement moyen de la durée de la scolarisation et de l’entrée dans l’ère de la post-industrialisation. Envisagée comme période de vie, la jeunesse est associée à un ensemble de pratiques

Documents relatifs