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CHAPITRE 4 : SANTE AU TRAVAIL : ENTRE OBLIGATIONS REGLEMENTAIRES ET RISQUES DANS

4. Enquêtes de santé dans le secteur de l’aide à la personne : constat critique

4.3. Le soutien social dans l’aide à domicile ?

L’aspect social est également travaillé dans l’étude de la DREES en 2008 (Loones & Jeaunneau, 2012; Messaoudi, Farvaque, & Lefebvre, 2012), ainsi l’on apprend que pour résoudre une difficulté, les aides à domicile font prioritairement appel à un responsable (84,7%) et peu à leurs collègues (16,9%). Cela demande donc au responsable une forte présence et d’être reconnu par le professionnel qui ne se tourne que peu vers ses pairs. De même, les salariés du service prestataire sont ceux qui font partie d’une équipe, et qui bénéficient de l’opportunité de rencontrer leurs collègues. Pour autant, la disponibilité ne fait pas l’accès et le soutien. Comment cela s’explique-t-il ? Le salarié prestataire se plaint de ne voir suffisamment ses collègues. Le risque peut-il naître de la frustration de savoir que le soutien est accessible et inaccessible à la fois ?

Cela peut être problématique alors que ces salariés prestataires ressentent le plus souvent leur travail comme fortement exigeant d’un point de vue psychologique, ce qui se distingue des autres modes d’intervention (emploi direct, mandataire), alors que les scores de latitude décisionnelle sont équilibrés d’un mode à l’autre. Ces éléments font des salariés prestataires des professionnels vulnérables, dont la dimension du soutien social, si le groupe est existant, resterait inabordable ? L’étude de la DREES a mis

médecin du travail, qui fait office d’enquêteur et renseigne le questionnaire à l’occasion de la visite médicale à l’aide de son expertise du milieu du travail et de la nature des expositions. Sumer se veut un relevé d’expositions exhaustif au poste du salarié et module la présentation des expositions à partir d’items renseignant sur la durée hebdomadaire des expositions, l’estimation de l’intensité et la mise à disposition de protections.

en évidence que la probabilité de figurer parmi les tendus chez les aides à domicile est 1,5 fois plus élevée chez les salariés prestataires (vs emploi direct). Les conditions de travail y seraient donc plus défavorables. Dans la moitié des interventions décrites par les professionnels lors de l’enquête de la DREES 2008, l’aide à domicile se dit insuffisamment informé lors de la première intervention et 63% des prestataires ne sont pas accompagnés lors de la première intervention (Loones & Jeaunneau, 2012). Cela peut présenter des risques de stress par l’incertitude que la situation peut entraîner à certains individus. Cela a-t-il évolué ?

Aujourd’hui, les temps d’échanges et de réunions permettent de rassembler ces professionnels isolés. Deux tiers des sondés témoignent d’ailleurs participer ponctuellement ou régulièrement à des réunions de service pour faire part de leur difficultés concernant les personnes aidées et les familles (Loones & Jeaunneau, 2012). Sont-elles pour autant efficaces ? Pas forcément à en lire les résultats liant la proportion des tendus suivant le type de rencontre dont ils bénéficient avec leurs collègues. En effet, 38,9% des salariés ne profitant pas d’échanges ou de réunions avec les collègues sont tendus. Or ce chiffre se réduit de seulement 3,7% si des moments formels d’échanges existent ! Cela pose question quant à l’efficience des rencontres (contenus des échanges vs contacts-soutien de la présence d’autrui) et demanderait à être développé. Le soutien des collègues, des responsables, au travers de réunions ou d’échanges plus réduits ne serait pas efficace quand il existe. L’INRS, en 2005, identifiait pourtant que les groupes de paroles soulagent l’anxiété des intervenants auprès de personnels fragilisés, même si l’effet est limité. Leur interprétation était toutefois que les personnes participant à ces groupes faisaient partie des plus vulnérables et présentaient aussi le plus de difficultés.

Cet aspect relationnel et de soutien semble donc à creuser, d’autant que lorsque le professionnel bénéficie du soutien de son collègue (hors réunions), cela diminue significativement la proportion de job strain (28% contre une moyenne de 35%). Reste le problème que seuls 16% des aides à domicile font appels à leurs collègues… Si l’on interprète ces chiffres, il apparaîtrait malgré tout que le collègue est davantage médiateur que les groupes de paroles et/ou les temps d’échanges formels.

Le troisième article du dossier de la DREES (Loones & Jeaunneau, 2012) aborde également l’organisation du métier, rattaché aux questions d’autonomie. Les échanges possibles avec les professionnels sont également abordés, selon le nombre de contacts possibles avec les autres personnes intervenant au domicile des personnes aidées, ceci en vue de mesurer le degré d’isolement professionnel des salariés. Ce qui ne nous apparaît pas forcément pertinent. En effet, les pairs sont perçus comme plus compétents pour les comprendre quand ils rencontrent des difficultés. Les pairs sont également ceux qui permettent de définir leur appartenance au groupe, leur identité sociale et ainsi, assurer les processus d’identification. A notre sens, il convient davantage de parler d’isolement professionnel du fait du manque d’échanges avec leurs collègues pairs, plutôt qu’avec les kinés, infirmières ou autres personnels soignants. Pour autant, les conclusions de ce sondage sont que 17% des salariés prestataires indiquent ne jamais avoir la possibilité d’échanger avec quelqu’un à propos des interventions chez une personne aidée. Alors que 73% d’entre

eux bénéficient de temps d’échanges formels avec leurs collègues, portant sur des questions d’organisation ou sur les situations rencontrées auprès des personnes aidées.

Plus d’échanges, mais plus de stress ? Pas sûr, il ne faudrait confondre plus de possibilité d’échange et plus d’échanges, il s’agit là sûrement de distinguer le soutien social disponible et sa qualité, voire son accessibilité.

De même, venant confirmer nos hypothèses de frustrations d’un soutien disponible non accessible, les chiffres de cette étude montrent que moins le professionnel est isolé, plus il juge important d’avoir des échanges avec les autres intervenants pour bien faire leur travail113. A noter que ces échanges servent avant tout (90%) à améliorer le service à la personne, mais seulement 26% des échanges leur apportent un soutien psychologique. Le coping de soutien social pourrait alors être ici utilisé telle une stratégie opérationnelle visant à recueillir des informations pour faciliter la gestion des situations, mais pas dans une visée de gestion de l’émotion.

Les aides à domicile présentent donc déjà plusieurs indicateurs révélant des carences quant à une santé et un bien-être acceptables au sens de l’OMS. Il conviendra toutefois de donner un sens à ces tendances relevant d’enquêtes quantitatives.