• Aucun résultat trouvé

Le groupe professionnel des professions de santé

Dans le document Le sentiment identitaire professionnel (Page 55-58)

Chapitre 1 : Le contexte professionnel de la recherche

3. Approche démographique de la profession infirmière

4.5. Le groupe professionnel des professions de santé

Parmi les professionnels de santé, certains se situent à la frontière du champ médico-social et du champ éducatif. Ils travaillent dans des équipes pluridisciplinaires comportant des professions sociales et médicales, et répondent pour la plupart aux services publics. Les infirmiers font partie des professionnels de santé mais le contour de cette catégorie sociale est difficile à délimiter.

D'après le rapport Berland et Gausseron concernant la démographie des professions de santé, elles sont soumises à une autorisation d'exercice avec des actes codés, c'est-à-dire les médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes, pharmaciens, infirmières, masseurs- kinésithérapeutes, pédicures-podologues, ergothérapeutes, psychomotriciens, orthophonistes, orthoptistes, manipulateurs en radiologie médicale, audioprothésistes, opticiens-lunetiers (2002, p. 7). Il est surprenant de voir que les psychologues cliniciens en soient exclus alors qu'ils travaillent en collaboration avec les médecins et les infirmiers, notamment dans les secteurs de psychiatrie ; de même que des personnes participant de près ou de loin aux soins comme les aides-soignants, les agents hospitaliers ou les brancardiers.

Après avoir défini les professionnels de santé dans un cadre réglementaire afin de pouvoir situer l'infirmier dans un champ d'activités professionnelles, nous nous intéressons rapidement à la question du genre. C'est souvent le vocable utilisé socialement qui est révélateur de la

les puéricultrices ; pour d'autres l'appellation au masculin perdure, comme pour les médecins. L'arrivée d'hommes ou inversement de femmes dans une profession fait évoluer les vocables dans les usages sociaux, comme docteur/doctoresse, sage-femme/maïeuticien.

Concernant l'aspect hiérarchique des professions sanitaires déclinées le plus souvent au féminin, un paradoxe perdure entre la considération très noble qui leur est socialement réservée et celle moins grande qui consiste à penser que leur exercice professionnel exige des qualités naturelles et non des compétences reconnues professionnellement. Cette dernière idée légitime leur peu de reconnaissance salariale, assimilant certaines activités à du travail domestique féminin ou à du bénévolat des femmes. L'origine de ces professions laisse encore son empreinte dans les représentations sociales. Les activités accessibles sans diplôme ont des difficultés à se positionner dans leur champ professionnel sanitaire et social. Le cas de la profession infirmière peut sembler différent car on y accède par l'obtention d'un diplôme, cependant des éléments émanant de la genèse de la profession comme le bénévolat, la religion, la féminisation, influence encore aujourd'hui dans une certaine mesure la professionnalisation des infirmiers. Les rapports hiérarchiques existent dans ces professions très féminisées. La profession infirmière se réclame d'une part du côté ascendant, celui des médecins, et d'autre part, du côté descendant, celui des professions moins techniques et qui composent la chaîne ouvrière du paysage hospitalier. Dans les années 90, des recherches ont porté sur le développement de l'autonomie de l'infirmière qui a contribué à sa professionnalisation. Une partie de ses activités sont des tâches que l'aide-soignante peut réaliser, que l'on retrouve sous le vocable soins de confort et de bien-être, anciennement qualifiées de soins de nursing. L'autre partie de ses activités regroupe des tâches plus techniques que l'on retrouve dans le référentiel d'activités de l'infirmier. Ces activités sont spécifiques à l'infirmier, ils ne sont réalisables que par un infirmier et non pas en collaboration comme peuvent l'être les soins d'hygiène ; il s'agit notamment de la pose d'une voie veineuse périphérique ou sur une voie centrale, de la pose de sonde naso-gastrique.

S’il est vrai que la sociologie des professions s’est plutôt consacrée à l’étude de groupes professionnels prestigieux et reconnus socialement depuis des décennies, elle a su s’ouvrir à des groupes professionnels moins élevés dans la hiérarchie sociale. Arborio (2009) met en avant la division du travail dans l’organisation hospitalière qui a été fortement construite à partir du corps médical, la profession médicale apparaissant ainsi comme un prototype de la définition fonctionnaliste, avec une grande autonomie. C’est ainsi que le terme « paramédicaux » est apparu, désignant l’ensemble des personnels soignants autres que médicaux comme étant interdépendants et sous le contrôle du médecin (Freidson, 1984).

Aujourd’hui, la division du travail, ainsi que les responsabilités et les rapports hiérarchiques ont évolué pour laisser place à deux lignes hiérarchiques distinctes, la hiérarchie médicale et celle des paramédicaux (infirmiers, cadres de santé, cadres supérieurs de santé, directeurs de soins).

Dans les établissements de soins, la profession infirmière est celle dominante aujourd’hui mais elle travaille en collaboration avec d’autres soignants. Comme nous l'avons décrit précédemment, certains actes infirmiers, ceux en lien avec les soins d'hygiène et de confort, sont exécutés le plus couramment par l'aide-soignante. Ceci place l'aide-soignante dans une position de dépendance de l'infirmier concernant l'exercice de sa fonction, mais par cela même elle se différencie des agents de service. Les aides-soignantes sont considérées comme une catégorie intermédiaire dans l'échelle des valorisations sociales, « entre l’infirmière dont le rôle et les compétences techniques sont reconnus et à laquelle le grand public associe généralement le travail hospitalier non-médical et l’agent du service hospitalier chargé des tâches les plus matérielles comme l’entretien des locaux » (Arborio, 2009, p.52). S'appuyant sur les travaux de Goffman (1963), cette sociologue propose une description de l’hôpital comme permettant à des personnels éloignés hiérarchiquement de travailler ensemble ou de partager à la fois les mêmes espaces et le même « matériau ». Les aides-soignantes, tout comme les infirmières, et l’ensemble des professionnels de santé, ont un objectif commun de soigner les malades, ce qui confère à leur travail une valorisation sociale fortement reconnue. Dans le mouvement de professionnalisation des infirmières, la délégation des tâches liées à l’hygiène et au confort du malade à la catégorie professionnelle des aides-soignantes a fait perdre à l’infirmière « un peu de son rôle valorisé tenant à la relation au malade ». C'est notamment par l'accentuation de la division du travail sous l’effet de la rationalisation technique des soins depuis les années 90 que le processus s'est développé (Brannon, 1994).

Dans le document Le sentiment identitaire professionnel (Page 55-58)