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Le corporéisme de la masculinité hégémonique défensive

Chapitre 2 : Se faire mâle par le corps

2.1 Le corporéisme de la masculinité hégémonique défensive

Dans cette partie, nous traitons pour débuter du rapport contemporain au corps, dans la mesure où ce dernier possède une place, un statut et un rôle toujours importants. En second lieu, nous relions le corps à l’identité de sexe masculine.

2.1.1 Le rapport contemporain au corps

Deux points sont successivement développés ici : la dimension historique amenant à une centration individuelle croissante sur le corps, et la dimension sociale du corps contemporain.

2.1.1.1 La lente subjectivation du corps

Si nous traitons des références masculines au corps contemporain, il est important de noter pour commencer que les visions sociales du corps ont

évolué au cours du temps dans l’histoire occidentale, avec parfois des

ambivalences et des oppositions. Ainsi, certains philosophes au temps de

l’Antiquité grecque, comme Platon (5ème

et 4ème siècles avant J.C.), séparent le

corps de l’âme : le premier (soma) est présenté comme un tombeau de matière,

contrairement à la seconde qui s’apparente à la pureté, à l’essence (sema). Par

la suite, le christianisme naissant poursuit cette dichotomie, en insistant sur le caractère « honteux » du corps, symbole du mal, de la tentation, du pêché.

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C’est la conception véhiculée par Saint-Augustin (4ème

et 5ème siècles) par

exemple : le corps doit être purifié et il faut lutter contre la chair. Son usage doit être strictement circonstancié : il ne s’agit pas de l’utiliser pour s’adonner à des spectacles collectifs à travers certaines pratiques hors travail, comme dans les jeux de l’Antiquité.

S’occuper de la sorte de son corps représente une perte d’énergie inutile, et surtout, cela soustrairait les masses à la spiritualité, les incitant même à la subversion de l’ordre social et moral, leur âme étant captivée et pervertie par les plaisirs (Taranto, 2008). De même, le corps est considéré comme élément sacré d’un tout, appartenant à Dieu. Dans ce contexte, l’individu a un corps plutôt qu’il n’est ce corps (Le Breton, 1990), et le corps est de ce fait séparé de la psyché.

Par la suite, d’autres philosophes tels que Descartes (17ème

siècle) symbolisent par leur prise de position le maintien d’une séparation du corps et de l’âme,

avec un statut dévalorisé pour le corps, contrairement à l’esprit : « j’ai une idée

distincte du corps, en tant qu’il est seulement une chose étendue et qui ne pense point, il est certain que moi, c’est-à-dire mon âme, par laquelle je suis ce que je suis, est entièrement et véritablement distincte de mon corps, et qu’elle peut être ou exister sans lui » (Descartes,1970, pp 118-119).Toujours dans le

sens précédent, mais en renversant la posture, Rousseau montre au 18ème

siècle que la discipline des esprits humains est susceptible d’aller à l’encontre de la spontanéité affective et relationnelle des hommes, car elle rationnalise

trop leur conduite. Les individus doivent donc retrouver l’état de nature en se

libérant de cette contrainte, par l’intermédiaire notamment d’une « revanche »

du corps sur l’esprit : « tout ce que la tradition dominante de la pensée

occidentale attribue à l’esprit ou à l’âme : la sagesse, la vérité, le chemin du bonheur, tout cela doit être restitué à son légitime détenteur : le corps » (Perrin, 1984, p 12). La dualité corps et âme est maintenue ici, mais c’est sa hiérarchie qui change.

Dans le même temps, mais à l’opposé de la conception précédente, une tradition héritée d’Aristote insiste sur l’interdépendance entre l’âme et le corps qu’elle a façonné : les particularités physiques permettraient de connaître les traits de caractère d’un individu, à travers une physionomie établissant des équivalences entre traits physiques et traits moraux. Par la suite, d’autres penseurs de différentes disciplines réaffirment ce lien entre le physique et le

moral : Battista Della Porta au 17ème siècle, Lavater, Schopenhaueur, Diderot au

18ème siècle, Stendhal, Balzac ou Baudelaire au 19ème siècle. Comme le

rappelle Le Breton, « le destin de l’homme est inscrit d’emblée dans sa

conformation morphologique » et donc « finalement, l’ordre du monde obéit à un ordre biologique dont il suffit de chercher les preuves dans les apparences du corps » (Le Breton, 2004, p 16).

La conception moderne du corps qui naît au 18ème siècle crée un changement

radical de conception. Désormais, l’individu se retrouve coupé d’avec les autres (développement de l’individualisme), d’avec le cosmos (par la rationalisation et la désacralisation de la nature) et aussi d’avec lui-même (par la conception d’un

corps objet, séparable du sujet, en lien avec les progrès scientifiques et médicaux). La science véhicule l’idée d’un corps-machine à travers son objectivation en connaissances biologiques. La médecine a par ce biais réduit en partie le corps à sa dimension physique, objective, en l’ancrant dans le matériel, et plus largement, un réel « désenchanté ».

A titre d’illustration au siècle suivant, l’utilisation par la médecine de la photographie participe à une vision anatomique et biologique du corps : les médecins commencent à photographier les anomalies, et à utiliser l’endoscope pour livrer des images de l’intérieur du corps. Cette conception de la médecine va s’instituer et apparaître comme légitime. Elle renforce le mouvement

d’individuation véritablement entamé au 18ème siècle : l’individu et son corps

sont spécifiques, et peuvent être détachés d’un tout. De ce fait, les progrès techniques et médicaux permettent de penser « maîtriser » le corps, de montrer son caractère malléable et cartographiable, véhiculant finalement l’image d’un corps transformable et modelable à l’infini. L’idée émerge d’un corps produit par l’individu, qui n’est plus mystérieux mais au contraire à penser et à comprendre. La médecine va ainsi mettre en évidence dans un sens normatif – les impératifs

hygiénistes – les nouveaux pouvoirs du corps. En s’inscrivant dans les

croyances des Lumières relatives aux progrès de l’homme et à la perfectibilité des destins personnels, elle cherche à repousser les limites humaines tout en incorporant l’idée de sélection et de compétition entre les organismes vivants,

dans le souci d’éviter la dégénérescence. L’indétermination biologique de la

matière corporelle peut et doit être instrumentalisée selon la médecine, avec comme objectif l’amélioration des performances et la transformation de l’humain. Elle voit dans le corps humain un défi technique pour tendre vers l’immortalité, défi objectif et normatif puisqu’il a la caution de la « vérité » de la science. En cela, la médecine est une pratique située socialement comme historiquement, puisque les principes scientifiques et techniques qu’elle utilise jouent également un rôle majeur dans la catégorisation des corps (Gardey, 2006).

De ce fait, la santé et l’hygiène, à la fois obtenues et révélées par le corps, s’apparentent moins à une réduction des souffrances et des pathologies qu’à une volonté de développer certaines sensations et une visibilité sociale accrue du corps. Autrement dit, les aspects sanitaires apparaissent secondaires par rapport à l’estime de soi et au souci d’intégration et de conformité sociales recherchées, dans un contexte où la dimension esthétique incarne la dimension

sanitaire : « le corps révèle en tant que signe extérieur les manières d’être soi »

(Queval, 2008, p 208).

C’est pourquoi d’autres disciplines dont la sociologie vont insister par la suite sur le fait que le corps n’est pas uniquement une machine distincte de l’individu et indépendante des influences de la société. Au-delà de son anatomie, les constructions et représentations du corps sont aussi influencées socialement car l’individu est un être social inséré dans des réseaux et des interactions où le corps est mis en scène. Le corps est ainsi façonné par les conditions de vie, de

même qu’il les façonne. Une perspective herméneutique du corps devient alors possible, comme le mettent en évidence les apports de la psychanalyse au

début du 20ème siècle. Celles-ci lancent indirectement les bases d’une future

sociologie du corps : elles démontrent que le corps et le sujet sont unis, le premier étant un langage où s’expriment l’histoire et la trajectoire sociale de l’individu (Maisonneuve, 1976).

Nous assisterions même depuis le milieu du 20ème siècle à l’émergence et au

développement d’une culture basée sur le libre accomplissement de soi, la culture de l’estime de soi et la valorisation de la jeunesse permanente. Notre société serait marquée par la « crise des valeurs » et la « perte du sens », qui peuvent conduire à chercher de nouvelles formes de légitimité et d’ancrages matériels, car c’est un univers créateur de sentiment de danger, de peur et de manque de confiance en soi (Lasch, 1979). C’est d’autant plus le cas dans un environnement socio-économique perçu comme homogénéisant, effaceur d’identités, et comme célébrant le primat du provisoire sur le permanent.

Dans ce contexte, l’individu doit désormais « s’inventer » du fait des mutations

économiques, technologiques, sociales et culturelles accélérées de ces soixante dernières années. Elles amènent à poser la question du sens de la vie, car l’individu est de plus en plus renvoyé à lui-même. En d’autres termes, ce processus s’apparente à une individualisation voire une individuation de la vie (Beck, 2001), que chacun doit gérer : plus qu’un repli sur soi et qu’un retrait de la vie sociale, ce processus correspond à une « prise en mains » individualisée de la vie où la référence aux autres est toujours présente. Et plus qu’une perte totale des repères, il semblerait qu’il existe au contraire une pluralité de ceux-ci. En somme, davantage que dans la postmodernité, nous serions entrés dans la

« seconde modernité », qui serait en fait une « hypermodernité » (Bonetti & alii,

1998). Dans le prolongement de ce que nous avons brièvement évoqué25, cette

« hypermodernité » serait en continuité avec les idéaux de la modernité. Le préfixe « hyper » souligne les excès, le risque et le dépassement qui sont socialement valorisés et qui doivent caractériser les actions individuelles

(Aubert, 2006). En effet, l’individu hypermoderne est « centré sur la satisfaction

immédiate de ses désirs et intolérant à la frustration, il poursuit cependant, dans de nouvelles formes de dépassement de soi, une quête d’absolu, toujours d’actualité. Débordé de sollicitations, sommé d’être toujours plus performant, talonné par l’urgence, développant des comportements compulsifs visant à gorger chaque instant d’un maximum d’intensité, il peut aussi tomber dans un « excès d’existence » lorsque la société lui retire les supports indispensables pour être un individu au sens plein du terme » (Aubert, 2006, p 157). Ce processus de centration sur soi serait révélateur d’une « hypermodernité » marquée par la « culture du narcissisme », où le souci de soi devient un but en soi pour pouvoir « se retrouver » (Lasch, 1979).

Or dans cette société hypermoderne, le corps peut alors apparaître comme créateur de sens (Le Breton, 2004) voire comme moyen de salut (Moore, 1996). Le corps n’apparaît plus asservi mais au contraire libéré, au sens d’accessible

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et de transformable à souhait par les individus dans une logique de projet (Gauchet, 2004). Désormais, le corps serait le bien dont dispose chaque individu et qui peut être source de tous les désirs et les fantasmes, dans un souci de transformation de soi. Chacun aurait la possibilité de se créer un corps nouveau, un corps à soi, qui correspondrait à ses désirs.

De même, la mise à mal du sens transcendant laisserait l’opportunité et la nécessité d’une quête de sens immanente, où le corps jouerait un rôle d’ancre dans le temps présent, en apparaissant comme « ce qui reste » quand les

transcendances s’effacent (Turner, 1996 ; Le Breton, 2004) : « puisque la

société n’a pas d’avenir, il est normal de vivre pour le présent, de fixer notre attention sur notre propre « représentation privée », de devenir connaisseurs avertis de notre propre décadence, et enfin, de cultiver un « intérêt transcendantal pour soi-même » » (Lasch, 1979, p 32).

Ne croyant pouvoir transformer leur vie de manière significative, certains pourraient être convaincus que leur objectif serait désormais de se soucier de soi avant tout pour « se retrouver », le corps étant le lieu d’expression de

l’intimité : « le désinvestissement des systèmes sociaux de sens amène à une

centration accrue sur soi. Le repli sur le corps, l’apparence ou les affects est un moyen de réduire l’incertitude en cherchant des limites symboliques au plus proche de soi. Il ne reste plus que le corps auquel l’individu puisse croire et se rattacher » (Le Breton, 2004, pp 90-91). Un nouvel imaginaire du corps caractériserait ainsi la période contemporaine (Maisonneuve, 2004). Nous y reviendrons, mais notons déjà que l’imaginaire est perçu ici comme une articulation forte entre l’individu et la société de perceptions, de représentations, de symboles, de mythes, donc de normes de comportement relatives au corps. La médicalisation croissante de l’existence pousse aussi dans ce sens. Le corps apparaît comme un indicateur objectif de la santé d’un individu (Goffman, 1969), notamment au sein de l’ère de l’obésité présentée comme croissante. La référence à la santé devient une norme permanente, assimilée à une vertu dans

un monde qui aurait perdu ses repères, où « l’homme devient responsable de la

durée et de la qualité de sa vie » (Aubert, 2006, p 155). Le corps est ainsi le moyen d’apparaître jeune et en pleine forme, éloigné des signes de maladie, de vieillesse et de sénescence, dans un objectif fantasmé d’éloignement voire de négation de la mort (Baudry, 1991). Le corps est en effet le support de la vie, mais aussi le signe des prémisses de la mort, à travers notamment le

vieillissement, contre lesquels il faut lutter. Car paradoxalement a priori, la

sollicitude apportée au corps vise à mieux le « mettre de côté », dans le sens de masquer ses dysfonctionnements.

L’idéal de la santé incite à privilégier la forme à l’essence corporelle. Il devient nécessaire de prévenir plutôt que de traiter, et surtout de montrer la santé plutôt que de subir la maladie. La sollicitude du corps devient le meilleur remède

contre la maladie. C’est pourquoi la médecine se « démocratise » dans cet

objectif, dans le sens où ses connaissances se diffusent pour que chacun les applique dans son quotidien. Le médical n’est plus le domaine réservé des médecins, et les firmes spécialisées dans la fourniture de biens ou de services

liés à la santé au sens large gagnent en légitimité et en supériorité morale. Comme l’a montré Bourdieu, la libération du corps est construite par tout un ensemble de catégories sociales et économiques qui en y associant le besoin de leur expertise, impose une vision légitime du corps qui sert aussi leurs intérêts. Elles parviennent d’autant mieux à le réaliser qu’elles couplent morale du devoir et morale du plaisir, avec comme principe sous-jacent le « toujours plus » et le « toujours mieux » (Bourdieu, 1979).

D’où, comme le laisse entendre la citation d’Aubert (2006) ci-dessus, la recherche non pas forcément de la mesure, mais du dépassement de soi permanent, de la démesure, du toujours plus de l’ « hypermodernité ». Le corps doit être investi dans une logique de performance et de maîtrise, voire de toute puissance, avec l’idée que toute lourdeur est proscrite. Le spectaculaire doit aussi s’y incarner, ce qui montre qu’à l’extrême, risquer la mort devient la garantie de l’existence car cela atteste de l’intensité de la vie. C’est en cela que la mise en forme du corps est centrale (Baudry, 1991).

Ainsi, le corps acquiert une valeur importante pour l’individu : il serait non seulement le symbole, mais même le « bien » à chérir par excellence, dans la mesure où ce serait lui qui permettrait d’atteindre l’écoute de soi et la sollicitude (Vigarello, 1982). Le corps devient une valeur en soi (Perrin, 1984), car il incarne l’identité physique et l’identité morale. Il est donc le lieu de centration de l’identité contemporaine. L’individu, en « se faisant plaisir » grâce à son corps, apprendrait à mieux se connaître. En redécouvrant son corps, il se redécouvre

lui-même : c’est le Getting in touch with myself (Luciano, 2001, p 77). Giddens

(1991, p 4) rejoint cette idée en parlant de processus de réflexivité qui amène chaque individu à s’interroger sur lui-même, et sur son corps. De ce fait, le corps n’est plus perçu comme objet passif. A travers son corps, un individu est susceptible d’avoir le sentiment d’exercer pleinement sa liberté, un certain pouvoir, et des choix souverains (Travaillot, 2004). L’idée de posséder un pouvoir renforcé sur le corps nourrit les imaginaires autour du corps.

En résumé, en opposition à ce qui prévalait il y a quelques siècles, la deuxième

partie du 20ème siècle serait celle d’un corporéisme particulier, où le souci

exacerbé du corps selon lequel le corps se serait affranchi des corsets moraux et physiques, aurait retrouvé une liberté originelle naturelle et permettrait l’écoute et l’expression du soi (Maisonneuve, 1976). Le corporéisme

s’apparenterait à « l’idéologie qui tend à faire du corps une valeur centrale,

après la faillite de la raison » (Perrin, 1984, p 179). Dans ce cadre, l’individu aurait non seulement un corps, mais serait aussi un corps, symbole de la réconciliation entre la matière et la conscience, lui permettant d’accéder à la liberté et à la libération ultimes (Le Breton, 2004). Un processus de « conscientisation et de psychologisation » (Queval, 2008) du corps serait aujourd’hui à l’œuvre, où l’individu « pense » son corps en apprenant à ressentir de nouvelles émotions et sensations. Cela ancre dans son esprit l’idée d’un statut plus important pour le corps, car il est alors potentiellement perçu comme une ressource personnelle directement accessible, et facilement appropriable.

Toutefois, au-delà de cette dimension subjective, le corps en possède simultanément une sociale, puisqu’il est ce qui relie physiquement un individu à son environnement et aux autres (Le Breton, 2004).

2.1.1.2 La dimension sociale du corps contemporain

Le corps possède aussi une dimension sociale car c’est un « organisme in situ,

en actes, agissant, parlant, et modelant son espace, modulant ses gestes »

(Berthelot, 1983, p 120). Cela signifie que les actions corporelles de la vie quotidienne sont marquées par l’existence d’une certaine mise en jeu de la

corporéité, c’est-à-dire « l’ensemble des traits concrets du corps comme être

social » (Berthelot, 1983, p 120).

En d’autres termes, le corps, miroir de l’intime, est aussi un miroir social. Il possède des fonctions de besoins, de désirs et de symboles, qui permettent de participer aux échanges avec le monde social. C’est par l’intermédiaire de sa corporéité qu’un individu cherche à s’intégrer dans son univers social et à le faire sien. En utilisant un langage simmelien, nous pourrions affirmer que chaque corporéité s’assimile à un contenu qui s’insère dans une forme particulière, les deux faisant système et s’entretenant mutuellement. C’est pourquoi, dans notre société de la communication et de l’image, où les contacts deviennent plus directs et plus rapidement source de classification, le souci de l’apparence publiquement véhiculée revêt une dimension centrale pour être « labellisé » positivement : l’identification par l’apparence corporelle s’affirme. Dans ces interactions, le non verbal est tout aussi important que le verbal, ce

qui crée une valeur forte pour l’hexis corporelle et la présentation de soi (Perrin,

1984). D’après Blumer (1969), les significations données à ce qu’un individu observe, c’est-à-dire essentiellement les caractéristiques physiques, sont organisées et transformées à travers l’interprétation (l’attribution de valeurs positives ou négatives basées sur les caractéristiques des individus) et la réflexivité. Ainsi, ces aspects nous poussent à créer une image, si ce n’est une réalité, de nous-mêmes et de notre place dans la société, où le corps joue un rôle important (Berry, 2010).

C’est pourquoi, selon Goffman, le comportement social peut être pensé comme une performance de mise en scène dans laquelle les acteurs mettent en œuvre intentionnellement des attitudes spécifiques que les autres vont évaluer, à travers leurs paroles mais aussi leurs gestes, leurs expressions,... Ce comportement « dramaturgique » est pour Goffman une attitude à travers laquelle nous communiquons de l’information sur nous-mêmes aux autres, c’est-à-dire en cherchant à influencer l’impression que les autres ont de nous :

« l’information peut provenir de différentes sources et être véhiculée par