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Chapitre I CADRE CONCEPTUEL

2. Le choix d’une approche systémique

Il existe plusieurs façons d’aborder les problèmes liés au processus d’enseignement/ appren- tissage de savoirs et, beaucoup de courants théoriques ont été élaborés pour éclairer des si- tuations éducatives orientées dans ce sens. L’approche socio-constructiviste une forme de révolution paradigmatique dans le monde de l’enseignement/apprentissage scolaire, justifiée par le fait que les connaissances ne sont pas transmises mais sont construites par le sujet à travers les expériences vécues dans son milieu. L’enseignement de l’informatique, pour mettre leurs élèves ou étudiants en activité, se situe dans une approche plutôt socioconstructi- viste : l’approche par projets et le travail en groupes fait référence à ce modèle.

Le cadre théorique qui a guidé notre regard et notre réflexion est la théorie de l’activité (TA), que nous allons analyser plus loin à partir de la section 3. Ce choix a été motivé par le fait qu’avec le modèle théorique socioconstructiviste correspondant à l’enseignement de l’infor- matique, les élèves, les étudiants et leurs professeurs sont tous inscrits dans un système d’ac- tivités. Malgré des rôles respectifs, ils sont appelés à entrer en interaction tout en respectant certaines règles en vue de la production d’un résultat attendu qui est l’objectif des projets. Pour toutes ces raisons, la TA nous semble bien appropriée pour cette étude qui, rappelons- le, porte sur les pratiques d’apprentissages des savoirs informatiques chez les élèves ou étu- diants débutants dans un contexte d’apprentissage par projets.

2.1. Pédagogie de projets et interactions

La thèse défendue est celle des potentialités de la pédagogie de projets pour l’apprentissage de l’informatique en général et chez les débutants en particulier. Le public est constitué de lycéens scientifiques et d’étudiants de licence en informatique. Quatre éléments principaux interviennent dans les situations d’apprentissage : les élèves/étudiants, le professeur, les ins- truments et le savoir ; auxquels s’ajoutent leurs interactions liées au fait qu’il s’agit d’un contexte de projets effectués en groupes.

Notre orientation se veut essentiellement didactique : elle concerne la construction de savoirs disciplinaires, essentiellement informatiques. Nos choix ont eu un double objectif :

• d’abord, clarifier le rapport de l’élève (étudiant) en tant qu’apprenant à l’objet de connaissance (Brun, 1994) dans un contexte plus vaste de l’approche par projets ; • et ensuite, apporter un éclairage sur les pratiques des élèves (étudiants), de leurs pro-

fesseurs et les interactions en jeux.

La construction des connaissances chez les sujets a lieu, ici, essentiellement en contexte de projets. Rarement utilisée dans la scolarité secondaire, l’approche par projets et par pro- blèmes est en vogue dans l’enseignement supérieur où « elle constitue un changement de pa-

radigme assez radical » (Galand & Frenay, 2005, p. 10). C’est une méthode d’apprentissage

fondée sur des problèmes pour susciter l’utilisation et la construction de nouvelles connais- sances.

Ces auteurs donnent trois caractéristiques de cette approche, sur lesquelles se fondent ses po- tentialités. La première caractéristique est que, contrairement aux autres contextes d’appren- tissage, l’approche par projets n’appartient à aucune discipline en particulier : c’est un apprentissage pluridisciplinaire inscrit sur un processus de longue durée. La deuxième carac- téristique est le travail de groupe : si l’apprentissage reste individuel, l’importance de l’ap- proche par projets est liée à son inscription dans un travail de groupe favorisant la coopération et le soutien mutuel des élèves dans leurs apprentissages. Comme forme inhé- rente au travail groupe, l’apprentissage coopératif suit les principes suivants (Robitaille, 2007, p. 172) : une interdépendance positive, une responsabilité individuelle, un développement des habiletés coopératives et une objectivation qui est un bilan-synthèse des apprentissages fait par l’enseignant pour terminer l’activité. La troisième caractéristique est la nécessité d’un tuteur. Si ce dernier peut être un enseignant ou une autre personne, son rôle est central dans

le travail de projets : il prescrit, conseille, oriente, donne une aide en cas de nécessité… La résolution de problèmes longs et souvent fastidieux nécessite un engagement de l’enseignant auprès de ses élèves/étudiants en apprentissage : ces derniers doivent être soutenus et encou- ragés pour rester motivés et ne pas abandonner le travail avant la fin.

2.2. Approche par projets et théorie de l’activité

Loin d’être indépendantes, les pratiques des élèves et des enseignants s’influencent mutuelle- ment au cours d’une action didactique (Robert & Rogalski, 2002 ; Rogalski, 2012). L’ensei- gnant est, par exemple, appelé à tenir compte des forces et des faiblesses des pratiques des élèves pour construire les situations didactiques : choix de sujets de projets effectués par les enseignants, sa façon de les encadrer, la nature des aides données, la façon et les moments- clés de les donner… Bref, dans ses pratiques, il prend en compte de leurs pratiques : ce qu’ils sont capables de faire, les questions posées, les tâches déjà effectuées, leurs compétences à aller plus loin, les degrés d’interactions avec les autres, leurs difficultés…

Dans ce sens, l’approche de la théorie de l’activité nous semble adaptée. Les tâches prescrites sont en fonction du sujet. Elles orientent, suscitent et caractérisent les pratiques de l’appre- nant. Ensuite, avec l’approche de la théorie de l’activité, les élèves/étudiants apprennent en faisant et leurs apprentissages se consolident dans le travail en synergies. Selon Lewis (1998), la théorie de l’activité peut bien servir d’un cadre théorique de recherche qui s’inté- resse aux apprentissages : « la théorie de l’activité met en évidence les caractéristiques des

communautés de travail efficaces », elle peut aussi servir d’un cadre d’analyse des pratiques

pour un travail relatif aux communautés d’apprentissages conjointes. Néanmoins, cette trans- position n’est pas automatique. Des conditions doivent être réunies, eu égard aux différences existant entre les deux communautés : la communauté de travail et la communauté d’appren- tissage. Dans la communauté de travail à laquelle s’intéresse la théorie de l’activité, les diffé- rents membres peuvent travailler sur des tâches différentes en termes d’exigences en fonction de leurs compétences ou leur disponibilité. Dans la communauté d’apprentissage (en groupes d’élèves/étudiants), les tâches sont en général partagées équitablement au sein des membres de chaque groupe12, ce qui est un objectif difficilement réalisable. Pour que cette approche soit efficacement utilisée en contexte d’apprentissage, les tâches proposées doivent avoir deux caractéristiques (Lewis, 1998) : (1) amener les apprenants à s’y reconnaître pour susci-

12 Même si au sein d’un groupe, les membres peuvent, selon leurs différences de compétences, partager eux aussi inégalement leurs tâches.

ter leur motivation et, (2) nécessiter une approche collaborative/coopérative dans leur exécu- tion pour stimuler les interactions entre les apprenants. Dans le cas qui nous concerne de l’apprentissage de l’informatique en contexte de projets, les tâches prescrites aux élèves/étu- diants remplissent-elles les deux caractéristiques de Lewis pour justifier le choix de ce cadre théorique ?