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3.2. Les travailleurs détachés depuis la France : cadre règlementaire, formes et évolutions

3.2.1. Le cadre réglementaire Les règles générales

Il n’existe pas de définition légale du détachement en droit du travail français. Il faut recourir au droit de la sécurité sociale pour en trouver une. Celle-ci définit le détachement depuis la France comme une situation où le salarié d’un employeur régulièrement établi en France et exerçant son activité dans le pays, travaillant habituellement pour le compte de cet employeur, exécute son travail à la demande de cet employeur sur le sol d’un autre pays pendant une durée limitée. L’article L761-1 du Code de la sécurité sociale précise que « Les travailleurs détachés

temporairement à l’étranger par leur employeur pour y exercer une activité salariée ou assimilée qui demeurent soumis à la législation française de sécurité sociale en vertu de conventions ou de règlements internationaux, sont réputés, pour l’application de cette législation, avoir leur résidence et leur lieu de travail en France ».

L’article L761-2 prévoit la situation des autres travailleurs qui ne sont pas concernés par ce dernier article comme les travailleurs étrangers travaillant régulièrement en France. Il précise que « s’ils ne sont pas ou ne sont plus concernés par l’article L. 761-1, les travailleurs détachés

temporairement à l’étranger par leur employeur pour y exercer une activité salariée ou assimilée, rémunérée par cet employeur, sont soumis à la législation française de sécurité sociale à la condition que l’employeur s’engage à s’acquitter de l’intégralité des cotisations sociales ».

Il résulte de ces deux articles 4 principales conditions du détachement de travailleurs depuis la France d’où découlent deux principales conséquences.

Les 4 conditions sont les suivantes :

L’entreprise doit avoir son siège social en France et avoir une activité substantielle dans le domaine pour lequel elle détache le travailleur.

Le détachement à l’étranger pour une activité salariée ou assimilée doit être temporaire1 .

 La rémunération doit être versée par l’employeur.

 Le paiement des cotisations sociales doit être effectué également par ce dernier. Les principales conséquences sont :

Le maintien de l’immatriculation et du paiement des cotisations sociales auprès du régime français de sécurité sociale (cotisations patronales et salariales ; droits aux prestations sociales et remboursement des soins reçus à l’étranger).

33 Et le maintien du contrat du travail avec éventuellement la coexistence d’un contrat local.

Les différentes situations en fonction du pays où le travailleur est détaché

Le détachement depuis la France peut recouvrir plusieurs situations ayant des implications différentes en matière réglementaire. Le détachement peut en effet s’effectuer :

 dans un pays appliquant les règlements européens (les pays de l’UE) ;  dans un pays où existe une convention bilatérale avec la France ;  et dans un pays où il n’y a pas de conventions bilatérales.

Les travailleurs détachés sont soumis en règle générale au droit du pays d’accueil sauf exceptions particulières spécifiées dans le contrat de travail et à la condition que les lois de police du pays d’accueil en matière de rémunération, de durée de travail, de congés payés, de sécurité et de santé, d’hygiène au travail, ne soient pas plus favorables qu’en France.

Détachement dans un Etat membre de l’Union européenne

Dans les pays de l’Union européenne, le détachement a une durée maximale d’un an renouvelable sur autorisation. Si la durée est inférieure à 3 mois, le travailleur doit disposer d’un exemplaire du formulaire A1 (anciennement E101)1 renseigné par l’employeur. C’est le cas notamment des

détachements dans le cadre des missions transfrontalières d’intérim. Si la durée du détachement est comprise entre 3 mois et un an, le travailleur doit disposer de ce formulaire mais préalablement renseigné par la caisse de sécurité sociale compétente et par l’employeur2. Enfin si

cette durée est comprise entre 12 mois et 24 mois, une autorisation préalable de l’autorité compétente de l’Ètat de détachement doit être obtenue (formulaire E 102). Si la durée est supérieure à 2 ans, une autorisation préalable et conjointe des autorités compétentes françaises et du pays de détachement doit être obtenue (Carte européenne d’assurance maladie ou le formulaire E106). Il peut s’agir également de détachement de très longue durée mais dans la limite de 6 ans. Cette situation est régie par l’article 17 du règlement communautaire CEE 1408/71. La démarche est la même que précédemment mais l’employeur doit renseigner un imprimé

1 Plus précisément, l’employeur doit demander à la caisse primaire d’assurance maladie dont dépend

l’entreprise un certificat de législation applicable (formulaire E 101). Il le complète et en remet un exemplaire au travailleur détaché. Il adresse un autre exemplaire à la caisse primaire.

2 L’employeur doit introduire une demande préalable auprès de la caisse primaire d’assurance maladie. Il doit

indiquer les motifs de la mission, son lieu et, le cas échéant, la dénomination et l’adresse de l’entreprise dans laquelle le travailleur sera détaché. La caisse primaire délivre ensuite au salarié un certificat de détachement. (formulaire A1 ou anciennement E101), ainsi que la carte européenne d’assurance maladie. Le formulaire E106 peut être également fourni dans le cas où le salarié transfert sa résidence dans l’Etat où il est détaché.

34 spécifique s’intitulant « demande d’application de l’article 17 du règlement CEE 1408/71 » qui est en fait une demande de maintien d’affiliation au régime français du salarié détaché.

Le salarié détaché reste affilié au régime de protection sociale française. Il conserve ses droits sociaux en matière d’assurance maladie-maternité, accident du travail, prestations familiales, retraites et chômage.

Le détachement dans les autres pays, signataires ou non d’une convention bilatérale avec la France

La France a signé avec une quarantaine d’Etats une convention (site du CLEISS)1. Ces conventions bilatérales définissent d’une certaine façon un cadre réglementaire du détachement afin de garantir la continuité des droits à protection sociale des travailleurs concernés. La règle générale est l’application du droit local de l’activité professionnelle mais la convention permet, par dérogation, le maintien du salarié au régime français de Sécurité sociale ce qui ne donne pas lieu à des versements de cotisations de sécurité sociale dans le pays de détachement.

Si un employeur français détache un salarié dans un Etat qui n’est pas lié à la France par une convention, il est possible de maintenir ce salarié au régime français de Sécurité sociale dans le cadre de la législation nationale. Mais la durée de ce détachement ne peut dépasser 3 ans, un seul renouvellement est possible. L’article R. 761-2 du Code de la Sécurité sociale prévoit une période de carence entre deux détachements. Un travailleur ne peut être détaché dans le même pays et dans la même entreprise qu’après un délai de 2 ans. Pour les travailleurs qui ont été détachés au– delà de la durée maximale sans respect de la période de carence, ils perdent leur statut de travailleurs détachés pour devenir des travailleurs expatriés ce qui signifie que ces salariés ne peuvent plus être maintenus au régime national de Sécurité sociale.

En cas de convention bilatérale, la convention fixe les durées de détachement et les possibilités de prolongation.