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Le béton constitutif des conteneurs de stockage

C4 COGEMA La Hague

4.1 Les colis de stockage de déchets B

4.1.5 Le béton constitutif des conteneurs de stockage

Les exigences sur les matériaux déduites des normes en vigueur dans le domaine des ouvrages de génie civil en béton [46] correspondent en général à des considérations mécaniques et à une durabilité séculaire des ouvrages.

Dans le cadre de l'étude des conteneurs, l’Andra et le CEA ont adopté ces normes ; ils les ont de plus complétées par des exigences renforcées. Les réponses apportées ici sont ainsi fondées sur des études scientifiques, des essais en laboratoire et des tests de convenance industriels réalisés sur plusieurs années. Certaines d’entre elles sont en synergie avec les homologues étrangers de l'Andra, notamment l’agence japonaise RWMC.

Le béton des colis de stockage est constitué de quatre groupes de matériaux : - le ciment, les ajouts minéraux et l'eau ;

- les adjuvants ;

- les granulats (sables et graviers) ; - les armatures et ou fibres métalliques.

La présente section est consacrée à la définition des caractéristiques de chacun d’eux. Il présente la contribution respective à la performance globale du colis.

4.1.5.1 Traduction technique des performances attendues

On notera d’abord qu’il existe une cohérence forte entre la durabilité d’un béton et sa capacité de confinement. En effet, un béton pour répondre à de tels objectifs sera très compact (faible porosité), et doté d’un très faible coefficient de diffusion et d’une perméabilité réduite (pas de porosité ouverte, ni de fissuration). Ces qualités sont favorables à la durabilité du béton, car elles préviennent la pénétration du béton par l’eau et empêchent donc les réactions chimiques d’altération engendrées par la présence d’eau. Elles sont également favorables vis-à-vis du potentiel de confinement.

La capacité à mettre en œuvre le matériau et obtenir un état initial de la meilleure qualité possible (c'est-à-dire avec une fissuration aussi limitée que possible en ouverture et en longueur) est conditionnée par :

- une faible chaleur d'hydratation ; - un retrait endogène limité ;

- une relaxation suffisante des contraintes générées au jeune âge par les déformations empêchées dans la structure.

Outre les caractéristiques précédentes, la durabilité du béton est également subordonnée à la prévention des pathologies du béton comme les réactions alcali silice et alcali granulats, l'attaque sulfatique, l'hydrolyse et la carbonatation [47].

Les conséquences d’une réaction entre certains granulats sisliceux ou silico-calcaires et la solution interstitielle alcaline du béton sont une hydrolyse de la silice et la formation d’un gel de silice. Cela conduit à la création d'un gel, plus ou moins cristallisé, au volume plus important que les réactifs initiaux. Le béton peut se fissurer sous l’effet de cette expansion. De même, les conséquences d’une attaque sulfatique se mesurent en termes de dégradations mécaniques du béton. En effet, la précipitation de composés expansifs (principalement des sulfato-aluminates de calcium) entraîne localement des contraintes mécaniques qui dépassent les capacités des matériaux et crée ainsi des zones fortement fissurées. Le choix de granulats non réactifs et de ciments avec une teneur limitée en aluminates tricalciques (C3A) permet la maîtrise de ces pathologies.

La principale conséquence de l’hydrolyse des matériaux cimentaires est la perte de la capacité tampon acido-basique au travers de la dissolution des principaux hydrates du béton. Cela entraîne une perte importante des propriétés mécaniques. Un moyen de limiter la propagation de ce front de dégradation du béton est de retenir des matériaux peu perméables. La carbonatation du béton, négligeable tant que l’environnement n’est pas resaturé, a dans un premier temps comme conséquence de limiter les

propriétés de transfert du béton (baisse de la porosité) et donc de limiter la propagation du front de dégradation par hydrolyse par exemple. Mais, à terme, cette couche « passivante » est détruite par les autres phénomènes de dégradation du béton et en particulier l’action solubilisante de l’eau29. Ici encore en choisissant des bétons de faible perméabilité, on limite l’extension de la zone perturbée par la carbonatation du béton de colis.

Le choix des matériaux constitutifs du béton résulte des éléments mentionnés ci-dessus. On notera que ce choix ne s’applique pas à la formulation du couvercle du conteneur standard définie spécifiquement pour favoriser une diffusion de l’hydrogène.

4.1.5.2 Le ciment, les ajouts minéraux et l'eau z Ciment et ajouts minéraux

Le ciment recommandé est de type « mélangé ». Il est caractérisé par une composition ternaire (exemple : CEM V, ou CEM I avec ajouts de fumées de silice et cendres volantes). Ce choix permet de réduire la chaleur d’hydratation et d'obtenir des bétons avec une microstructure plus développée.

Cela conduit à des bétons plus compacts, moins poreux et moins perméables.

La teneur du clinker en aluminate tricalcique (C3A) est limitée à moins de 5 %. Ce choix30 permet de minimiser les désordres physiques (risques de fissuration) dus à l'exothermicité de la réaction d'hydratation des aluminates tricalciques (C3A).

La quantité d’alcalins (K et Na) présents dans le ciment, adjuvants et autres constituants, est la plus faible possible, afin de limiter le risque de réaction alcali silice (taux en alcalins Na2O équivalent inférieur ou égal à 0,6 %).

La classe de résistance du ciment pour permettre d’obtenir un béton de classe BHP doit être a minima de 42,5 MPa.

z Dosage en eau et rapport eau totale sur liant total

Le rapport pondéral eau totale (E) sur liant total (L = ciments et ajouts minéraux) doit être strictement inférieur à 0,40. Pour ce faire, au-delà d'un dosage raisonnablement maximisé en liant, il convient de minimiser le dosage en eau (E). Un dosage raisonnable en liant, en conformité avec la prise en compte d'un milieu agressif et de la normalisation actuelle se situe dans la fourchette 300 à 550 kg/m3.

Ce choix contribue de façon significative à l'obtention d'une bonne compacité du béton, c'est-à-dire à une minimisation de la porosité. Il s'ensuit une meilleure protection vis-à-vis des attaques chimiques et une amélioration des performances mécaniques et de confinement.

Par ailleurs, le faible dosage en eau participe à la limitation du terme source hydrogène par radiolyse de l'enveloppe, notamment pour les conteneurs de stockage qui contiennent des colis primaires irradiants types B1 et B5 en particulier.

4.1.5.3 Les adjuvants

Pour la mise en œuvre, l'emploi d'adjuvants est nécessaire. Ils compensent le faible dosage en eau en apportant au béton la fluidité requise au moment de sa mise en place. Toutefois, les adjuvants étant pour la plupart des matériaux organiques, leur dosage doit néanmoins être ajusté afin de limiter la quantité de complexants susceptibles d’influer sur les mécanismes de transfert par l’eau (solubilité) des radionucléides.

29 Toutefois ce phénomène de carbonatation se produira essentiellement à l’interface entre le béton des alvéoles de déchets B et le milieu géologique et ne concerne pas directement les colis.

30 Les ciments retenus pour répondre à cet objectif sont de type PMES (PMES: Prise Mer Eau Sulfatée) ce qui permet aussi de se prémunir de l'attaque sulfatique.

4.1.5.4 Les granulats

Le choix des granulats (sables et graviers) prévient les phénomènes d’altération par réaction alcali silice.

Compte tenu des échelles de temps visées, en particulier pour la variante à capacité de rétention renforcée, le granulat doit être un calcaire physico-chimiquement stable. Les calcaires dolomitiques (contenant du Magnésium), ou les calcaires avec beaucoup d'alcalins doivent être évités. Les granulats calcaires envisagés doivent contenir au moins 95 % de carbonate de calcium (CaCO3). Les impuretés constituant les 5 % restants doivent également être exemptes de toute réaction alcali-silice.

Le diamètre des granulats doit être limité (classe dimensionnelle inférieure à 12,5 millimètres) afin d'améliorer la résistance mécanique du béton et sa compacité. Le fuseau granulaire peut aussi être affiné pour améliorer la compacité du béton en vue de performances accrues et faciliter le coulage du béton (injection, possibilité de pompage).

4.1.5.5 Fibres et armatures éventuelles

Les fibres et les armatures éventuelles répondent aux besoins de renforcement mécanique et de durabilité du conteneur.

L'adoption d'armatures et/ou fibres en acier inoxydable évite les risques de fissuration associés à l'expansion des produits de corrosion des aciers non alliés. Il convient de noter que le niveau de concentration en chlorures de l’eau susceptible d’atteindre le colis en situation de stockage a peu d’influence en milieu anoxique sur la corrosion des aciers inoxydables.

L’ajout de fibres dans le béton permet d'en améliorer la qualité en réduisant les risques de microfissuration et d'apporter des caractéristiques de ductilité et de résistance à la traction. Une résistance à la traction de 5 MPa a ainsi été visée.

Cependant, le rôle des fibres ne permet d'éviter le début de fissuration sous traction que si les propriétés physiques de la matrice béton sont telles que le matériau possède des propriétés de ductilité élevées. Dans le cas contraire, les fibres ne reprennent l'effort qu'après amorce de fissuration.

4.1.5.6 Formulation, tests de mise en œuvre industrielle et performances obtenues

Plusieurs formulations de béton ont été développées en laboratoire, puis testées par des essais de convenance industrielle. Lors de ces essais, une attention particulière a été apportée à la

« pompabilité » du béton en lien avec la dimension des granulats, la dimension et la forme des fibres.

Ainsi, il a été recherché un béton de type auto-plaçant ne nécessitant pas de vibration pour sa mise en place.

Deux types de formulations ont été développés :

- une première base de formulation est définie à partir de CEM I avec ajout d'une part de 10 % de fumées de silice et d'autre part de filler calcaire ou de cendres volantes, pour une masse totale de liant proche de 500 kg/m3, et avec une masse d'eau entre 170 et 200 kg/m3. Le rapport E/L obtenu est inférieur à 0,35. Les granulats et sables sont des calcaires du Boulonnais pour une masse totale d’environ 1 700 kg/m3. Les fibres sont des fibres à crochets inoxydables pour 30 kg/m3 (ou 56 kg/m3pour la variante sans armature) ;

- une seconde base de formulation est définie à partir de CEM V avec ajout complémentaire de 5 % de fumées de silice pour une masse totale de liant de 500 kg/m3 environ et une masse d'eau d’environ 170 kg/m3. Le rapport E/L obtenu est inférieur à 0,35. Les fibres sont des fibres inoxydables droites pour 85 kg/m3.

Par ailleurs, la formulation spécifique du couvercle du colis standard (perméable à l'hydrogène) a été développée sur base de CEM I avec filler calcaire sans fumée de silice et seulement 25 kg de fibres inox à crochet.

Les formulations développées et mises en œuvre pour la fabrication des démonstrateurs permettent d’atteindre les objectifs fixés.

4.1.5.7 Évolution du pH en situation de stockage

Le choix des matériaux et la mise au point des formulations présentées ci-dessus permettent de viser un pH de béton frais de 13 qui va rapidement tendre vers un pH de l’ordre de 12,5 après la maturation du béton. Ensuite en fonction de l’évolution du béton et de sa dégradation chimique, notamment par hydrolyse, le pH diminue très lentement pour tendre à l’état dégradé vers un pH de l’ordre de 10,5 [48].

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