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ARCHITECTURAUX INDUITS PAR LA PROGRESSION TUMORALE DANS LES

1. MATERIEL ET METHODES

1.2. Choix des méthodologies

1.2.2. La Sociologie Cellulaire

Pour reproduire à partir d’un modèle en 2D l’environnement des cellules en cycle et hors cycle, et ainsi pouvoir étudier leurs relations de voisinages, nous nous sommes appuyés sur la théorie des graphes. Rappelons qu’un graphe permet, en intégrant une métrique définie, de décrire une topographie, d’y intégrer les informations qui lui sont associées et donc, de caractériser la topographie d’une population cellulaire à partir de notions relativement simples (par exemple, dans le modèle choisi ici, type moyen d’occupation de l’espace, homogénéité des formes de l’espace propre à chaque cellule au sein de sa population, hétérogénéité de surface de ces régions). On peut ainsi relier l’ordre à la forme. Le modèle princeps de ce type de graphes est le diagramme de Voronoï. Un diagramme de Voronoï (encore appelé décomposition de Voronoï, ou partition de Voronoï) est une décomposition particulière d’un espace métrique déterminé par les distances à un ensemble discret d’objets de l’espace.

Pour construire un tel diagramme, on se place dans un espace euclidien E ; soit S un ensemble fini de n points de E; les éléments de S sont appelés centres, ou germes. On appelle région de Voronoï associée à un élément p de S l’ensemble des points qui sont plus proches de p que de tout autre point de S. Voici comment on définit ce lieu: étant donné deux points pi et pj , le lieu des points le plus près de pi que de pj est le demi-plan contenant pi qui est défini par la médiatrice de pi pj. Soit H( pi pj ) ce demi-plan; le lieu des points plus proches de pi que de n’importe quel autre point , qui est noté (Vi) , est l’intersection de N-1 demi-plans. Il représente une région polygonale convexe n’ayant pas plus que N-1 côtés. On le note:

(Vi) = ∩i≠j H( pi pj ).

Le diagramme de Voronoï est constitué de l’ensemble de ces polygones.

Dans un diagramme de Voronoï, il existe deux types de polygones: des polygones fermés, et des polygones ouverts dont les bords ne sont pas contenus dans la fenêtre de l’échantillonnage. Comme il n’est pas possible de déterminer les relations de voisinage des cellules qui se trouvent sur les bords, on corrige les effets de bord en éliminant ces polygones de nos mesures.

A partir de cette partition de l’espace, on peut mesurer la topographie d’une population en mesurant l’aire des polygones, la forme moyenne, le désordre géométrique et le désordre surfacique. On obtient ainsi une description spécifique d’une population, qui prend en compte la disposition des cellules les unes par rapport aux autres, l’hétérogénéité des distributions locales au sein de la population et l’hétérogénéité d’occupation de l’espace. En effet, les polygones peuvent varier entre eux par leur taille, par leur forme, par leur régularité, ils peuvent être plus ou moins homogènes entre eux pour ces différents paramètres : ce sont toutes ces spécificités que l’on peut quantifier à partir d’un diagramme de Voronoï, et l’on obtient alors l’information sur les relations de voisinage des cellules entre elles. Celle-ci est spécifique d’une population donnée.

Chaque polygone est caractérisé par son aire A et son facteur de forme RF. Ce facteur de forme dépend du périmètre et de la surface ; il est minimal (égal à 1) pour un cercle ; il augmente avec la complexité de l’objet. Connaissant l’aire et le facteur de forme des polygones, on peut mesurer le désordre intrinsèque de la population des polygones selon deux composantes principales, le désordre concernant les hétérogénéités de surface et celui concernant les propriétés géométriques. Ils sont quantifiés par deux paramètres, AD pour le désordre de surface et RFH pour l’homogénéité du facteur de forme. Ces deux paramètres sont bornés sur l’intervalle [0.1] et donnés par les formules:

AD = 1- ( 1+ σ

A

/Aav)

-1

et RFH = ( 1+ σ

RF

/RFav)

-1

Dans ces formules

σ

A représente l’écart type sur la surface,

σ

RF l’écart type sur le facteur de forme, Aav la surface moyenne, Rfav le facteur de forme moyen.

AD, qui mesure le désordre surfacique des polygones, informe sur la variation de la surface des polygones les uns par rapport aux autres, et décrit donc l’hétérogénéité d’occupation de l’espace par les cellules. Il varie dans l’intervalle [0,1] et augmente parallèlement au désordre.

RFH, qui mesure l’homogénéité géométrique des polygones, informe sur la variation de la forme des polygones les uns par rapport aux autres, et décrit donc l’homogénéité des distributions locales au sein de la population.

RFH varie dans l’intervalle [0,1] et diminue quand le désordre augmente.

Un autre paramètre obtenu à partir des polygones de Voronoï est la forme moyenne d’occupation de l’espace. Les polygones du diagramme de Voronoï étant strictement convexes, ils remplissent l’inégalité iso-périmétrique suivante: L(X)2 - 4π A (X)≥ 0 concernant un ensemble convexe X d’aire A(X) et de périmètre L(X). On peut alors

caractériser la forme moyenne d’occupation de l’espace de la population par son facteur de forme moyen Rfav donné par la formule:

N

RFav = 1/N∑ [ 4πA(X

i

)/L(X

i

)

i =1

et on a 0< Rfav≤1.

Rfav mesure la forme moyenne des polygones, et informe sur la disposition moyenne des cellules les unes par rapport aux autres. Il vaut 1 pour une forme ronde de chaque polygone et se rapproche de 0 quand le polygone se déforme.

Ces trois paramètres, bornés sur l’intervalle [0,1], sont indépendants de la taille de l’échantillon.

On peut également extraire, à partir des données du diagramme de Voronoï, d’autres informations qui ne sont plus directement liées aux notions de voisinage : connaissant l’aire moyenne A des polygones de Voronoï, on en déduit la cellularité des tissus ; il existe en effet un rapport inverse entre la taille des polygones et la cellularité, les zones les plus cellulaires générant les polygones d’aire la plus petite. La densité cellulaire est égale à 1/A (en effet, un polygone et la cellule qui l’a généré n’ont pas les mêmes limites, le polygone du fait de son architecture débordant les limites cytoplasmiques de la cellule). La polarisation de l’architecture est déduite du facteur de forme Rfav, par la mesure 1/RFav.

La figure 23 montre un exemple de pavage de l’espace par les polygones de Voronoï.

Figure 23 : exemple de diagramme de Voronoï constitué par les différents polygones de Voronoï

Il existe une autre manière de définir les relations de voisinage, la triangulation de Delaunay . Elle a été définie à partir du diagramme de Voronoï. Le diagramme de Voronoï et la triangulation de Delaunay sont très fortement liés, ils sont « duaux ». Le point à l’intersection de trois zones d’influence de Voronoï se trouve exactement à l’aplomb du centre de la sphère utilisée pour construire la triangulation de Delaunay.

Le diagramme de Voronoï et la triangulation de Delaunay s’intéressent à l’organisation spatiale d’un tissu au niveau de sa topographie globale (14). Un autre outil de la Sociologie Cellulaire est représenté par l’arbre d’Ulam. Contrairement aux deux précédents, l’arbre d’Ulam est un outil d’analyse de l’environnement de chaque cellule. Il s’agit d’un « objet mathématique qui grandit dans l’espace et dans le temps. La triangulation de Delaunay et le diagramme de Voronoï servent de support à la croissance de l’arbre. » (89).

Notre étude actuelle s’intéressant à la topographie globale du tissu cancéreux lors de sa transformation, nous ne ferons pas appel à l’arbre d’Ulam. Le diagramme de Voronoï s’étant révélé dans la littérature comme l’outil mathématique le plus informatif pour étudier la topographie globale d’un tissu, c’est lui que nous utiliserons dans notre étude.