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La situation respective des femmes et des hommes

L’ADÉQUATION DU SYSTÈME DE RETRAITE FRANÇAIS À SES OBJECTIFS

Chapitre 4 – La solidarité du système de retraite en regard des évolutions de la société

II. La situation respective des femmes et des hommes

1. Les disparités sur le marché du travail182

L’activité féminine n’a jamais cessé de progresser depuis la fin des années 1960. En 1970, une femme sur deux en âge de travailler (15-64 ans) était active ; aujourd’hui, c’est le cas de deux femmes sur trois. En 2010, le taux d’activité des 15-64 ans s’élevait à 75 % pour les hommes et à 66 % pour les femmes.

Cependant, depuis le milieu des années 1990, la progression de l’activité féminine ralentit avec la persistance des interruptions liées aux naissances (38 % des femmes ne travaillent pas après une première naissance, 51 % après une deuxième et 69 % après une troisième183). 30 % des femmes travaillent à temps partiel et le taux d’emploi des femmes en équivalent temps plein stagne depuis la génération 1955.

Les écarts salariaux ont cessé de se réduire depuis le milieu des années 1990. Ils se stabilisent autour de 10 % pour les salaires horaires et de 20 % pour les salaires annuels toutes durées confondues. Les écarts de durée effective de travail, ainsi que les différences de secteur d’activité et de qualification des emplois, sont les causes principales des écarts de salaire mensuel entre les femmes et les hommes, mais les différences d’évolution de carrière en expliquent aussi une partie.

2. Les évolutions des couples

Dans le même temps, les parcours conjugaux évoluent avec la montée importante du nombre de divorces et d’unions hors mariage. Les unions hors mariage s’avèrent plus fragiles que les mariages et, comme les mariages, elles deviennent de plus en plus fragiles au fil des générations. Il en résulte que la proportion d’hommes et de femmes vivant seuls à un âge donné tend à s’accroître au fil des générations. Ce constat est valable à tout âge, excepté au- delà de 70 ans en raison du recul du veuvage184. Cela contribue au très fort accroissement du nombre de familles monoparentales : le nombre de ces familles avec enfants de moins de

181 COR (2008), Retraites : droits familiaux et conjugaux, sixième rapport, décembre. 182 Séance du COR du 11 avril 2012, Parcours de vie, activité professionnelle et retraite.

183 Pailhé A. et Solaz A. (2006), « Vie professionnelle et naissance, la charge de la conciliation repose essentiellement sur les femmes », INED, Population et Sociétés n° 426.

184 Bien que le veuvage concerne encore quatre femmes sur dix après 60 ans, la proportion de personnes veuves devrait continuer de reculer en raison de l’augmentation de l’espérance de vie, de la réduction de l’écart d’âge entre conjoints et de la surmortalité masculine moins marquée que par le passé.

25 ans a plus que doublé entre 1975 et 1999, puis a augmenté de 13 % entre 1999 et 2005 pour atteindre 1,76 million de familles.

Enfin, si la fécondité a diminué depuis le baby boom, elle se maintient en France à un niveau relativement élevé par comparaison avec les autres pays développés185, mais la proportion de familles nombreuses a diminué : en 2008, 17 % des familles comprennent au moins trois enfants mineurs au domicile, alors qu’elles étaient 20 % en 1990.

3. Les écarts de pension entre les femmes et les hommes

Les écarts de durée de carrière et de salaires entre les femmes et les hommes se traduisent de façon cumulative par des écarts en termes de droits à retraite, à travers leur impact sur la durée d’assurance et le salaire de référence.

Fin 2008, parmi les retraités résidant en France, la pension de droit propre (hors réversion) des femmes ne représentait que 53 % de celle des hommes (879 € par mois contre 1 657 €). Ce ratio progresse au fil des générations, sous l’effet de l’accroissement de l’activité féminine et de la hausse des qualifications des femmes, passant de 44 % pour la génération 1924-1928 à 56 % pour la génération 1939-1943. Selon l’INSEE, il atteindrait 70 % pour les générations nées dans les années 1950, puis progresserait plus lentement, atteignant 80 % pour les générations nées dans les années 1970. En moyenne, les droits familiaux de retraite représentent plus d’un quart de la pension de droit propre des femmes des générations 1934 et 1938 (18 % pour les mères de deux enfants, 34 % pour celles de trois enfants). Cet apport est relativement plus important pour les mères percevant de petites pensions.

À l’avenir, les écarts en termes de durée d’assurance en défaveur des femmes devraient tendre à disparaître avec la montée de l’activité féminine et le concours des droits familiaux186, et les écarts de salaire, y compris ceux liés au temps partiel, seront alors la cause principale des écarts de pension subsistant entre les femmes et les hommes, les droits familiaux de retraite (MDA ou AVPF) apportant des trimestres supplémentaires mais ne jouant pas ou peu sur le salaire de référence187.

Après prise en compte des pensions de réversion, les écarts de pension entre les femmes et les hommes se réduisent (1 165 € par mois contre 1 749 € en 2008, soit un rapport de 67 %). Mais, pour les générations futures de retraités, et en raison des évolutions des modes de conjugalité (recul du mariage, augmentation du nombre de divorces et de ruptures d’union), de plus en plus de femmes vivant seules ne percevront pas de pension de réversion, à législation actuelle. Leur niveau de vie rapporté à celui des couples de retraités pourrait même se dégrader. En effet, même si la pension moyenne des femmes continuera d’augmenter, il n’est pas évident que, dans le même temps, celle des femmes célibataires ou divorcés progressera au fil des générations, dès lors que ces dernières appartiendront de plus en plus souvent à des catégories modestes ou peu diplômées188.

185 Selon l’INSEE, en France, l’indicateur conjoncturel de fécondité (ICF) est de 2,01 enfants par femme en 2011.

186 Les activités à temps partiel peuvent permettre de valider quatre trimestres par an.

187 Ils ne donnent pas non plus lieu à la validation de points dans les régimes complémentaires. Voir le chapitre 4 de la présente partie.

188

Bonnet C. et Hourriez J.-M. (2012), « Inégalités entre hommes et femmes au moment de la retraite en France », INSEE, Regards sur la parité, pp. 39-51.

La problématique des écarts de pension entre les femmes et les hommes renvoie donc aux politiques visant à réduire les écarts de salaire, en amont, mais également aux règles relatives au cœur du système de retraite, qui sont plutôt défavorables aux femmes, dont les carrières sont en moyenne plus courtes, et aux dispositifs de solidarité, qui pourraient davantage contribuer à réduire les écarts de pension entre les femmes et les hommes189.

4. Les écarts de pension entre femmes et hommes à l’étranger

Les spécificités de l’activité féminine – moindre participation au marché du travail, fréquence accrue du temps partiel et moindre niveau de rémunérations – se retrouvent à des degrés divers dans tous les pays étudiés par le COR190.

Les écarts de pension en défaveur des femmes restent importants mais se réduisent si l’on prend en compte les pensions de réversion et parmi les jeunes générations de retraités.

Pension moyenne des femmes rapportée à celle des hommes en Europe Allemagne (2007) France (2008) Italie (2006) Suède (2006) Royaume-Uni (2006) seuls couples

Droits propres uniquement 52 % 53 % 54 % 68 % 86 % 41 %

Droits propres + réversion 72 % 67 % 69 % 79 % - -

Sources : pour la France, Andrieux V. et Chantel C. (2011), « Les retraites perçues fin 2008 », DREES, Études et résultats, n° 758 ; pour l’étranger, COR (2008), « Retraites : droits familiaux et conjugaux », sixième rapport. Note de lecture : en France, en 2008, la pension de retraite moyenne de droit propre de l’ensemble des retraitées est égale à 53 % de celle des hommes. Si on considère la pension totale, c’est-à-dire en incluant la pension de réversion, la pension des femmes atteint 67 % de celle des hommes.

En Allemagne, en Italie, en Suède et au Royaume-Uni, les droits familiaux ne se sont développés de manière significative qu’à partir des années 1990, dans le contexte de réformes des systèmes de retraite qui accentuent le lien entre les cotisations et les prestations et risquaient, de ce fait, de fragiliser plus particulièrement les femmes. Les Etats-Unis et les Pays-Bas, qui ont préservé le caractère forfaitaire de leur système de base, sont restés à l’écart de cette tendance.

À l’exception des Pays-Bas, seul pays à ne pas avoir instauré de pension de réversion, la réversion représente encore souvent une part significative des prestations de retraite : autour de 17 % pour l’Italie, l’Allemagne et les Etats-Unis en 2006, mais cette part a tendance à diminuer. Elle n’était, en 2006, que de 7 % pour le Royaume-Uni et un peu plus de 5 % pour la Suède, où le dispositif a été progressivement supprimé.

189 Voir les deux chapitres précédents.