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La situation particulière des femmes dans la recherche

II - FAVORISER CONTINUITÉ,

4. La situation particulière des femmes dans la recherche

L o er re progressi e de l enseignemen s p rie r e de l ni ersi a femmes à partir de la seconde moitié du 19e siècle, a permis une féminisation progressive de la recherche scientifique, auparavant exclusivement réservée aux hommes.

To efois, le r q ilibrage es loin d re a ein . Si les femmes sont majoritaires parmi les dian s de l enseignemen s p rie r (55 % en 201797) et plus diplômées (la part des femmes de 25 à 34 ans diplômées est près de 10 points supérieure aux hommes), elles restent largement minoritaires dans les effectifs de la recherche (28 %)98. Elles n on por q e 14 % des demandes de brevet entre 2003 et 2013.

4.1. Les inégalités de genre dans le secteur de la recherche

Les femmes repr sen en moins d n iers des effec ifs de la recherche (p bliq e comme privée), même si cette proportion est en augmentation (3 points d a gmen a ion en re 2010 e 2016). Elles son bea co p pl s pr sen es dans la recherche publique (39 %) que dans la recherche privée (21 %)99.

En tendance générale, les femmes sont davantage présentes sur les fonctions support ou périphériques à la recherche et dans les échelons subalternes. Leur proportion dans les effectifs de recherche stricto sensu est plus faible (28 %) que dans le total des effectifs dédiés à la R&D (32 %). Ce déséquilibre est patent dans les EPST, dans lesquels les femmes représentent 58 % du personnel de soutien.

Leur proportion diminue en raison inverse du statut hiérarchique. 61 % des adjoints techniques et des techniciens de la recherche sont des femmes, contre seulement 30 % des direc e rs de recherche. Dans les carri res d enseignan cherche r, la par des femmes d cro a ec l a ancemen de carri re (44 % des maîtres de conférences, 25 % des professeurs des universités). Enfin, elles ne représentent que 9 % des pr sidences d organismes p blics de recherche.

Le taux de féminisation varie fortement selon les domaines, ce qui révèle des phénomènes de spécialisation.

Plusieurs motifs peuvent être invoqués pour expliquer ces déséquilibres : le poids des s r o pes de genre no ammen a s ade de l orien a ion, ainsi q e des fac e rs organisationnels et culturels propres aux établissements de recherche.

97Mesri, « Vers l Egali Femmes-Hommes ? Chiffres clés 2019 », p. 18 : https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid139695/esri-chiffres-cles-de-l-egalite-femmes-hommes-parution-2019.html.

98 Ibid. p10 99 Ibid.

Avis

4.2. Le poids des choi d orien a ion

Comme l'a mis en évidence l'avis « L orien a ion des je nes » (Laure Delair et Abert Ritzenthaler, 2018), « A chaque palier d orientation, chaque fois que l offre de formations se diversifie, des diff rences d orientation entre les garçons et les filles apparaissent. » Le constat de la désaffection des jeunes femmes pour les matières scientifiques est persistant. En 2017, les femmes étaient toujours minoritaires dans les filières scientifiques (36 % dans les universités de sciences, 27 % dans les forma ions d ing nie rs et ingénieures) et sélectives (42,8 % en classes préparatoires aux grandes écoles)100. Les associations Femmes & Sciences, Femmes et mathématiques et Femmes Ingénieurs, ont publié le 23 janvier 2020, des propositions dans la perspective de la LPPR101. Elles por en no ammen s r l orien a ion scolaire des filles vers les filières scientifiques et techniques et le combat contre les représentations stéréotypées des femmes dans les sciences. Les biais d a ocens re sont également très prégnants. Si le recrutement des enseignants-chercheurs tend à se féminiser, les femmes se portent moins souvent candidates lors du recrutement102. L a ocens re des femmes se manifes e galemen a long de le r carrière dans la recherche103. Moins confiantes sur leurs capacités, davantage exposées aux attentes sociales liées à la famille, les chercheuses tendent à se présenter « plus tard, parfois jamais ou trop tard » aux concours qui permettraient de faire progresser leur carrière.

Des chercheuses ont également suggéré que la loi ORE104 et Parcours Sup ont contribué à renforcer ces biais105.

4.3. Des modèles de réussite professionnelle qui désavantagent les femmes

Comme le souligne la mission pour la place des femmes au CNRS : « Au CNRS, comme dans les autres établissements de ce type, le modèle professionnel dominant de r ussite professionnelle se construit encore autour d une norme valorisant la fois la disponibilité totale polarisée sur la recherche, l engagement intellectuel et psychique constant, la porosité des frontières entre temps professionnel et temps privé, ainsi que la précocité et la rapidité de carrière. »106 Au-delà du nombre de p blica ion, la r ssi e d ne cherche se ien galemen l inser ion dans les

100 Ibid. p18.

101 « Proposi ions des femmes scien ifiq es e ing nie res po r pl s de mi i dans les m iers d ing nie r-es et de scientifiques », 23 janvier 2020, femmesetsciences.fr. URL : http://www.femmesetsciences.fr/actualites/actions_phares/communique-de-presse-du-23-01-2020/.

102 Mesri, 2019, op. cit., p34.

103 Marry Catherine, Jonas Irène, « Chercheuses entre deux passions. L'exemple des biologistes », Travail, genre et sociétés, 2005/2 (Nº 14), p. 69-88. URL : https://www.cairn.info/revue-travail-genre-et-societes-2005-2-page-69.htm.

104 Loi n°2018-166 du 8 mars 2018 relative à l'orientation et réussite des étudiants.

105Fanny Bugeja-Bloch & Marie-Paule Couto, « Le Parcoursup des filles Classe e genre l ni ersi », 12 juin 2018, la vie des idées.fr. URL : https://laviedesidees.fr/Le-Parcoursup-des-filles.html.

106 Mission pour la place des femmes au CNRS, Fiche 2017, cnrs.fr : https://www.cnrs.fr/mpdf/IMG/pdf/fichempdf_2017_hd.pdf.

AVISANNEXES réseaux, aux mobilités internationales, et à la diversité des responsabilités prises au

sein de l ni ersi 107.

Or, la réalité professionnelle des femmes (parcours moins linéaires, plus fortes con rain es d ar ic la ion des emps de ie ) les me en posi ion moins favorable po r r pondre ces e igences de disponibili e d in es issemen o al. Elles son donc moins bien placées pour préparer certains concours, valoriser leurs travaux (lors de congr s, de colloq es, parfois l in erna ional), mais a ssi a près des organismes privés qui proposent financements et possibilités de carrière. Ces contraintes sont un handicap important dans la concurrence qui prévaut au sein de la recherche.

Le manque de valorisation108 des travaux des chercheuses les rend souvent invisibles. Ces ra a fon parfois l obje d ne r appropria ion par les cherche rs hommes, dont les plus connus et reconnus mobilisent les ressources collectives des laboratoires de recherche aux dépens des chercheuses (effet « Matthieu et Matilda »109).

Ceci explique également une exclusion progressive des femmes, au fur et à mesure des échelons grimpés et responsabilités obtenues le long de leur carrière, et l e is ence d n plafond de erre. A CNRS, « toutes disciplines confondues, 16,1 % des chercheurs hommes sont directeurs de recherche de première classe ou de classe exceptionnelle, alors que seulement 8,9 % des femmes atteignent ce grade ».

Les femmes, fragilisées dans leur progression dans la recherche tout au long de leur carrière, sont par contraste, surreprésentées dans le personnel non-enseignant (63 %).110

4.4. Le débat public sur la place des femmes dans la recherche, dans la perspective de la LPPR

Pour répondre aux inégalités de genre qui persistent dans les carrières scientifiques, les associations Femmes & Sciences, Femmes et mathématiques, et Femmes Ingénieurs, formulent des propositions sous l'angle de la parité dans les organismes de recherche et les ablissemen s d enseignemen s p rie r111. Dans

107Marry Catherine, Jonas Irène, « Chercheuses entre deux passions. L'exemple des biologistes », Travail, genre et sociétés, 2005/2 (Nº 14), p. 69-88. URL : https://www.cairn.info/revue-travail-genre-et-societes-2005-2-page-69.htm.

108 Boutillier Sophie, Laperche Blandine, « La place des femmes dans la recherche : apprentissage, production et valorisation des connaissances », Marché et organisations, 2007/3 (N° 5), p. 61-77.

109 Théorie propos e par l his orienne Margare Rossiter, du nom de la militante féministe Matilda Joslyn Gage.

Elle d signe l o bli dans leq el son so en plong s les noms de collabora rices de grandes d co er es.

Ainsi, Rosalind Franklin, q i r alisa le premier clich de l ADN, n a-t-elle jamais été associée au prix Nobel de James Watson, Francis Crick et Maurice Wilkins (1962).

110 Mesri, 2019, op. cit., p. 31.

111 Proposition n°23, « Propositions des femmes scientifiques et ingénieures pour plus de mixité dans les m iers d ing nie r-es et de scientifiques », 23 janvier 2020, femmesetsciences.fr. URL :

http://www.femmesetsciences.fr/wp-content/uploads/2020/01/propositions-feminisation-metiers-scientifiques_2020-vf.pdf.

Avis

la tribune « LPPR : Une réforme néolibérale contre la science et les femmes » publiée le 10 février dans Le Monde112, n collec if de cherche ses e d ni ersi aires spécialistes du genre, demande une approche plus structurelle des inégalités, condamnant le simple affichage que pourrait être « l obligation de repr sentation équilibrée dans différentes instances », même si elle a « amélioré la position de certaines femmes ».

Cette tribune remet également en perspective les « pays généralement présentés comme des modèles à suivre ». Il est ques ion de l Allemagne, pa s o se lemen 28 % des chercheurs sont des femmes113, et 15 % des chercheurs dans le secteur privé114, où « en 2014, 77 % des enseignantes-chercheuses avaient un contrat à durée limitée (contre 64 % des enseignants-chercheurs)».

Depuis 2001, la « Mission pour la place des femmes au CNRS s engage e agi autour de quatre axes : l gali professionnelle, la rans ersali des recherches s r le genre, la promotion des carrières scientifiques auprès des jeunes femmes, et le développement de partenariats internationaux. La mission, placée auprès de la présidence du CNRS, pose un diagnostic : « certaines règles, procédures, critères d valuation et pratiques quotidiennes en tant appliqu s de mani re identique des situation inégalitaires, défavorisent les femmes »115.

Préconisation 10 :

Le Cese recommande que la plus grande importance soit attachée à des rapports de situation comparée de l'égalité professionnelle et que des plans d'action pour l'égalité professionnelle soient engagés dans l'ensemble des organismes et centres de R&D. Une politique volontariste vis-à-vis des femmes doit être menée, en concertation avec les représentants et représentantes des personnels (par exemple : attribution de congés de recherche, décharges de service d'enseignement, présence dans les jurys, etc.), avec pour objectif d'atteindre la parité dans les emplois, notamment parmi les professeurs/professeures d'université et les directeurs/directrices de recherche. Le Cese recommande également qu'une attention particulière soit portée à tous les aspects d'égalité, dès la formation initiale.

112 « LPPR : "Une réforme néolibérale contre la science et les femmes" », lemonde.fr, 10 février 2020. URL : https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/02/10/loi-de-programmation-pluriannuelle-de-la-recherche-une-reforme-neoliberale-contre-la-science-et-les-femmes_6029018_3232.html.

113 Mesri, 2019 op. cit., p. 10.

114 Ibid.

115 Mission pour la place des femmes au CNRS, Fiche 2017, cnrs.fr. URL : https://www.cnrs.fr/mpdf/IMG/pdf/fichempdf_2017_hd.pdf

AVISANNEXES

III - REDONNER UNE PLACE À LA SCIENCE