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Introduction générale

1.2 La séparation mécanique

Beaucoup d'installations industrielles ont des opérations unitaires de séparation de phases (ou de classication) dans leur procédé. De tels procédés sont implantés dans des secteurs très divers de l'industrie : industrie agroalimentaire, industrie chimique, industrie pétrolière, scieries, stations d'épuration et de dépollution des eaux, minéralurgie, hydrométallurgie, dépoussiérage...

Les procédés de séparation peuvent être classés en deux grandes familles :

ê Les procédés de séparation par diusion : extraction, distillation, évaporation, sublimation, chromatographie, séparation par ltre chimique (charbon actif, osmoseur...)...

ê Les procédés de séparation mécanique dans le sens large du terme : séparation gravitaire

(décantation, oculation...) et/ou inertielle (par exemple les centrifugeuses, dans les sépara-teurs cyclones ou les essoreuses), ltration par milieu poreux ou par ltre physique (à l'aide d'une grille, d'un tamis, ou d'un ltre...)...

Le principe commun de tous ces procédés est d'exploiter une diérence de propriétés entre le composé d'intérêt et le reste du mélange, de façon à ce que sous l'inuence d'un champ de force donné, la phase d'intérêt emprunte un chemin diérent et puisse être récupérée à part. Cette propriété à exploiter peut être la masse volumique ou la réponse inertielle, la tension supercielle, la charge électrique, la mouillabilité, le point d'ébullition, la solubilité...

Et suivant la propriété discriminante retenue, les forces motrices de la séparation peuvent être de nature inertielle (gravité ou champ de forces centrifuges), électrique (électrophorèse...), magnétique, thermique (thermophorèse), ou liées à une diérence de tension supercielle (eet Marangoni) ou d'anité (propriétés de mouillabilité, d'hydrophobicité)...

A noter qu'assez souvent, on peut avoir recours à des traitements préliminaires pour faciliter ultérieurement la séparation. Ces traitements visent généralement à amplier l'écart de la propriété discriminante entre les diérentes phases : ottation, oculation, mouillage des poussières (dans les laveurs), agglomération acoustique des poussières par ultrasons [Sadigzadeh1990]...

Dans le reste de ce manuscrit, on ne s'intéressera qu'aux procédés de séparation mécanique. Le lecteur intéressé pourrait consulter [Sinaiski2007], un ouvrage abordant la séparation dans un contexte vaste, ou se référer à [Falk2011] ou [Midoux2010], deux cours ciblant des applications plus précises.

D'une façon simpliée, on peut dire que les techniques de séparation mécanique, quand leur utilisation est possible et susante, sont généralement préférées aux techniques de séparation par diusion, et ceci en vue de leur moindre coût énergétique, comme en témoigne le graphique de la Figure 1.5.

Une fois qu'une séparation mécanique a été décidée, il reste à choisir le procédé convenable. On va donc discuter ci-dessous des avantages/inconvénients des trois principales catégories de séparation mécanique : la décantation, la centrifugation, la ltration. D'autres catégories peuvent être ajoutées, mais elles ne sont pas purement mécaniques, telles que la séparation en utilisant un

champ électrique4, magnétique ou thermique. Elles ne seront pas abordées dans ce manuscrit.

4. L'extraction électrostatique se fait sur des particules susceptibles de prendre une charge électrique dans un champ et d'être attirées par un collecteur de charge opposée.

Figure 1.5 Consommation d'énergie relative des procédés de séparation [ADEME2011]

1.2.1 La décantation

On utilise le terme décantation pour désigner, d'une manière légèrement abusive, la séparation des phases d'un mélange hétérogène sous l'eet du champ gravitaire. L'opération est simple et très peu consommatrice en énergie. Toutefois, son ecacité du point de vue de la qualité de séparation ou en terme de temps de séjour du mélange peut montrer de sérieuses limitations :

ê L'ecacité de la séparation gravitaire est fortement altérée lorsqu'il s'agit de séparer de

nes particules. L'action de l'agitation brownienne et/ou de la dispersion turbulente fait que la particule est soumise à un mouvement erratique ralentissant sa ségrégation. A titre d'exemple, une particule de poussière de densité égale à l'unité, et d'une taille de 10 µm, demande environ 5 minutes et demi pour sédimenter d'un mètre dans une atmosphère calme [Homann2008].

ê Lorsque la diérence de densité entre les phases est faible, l'ecacité de séparation gravitaire décroît considérablement. Il faudrait des temps de séjour plus conséquents pour pouvoir atteindre la qualité de séparation requise, ce qui implique divers inconvénients : utilisation de gros séparateurs d'où une hausse dans les charges, l'encombrement lié à ces gros séparateurs, sans oublier les problèmes de sécurité que cela peut poser si le mélange est inammable ou pouvant être sujet à détonation (le séparateur contenant une grande quantité du produit), ou les problèmes de maintenance si le mélange est corrosif...

ê Elle est inecace face à des mélanges relativement stables, tels que les colloïdes : mousses, émulsions...(A noter que ces solutions bien que montrant une stabilité apparente, ne sont pas stables thermodynamiquement, et se séparent très lentement sous l'eet de la gravité.)

ê Elle ne peut subvenir à séparer diérents gaz, les forces liées aux chocs intermoléculaires

ê Conduite par le champ gravitationnel, elle ne peut être ecace dans des environnements où il est faible, par exemple dans des applications spatiales ou autres, situations que l'Homme pourrait aronter dans un futur proche.

1.2.2 La centrifugation

La centrifugation désigne la séparation mécanique sous l'action d'un champ centrifuge. Dans une bonne partie des situations, le champ gravitaire vient renforcer la séparation. On peut aussi procéder à un ltrage où la pression motrice est fournie par action centrifuge : c'est l'essorage.

Les séparateurs centrifuges peuvent être classés en deux catégories :

ê Les séparateurs statiques : le châssis du séparateur est xe, et c'est uniquement le mélange

à séparer qui est soumis à un mouvement rotationnel (généré par injection tangentielle du uide par exemple...).

ê Les séparateurs dynamiques : c'est le châssis du séparateur ou une composante de ce dernier

qui est soumis à la rotation, et qui induit le mouvement tourbillonnaire dans le mélange d'intérêt. C'est le cas des écrémeuses.

Ces derniers peuvent atteindre des ecacités bien supérieures à celles des séparateurs statiques, mais sont cependant beaucoup plus énergivores. En plus, la présence de pièces mobiles conduit à des risques de pannes plus fréquents. Dans le reste de ce rapport, on ne s'intéresse qu'aux séparateurs statiques. En comparant les séparateurs centrifuges à leurs homologues gravitaires, on peut faire les constats suivants :

ê La séparation étant conduite par plusieurs gs et non pas uniquement pas la gravité, ils

sont plus ecaces.

ê Ils sont capables de séparer les composantes d'un mélange gazeux. C'est un des procédés

utilisés pour l'enrichissement de l'Uranium.

ê L'ecacité de la séparation étant augmentée, le temps de séjour du mélange est ainsi réduit.

Ceci fait que les séparateurs centrifuges sont plus compacts. Cet encombrement moindre constitue leur principal avantage.

ê Les pertes de charge associées sont généralement plus importantes, sans que ceci n'implique

forcément un moindre rendement énergétique.

ê Derrière leur fonctionnement apparemment simple, les séparateurs centrifuges cachent une

grande complexité opératoire. Comme on va le voir plus tard, la dynamique des écoulements tourbillonnaires n'est toujours pas maîtrisée, et la mécanique des uides multiphasiques est encore loin d'atteindre sa maturité. La prévisibilité de leur fonctionnement est donc moins aisée que pour les séparateurs gravitaires.

ê Le nombre de gs participant à la séparation étant directement lié aux débits d'entrée

(pour les séparateurs statiques), leur souplesse en débit est relativement limitée. Quant aux séparateurs gravitaires, la uctuation des débits n'est pas limitante, tant qu'ils sont correctement dimensionnés (donc en tenant compte des débits maximaux sur la ligne).

ê En général, ces deux types de séparateurs sont économiques, puisqu'il n'y a pas de coûts de

consommables, et les frais de maintenance sont faibles (absence de pièces mobiles, puisqu'on ne considère plus les séparateurs centrifuges dynamiques). Quant aux coûts d'investissement, c'est au cas par cas qu'il faut les traiter ; ces coûts étant liés en grande partie à la géométrie standard ou non du séparateur.

1.2.3 La ltration

Les ltres sont généralement utilisés pour séparer des particules solides ou liquides (le méca-nisme exact dans le second cas est alors l'interception des gouttelettes) dispersées dans une phase

continue. Il existe plusieurs types de ltration (en profondeur, sur support) et une très grande va-riété de ltres. Le lecteur intéressé pourrait consulter à ce sujet [Falk2011] ou [Midoux2010]. Nous nous contenterons uniquement de comparer les potentiels généraux de la ltration par rapport aux séparateurs inertiels (gravitaires ou centrifuges) :

ê Le point le plus fort de la ltration est qu'elle est capable de récupérer et avec une ecacité presque parfaite les particules les plus nes, et qui échappent à la séparation inertielle.

ê Contrairement aux séparateurs inertiels, la perte de charge n'est pas constante à travers les ltres. Celle-ci augmente au fur et à mesure du colmatage du média ltrant. En plus, ces pertes de charge sont généralement importantes.

ê Les ltres ne sont pas à recommander lorsqu'il s'agit d'÷uvrer sur des écoulements fortement

chargés : le ltre pourrait être rapidement obturé.

ê Lorsqu'il s'agit de récupérer des particules valorisables, les ltres sont à proscrire ; le produit collecté peut devenir inutilisable.

ê Contrairement aux dispositifs inertiels, l'utilisation des ltres implique un coût de consom-mables, puisqu'ils présentent une durée de vie limitée. Cette durée de vie est liée à l'atteinte de la perte de charge maximale tolérée, et non pas à une chute d'ecacité ; en fait l'eca-cité du ltre augmentera au fur et à mesure de son colmatage. Bien entendu, certains ltres peuvent être régénérés.

Compte tenu de ces problèmes, on pourrait conclure que l'utilisation des séparateurs inertiels est préférable aux ltres si l'on veut traiter de gros volumes de mélange (ou des mélanges fortement chargés), à condition que la séparation des très nes particules ne soit pas impérative. Sinon, il faut employer des ltres ; un séparateur inertiel placé en amont pourrait réduire considérablement la charge du mélange en grosses particules, et faire éviter ainsi l'encrassement excessif du ltre.