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De la mucoviscidose à la pathologie CFTR : un continuum clinique

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Le diagnostic de mucoviscidose ou de pathologie CFTR repose à la fois sur des arguments cliniques et biologiques. Si la plupart des patients présentent une forme sévère de la maladie, avec atteinte multisystémique, il existe des cas de formes plus modérées ou atypiques. Ces formes modérées, voire monosymptomatiques n’ayant pas le même pronostic que les formes classiques de la maladie, il a été décidé de les distinguer de la pathologie « mucoviscidose », pour des raisons psychologiques, sociales (assurances, services sociaux) et médicales (suivi moins complexe). C’est pourquoi un consortium réuni par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), avec la participation de l’European CF Thematic Network (ECFTN), avait établi en 2000 des critères diagnostiques permettant de différentier la mucoviscidose classique, la mucoviscidose atypique, et les pathologies monosymptomatiques liées à CFTR ou CFTR-RD (CFTR-Related Disorder) (WHO, 2000). Plus

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récemment, cette classification a été remise à jour lors de « workshops » organisés par EuroCareCF en 2007 et 2008, réunissant 35 experts européens et Nord-américains (Bombieri, et al., 2011), classant les différentes formes de la maladie en deux entités : la maladie mucoviscidose CF et les pathologies CFTR ou CFTR-RD.

1. Mucoviscidose classique

Les critères cliniques, reconnus au plan international et validés par la conférence de consensus de la CFF (Cystic Fibrosis Foundation), sont ceux rapportés par Rosenstein et Cutting en 1998 et revus par la conférence de consensus de la CFF (Cystic Fibrosis Foundation) en 2007 (Figure 2, page 9)

(Farrell, et al., 2008; Rosenstein and Cutting, 1998). Dans la mucoviscidose classique, le taux de CFTR fonctionnel est proche de 0%, et pour la majorité des patients qui remplit les critères indiqués dans le Tableau 1, l’établissement du diagnostic ne pose pas de difficulté particulière, de par leur présentation clinique et leur test de la sueur supérieur à 60 mmol/L. Parmi eux, environ 85% nécessitent une supplémentation en enzyme pancréatique (PI).

Une ou plusieurs caractéristiques phénotypiques (cf Figure 2) ou un antécédent familial de mucoviscidose dans la fratrie

ou un dépistage néonatal positif, associée à

1 test de la sueur positif ou 2 mutations identifiées du gène CFTR

ou une ddp nasale pathologique.

Tableau 1 Critères diagnostiques de la mucoviscidose

Ce diagnostic repose sur l’association de paramètres cliniques et biologiques

Une minorité de patients ne remplit pas les critères de mucoviscidose classique, et leur diagnostic ne peut être sûrement affirmé sur leurs signes cliniques, mais repose sur des tests fonctionnels de la protéine CFTR ou l’analyse moléculaire du gène. Ils développent en général une pathologie tardive, avec une fonction pancréatique conservée et une symptomatologie respiratoire modérée. Le test de la sueur est « intermédiaire » (entre 30 et 60 mmol/L) (De Boeck, et al., 2006; Southern, 2007). Le choix a été fait de classer ces formes, dites « atypiques » ou « non classiques » parmi les CFTR-RD ou pathologies liées à CFTR (Bombieri, et al., 2011).

Chapitre 1 La Mucoviscidose 18 ORGANE Canaux déférents Pancréas Glande sudoripare Appareil respiratoire Insufficance pancréatique Augmentation du NaCl dans la sueur Pathologie obstructive, bronchectasie, infections

Infertilité

masculine, pénétrance presque totale

0%

Homozygote ou hétérozygote composite pour 2 mutations sévères 10% 25% 50% Hétérozygotes (porteurs sains) Taux de CFTR fonctionnel

Adapté de Sosnay et al, 2001

Figure 6. Atteinte des différents tissus en fonction de l’activité résiduelle de CFTR Corrélation génotype- phénotype selon les organes. La pénétrance relative dans les différents organes est indiquée en fonction du taux de CFTR fonctionnel. L’organe le plus sensible à une diminution de l’activité de CFTR est l’appareil reproducteur masculin (canaux déférents). L’insuffisance pancréatique exocrine est observée lorsque le taux de CFTR fonctionnel résiduel est inférieur à 10%. Adapté de (Sosnay, et al., 2011)

2. CFTR-RD ou pathologie liée à CFTR

Le terme de CFTR-RD (CFTR Related Disorder) ou pathologie liée à CFTR, parfois encore appelée CFTR-opathie, désigne des formes atypiques, modérées de la maladie, parmi lesquelles des atteintes mono-symptomatiques. Ce sont des entités cliniques associées à une dysfonction de CFTR mise en évidence par l’identification de variants moléculaires ou les anomalies des tests fonctionnels (test de la sueur, ddp nasale) mais ne remplissant pas les critères diagnostiques de la mucoviscidose. Ce terme est associé à un large spectre de maladie, en relation avec le gradient de dysfonction de CFTR

(Figure 6). Les principales entités cliniques mono-symptomatiques sont : l’infertilité masculine par absence bilatérale des canaux déférents (ou ABCD, dont la fréquence est évaluée à 1/1000 hommes), les pancréatites chroniques ou les pancréatites aigües récurrentes, les dilatations des bronches, les polyposes nasosinusiennes, des bronchites chroniques, des sinusites à répétitions (Tableau 2). Le génotype chez ces patients associe en général en trans une mutation sévère et une mutation à effet modéré, voire 2 mutations modérées ensemble. A part pour le variant d’épissage T5 de l’intron 8 fréquemment associé à des infertilités, on retrouve plutôt dans ces formes monosymptomatiques des mutations rares (Bombieri, et al., 2011). Le génotype est à l’origine d’une diminution partielle du taux de CFTR fonctionnel, ce qui explique l’atteinte modérée organe spécifique (Figure 6).

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Liste des CFTR-RD proposée par l’OMS

Azoospermie obstructive (ABCD ou AUCD) Pancréatite chronique

Aspergillose allergique broncho-pulmonaire Dilatation des bronches

Cholangite sclérosante

Tableau 2. Classification des CFTR-RD proposée par le consortium de l’Organisation Mondiale de la Santé en 2000 (WHO, 2000). L’hypertrypsinémie néonatale qui rentrait dans la première classification, concernant les enfants avec un dépistage néonatal positif et une seule mutation identifiée, a été supprimée, ces enfants étant soit simple hétérozygotes asymptomatiques, soit porteur d’une mutation rare non identifiée.

Le plus souvent, établir le diagnostic de mucoviscidose ou de forme monosymptomatique ne pose pas de difficulté majeure. Cependant, dans un certain nombre de formes CFTR-RD, le diagnostic n’est pas clair, et il existe une « zone grise » entre CFTR-RD et CF. L’atteinte de chaque organe dépend du taux résiduel de CFTR fonctionnel dans le tissu concerné (Figure 6), ce taux pouvant subir des variations selon l’âge, des facteurs génétiques ou environnementaux. Ainsi, une atteinte mono- symptomatique peut évoluer en atteinte pluri-organes, et une forme CFTR-RD peut progresser en une forme CF (Bombieri, et al., 2011; De Boeck, et al., 2006).

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