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La modification ou la dégradation de l’antibiotique

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16 2.1. La résistance naturelle

2.2. La résistance acquise

2.2.3. La modification ou la dégradation de l’antibiotique

Les bactéries peuvent également acquérir des gènes homologues à la cible de l’antibiotique. C’est le cas des souches de Staphylococcus aureus résistantes à une β-lactamine, la méthicilline (SARM). Cette résistance est due à l’acquisition d’une cassette chromosomique SCCmec portant le gène mecA. Ce gène code pour une protéine additionnelle (PLP2a), ayant une faible affinité pour les β-lactamines et étant donc capable de se substituer aux PLPs natives, inhibées en présence d’antibiotiques (Katayama, Ito, & Hiramatsu, 2000). Elle permet ainsi une résistance croisée aux antibiotiques de la famille des β-lactamines.

2.2.3. La modification ou la dégradation de l’antibiotique

L’inactivation des antibiotiques par des enzymes constitue le mécanisme de résistance naturel le plus répandu. Cette inactivation peut s’effectuer par hydrolyse ou par addition d’un groupement chimique (phosphorylation, acétylation, adénylation), empêchant ainsi l’interaction de l’antibiotique avec sa cible. Ces enzymes d’inactivation sont naturellement produites par les bactéries. Néanmoins, des copies supplémentaires des gènes les codant peuvent être apportées par des plasmides, conférant ainsi une résistance accrue ou un élargissement du spectre d’activité des bactéries qui les portent.

2.2.3.1. Inactivation par hydrolyse enzymatique

Les β-lactamases sont les hydrolases les plus répandues et les plus importantes dans la résistance aux antibiotiques des souches cliniques. Elles hydrolysent le noyau β-lactame des lactamines et sont classées en différentes sous-familles en fonction de la classe de β-lactamines hydrolysées (pénicillinases, céphalosporinases, carbapénémases, etc.) et du mécanisme d’hydrolyse (Sérine β-lactamases et métallo-β-lactamases) résumé par la Figure

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Les β-Lactamases sont naturellement produites par les bactéries, mais le développement de nouveaux antibiotiques ayant une meilleure affinité pour leurs substrats a cependant entraîné l’émergence de nouvelles β-lactamases possédant un spectre d’activité beaucoup plus large, les BLSE (β-Lactamases à Spectre Etendu) (Jacoby & Medeiros, 1991). Les BLSE (pour la plupart dérivées des β-Lactamases des familles SHV ou TEM) sont capables d’hydrolyser les β-lactamines de seconde, de troisième et parfois de quatrième génération (carbapénèmes, céphalosporines) et leur présence chez les bactéries Gram négatif telles que Escherichia coli, Pseudomonas aeruginosa et les bactéries du genre Acinetobacter contribuent à l’apparition de nouvelles souches résistantes à la majorité, voire à toutes les β-lactamines (Bush & Fisher, 2011). La plupart des plasmides portant les gènes codant pour des BLSE portent également des gènes de résistance aux aminoglycosides et au triméthoprime (Jin & al, 2014 ; Xia & al, 2016), ce qui contribue à une résistance croisée avec d’autres familles d’antibiotiques.

Figure 18 : Mécanisme d’action général des Sérine et des métallo-β-lactamases. (Wright, 2011, Chemical

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L’augmentation de la résistance aux β-lactamines résulte d’une part du transfert des gènes codant pour des β-lactamases, initialement porté par le chromosome bactérien, aux plasmides, augmentant ainsi le nombre de copies des gènes et contribuant de ce fait à la surexpression de ces enzymes. Elle résulte d’autre part de mutations au sein de gènes codant pour ces enzymes (TEM, SHV) et du transfert de plasmides (et donc de gènes de résistance) d’une bactérie à une autre. Chez E. coli, le niveau d’expression basal de la β-lactamase AmpC est faible et ce gène est inexistant au niveau du chromosome des bactéries du genre Klebsiella et Salmonella. Mais la présence de plasmides porteurs de gènes codant pour cette β-lactamase entraîne une augmentation de la résistance similaire à celle observée chez des souches mutantes d’Enterobacter cloacae résistantes aux céphalosporines (Xia & al, 2016).

En plus des BLSE dérivées des familles SHV ou TEM, il existe d’autres familles d’enzymes impliquées dans la résistance aux β-lactamines. Elles agissent principalement contre les oxyimino-β-lactamines (Bush & Fisher, 2011) et les plus répandues sont :

les β-lactamases AmpC à spectre étendu (ESAC), qui hydrolysent la plupart des

céphalosporines. Cependant elles hydrolysent peu les nouveaux carbapénèmes (ertapénème et doripénème) et les céphalosporines zwittérioniques (céfépime) pour lesquels leur affinité est faible,

les BLSE de la famille CTX-M (CTX-M14 et CTX-M15) qui dérivent de bactéries

environnementales non pathogènes du genre Kluyvera et qui hydrolysent majoritairement la céfotaxime par rapport aux autres oxyimino β-lactamines,

les sérines β-lactamases (KPC) et les métallo- β-lactamases (VIM, IMP et les enzymes

de la famille NDM) qui hydrolysent principalement les carbapénèmes.

2.2.3.2. Inactivation par addition d’un groupement chimique

L’addition de groupements chimiques aux antibiotiques par les enzymes bactériennes entraîne un encombrement stérique qui empêche la fixation de l’antibiotique à sa cible. Différents groupements chimiques peuvent être ajoutés aux antibiotiques (acyle, phosphate,

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nucléotidyl). Les aminoglycosides constituent des cibles de choix pour les enzymes de modification à cause de l’accessibilité des groupements hydrophiles (hydroxyle, amide) de ces antibiotiques polycationiques.

Les enzymes de modification sont regroupées en trois catégories : les acyltransférases (voir § 3.2.2.2 pour celles de Pseudomonas), les phosphoryltransférases et les nucléotidyltransférases. Ces enzymes confèrent une résistance élevée aux antibiotiques qu’elles modifient. Elles sont portées par des transposons et se transmettent rapidement d’une bactérie à l’autre. C’est le cas de l’aminoglycoside phosphorylase APH(3’)-I, portée par un plasmide et retrouvée chez 46 % des bactéries Gram négatif résistantes aux aminoglycosides, qui présente des similitudes avec une enzyme dont le gène est porté par le chromosome bactérien de Streptomyces fradiae (Shaw & al, 1993).

Des mutations au sein de gènes codant pour ces enzymes de modification peuvent conduire à une extension du spectre d’activité. Pour exemple, l’aminoglycoside acétyltransférase AAC(6’)-Ib-cr présente des mutations qui lui confère la capacité de modifier les groupements amine du cycle pipérazine des fluoroquinolones (Robicsek & al, 2006). De même, un variant d'AAC(6’)-Ib retrouvé dans des souches cliniques, montre une extension de résistance à la plupart des aminoglycosides, et aux fluoroquinolones, de structure éloignée, de par l'élargissement de son site actif (Maurice & al, 2008).

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