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L’adaptateur périplasmique MFP

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Pseudomonas aeruginosa

4.1.3. L’adaptateur périplasmique MFP

4.1.3.1. Architecture générale

La protéine MFP est le troisième partenaire de la pompe à efflux et le dernier composant à avoir été caractérisé au niveau structural. Cette protéine a tout d’abord été décrite comme une protéine de fusion qui interagirait avec les deux membranes d’où le nom MFP. La protéine MFP est impliquée dans la stimulation de l’activité d’efflux du transporteur et dans le recrutement et l’ouverture de la protéine OMF afin de permettre l’efflux hors de la cellule (Zgurskaya & al, 2009 ; Symmons & al, 2015). Son implication dans la stabilisation des interactions au sein de la pompe sera décrite au paragraphe 4.2.1.

Les MFPs sont des protéines qui adoptent une conformation linéaire et elles s’étendent de la surface de la membrane interne où elles interagissent avec le transporteur localisé dans la membrane interne, vers le périplasme où elles interagissent avec la protéine OMF. Cette structure linéaire s’organise, dans la plupart des bactéries, en quatre domaines : le domaine membrane proximal (MP), le domaine β, le domaine lipoyl et le domaine α (Fig.

46). La moitié N-terminale et la moitié C-terminale de la MFP se replient l’une sur l’autre

comme une fermeture éclair pour former l’ensemble des quatre domaines. La taille de ces domaines est variable, afin de s'adapter à différents transporteurs tels que ceux des familles RND (AcrB et CusA d’E. coli, MexB, MexY, MexF et MexD de P. aeruginosa), ABC (MacB d’E. coli) et MFS (EmrB d’Aquifex aeolicus).

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Figure 46 : Structure et topologie d’une MFP entière. Les quatre domaines de l’adaptateur ZneB sont

représentés avec l’extrémité N-terminale en rouge et l’extrémité C-terminale en violet. Les deux moitiés N- et C-terminales se replient le long de la protéine pour former l’ensemble des domaines. (Adapté de Symmons & al., 2015, Frontiers in Microbiology). Code PDB : 3LNN.

Les premières structures de MFP notamment MexA de la pompe MexAB-OprM (Higgins & al, 2004 ; Akama & al, 2004) étaient toutes dépourvues du domaine MP. En conséquence, une construction raccourcie de ce domaine avait été réalisée pour résoudre la structure de AcrA de la pompe AcrAB-TolC (Mikolosko & al, 2006). La faiblesse de la densité électronique correspondant à ce domaine chez MexA montre la grande flexibilité de la protéine. Néanmoins, treize molécules de MexA, correspondant à deux fers à cheval en position « tête bêche » de six et sept molécules respectivement, étant présentes dans l'unité asymétrique, un ré-affinement de la structure en minimisant les contraintes de symétrie non cristallographique a finalement permis de reconstruire ce domaine pour neuf des treize molécules de l'unité asymétrique (Symmons & al, 2009) (Fig. 47).

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Figure 47 : Empilement cristallin de MexA. L’unité asymétrique contient un hexamère (A) et un heptamère (B)

qui interagissent via leur domaine α. Chacune des structures est constituée de paires de dimères et l’ensemble forme un canal d’environ 40 Å de diamètre au sien duquel peuvent s’insérer l’OMF et le transporteur RND. Code PDB : 2V4D.

D’autres structures de MFP ont été résolues par la suite : MacA chez E. coli et chez Actinobacillus actinomycetemcomitans (Yum & al, 2009 ; Xu & al, 2012) suivie de MFPs associées à des pompes d’efflux spécifiques des métaux, notamment CusB d’E. coli seule ou en complexe avec le transporteur RND CusA (Su & al, 2009, 2011, 2012) ou encore ZneB de Cupriavidus metallidurans (De Angelis & al, 2010). La structure partielle d’AcrA de Campylobacter jejuni sous forme glycosylée a également été résolue par RMN (Slynko & al, 2009). Plus récemment ont été résolues les structures d’une MFP associée à un transporteur de la famille MFS dépourvue du domaine MP, EmrA d’Aquifex aeolicus et une MFP dépourvue du domaine α, BesA de Borrelia burgdorferi (Hinchliffe & al, 2014 ; Greene & al, 2013).

Le domaine α est constitué de deux hélices α antiparallèles (α1 et α2) reliées par une boucle au sein d’une structure en épingle à cheveux (α-hairpin). Des expériences de

cross-B

A

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link entre AcrA et TolC ont montré que ce domaine correspond au domaine d’interaction avec la protéine OMF (Lobedanz & al, 2007). Il a une longueur variable suivant les MFPs en fonction de l’insertion ou de la délétion de répétitions au sein des deux hélices α (Fig. 48). Chez CusB, ces hélices sont repliées sur elles-mêmes pour former une hélice supplémentaire contribuant ainsi à raccourcir le domaine α, tandis qu’EmrA présente un long domaine α qui traverse le périplasme. Quant à BesA, elle en est complétement dépourvue. Les raisons de l’absence de ce domaine chez BesA restent non définies mais certains auteurs suggèrent qu’elle serait due à l’absence de l’anneau Aspartate (voir § 4.1.2.1) chez son partenaire OMF, BesC, suggérant ainsi qu’une interaction directe avec l’extrémité périplasmique de BesA suffirait pour permettre l’ouverture du canal au cours de l’efflux (Bunikis & al, 2008).

Adjacent au domaine α, le domaine lipoyl a été décrit comme étant homologue au domaine de transport des groupements biotinyl/lipoyl des déshydrogénases (Johnson & Church, 1999 ; Higgins & al, 2004). Ce domaine est cependant dépourvu de la lysine modifiée par le lipoyl, caractéristique de ces enzymes. Son rôle exact est inconnu, cependant des expériences de mutagénèse dirigée et de cross-link, notamment du domaine lipoyl d’AcrA avec AcrB suggèrent qu’il est impliqué dans la stabilisation de la pompe, par interaction avec le domaine périplasmique du transporteur (Symmons & al, 2009). En cas de modification du domaine lipoyl, la MFP DevB, de la pompe à efflux de la famille ABC, DevBCA perd sa capacité d’oligomérisation, ce qui suggère que le domaine lipoyl pourrait également être impliqué dans l’oligomérisation de la MFP (Staron & al, 2014). Les domaines MP, β et lipoyl sont majoritairement constitués de brins β, les domaines MP et β étant coiffés d’une petite hélice α supplémentaire (respectivement α4 et α3). Le domaine β semble également impliqué dans l’oligomérisation de la MFP (Staron & al, 2014) et dans l’interaction avec le transporteur. Les structures des MFP (MacA, MexA) montrent que le domaine MP ne semble pas intervenir dans l’oligomérisation mais des études de cinétique ont montré qu’il est impliqué dans l’interaction avec le transporteur (Tikhonova & al, 2011). Certaines MFPs telles que EmrA sont cependant dépourvues du domaine MP, ceci pouvant s’expliquer par le fait qu’elles interagissent avec des transporteurs dépourvus de domaine périplasmique.

Les MFPs sont ancrées à la membrane interne soit grâce à une hélice α transmembranaire adjacente au domaine MP (MacA, EmrA), soit par l’acylation de la cystéine N-terminale du domaine MP (voir § 4.1.2.3). Certaines protéines telles que les

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pompes à efflux de la famille des transporteurs RND spécifiques des métaux (CusB, ZneB) possèdent un domaine N- ou C-terminal supplémentaire (Fig. 48). Ces domaines semblent impliqués dans l’interaction avec le transporteur RND mais également dans l’interaction avec les protéines chaperonnes telles que CusF (Symmons & al, 2015). Les quatre domaines sont séparés par des linkers courts et flexibles, ce qui rend possible les changements conformationnels impliqués dans l’assemblage de la pompe (voir § 4.2).

Figure 48 : Exemples de protéines de la famille des MFPs. Le domaine MP est représenté en orange, le

domaine β en jaune, le domaine lipoyl en vert et le domaine α en bleu. Les domaines équivalents sont colorés de la même façon chez toutes les protéines représentées. Les MFPs présentent des domaines α de longueur variable et certaines sont dépourvues d’un domaine (BesA) tandis que d’autres présentent des domaines supplémentaires (CusB, ZneB). (Adapté de Symmons & al., 2015, Frontiers in Microbiology).

83 4.1.3.2. Oligomérisation des MFPs

L’oligomérisation des protéines MFP est indépendante de l’interaction avec les partenaires OMF et les partenaires de la membrane interne (RND, ABC, MFS). La première preuve de l’oligomérisation des MFPs provient d’études de cross-link in vivo d’AcrA et de HlyD (la MFP de la pompe à efflux de la famille ABC, HlyDB, impliquée dans la sécrétion de l’hémolysine A (HlyA) chez E. coli) (Zgurskaya & al, 2015). La stœchiométrie des MFPs au sein des oligomères a cependant longtemps été un sujet de débat. De nombreuses structures cristallographiques de MFPs ont permis de montrer qu’elles s’organisent en répétition de dimères (MexA, MacA, AcrA) et des études de cinétique ont montré que le dimère est nécessaire à la formation du complexe (Tikhonova & al, 2011). Le dimère a donc été défini comme l’unité fonctionnelle des protéines MFP. L’évidence naturelle de l’existence des MFPs en tant que dimère fonctionnel reste la pompe TriABC-OpmH de P. aeruginosa, spécifique de l’efflux du triclosan au sein de laquelle TriA et TriB sont des MFPs distinctes qui sont pourtant toutes les deux requises pour avoir un complexe fonctionnel.

La réalisation de différentes chimères in vivo et des études d’interaction in vitro, notamment l’étude de l’oligomérisation de la MFP DevB, de la pompe à efflux de la famille ABC, DevBCA, la structure de la MFP MacA ou encore la structure de CusB co-cristallisée avec le transporteur RND CusA, ont permis de montrer que les MFPs s’assemblent en trimères de dimères, formant ainsi des hexamères au sein du complexe (Yum & al, 2009 ; Su & al, 2011 ; Staron & al, 2014).

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