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L’efflux actif

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Pseudomonas aeruginosa

3.2. Les mécanismes de résistance aux antibiotiques chez Pseudomonas aeruginosa

3.2.3. L’efflux actif

En plus des systèmes précédemment décrits, P. aeruginosa met en jeu des systèmes d’efflux actif afin de prévenir l’accumulation des composés toxiques et notamment des antibiotiques à l’intérieur de la cellule. Ces systèmes d’efflux, classés en cinq familles (§

2.2.1.2), sont impliqués à la fois dans la résistance intrinsèque et la résistance acquise aux

antibiotiques mais également dans l’efflux de biocides, de colorants, de détergents et de solvants organiques. Même si l’analyse du génome de P. aeruginosa a révélé la présence des cinq familles, la majorité des pompes d’efflux appartiennent à la famille des transporteurs RND (Stover & al, 2000). Cette famille de transporteurs sera décrite de façon plus exhaustive au paragraphe 4. On dénombre 12 pompes d’efflux chez P. aeruginosa et 5 d’entre elles ont été décrites comme étant impliquées dans la résistance aux antibiotiques chez des isolats cliniques : MexAB-OprM, MexXY-OprM, MexEF-OprN, MexCD-OprJ et MexJK-OprM (Lister & al, 2009). La pompe MexAB-OprM est exprimée de façon constitutive, l’expression des autres pompes étant induite par des signaux environnementaux. Les substrats de ces pompes varient d’une pompe à l’autre et sont résumés dans le tableau 1.

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Tableau 1 : Caractéristiques des pompes d’efflux de la famille RND chez P. aeruginosa. Les complexes

bipartites MFP-RND sont indiqués en bleu et les OMFs correspondantes sont indiquées en rouge, vert et violet. Les OMFs communes à plusieurs pompes sont indiquées par la même couleur. (Adapté de Lister & al, 2009, Clinical Microbiology Review).

La résistance liée à ces pompes implique souvent des mutations au niveau des systèmes de régulation qui entraîne la surexpression des pompes à efflux. Mais cette surexpression résulte principalement de l’induction de l’expression des pompes en réponse aux signaux environnementaux. C’est le cas de la pompe MexXY-OprM dont l’expression est

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induite en présence d’aminoglycosides (gentamicine), de macrolides (érythromycine) et de tétracyclines (Masuda & al, 2000) ou encore de la pompe MexEF-OprN dont l’expression est induite par la présence d’espèces réactives de l’oxygène (ROS) et la pompe MexCD-OprJ dont l’expression est induite par des agents déstabilisants de la membrane (Lister & al, 2009 ; Morita & al, 2014). Les gènes codant pour certaines pompes spécifiques, notamment la pompe MexCD-OprJ, sont portés par des éléments mobiles (transposons, intégrons) ou des plasmides porteurs de gènes de résistance supplémentaires (Poole, 2005).

Les régulateurs impliqués dans l’expression des pompes à efflux, qui peuvent jouer un rôle répresseur ou activateur, sont regroupés en deux classes : les régulateurs locaux (ou primaires) situés à proximité des gènes et qui contrôlent directement leur expression et les régulateurs globaux (ou secondaires) impliqués dans plusieurs voies de régulation et qui contrôlent l’expression des gènes de façon indirecte. Ces régulateurs acquièrent facilement des mutations qui confèrent à la bactérie une résistance aux antibiotiques (Fig. 28) (Fernández & Hancock, 2012).

3.2.3.1. Les régulateurs locaux

Une surexpression de la pompe MexAB-OprM a été décrite chez des mutants nalB (souche de P. aeruginosa résistante à l’acide nalidixique) résistants aux β-lactamines (K Poole & al, 1996 ; Higgins & al, 2003). Cette surexpression est due à des mutations du gène mexR localisé en amont de l’opéron mexAB-oprM, qui code pour un répresseur de la famille MarR (§ 2.2.1.2).

La pompe MexCD-OprJ est régulée de façon similaire par le produit d’expression du gène nfxB, qui est adjacent à l’opéron mexCD-OprJ mais orienté dans le sens opposé. La surexpression de cette pompe a cependant des effets délétères sur la bactérie car elle entraîne la répression de l’expression d’autres systèmes de résistance (pompes d’efflux, facteurs de virulence) (voir § 3.2.4.1), rendant ainsi la bactérie plus sensible (Fernández & Hancock, 2012).

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Un autre régulateur appartenant à la famille TetR, MexZ, réprime quant à lui l’expression de la pompe MexXY en se liant à la région intergénique comprise entre les gènes mexZ et mexX. Des mutations de MexZ conduisent à l’apparition de résistance modérée aux aminoglycosides chez des isolats cliniques retrouvés chez des patients atteints de mucoviscidose (Vogne & al, 2004).

La pompe MexEF-OprN quant à elle, est plus souvent sujette à une activation qu’à une répression. Des mutants de phénotype nfxC (souche de P. aeruginosa résistante aux quinolones) résistants à une fluoroquinolone, la norfloxacine, présentent une surexpression de cette pompe liée à des mutations qui entraînent l’activation du régulateur MexT. MexT est un régulateur de la famille LysR (§ 3.2.2.1) codé par un gène situé en amont de l’opéron mexEF-oprN, inactif chez les souches sauvages de P. aeruginosa, notamment grâce à l’insertion de 8 nucléotides (8-bp) au sein du gène mexT. Les mutants nfxC présentent des mutations additionnelles de ce gène ou encore la délétion de l’insertion 8-bp, qui contribuent à l’expression de MexT sous forme active (Maseda & al, 2000). Il a également été montré que des mutations de MexS, dont l’expression est régulée par MexT, sont impliquées dans l’apparition du phénotype nfxC mutant (Richardot & al, 2016). MexS est une oxydoréductase dont l’inactivation permet l’activation de l’opéron mexEF-oprN par MexT.

3.2.3.2. Les régulateurs globaux

Chez P. aeruginosa, l’expression de la pompe MexAB-OprM implique d’autres systèmes de régulations, en plus de MexR. Des mutants nalC, résistants grâce à la surexpression de cette pompe, ne présentent aucune mutation au sein du gène mexR. Ces mutants ont permis d’identifier deux gènes supplémentaires impliqués dans la régulation de l’expression de la pompe MexAB-OprM, un répresseur de la famille TetR codé par le gène nalC (locus PA3721) et ArmR (locus PA3719). Des mutations du gène nalC entraîne la surexpression de l’opéron PA3719-PA3720 chez des souches cliniques, opéron qui est normalement réprimé par ce régulateur, conduisant à l’apparition du phénotype de multirésistance nalC (Cao & al, 2004 ; Sobel & al, 2005). ArmR, produit de cet opéron, peut

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ainsi se lier à MexR, et inhiber la répression de l’expression de la pompe MexAB-OprM (Daigle & al, 2007).

D’autre part, le système régulateur ParRS a récemment été identifié comme étant impliqué dans la résistance à de nombreux antibiotiques. Ce système régule la transcription de l’opéron arnBCADTEF (impliqué dans la modification du LPS, § 3.2.4.3), l’expression de la pompe MexXY (indépendante de MexZ) et la répression de l’expression de la porine OprD. Des mutations de ce système de régulation confèrent à la fois la résistance aux polymyxines, aux aminoglycosides, aux fluoroquinolones et aux β-lactamines (Muller & al, 2011).

Figure 28 : Voies de régulation de l’expression des pompes à efflux et de la porine OprD chez P. aeruginosa.

Les flèches bleues et rouges indiquent respectivement l’activation et la répression. Les régulateurs sont indiqués par les cercles bleus et les signaux environnementaux par les rectangles verts. (Adapté de Fernandez & Hancock, 2012, Clinical Microbiology Reviews).

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